Grande Muraille elle-même, qui dans cet endroit suit le flanc
de monts assez élevés. Un certain nombre d’Européens, missionnaires
protestants, commerçants russes, habitent des villas
de la campagne, à côté de la ville chinoise.
La présence de ces négociants russes s’expliquait par la
principale fonction actuelle de Kalgan, qui était de concentrer
pendant la moindre partie de 1 année, en hiver, le convoiement
des caravanes de thé vers la Russie d’Asie et la Russie d’Europe.
Avant 1900, Kalgan, alors extraordinairement animée
comme une ville aux jours de la foire annuelle, voyait partir
caravanes après caravanes, chaque chameau portant pour sa
p art 150 à 200 kilogrammes de la feuille aromatique pressée en
briques, enfermée dans des caisses garanties des influences du
dehors par une enveloppe de paille, elle-même contenue dans
un épais sachet de poil de chameau. Une seule des maisons de
Kalgan en employait 100 000 à 120 000 dans l’année, et l’on admet
que le nombre total des convoyeurs doublement bossus ainsi
mobilisés atteignait 500 000. C’était donc toute une armée de
serviteurs fidèles, bien qu’un peu grognons, qui arpentait la
steppe entre les plaines du Petchili et les premières villes de
la Sibérie, et cette armée s’est presque entièrement licenciée,
dès l’ouverture'de la ligne du transsibérien, vers Vladivostok!
Les nomades mongols, dont beaucoup vivaient du transport du
thé, se préoccupent soucieusement de cette révolution commerciale;
les Kalganais également, qui pourraient bien voir
leur ville, estimée « fastueusement » à 200 000 âmes, descendre
au-dessous de ses 30 000 à 40000 habitants réels, desquels un
grand nombre professent l’islamisme.
Les villes sont très nombreuses dans la partie méridionale
de la province, qu’arrosent les divers affluents du Wen ho et du
Peï ho. La plus grande a nom Paoting fou (150 000 habitants)
gare du chemin de fer de Peking à Canton : on l’a choisie à la
place de la métropole comme chef-lieu de la province et résidence
officielle du vice-roi, qui pourtant séjourne plus souvent
àTientsin. Paoting est une cité régulièrement construite, mieux
tenue que la capitale de l’Empire et très commerçante. Les
campagnes des alentours, où domine la culture du millet, comme
dans tout le Petchili, sont admirablement cultivées ; près de
Paoting, à Hoangtou hien, s’élèvent en l’honneur du mythique
Yao et de sa mère, de très anciens temples entourés de cyprès
gigantesques, en heureux concours de la nature, de l’art et de
1 histoire.
Tchingting, au sud-ouest, « immense ville aux grandes et
belles murailles », située près de la frontière montueuse du
d e u x i è m e Bassin du Peï ho : Le Petchili,' Paotinog.
Chensi, aux escarpements couverts d’herbes médicinales appréciées,
est aussi une cité industrieuse, mais déchue, où ne
vivent qu’une dizaine de milliers d’hommes; ses ouvriers fabriquent
avec le fer de Chansi des images de Bouddha pour tout
le nord de la Chine. Les idoles en bronze de ses temples sont
parmi les plus remarquables de l’Empire, l’une d’elles a
24 mètres de hauteur : ainsi donc elle dépasse en élévation l’obélisque
de Louqsor.
Plus au sud, la ville de Taïming est l’un des principaux
marchés des contrées voisines du Hoang ho.
Quant à Toungtcheou, on pouvait à la rigueur, avant sa
destruction presque complète par les alliés, regarder cette ville,
d’une centaine de mille hommes alors, comme un faubourg de
Peking. Située à 17 kilomètres seulement à l’est des portes de
la « capitale des Jaunes », sur le fleuve Peï ho, dans une plaine
trop visitée par les inondations, sur le chemin de fer de Peking
à Tientsin, c’était une cité fort curieuse pour ceux qui « débutaient
» en Chine et, sur la route de Tientsin à Peking, y
voyaient pour la première fois une agglomération chinoise du
« vieux modèle », car Tientsin est une place moderne, quelque
peu européanisée. Un corselet de murs antiques, des rues très
étroites où se pressait un peuple affairé, du grouillement, des
écriteaux en caractères hiéroglyphiques qui sont les enseignes
des marchands, des pagodes en foule, une architecture, une
sculpture, une * peinture » auxquelles l’Européen n’est pas
accoutumé, tout cela ne manquait pas de ressemblance avec
l’aspect de Canton, la grande ville du Sud de la Chine.
Chan haï kouan ou la » Barrière entre mont et mer », n’est
qu’une petite ville voisine de la frontière du nord-est, mais son
nom a souvent retenti dans l’histoire des invasions de la Chine
par les « Barbares » du Nord.