Koeïtcheou et au Yunnan; et au sud-ouest, à ce même Yunnan.
Entre ces bornes son aire est supposée atteindre 566 000 kilomètres
carrés, soit 30 000 de plus que la France, ou presque
l’étendue de cinq de nos départements moyens.
Combien d’hommes en cet espace?
Le recensement de 1842 s’étant totalisé par un peu plus de
22 millions d’habitants, celui de 1882 arriva au nombre surprenant
de près de 68 millions, celui de 1885 atteignit 71 millions,
chiffre vraiment excessif pour un pays sans aucun doute admirablement
favorisé de la nature, mais sur la moitié seulement
de son étendue, en son orient, dans son « bassin Rouge »,
tandis que son occident se relève en colossales montagnes peu
habitables, très peu habitées.
En en distrayant les anciens districts tibétains, où ne
vivent guère que 500 000 personnes, le Setchouen aurait donc
entretenu en 1885 près de 180 individus par kilomètre carré.
Mais il convient d’éliminer, de ces 40 millions d’hectares,
12 à 15 millions comme hérissés de monts, de rochers, terres
hautes et froides à peu près incapables de culture et, de fait,
quasi vides d’habitants.
Si donc en retranchant douze millions d’âmes au Setchouen
on arrive à 253 ou 254 personnes par 100 hectarès; et si l’on
en extrait quinze, réduisant ainsi la surface vraiment utile à
250 000 kilomètres carrés, on obtient 284 habitants au kilomètre
carré; et cela dans un pays sans grandes industries,
alors que la Belgique très industrielle se contente de 228. Le
dénombrement de 1885 fût-il d it fois plus officiel encore, il y a
donc lieu de le considérer comme ayant dépassé en quelque
chose la vérité stricte.
C’est ce qu’ont fait les meilleurs connaisseurs du Setchouen,
spécialement les membres dè la Mission Lyonnaise, qui n’accordent
à la province que 42 500 000 âmes, « soit une densité de
75 habitants au kilomètre carré pour la province entière, et de
175 par 100 hectares pour les 25 millions d’hectares du territoire
agricole ».
Dans aucune des dix-huit provinces la propagande catholique
n’a fait autant de prosélytes ; le Setchouen, divisé en trois
vicariats apostoliques, lesquels renferment ensemble environ
200 chrétientés, compte au delà de 100 000 catholiques. A la
différence de la plupart des autres communautés « romaines »
de la Chine, ce troupeau ne comprend pas seulement des nouveaux
convertis; même la plupart des chrétiens des Quatre
Rivières sont fils, petits-fils ou arrière-petits-fils de t baptisés ».
Batang, la ville principale de la région du Setchouen
connue d’ordinaire sous le nom de Tibet oriental, n ’est actuellement
qu’une faible bourgade. Complètement renversée en
1871 par des tremblements de terre qui se succédèrent pendant
plusieurs semaines, Batang se compose de quelques centaines
de maisons neuves, bâties dans une plaine fertile qu arrose un
affluent oriental du Kincha kiang et où jaillissent des sources
thermales abondantes ; près de la moitié de sa population con-
siste en lamas vivant dans un couvent somptueux à toiture
dorée sur laquelle perchent des milliers de chapons sacrés
apportés par les fidèles. La ville du i Relais », car tel serait le
sens du mot Batang, d’après Desgodins, n’a d’importance que
comme lieu d’étape sur la grande route de la Chine centrale à
Lassa; les Tibétains, qui dépendent de magistrats de leur
nation, mais que surveille une garnison chinoise, y vendent aux
négociants venus de l’est du musc, du borax, des pelleteries,
de la poudre d’or, en échange de thé en briques et d objets
manufacturés ; des tribus complètement indépendantes, connues
sous le nom de Zendi, parcourent les montagnes des environs;
ils se rattachent aux Lolo.
Litang (10 000 hab.), autre lieu de marché sur la route du
Tibet à Tchingtou fou, est une des villes les plus misérables
du monde : située dans une dépression des hauts plateaux,
dans le bassin du Kitehou, qui descend au sud vers UrKincha
kiang, elle se trouve presque à la limite supérieure de la végétation,
à 4 088 mètres d’altitude : on ne voit pas un arbre, pas
de céréales, à peine quelques choux rabougris et des navets
dans ce triste pays, berceau de la monarchie tibétaine; et
pourtant 3 500 lamas y vivent dans un riche couvent au toit
revêtu de feuilles d’or; plus 2 500 autres de ces prêtres dans de
moindres moutiers des environs. Ces prêtres de Bouddha, des
coupeurs de route, du bétail, des chevaux, de l’or, ce sont les
caractéristiques du haut et dur pays de Litang.
A 2 500 mètres environ Tatsienlou (Tatsienlu), est le Tat-
chindo, Dartchedo, Tarzedo des Tibétains ; elle a de 30000 à
40 000 habitants, parmi lesquels moins de Chinois ou de tib é tains
que de métis des deux races, et l’on y compte des milliers
de lamas pour lesquels de misérables orpailleurs lavent les
sables aurifères des torrents. Parmi les femmes la majorité
est aux Tibétaines, la plupart servantes vouées aux métiers
pénibles, « solides gaillardes », qui sont plus grandes et plus
vigoureuses que les Chinoises et gardent leurs pieds au naturel.
D’ailleurs Tatsienlou est, en beaucoup de choses, une ville d aspect
tibétain : partout flottent au-dessus des maisons des