moins au chiffre de ses transactions qu’à sa qualité de rendez-
vous passager des navires commerçants entre l’Europe, l’Australie,
l’Inde, l’Indo-Chine, l’Indonésie d’une part et la Chine
d’autre part, au croisement d’une foule de lignes de bateaux à
vapeur, au crédit de ses banquiers « internationaux ». On peut
le qualifier de grande banque et bourse de l’Europe au péristyle
de l’Asie Jaune;
Le concours des navires s’y résume par cinq à six mille
vaisseaux et six à sept millions de tonnes à l’entrée; plus
vingt-neuf à trente mille jonques et près de deux millions de
tonnes pour la part de la Chine : cela pour l’entrée ; à peu près
autant pour la sortie. Ce qui s’y échange surtout (à part l’argent,
les billets, les lettres de crédit, en un mot la finance), ce
sont, ainsi qu’à peu près partout en Chine, l’opium, le thé, le
sucre, le sel, la soie, les cotonnades, les métaux et une foule
de menus objets d’Occident ou d’Orient. L’Angleterre fait plus
ou moins la moitié des transactions ; mais la part de la Chine
ne cesse de grandir; sa flotte commerciale, l’ensemble des jo n ques
attachées au port de Hongkong comprend 52 000 bateaux
avec tonnage de 1300000 tonnes, et des compagnies chinoises
ont organisé des services réguliers de bateaux à vapeur faisant
l’intercourse avec Manille, Batavia, Sai'gon, Singapour et
Bangkok. Et c’est pourquoi les factoreries de Victoria ne sont
plus aussi prépondérantes qu’aux premiers temps de la liberté
des échanges avec la Chine : de grands entrepôts, fondés par
des négociants chinois, se trouvent maintenant dans les villes du
littoral, de l’autre côté de la rade, où l’on a également construit
de vastes chantiers, et les palais britanniques de Victoria
passent les uns après les autres entre les mains des indigènes.
A l’extrémité sud-occidentale de l’île, la petite ville d’Aber-
deen, appelée communément Little Hongkong ou Petit Hongkong,
possède de nombreux chantiers et des bassins de carénage,
d’importantes raffineries de sucre.
L’île d’Hongkong est ce qu’on appelle en Angleterre une
colonie de la Couronne, c’est-à-dire qu’elle est gouvernée de
Londres, sans constitution propre, sans corps élus, parlement,
machinerie électorale, ministère responsable, etc. Elle est administrée
par un gouverneur que nomme le ministre des colonies
de Londres et qu’assiste un Conseil exécutif, comme aussi
un Conseil législatif composé presque uniquement de fonctionnaires
et où deux Chinois ont place. Le nombre de ces conseillers
étant de douze, ces deux « fils de Han » ne représentent
que très faiblement l’élément national, vingt-cinq fois plus
nombreux que l’élément dirigeant et de plus en plus accru par
l’immigration. Le gouverneur touche la « modeste » somme de
168 000 francs par an.
Les recettes de la colonie proviennent du monopole de
l’opium, des licences et patentes, de taxes diverses; elles se
montent à 12, 13, 14, 15 millions, suivant les années, et balancent
plus ou moins les dépenses, celles-ci consacrées en grande
partie au maintien de la police et d’une force publique solidement
organisée, qui comprend 661 hommes, dont 122 Anglais,
210 Sikhs, 329 Chinois.
La dette, 8 545 000 francs, a été contractée en deux emprunts,
en 1887 et 1893, pour travaux de fortification, d’hygiène,
d’utilité publique, notamment pour adduction d’eaux potables;
fardeau bien léger puisque le revenu des propriétés de la
colonie excède de plus de 110000 francs la dette coloniale.
Tous ces nombres se rapportent à l’ancienne colonie de
Hongkong. Or, cet établissement vient de s’accroître par la
convention anglo-chinoise du 9 juin 1898 : elle reconnaît à
l’Angleterre, comme cédé à bail pour 99 ans, le territoire continental
de Kaoloung, où les négociants chinois possèdent de
très vastes entrepôts, plus les îles de Lantao et de Lamma :
environ un millier de kilomètres carrés, qu’on suppose peuplés
de 100 000 habitants.
En signant cet acte conférant aux Anglais ces lambeaux de
la province du Kouangtoung, le gouvernement chinois revenait
sur la convention, à peine conclue, par laquelle il s’engageait
à considérer Kouangtoung, Kouangsi et Yunnan comme rentrant,
ne oarietur, dans la sphère des intérêts français.
La France n’a pas protesté, mais les Anglais y ont perdu
en ce sens que la France, que l’Europe ont désormais considéré
comme une vaine formule la convention anglo-chinoise
garantissant le bassin du Yangtze kiang à l’influence anglaise :
si bien que l’Angleterre n’a pas pu profiter à son gré des événements
de 1900-1901 pour s’installer à demeure, et seule, sur
le grand fleuve.
Macao (Macau) est la Ngaomen ou « Port de la
Brique » ou l’Aman Gao ou « Port de la Mère ».
iv De ces noms chinois provient le nom européen.
macao Pour se conformer à l’antique ampleur ibérienne,
lusitanienne comme espagnole, Macao
s’appelle tout au long : Cidade do Santo Nome
de Dios de Macau.