Les plus hautes cimes des monts occiden-
iii taux s’élèvent presque immédiatement au-dessus
l e ta c h a n des campagnes du Hoang ho, au sud de Tsinan,
oo la capitale de la province. Ta chan ou Taï chan,
t a i ch a n la « Grande Montagne », tel est le nom, célèbre
dans toute la Chine, du sommet principal, qui
s’élance à 1 S45 mètres environ.
D’après la mythologie chinoise, le Taï chan est la plus
sainte des cinq montagnes sacrées de l’Empire : il n’y en avait
d’abord que quatre.
Le Taï chan, disent les Chinois, « est l’égal du ciel, le souverain
bienfaisant; il décide des naissances et des morts, de
l’heur et du malheur, de la gloire et de l’ignominie ».
D’après le Chouking, voici déjà plus de quarante et un
siècles que l’empereur Chun monta sur la cime de ce pic pour
sacrifier aux rivières, aux collines, aux génies, et pour la consacrer
officiellement au Dieu du ciel. Et depuis lors, parmi
les empereurs des dynasties successives, jusqu’à nos jours,
nombre de « pères du peuple » l’ont gravi pour y adresser
leur prière à ce Dieu du ciel, tel que le conçoivent les Chinois.
Il n’y a pas que ces souvenirs de plus de 4 000 ans, il y a
ceux de 2 500 années, ceux de Confucius, l’idole de la nation, le
fils plus qu’illustre du Chantoung, né dans le voisinage de la
montagne sacrée. Il essaya d’ascendre le Taï chan, mais ne
put en atteindre la cime : un temple marque l’endroit où il dut
s’arrêter, temple unique en son genre dans l’Empire, en ce
qu’il ne contient pas une' seule idole. La piété des Chinois
pour leur philosophe, leur sage, leur législateur, l’admiration
des lettrés et des mandarins, l’adhésion, parfois le concours
des plus hautes autorités, puis, bien entendu, la puissance de
la coutume, l’entraînement de l’imitation, la « moutonnerie »,
ont fait du Taïchan et surtout de Taïngan, la ville de sa base,
la Mecque, la Jérusalem de la Chine, tout au moins de la
Chine du Nord.
Même sans ses temples, son histoire antiquissime, le prestige
du passé, le Taï chan mériterait l’ascension : la montagne,
qui est de gneiss, a des contours fermes, des roches superbes,
des entassements de blocs roulés les uns sur les autres, des
gorges sauvages, suffisamment de précipices ; e t de la cime, la
vue est grandiose, sur tout un monde de pics et de dômes,
des villes, des vallées de fleuves et, à l’horizon, au nord, à
l’ouest, au midi, la plaine, les rives du Hoang ho et de la
rivière des Transports.
On en fait l’ascension en partant de Taïngan ; c’est une
distance de 20 kilomètres au nord de cette ville sainte, toute
„„mnlie d’édifices religieux et qui, dans l’esprit des Chinois, est
c o n s i d é r é e comme une simple dépendance du Taï chan.
Aux lieux où le mont commence à se manifester vraiment
nar le relèvement de la pente, on entre dans une cité pieuse :
temples, sanctuaires, cloîtres allongés aux deux bords du
chemin; cité sans hôtels, auberges, buvettes, boutiques d ob-
iets religieux — car tout trafic est prohibé dans ce Sinai du
Chantoung, — mais l’industrie des moines qui pullulent ici sait
comment s’y prendre pour tondre les pèlerins jusqu à 1 os, au
moyen d’aumônes faites aux idoles et autres ruses de bonne
°U A rriv é 8 à ^extrémité, de cette ville de recueillement, de
Drière et d’adoration, on passe par une . porte marquant le
terme de l’ascension de Confucius, ce dont quelques monosyllabes
inscrits avertissent le pèlerin. Puis le paysage
SDlendide par ses forêts, ses torrents, ses cascades, le Taï chan
n’étant pas déforesté comme presque toutes les montagnes
Ch Ensuite on atteint le pied du fameux escalier, le plus grand
du monde : 6 000 marches, pas moins, larges dalles ombragées
d’abord de cyprès, de cèdres et d’ifs, puis, plus haut, de pins
à cime horizontale. jSBBWjjfi H
Des porteurs de palanquins attendent les pèlerins à chaqu
palier. Des files énormes de vrais ou faux infirmes, et de mendiants
vivent des aumônes que leur distribuent les pèlerins,
tous ces malheureux, vêtus de haillons sordides, grouillan
l’entrée des grottes, au milieu des tas de pierres, Arment un
lamentable contraste avec la richesse des temples et la beauté
de la nature environnante.
Ainsi l’on aborde à la Porte du Ciel ouverte sur le plateau
terminal, bombé de quatre collines portant chacune un grand
temple et semé, sur une étendue d’une lieue de tour environ,
de rochers, aussi bien que partout encombré de sanctuaires,
de cloîtres, de monuments commémoratifs, de ruines, demi-
ruines, de temples bien entretenus, sous diverses invocations.
Le plus visité de tous, c’est celui de Laounai-nai, la Bonne
Déesse, que viennent implorer les femmes stériles. Edfal?>
devant celui du « plus haut Dieu », une balustrade de bois
entoure un rocher d’un mètre d’élévation : c est là le culmen
du Taï chan. I I , „ H
La plaine qui empâte le Chantoung au nord et à 1 ouest,
le long du Hoang ho et du Canal Impérial, fait partie de la
fameuse Terre Jaune, Hoang tou des Chinois. Elle rattache la
province, comme le fait aussi le cours du Fleuve Jaune,