surtout militaires, d’ingénieurs anglais, français, allemands,
la plupart envoyés par des établissements de célébrité universelle:
usines Armstrong, le Creusot et Essen, où règne Krupp.
Mais, une fois ces établissements « montés », les Chinois
ont cru pouvoir se passer des Européens et, comme il fallait
s’y attendre, arsenaux, chantiers, Monnaies ont fortement périclité,
dans les mains incapables (ou coupables) des mandarins.
Des sommes énormes dépensées pour rien, et la nécessité de
€ radouber » ces grands établissements, si l’on ne veut qu’ils se
perdent, c’est à peu près tout le bénéfice de ces entreprises,
dont quelques-unes vraiment trop « guerrières » pour le pacifique
Jean le Chinois.
Dans le domaine purement industriel, le renouveau date
de 1896, du traité sino-japonais de Simonoseki, en vertu duquel,
par un article spécial, le Japon obtint le droit longtemps refusé,
d’importer des machines en Chine ; droit qui s’étendit naturellement
aux Européens.
L’industrie « civile » des Européens en Chine, par opposition
à l’industrie « militaire et navale » du début, s’exerce
principalement sur les cotonnades et les lainages.
Les filatures de coton se sont fondées immédiatement
et développées très vite : tellement qu’elles comprenaient
déjà en 1900 500 000 broches en quatorze filatures contre les
105 000 broches de 1896. La moitié de ces établissements, nés
de capitaux anglais, allemands, français, ont leur centre à
Changhaï, lieu d’élection tout indiqué, d’une part à cause du
voisinage des plus riches districts cotonniers de la Chine,
d’autre part à cause du bas prix de la main-d’oeuvre, sans
compter l’admirable facilité des communications, tant par
mer que par terre, fleuves, rivières et canaux. L’autre moitié
s’est installée dans divers ports à traité, Ning p’o, Tching-
kiang, Hankoou, Outcliang, Foutcheou, celles-ci, presque
toutes, du fait de capitalistes chinois. Ces entreprises ont lutté
jusqu’à ce jour et luttent encore contre de grandes difficultés,
telles que l’inhabileté des ouvriers et des contremaîtres chinois,
qui ne sont pas devenus subitement des professionnels,
contre la qualité inférieure du coton, la difficulté de se le procurer,
la concurrence de l’Inde, du Japon, et déjà les grèves
ont fait leur apparition.
La « noble feuille du mûrier » a suscité non moins rapidement
des usines européennes : rien qu’en une seule année, dit
Jung, le nombre des filatures de soie s’est élevé à Changhaï de
deux à vingt; Changhaï compris, il y en a trente-trois dans la
Chine centrale, et vingt à Canton.
Mais le reflux a suivi le flux : par suite de la mauvaise
qualité de la plupart des cocons, et par conséquent de l’infériorité
de la soie produite, par suite également de la concurrence
du Japon, la moitié de ces filatures, presque toutes dues au
capital chinois, se sont fermées depuis ces débuts enthousiastes
et pleins de promesses.
Les Européens n’ont pas encore monté de grands établissements
métallurgiques en Chine; ils se réservent de le faire,
la crise actuelle passée, les mines concédées et les chemins de
fer mettant ces mines en relations faciles avec les grandes
villes et la mer. On ne peut guère citer que les forges
d’Hanyang; or, si elles ont un directeur et des contremaîtres
européens, le propriétaire est chinois, les ouvriers aussi.
Chinoises également de nombreuses fabriques d’allumettes
que leur bas prix fait préférer aux allumettes japonaises, qui
sont de beaucoup meilleures. Et nombre d’établissements industriels
de toutes sortes, qui sont européens de nom, en apparence,
et sont réellement chinois par les capitaux, et bien
entendu, par les ouvriers. Quant au personnel dirigeant, il y a
tout intérêt pour les « fils de Han » eux-mêmes, qu’il soit
fourni par l’Europe, en tant que plus instruit, plus scientifique,
procédant avec plus d’ordre, et moins accessible, dit-on, à la
corruption et au péculat.