
I I O C O Ü
» y a de chaque côté quatre colonnes. Les piller!
^ lent conftruits en grandes pierres choifies, dont
» les pr. remens font polis , & les joints fi fins, que
» les piliers paroifTent être d'une feule pièce. Leur
30 volume & leur élévation eft fi confidérable,
» qu’il femble que ce foient des rochers détachés
» d’une montagne. Ces piliers font réunis par quatre
» grands arcs difpofés de manière que chaque pi-
» lier reçoit la naiffance de deux; le fommet de
» ces arcs s’élève à une hauteur étonnante. Le
» milieu des deux arcs qui font a l’orient & à
» l’occident eft vide. Les deux autres font rem-
» plis par un ouvrage à colonnes au-deffus du-
» quel eft mie ouverture circulaire fort élevée par
j» laquelle on voit entrer le jour ».
.Comme Procope n’étoit point architeéle5 il dé-
tefpère de pouvoir décrire convenablement les
voûtes qui formoient la coupole. Cependant quoiqu’il
ne fe ierve pas des termes de l’art, il parvient
à fe faire entendre;on ne peut lui reprocher que
trop d’entboufiasme,& d’exagération. Voici comme
il s’exprime ;
« Entre les quatre grands arcs, fe trouvent quatre
* parties de voûtes en triangles, qui ont chacune
» par Le bas, un angle aigu placé entre les naif-
» fances de deux grands arcs qui pofent iur un même
» pilier. Les deux autres angles de chacun de ces
» triangles fe terminent au bas de Ta coupole.
» Cette coupole placée au^deffus, eft d’une har-
« dieffe qui fait douter de fa folidité. I l femble
» qu’au lieu d’être pofée fur l’ouvrage de deffous ,
» elle eft fuipendue au ciel par Une chaîne d’or.
» Toutes ces parties réunies avec beaucoup d’ art ,
M forment un enfemble merveilleux, qu’on ne peut
»» regarder fans une agréable fu-rprife ».
Plus loin, il dit : Juftinien & Amhémius employèrent
différens procédés pour affermir cet édifice.
Comme il avoue qu’il ne les connoît pas tous,
il fe contente d’en rapporter u n , qui luffira , dit-il,
pour faire juger des autres, & donner une idée de
la folidité de tout l’ouvrage.
' « Les gros piliers né font pas çonftruits comme
» le refte de l ’édifice, Ils font, ainfi qu’il a été déjà
» d it , en grandes pierres fort dures. Celles qui font.
» aux ceintres font taillées en coin , & les autres à
joints carrés. Ces pierres ne font pas unies avec
►> du mortier ni du bitume, comme les murailles
» que ' Sémiramis fit autrefois bâtir à Babylohe,
mais avec du plomb fondu ».
Malgré toutes ces précautions, il arriva un accident
qui déconcerta les, archite&es. « Le grand
» arc du côté de l’orient n’-étoit pas encore achevé ';
>> lorfque les ceintres fur lefquels il étoit ap-,
y* puyé, commencèrent à s’affaiffer & à menacer
» ruine. Anthémius & Ifidore défefpérant de leur
y, art, allèrent rapporter ce fâcheux accident à
» J.iftinien. Cet empereur qqi n’étoit pas inflruit
y dans î’architeclure, leur ordonna comme par
» une ip/piration de Dieu , de .continuer cet arc,
» en aifuiant qus quand il ferait achevé, il fe
c o tr
9 foutieftdfôît d t lui-même, fans le fecoufs de
» ces ceintres ». La même chofe arriva aux arcs
du midi et du feptentrion.
« Lorfque toutes les voûtes furent achevées^
» le bas de l’églife commença à gémir, pour ainfi
» dire, fous la pefanteur du fardeau. Les colonnes
» qui en foutenoient une partie, rejetèrent tout
»Nle mortier j comme fi on l’eût gratté». Nouveaux
chagrins pour les afchiteéles : « Ils retour-
» nèreni à l’empereur pour lui rendre compte de
» ce qui venoitd’arriver. Il en trouva tout de fuite
» le remède ; ce fut d’ôter les colonnes qui por-
» toient fous les ceintres ; & il ne les fit repofer que
» lorfque les mortiers furent entièrement fecs , &
» que l’ouvrage eut fait tout Ton effet ».
Ce dernier effet qui arriva à I’églife de Sainte^
Sophie, a eu lieu par-tout où. l’on a voulu conf*
truire en même temps les ouvrages délicats, fufeep-
tibles de peu de compreifion , 6c les conftruâions
folides. Nous avons vu arriver la même chofe de
nos jours, en rebitiiTant le portail de Sainte-Croix
d’Orléans : on voulut pofer trop tôt les petites colonnes
qui dévoient former une galerie autour du
veftibule de l ’entrée ; c’eft-à-dire, avant que les
grandes conftruélions fuffent achevées ; le taflemeng
inévitable, caufé par l ’augmentation du fardeau, fit
brifer ces petites colonnes que l’on a été obligé dé
fupprimer. Lesarchiteéles.Goths, qui ont fait beaucoup
de ces fortes d’ouvrages contraftans fort
bien avec les parties folides de leurs édifices „avoienc
la précaution de ne les faire mettre en place qu’a-
p.rès que les groffes conftruélions ctoiçnt tout-à-
fait achevées.
Ainfi il n’eft pas étonnant que les colonnes qui
remplifloient les grandes arcades du midi & du nord
de l ’églife de Sainte-Sophie, dont parle Procope,
aient été furchargées, lorfque les grandes voûtes
furent achevées, & qu’elles commencèrent à s’af-
feoir fur leurs points d’appui. On peut dire que
Juftinien agit très-prudemment, en faifant ôter
les parties de colonnes ou piliers qui portoient
fous le ceintre des Voûtes , jufqu’à ee que les
grandes parties de l ’édifice euiien: "fait leurs afîùif-
fsmens inévitables. C ’eft toujours à Pin fiant où
les grands édifices font fur le point d’être terminés
, & que leur poids tend à fe diftribuer fur leurs
points d’appui, que fg font les grands eftets, qui
ont épouvanté ceux- qui n’éto.ient pas entièrement
verfés dans l ’art de bâtir,
Par rapport au plomb fondu, verfé dans les
joints des piliers de Sainte-Sophie, au lieu de ciment,
on peut dire que cette pratique, qui a
quelquefois été mifê en' ufage, eft plus coûteufe
qu’utile; i ° . par la difficulté de couler exactement
les joints dans toute .leur fuperficie; 2°. parce
que tou:es fortes de pierres ne peuvent pas , fans
éclater, fouffrir la chaleur du plomb , 6c celle
qu’il, faudroit donner à la. pierre, pour que la
-matière s’étende également par-tout ; 3°, parce
que le plomb s’affaifle fous le. fardeau, tant .qu’il
C ô U c o u ï ï ï
en r e l i e entre les joints, ce qui prolonge l’ effet
du taflement à l’infini , & forme, à l ’extérieur ,
des bavures, qu’on eft obligé de couper à plu-
fieurs reprife*. J’ai eu occaûon de remarquer cet
effet à des colonnes ifolées, compofées de plufieurs
tambours, fous chacun defquels on avoit mis des
lames de plomb, taillées circulairement.'
Le feul ufage que l ’on pourrait faire du plomb,
ce ferait de s’en fervir au lieu de calles de bois,
dans les conftru&ions en pierres de taille pofées
fur mortier, lorfque ces pierres ont un gtand
fardeau à fou tenir, parce que le plomb s’étend
fous le fardeau, à mefure que le mortier s’afiaiffe
& prend confiftance , au lieu que les cailes de
bois, qui réfiftent, occaTiennent des éclats. Voye{
le mot pbfe.
. Une autre particularité de cet édifice, c’eft que,
pour le mettre à l ’abri des incendies , on 'n ’y
employa point de bois pour former les combles ;
on fe fervit, au lieu de tuiles, de grandes dalles
de marbre.
La coupole de Sainte-Sophie n’a dû fa célébrité
qu’au temps où elle a été bâtie, & parce qu’elle
a fervi de modèle aUx-architeÛes. qui ont confirait
depuis des édifices de même genre. Quoique les
détails de cet édifice foient d’un mauvais goût ,
on ne peut ,s’empêcher de convenir que la dif-
pofition intérieure a quelque chofe de grand , &
que le niécanifme de fa conftruélion eft aflez
bien entendu pour le temps.
Coupole de. Saint-Vital 9 à Ravennt.
Cette coupole , que l ’on croit plus ancienne
que celle de Sainte-Sophie, eft curieufe par la
manière dont elle eft conftruite : fon plan eft
un oélogone régulier : elle eft fou tenue par huit
piliers placés aux angles. Entre ces piliers, font
sept grandes niches extrêmement élevées, divifées
en deux étages. Le fond de ces niches eft à
four, avec des,colonnes, comme celles de Sainte-
Sophie. Le huitième côté' de l ’oâogone eft percé
d’une grande a r c a d e fe rv an t d’entrée au fanc-
iuaire; cette arcade eft de même diamètre & de
«aeme élévation que les niches. La partie de mur
au-deffus, qui eft fans ouvertures, foutient une
voûte hémilphérique ou coupole , dont le plan
eft un cercle inferit dans un oélogone régulier.
La bafe circulaire de cette- voûte, n’eft pas rachetée
par des pendentifs , comme à Sainte-
Sophie; ce font des arcs qui foutiennent la faillie
des angles. Le bas de la voûte , qui eft confiant
en maçonnerie ordinaire , eft ouvert par
huit croifées, divifées en deux parties par une
etite colonne qui fiapporte deux petites arcades.
_ a coupole ou ' YOÛte hémifphérique-eft formée
I Paf wn double rang de petits tuyaux de terre
1 cuitc de fept pouces de longueur , fur environ, deux
B pouces de diamètre ; chacun de ces tuyaux eft
L par m b çutj &. l ’aiitjç forme une pointe j
ils font pôfés en place horizontalement, de manière:
que la pointe de l’un entre dans l ’ouverture de
l’autre; cette difpofition ne forme point de rangs
parallèles : on pourrait même dire qu’elle n’eft faite
que par un feul rang; car c’eft une double fpi—'
raie qui commence au-deffus des arcs des croifces
& qui finit à la clef. Les cordons que devrait
former cette efpèce de fpirale ne font 'appareils f
ni à l’ intérieur, ni à l’extérieur, parce que la voûte
eft recouverte _d’un enduit de mortier. Pour fortifier
les reins de cette coupole, on a fait; au-
deffus des arcs des croifeés qui font dans le bas
de la voûte, une maçonnerie, avec des efpèces
d’urnes en terre cuite. Ces urnes ont 22 pouces
de hauteur 'ÔC 8 pouces de diamètre; elles font
terminées en pointe paf le bas, avec des rayures
en fpirale, qui lemblent avoir été faites peur
donner plus de prife au mortier. A la hauteur
du fond de ces-urnes, il y a un petit trou, curî
avoit été fait vraifemblabiement pour en retirer
la liqueur qu’on y pouvoit mettre ; ce qui
prouverait que ces vafes n’ont pas été fabriqués
exprès. La bouche, ou l ’ouverture fbpérieure de
ces urnes, eft d’environ trois ponces & demi de
-diamètre , avec deux anfes placées un peu au-
deffous. On voit a Raveiine, chez le fietir Ca-
tntllo Morigia 3 une de ces urnes qui fut ôtée en
raccommodant la voûte.
Il y a. plufieurs autres édifices à Ravenne, dont
les voûtes font conftruites comme la coupole eit
queftion , telle que celle du baptiftére de Sainte-
Marie in Cofmedin. La coupole de la grande niche
de l ’ancienne métropolitaine, qui,à été' démolie ,
pour conftruire la nouvelle, étoit faite de la'même
manière.
Cette méthode de conftruire les voûtes, pour Je#
rendre plus légères, étoit connue des anciens romains.
À Saint-Etienne-Je-Rond , que l’on dit être
un ancien temple de Faune, bâti par l’empereur
Claude, on voit des refies de voûtes en tuyaux,
mais au lieu d’être pofës horizontalement, ils font
debout & forment des arcs verticaux pofés le»
uns à côté des autres., Quant aux grandes urnes,
il y a plufieurs reftes d’édifices antiques, à Rome
& aux environs, 011' l’on s’ eft servi de grands vafes
pour remplir les reins des voûtes. On en voit ai$
cirque de Caracalla ' 6c au tombeau de Sainte-
Hélène.
La coupole de Saint-Vital n’eft pas apparenta
à l’extérieur ; elle eft recouverte d’un toit de charpente
fort écrafé & couvert en tuiles.
Coupole de Saint-Marc de Venife.
L e plan de l ’égjife de Saint - Marc repréfente k
i’extérieur une croix grecque :■ elle eft termihée par
cinq coupoles, dont une au centre , qui eft plus élevée
que les autres. La difpofition de ces voûtes eft lem-
blabîe à celle de l’édifice ci-devant de Sainte-Gene-
viè-Vé? c’eft-4-dire gu« chaque coupole eft ren%*»