
livrer leurs deftins &. leurs plans à l’exécution de
l ’entrepreneur, fans même s’en réferver la furveil-
lance. Mais comme l’exécution de l ’architeélure,
comme le plus ou le moins de netteté , de précifion,
de fini, influent beaucoup plus qu’on ne fauroit le
dire fur la penfée même & les conceptions de l ’auteur
, il arrive que de fort bonnes intentions dif-
paroiffent, travefties &. défigurées par l ’el'prit de
routine & par la méthode bannale de l'entrepreneur.
Les architectes devroient donc beaucoup moins né*
gliger qu’ils ne le font l’étude & les connoilïances »:e
toutes les parties de détail de leur art. Ils ne devroient
pas même méprifer celles qui leur en paroiffent indépendantes.
C ’eft fur ce mépris ..de la partie économique
& commerciale de l’art de bâtir , que fe font
établi la profeflion & le crédit des entrepreneurs.
Il ne faut pas le diffimuler, ceux qui font bâtir j
ont befoin d’une forte de garantie qu’ils ne feront
pas entraînés dans des dépenfes au-delà de leurs
moyens. O r , un reproche que l’on fait aux architectes
, par trop étrangers aux détails mercantils de
l ’art.de bâtir , c’eft que jamais dans leurs projets
ils ne prennent la déper.fe pour mefure de leurs
inventions ; c’eft qu’ ils n’en calculent point lés
frais, & qu’ ils engagent le propriétaire à aller beaucoup
au-delà de fes intentions & de fes moyens.
Heureux encore quand des effais infructueux ou
des malfaçons n’achèvent pas de le ruiner. L’ar-
chiteéte eft ordinairement un artifte qui offre plus de
garantie dans fon talent que dans fa fortune. On ne
peut ni faire avec lui des conditions févères nife ménager
de recours contre lui en cas d’avarie ou d’ erreurT
Uentrepreneur , au contraire, eft un commerçant
avec lequel on peut faire un traité de la nature
de tous ceux qui fe font dans le commerce. L’ana-lyfe
mercantile de toutes les parties dont fe compofe une
maifon , permet de ftipuler avec lui & de rigueur
la quantité des matériaux l ’épaiffeur des murs,
la nature des enduits, des bois de charpente , &c.
Le toifé peut toujours fervir de vérificateur au
devis, & enfin il y a refponfabilité à exercer. On
peut le forcer à tenir les conventions. Les leuls
engagemens qu’on ne fauroit contra&er avec lui font
ceux qui ont rapport au bon gcût & aux règles de l’art.
La conféquence qui fembleroit réfulter de tout
ceci feroit donc que Y entrepreneur ayant très-rarement
les talens de l’artifte, & l’architede manquant
le plus fou vent des eonnoiffances de l ’entrepreneur,
les édifices devroient prefque toujours fereffemirde
l ’ignorance de l’un ou de l’inexpérience de l’autre.
La divifion établie entre les différentes parties de
l ’art de bâtir rendroit cette conféquence inévitable,
fi dans les monumens publics furtout on ne trouvoit
la manière d’unir enfemble l ’architede & Ventre-
preneur 9 de telle forte que ce dernier fubordonné à
J’infpedion & au contrôle du premier, ne devienne
que l’exécuteur de fes deffins , & foit dans la qualité
des matériaux , foit dans la main-d’oeuvre, refte
fournis à une furveillance qui en garantit le choix
& la peifedion.
ENTREPRISE, f. f. C ’eft le mot quidéfW
l’engagement par lequel un homme qu’on appelle
entrepreneur le charge de bâtir à forfait un édifice
quelconque d’après des devis oh font fpécifiées
toutes les conditions relatives à cette conftruétion
On a dit au mot précédent quelles font les rai
fons principales qui, ont multiplié les entrepreneurs
de bâtimens, & rendu fi commune leur intervention
dans la plupart des bâtimens particuliers. O n pour-
roit croire qu’une partie de ces r a ifo n s n’eft point
appliquable aux édifices publics. Eu e ffet , leur
conftru&ion eft ordinairement fubordonnée à des
a dm in iftr a tio n s ou à des furveillans dont la capacité
& l’intelligence devroient être une caution de l’économie
, du bon choix & du meilleur em plo i des
matériaux & de tout ce qui entre dans la compo-
fition des bâtimens. Cependant, on voit les plus
grands monumens mis à l ’ entreprife, & malgré le
bénéfice que doivent faire les entrepreneurs , l’expérience
apprend encore que c’eft là la méthode la
plus économique.
En effet, dans tout ce qui eft bâtiment, ifes moyens
de fraude font fi variés & fi difficiles à faifir, les
amples négligences dans de vaftes atteliers deviennent
fi difpendieufes, les abus s*y multiplient fi
facilement & s’y enracinent fi profondément, la
connivence de tous les abus & de tous ceux qui
en vivent eft fi habituelle, qu’après toutes les tentatives
& tous les effais de réforme, on fe perfuade
que la c-hofe publique n’a pas de meilleur garant
à fe procurer que celui de l’intérêt perfonnel. Et
c’eft ce puiffant moteur qu’on emploie & qu’on met
en adion dans Y entreprife.
Au refte, à l’égard des grandes conftrudions des
monumens publics, où les malverfations de détail
peuvent occafiohner de fi grandes pertes pour l’état,
le fyftême-de Yentreprife repofe fur les confédérations
générales qui le font adopter dans d’autres parties
du fervice public. On peut faire & l’on fait fouvent
les plus belles objedions morales contre ce fyftême.
Il y a même entre les efprits les plus défintérelfés
beaucoup de diverfité d’opinion à ce fujet. C’eft
que les uns voyent les chtofes & les hommes tels
qu’ils pourroient ou devroient être. Les autres les
voyent tels qu’ils font.
En générajifant l’idée à'entreprife confédérée fous
fon point de vue moral, & dans fes rapports avec
l’intérêt public, je la définirois, une tranfadion faite
par & pour cet intérêt public, avec l’indolence,
l’ignorance ou la cupidité préfumées des hommes
en place. C ’eft un accommodement avec ces vices
au moyen duquel on facrifie une partie de l ’intérêt
public pour s’aflùrer du refte par la garantie de
l’intérêt particulier. •
Le moyen de fe palier à*entreprife feroit de faire
en forte que les hommes chargés des différens fer-
vices publics y apportaffent la probité, le favoir &
l’adivité, & y apportaffent ces qualités dans une
proportion autant au-deffus de ce qu’exige Pintérttf
particulier dans le maniement de fes propres affaires»
. vaftes combinaifons des affaires publiques
C Supérieures aux relations bornées d’ une fortü0r&
comme'U^ Tftiu'd ans les hommes qui
- ’ les affaires publiques que le manque dune
S trois qualités , ?probUé, fivoir &l aCthuê , pour
t âfonner à la chofe publique dans quelque
■ S que ce foit, un députent beaucoup plus
S , que celui auquel on fe réfigne dans le fyf-
|me de VenMprifi, toute la-queftion n eft qu une
oueftion de probabilité fur le mérite & la vertu des
hommes en place. De fa folutton dépend celle de
la queftion de Y entreprife.
ENTRER, v . ad. C ’eft joindre bout à bout &
à-plomb des pièces de bois de charpente de même
groffeur, comme font quelques noyaux de bois; ce
qui fe fait par tenon & mortaife , ou par une entaille
de la demi épaiffeur du bois.
ENTRESOL , f- m. C ’eft un petit étage pris
dans la hauteur d’un grand étage, ordinairement
celui du rez-de-chauffée, dans lequel on ménagé
ou de petits appartenons d’hiver , ou des garde-
robes, ou des logemens de domeftiques.
Ventrefol a pris naiffance dans les grands paiais,
des convenances ou des néceffites dont on vient de
parler. La grandeur des pièces principales, furtout
au rez-de-chauffée, n’étant point d’accord avec le
refte des autres pièces, on a trouvé auffi commode
qu’utile de divifer en deux la hauteur de celles qui
ne font point de parade ; & l’on a , par un petit
étage interpofé & diffimulé a l’extérieur, multiplié
les dégagemens & les logemens dans un meme
étage. _.
Bientôt on a bâti exprès des entrefols dans le plus
grand nombre des maifons, & meme des maifons
particulières. Dans ces cas, Yentrefol n’ eft plus un
étage furtif dérobé à la vue & pris aux dépens
d’ un autre. Il entre dans le deffin primitif du batiment,
On lui donne fa proportion déterminée &
même fes embelliffemens particuliers.
Lés Italiens appellent mer^anino ce que nous appelons
entrefol. Ils en pratiquent dans leurs palais,
d’importance poffible. En Italie, on les pratique
quelquefois entre un étage & un autre, & alors ils
préfentent au-dehors de petites fenêtres carrées ornées
& ils les font apparens. Ce petit étage fe trouve
ordinairement dans l’ordonnance générale faire partie
du foubaffement.
Le mezzanine ou entrefol ne comportant point la
décoration d’une ordonnance particulière, & cet
étage qu’on pourroit appeler étage de fouffrance ou
d’exception , fe trouvant ordinairement fort bas &
placé au-deffous des grands étages,il eft facile de I
voir qu’on doit le conüdérer plutôt comme un hors-
d’oeuvre dans la décoration d’une façade que comme
devant en faire partie intégrante. On ne fauroit lui
appliquer aucun ordre, car cet ordre feroit ridiculement
petit eu égard à ceux qui le furmonteroient.
Lors donc qu’on eft forcé dans un grand palais
fte pratiquer des mezzanines, le bon fens & le bon
goût veulent qu’on leur donne à l ’extérieur le moins
d’un fimpie bandeau, & qui, foit par la proportion
, foit par la décoration., le cèdent aux croi-
fées des étages principaux.
Toutefois la meilleure manière de placer cet
étage de fujétion eft de le rendre partie du fou-
baffement général, lorfqu’on ne fait pas du rez-de-
chauffée un étage principal. ‘ r i
On voit quelquefois deux mélanines ou entrefols
au-deffus l’un de i ’auire. C ’efUia un abus révoltant.
Ventrefol, lorfqu’il eft fe u l, paffe comme
on l’a dit pour une forte d’exception, à laquelle
on confent de ne pas trop faire d’attention. Deux
entrefols au-deffus l ’ un d.e l’autre donnent l idee
d’une petite maifon inferite dans une grande. Cette
répétition dénature le caractère des palais, en gâte
l ’ordonnance & en rapetiffe l’ effet. , s
Ces confédérations ne font applicables qu aux
palais & aux maifons dont Tarc’nitedure deffine
les plans & foigne- les élévations. Dans le plus
grand nombre des maifons, &. furtout des maifons
de-commerce, il y a une multitude de befoins & do-
convenances ennemis de ces principes 7 & pour
lefquels ces principes ne font pas faits.
ENTRETIEN, f. m. Se dit généralement en
architedure pour exprimer les foins, la furveillance
habituelle & les réparations légères dont tous les
édifices-ont befoin. Quelle que fôlidité qu on leur
donne, quelle que parfaite que foit leur conftruc-
j tion , le temps & la tendance à la décompofition
qui eft propre à tous les corps, y produifent journellement
des altérations auxquelles il faut fans
ceffe apporter remède pour prévenir les fuites quo
leur négligence pourroit occafionner. ,
I l y a toujours une femme annuelle confacree
à Y entretien des grands édifices. Au moyen de cette
dépenfe, on empêche qu’ il ne s y développe des
caitfes de ruine; & cette dépenfe légère à'entretien
économife les grandes dépenfes de réparations. Un
édifice même peu folide qu’on entretiendrez avec
foin dureroif éternellement. .
Ce qu’on appelle entretien eft furtout néceffaire
dans les objets qü’un mouvement continuel attaque
fans interruption. Tels font Tes ponts, les quais,
les aqueducs , les égouts, les chemins publics. La
oh un agent deftrudeur travaille fans relâche, il
faut que l’inftrument confervateur fort aulii lans
ceffe en adion. Si l’on difeontinue quelque temps
l’adion réparatrice, le mal fait de tels progrès qu on
ne trouve plus de fonds pour y oppofer une relil-
tance fuffifante. La force de celle-ci diminuant en
raifon de ce que la force de l’autre augmente, 1 équilibré
èft rompu & la ruine des édifices en elt le
prompt réfultat. . . . r
Dans le langage de la partie admmiftrative des
bâtimens,-on appelle entretiens au pluriel les réparations
annuelles, foit des maifons foit de la culture
X x a