
bien maçonnés à bain de mortier, avec des chaînes
en pierres de taille de trois toifes en trois toifes.
Si ['égout doit être voûté, après avoir arrafé les
murs à la hauteur des naiffances de la voûte , on
conftr-uira celle-ci , on la reliera avec les murs
qu’on élévera jufqu’à la hauteur de l ’extrados , auquel
on donnera un bombement fur la largeur ,
d’environ un pouce & demi par pied. Si le deflùs
eft a découvert , on couvrira cet extrados d’une
chappe de ciment, de fept à huit pouces d’épaif-
feur ; & s’il pâffe fous une rue, le pavé fera maçonné
dans cette couche de ciment. Cette voûte peut être
en pierres de taille, ou en moëlons avec des chaînes
en pierres de taille, en raifon du dégré de folidité
que peut exiger fa pofition.
Quand on conftruit les égouts en pierres de taille,
il faut, pour éviter les filtrations, pofer les pierres
à bain de ciment.
Dans lés ouvrages de ce genre, conftruits en
pierre par les anciens Romains, on remarque qu’ils
avoient la précaution d’envelopper à l ’extérieur les
parties de pierre de taille , avec des maflïfs en maçonnerie
de blocage, à bain de mortier. Dans l ’intérieur
, la partie ou couloit l’eau étoit revêtue de
ciment, afin d’empêcher l ’eau de filtrer au travers
des joints de la pierre de taille qu’ils avoient coutume
de pofer fans mortier.
Soit que les égouts foient conftruits en pierre de
taille , foit qu’ils ne le foient qu’en moëlons, il fera
à propos de ne former définitivement le fond du
canal fur lequel l ’eau doit couler, qu’après que la
conftruélion aura été tout-à-fait achevée , afin de
pouvoir réparer , en le formant, les inégalités de
taffement, & autres accidens furvenus dans fon niveau
, accidens inévitables, furtourlorfque la longueur
d’un ègoût eft confidérable, Ce fond pourra
être formé avec des caniveaux en pierre de taille
©u avec des pavés de grès pofés à bain de ciment.
Il y a des égoûts découverts qui n’exigent que des
rigoles ; d’autres pour lefquels il fuffit de deux murs
formant un canal dont le fond eft pavé.
Quand un égout doit avoir plufieurs branches, il
eft à propos de commencer par celle qui doit le terminer
à fon embouchure , & de faire en remontant
les principales branches où les autres aboutirent,
afin que l ’écoulement des eaux puifte avoir lieu à
'.dnefure de l ’exécution.
Les précautions indiquées dans cet article, pour
parvenir à conftruire des égoûts folides & durables
font du genre de celles qu’on obferye dans l’établif-
fement des aqueducs & des canaux (vqy. ces mots),
EGYPTIENNE ( architecture). Le premier
fenriment qu’on éprouve , lorfqu’on se difpofe à
parler de l'architeâure égyptienne, Centiment qui doit
affecter aulïï ceux à qui l’on en parle, eft l ’étonne-
ment, qu’il exifte encore a fiez de monumens de l’art
architectural des Egyptiens , pour qu’on puîffe dire
avec quelque précifion ce qu’il fu t , & fonder fur
ces notions des jugemens & des parallèles que puijft
avouer la faine critique.
Tous les genres d’architeâure que nous connoif.
fons, & dont nous prétendons donner dans cet ou-
vrage la connoiflance au public, d’après les lumières
que nous avons tâché d’en acquérir, appartiennent
ou à des peuples encore exiftans, tels que les Chinois,
les Indiens, ou à des nations très-modernes
telles que les Maures ou les Arabes, ou à des temps
encore récens , & prcfque fous nos yeux, tels qUe
les fiècles appelés gothiques, ou à des peuples qui
ont ceffé d’exifter depuis long-temps à la vérité,
comme, les Grecs ou les Romains, mais dont les le-
çons & les préceptes, confervés par une tradition
ininterrompue , vivans encore dans leurs ouvrages,
font devenus naturellement un objet vulgaire de
connoiffances communes à toute l’Europe , & le régulateur
de fon goût.
L ’Egypte, au contraire, ayant ceffé d’être dès
avant les temps qui font devenus pour nous les
premiers temps hiftoriques y n’a pu dès lors influer
fur le goût des nations dont nous avons reçu direéle-
ment & notre’ goût, &nos arts, & notrearchiteéhire.
Les nations qui furent jadis particulièrement en conta#
avec elle, ayant aufli entièrement difparu pour
nous, il devoit arriver que les monumens de fon architecture
(ceux furtout de la Haute-Egypte, &
c’eft dans ceux-làfeulsqu’exifte cette architeâure
enfevelis dans un coin oublié du monde, & fans
rapport avec le mouvement commercial des fiécles
modernes, refteroient inconnus, de comme perdus
pour l’hiftoire des arts.
C’eft toutefois à cet oubli même que nous en devons
la connoiflance aâuelle. C’eft au délabrement
total où s’ eft trouvée la Haute-Egypte, divifée du
refte du monde par la mer Rouge , pardes mers de
fable , & ne confinant plus qu’avec des peuples barbares
; c’eft à cet entier & long ifolement du relie
de toutes les nations civil:féés qu’ eft due la confer-
vation de ces maffes prodigieufes d’édifices mis, en
quelque forte par la nature, fous la fauve-garde de
la barbarie des habitans de cette contrée. Il n’y a
pas de doute que fi des peuples puifians euffent luc-
cédé fur cette terre à fes anciens propriétaires, fi des
villes riches & induftrieufes -fe fufient relevées fur
les ruines des antiques cités de ce pays, les temples,
de l’Egypte fùflent devenus les carrières où l’on eut
puifé les matériaux des nouvelles conftructions. Les
révolutions naturelles furvenues chez ces peuples,
les guerres, les dévaftarions, les incendies, enfin tout
ce qui accompagne l’exiftence des fociétës policées,
eut contribué à effacer pour jamais l’architemrt
égyptienne. Les hordes d’Arabes qui habitent ces con*.
trées , les peuplades foibles & à demi-barbares delà
Haute-Egypte ont bien à la vérité bâti leurs village8
fur quelques-unes de ces villes. Les terra fies de
quelques temples fervent il eft vrai de fol a leurs
maifons, & l’on voit à Tbèbes deux étages de bourgs»
ou, fi l’on 'veut, un bourg à deux étages, fufpéndtt
fur les plafonds immobiles de ces ruines éternelle*»
Mais tous ces moyens naturels ■ deftruffion ne fe
Z pas trouvés en proportion de la force de réf.f-
lance des monumens auxquels ,1s livro.ent la guerre.
Tl n’a rien moins fallu que la fucceflion de villes
aufli peuplées qu’Alexandrie ( voy. Alexandrie ) ,
' le Caire, pour détruire totalement Memphis, i
Thèbes n’a point eu de feroblables fucceffeurs, &
Thèbes exifte encore dans des réîles gigantefques
que les feules forces de la nature & du temps ne
Semblent pas capables de détruire.
Il faut dire aufli, 6c c’eft ce que nous aurons plus
d’une fois l’occafion d’obferver dans le cours de cette
differtation, que jamais aucun peuple ne fût doué ,
comme le peuple égyptien I de tout ce qui peut
contribuer à éternifér les monumens. lnltitutions
religieufes, génie formé par ces inftitutions, gouvernement,
moeurs, climat, matériaux, principe
originaire de l’art de bâtir, tout tendit, comme d’un
commun accord, a confolider, à cimenter ^ les édifices
, & à les rendre aufli indéfiniétibles qu il appar-
(tient à l’homme de pouvoir le faire.
C’eft à ces caufes que nous devons l’exiftence de ;
YarchiteSure égyptienne. A l égard de la connoiflance
que nous en avons, il faut aufli que le leâeur fâche :
le degré de confiance qu’il doit mettre dans notre ;
récit. Le fenriment du doute doit fuccéder naturellement
à celui de l’étonnement. ^ |
Avons-nous des notions afiez pofitives des monu-
tnens de l’Egypte, pour pouvoir en déduire l’ana- ;
lyfe de fon archit'e&ure ? L’auteur de cet article
a-t-il pu , fans avoir vu par fes yeux cette archi- .
tcfture , établir un fyftème de. critique &. de parallèle
qui acquiert au moins le degré de vraifemblance
qu’on doit exiger d’un fyftème }
Je réponds à la première queftion , que les autorités
monumens ont acquis force d’autorité, & leurs def-
criptions nombreufes ne permettent aucun doute.
3°. Les ouvrages égyptiens répandus dans toute
l ’Europe, & ceux qui exiftent à Rome, tels que les
obélifques, les ftatues, les idoles de tout genre,
chargées d’hiéroglyphes, les fragmens de corniche
& de couronnement qu’on voit au Mufaum hritan-
nicum, à Londres, & enfin le ftyle bien connu de
la fculpture égyptienne qui donne la mefure .d imitation
fur lefquelles peut fe bafer l ’analyfe de Y or- i
chiteclure égyptienne , font fuffifantes , au moins
quant à cette architecture q u i , ainfi que nous le
verrons, eft d’une telle fimplicité dans la conftruc-
îion, dans fes formes & dans fa décoration , & eft
ènfuite d’une telle uniformité * que, fous ce rapport,
on ne peut la comparer à aucune autre.
Ces autorités font de quatre genres.
i°. Les deferiptions des écrivains grecs & romains,
qui tout étrangères qu’elles puiuent être aux
notions proprement dites architecturales , n’en
fervent pas moins de moyen de vérifier les deferip-
tions modernes , furtout quant aux plans, à la grandeur
des diftributions, & à un grand nombre de
détails décoratifs qui exiftent encore.
a0. Les monumens connus de toute l’ Europe,
& décrits par tous les voyageurs du monde, qui
fubfiftent dans la Baffe-Egypte , tels que les pyramides
, le fphinx, les fou terrains, & diverfes autres
conftruâions dans lefquelles ne fe retrouve point a
la vérité l’art proprement dit de l’architeâure ,
qu’on ne voit que dans les édifices de la Haute-
Egypte , mais où brille le mérite de la conftruCHon,
r- où çft toujours empreint le génie égyptien. Ces
où les arts étoient parvenus, & fou mit àTap-;
prédation de l’architeâure une analogie^ invincible,
& contre laquelle il ne fauroit exifter d argument.
4°. Enfin les récits, les deferiptions & les deflins
du petit nombre de voyageurs qui, dans le cours
de ce fiècle, font parvenus à remonter le N i l , ôc
à vifiter la Haute-Egypte. Jufqu’à ce moment, les
deux feuls qui puflent fervir d’autorité , etoient
Pococke & Norden; & c’eft d’après la confrontation
de leurs deflins, que nous étions parvenus «.
analyfer d’une manière aflez fatisfaifante 1 archi-
teclure égyptienne , pour qu’en 1785, l’Academie des
inferiptions & belles lettres ait adjugé le prix au mémoire
que nous lui avions adreffé , d apres fon pro-,
gramme fur cette matière.
Ceci nous mène à répondre à la fécondé queltion.
Point de doute que l’on ne décrive bien que ce que
i l’on a vu. Celui-là feul qui a reçu perfonnellement
les impreflions des monumens, peut les faire palier
dans Lame du leâeur. Il eft malheureux que ceux
des voyageurs qui ont été à portée de recevoir ces
impreflions, n’ayent pas eu le talent ou la volonté
de nous les transmettre dans leurs deferiptions. Ils
s’en font tenus à des deflins, & même à des deflins
allez fuperficiels. Toutefois ces deflins raient encore
mieux que'toutes les deferiptions, pour celui qui
fait lire dans ces linéamens ; & quiconque a 1 habitude
de cette lecture, quiconque a eu louvent occa-
fion de .comparer aux monumens eux-mémes les
deflins des voyageurs, & de fe former en ce genre
une règle de critique, ne doit pas défefperer de le
former des idées aflez juftes de l’effet meme de 1 ar-
chitefture, qualité la plus difficile à tranlmettre par
le deflin. , „ , . .
Mais il eft une multitude de parties dans 1 archt-
teélure, fur lefquelles on peut, d’après des deflins ,
prononcer aufli juftement que d’après la vue des
objets. S’il s’agit furtout, moins d’apprécier de ces
fineffes de ton, de ces rapports délicats, de ces
grâces de forme , de ces beautés d’ornement ou de
proportion qui échappent au deflin, que de (pect-
fiet ta nature des maffes, la nature des formes générales
, la nature des plans, le caraftère originaire ,
les types & les données principales d une architecture
, on conviendra que les deflins des voyageurs
peuvent bien fuppléer à la vue des monumens. 11
ne s’agit pas en effet ici, comme dans 1 architectuie
grecque, de ces nuances , de ces fineffes de detail ,
de ces combina'ifons exquiles de parties & de rapports,"
dont la mefure la plus rigoureulement exaite
indique .encore jnfidelleaient l’enfemble.. Les dcütn*
Ha i.