portique d’ordre corinthien. On voit dans le recueil
de fes oeuvres le plan & l’élévation d’un de
ces portiques (celui du côté occidental), ouvrage
qui a dilparu avec cette ancienne cathédrale ,
lors de fa reconftrucHon par le chevalier Wrenn.
On eft obligé d’avouer que la critique qu’on en
lit alors eft fondée. Rien ne convient moins , dans
les reliaorations qu’on eft obligé de faire des mono
mens gothiques., que ce mélangé d’une autre
arcmteâure, & furtout des ordonnances grecques,
dont le fyftème tout différent, ne peut produire
d’autre effet, que celui d’une contradiôUon
qui bleffe autant les yeux que l’efprit.
Le roi Jacques mourut, & le roi Charles Ier. ,
ainfi que la Reine l’on époufe, honorèrent de leur
confiance Inigo Jones 3 qui maintenu dans fa
place & (es emplois, fut bientôt chargé de réalifer
la grande enlreprife du palais royal de Wite-
hùît, dont il avoit fait les plans &. arrêté les projets
fous le règne précédent.
(/eft là l ’ouvrage dans lequel on peut le mieux
j'uger du génie de notre arclnleôte. Nous avons,
pour en prenire une jufte idée, les plans & élévations'
de cet immenfe édifice , recueillis par
M. K e n t, dans, l’oeuvre A’Inigo Jones y. 8c de plus
un fragment affez conlidérable de cet édifice
qui s’eft confervé à Londres , & qui brille au milieu
de celte ville , comme l’archifeâure du vieux
Louvre fe fai t diftinguer à Paris.
On peut affirmer que jamais un plus grand &
plus magnifique enfemble de palais ne fut conçu &
projeté par aucun architecte 5 & fi les malheurs
des temps n’en enflent pas interrompu l’exécution,
Londres poarfoit fe vanter,de pofféderle palais
le plus magnifique qu’il y ait en Europe. Malheu-
reufement ce n’eft plus que dans des deflias, qu’on
peut s’en former & en donner une idée.
Rien .de plus grand, de plus fimpJe, de plus
varié à,la fois & de plus régulier, que le plan de
cet immenfe édifice, qui dévoit former un qua-
drangle parfait. I/efpaee occupé par ce plan, fe
divife en trois parties égales. Celle du milieu eft
une vafte cour qui traverfe tout le palais : les deux
autres fe eompofent chacune de trois cours environnées
de bâiimens, dont les maffes fe corref-
pondeqt avec quelques variétés/- •=
L ’élévation de cet enfemble offre dans les
quatre: façades de fon extérieur , la plus parfaite
fymétne. Chacune de ces façades eft formée de-
malles • de bâtimens , dont les difpofitions , les
ordonnances fe balancent dans. :hn motif général
& uniforme, & toutefois très-varié, foi-t par les
avant-corps & les retraites des parties, foit par la
diverfilé des élévations. Chaque façade eft extérieurement
femblable à l’autre-. L’intérieur du
palais préfente dans lesélifférentes maffes de les
élévations, des parties d’arcbiieôlure & d’ordonnance,
dont le ityle eft toujours le même, & dont
les détails femblent être une colleôlion de tout ce
que le bon goût peut réunir de variétés.
La defcriplion de tous les corps de bâtiment '
qu’ I n i g o J o n e s a fu foumettre à un plan régulier
& d’une très-valte étendue, exigeroit un grandi
nombre de pages. Mais on a cru devoir d’autant
moins s’y étendre, que ce palais, comme on l’a dû I
à l’exception d’un corps de bâtiment qui n’en eftl
pas la trentième partie, eft relié fans exécution. If
luffira donc de renvoyer le leôleur au recueil des
ouvrages à ? In ig o J o n e s } rafleinblés par M. Kent I
en 1770 3 !§ où l’on trouve les détails maguifique I
ment gravés de celte grande entreprife. f
C’en; là qu’on voit combien I n i g o J o n e s s’éioiîl
approprié le caraôlère de Palladio, dans l’archi-l
teclure civile. Il n’eft pas une partie de fa vafte
compofilion qui ne rappelle dans l’emploi des!
ordres, des portiques, des boffages, des ■ foubaf-I
femens, des-profils, des détails,. des formes de
croifées & de portes, & c ., ce ftyle riche & .(impie I
noble & élégant, folide & léger à la fois, q u e Pal- j
ladio & les archileôles du feizième liècle en li ''
furent appliquer aux palais des grands, comme!
aux demeures des particuliers.
Ceei ne tend pas J au relie, à rabaiffer la glcirel
I n ig o J o n e s : imiter comme il l’a fu faire, c’eil
être original.
On peut s’en convaincre par ce beau (fragment
du palais de Whitehall, appelé B a n q u e t i n g houze,I
qui fervit pendant quelque temps à la réception
.dès ambaffadeurs étrangers , & dont le plafond!
fut peint quelques années- après, par Rubens. Il fel
CompoTe ,d’un foubaffemenl ruftique fort liant j
fur lequel s’élèvent deux étages percés chacun de
fept croifées. La hauteur de chaque étage eft ocJ
cupée par une ordonnance de pilaftrès. & de colonnes}
celles d’en bas font ioniques , celles d’enI
haut font compolites. Le'tout fe termine par un
a t tique, avec baluftrades. Quelques détails dans
cet enfemble s’offrent à la critique. On, préférerait I
que la corniche ne fut pas en reffaut .fur les pi-1
laftres & les colonnes engagées. On voudrait auffil
q a 'I n i g o J o n e s n’eût pas employé la mauvaifel
pratique de la fri fe bombée dans lfi?en t ablément
de fon ionique. Malgré ces petites irrégularités j j
l’afpecl du monument eft riche & d’un beau caractère.
Lès fenêtres ont de très-beaux chambranles j
l ’exécution eft pur,# 8c précieufe, & l’on eroit etre I
en face d’ un édifice die Palladio.
Un des plus grands & des plus remarquables!
rnonuineus dé l’Angleterre , celui de Greenwich, I
à'fix milles de Londres , fur le bord de la Ta mile, I
fut conçu par I n i g o J o n e s & terminé fur lespro-j
jets par Web fon élève.
Ce vafte enfemble de bâtimens qui fert aujourd’hui
d’hofpice aux invalides de la marine, & dont!
o n a déjà d i t quelques mots à l’article H oteb
{ v o y e z Hôtel des invalides) , avoit cl’abord été
projeté pour une autre deftinalion. I n ig o Jones
eu devait faire un palais pour Charles Ier. Jl par0lt
qu’il n’en avoit achevé qu’un-corps de bâiimens*!
L’édifice interrompu par les circonfiances
' es étoit dans cet état, lorferae Guillaume III
M' ini’ rlp céder les bâtimens & les terrains defti-
K ° poUr Un palais royal, à l’établiffement de
Irhôtel des invalides de mer. Ce fut en vue de
I „ette dëftination nouvelle, que le corps de bail-,
ment exécuté par Inigo Jones fut accompagné,
de celui qui lui fait pendant, & de tous les autres
corps d’édifices qui entrent dans l’enfemble du
r-Nous ne faurions affirmer que l’enfemble qu’on
volt aujourd’hui ait été projeté dès l’origine par
notre architefte : il eft très-vraifemblable que le
changement d’emploi aura néceffité des difpofi-
[tions particulières. _ ,
Cet enfemble fe compofe maintenant de deux
vaftes corps de bâtimens carrés, placés en pen-
Idans & fur le bord de la terraffe qui donne fur la
| Tamifè- Chacun de ces bâtimens, parfaitement fy-
| métriques, a une cour dans fon. milieu. Leur fa-
jeade antérieure & .poftérieure eft formée d’un fou-
I baffement fur lequel s’élève un ordre corinthien,
qui occupe la/hauteur du rez-de-chauffée & du
premier étage} u n a t tique furmonté d’une baluf-
[trade couronne celte ordonnancé. Deux eurps
avancés avec quatre colonnes adoffées, ^apportant
un fronton, font difpofés dans celte façade de
[chaquecôté de la porte , flanquée de pilaftrès accouplés,
correfpondant aux pilaftrès également
[accouplés des angles. Ges pilaftrès fe raccordent
t avec quatre autres pilaftrès en retour, qui terminent
l’ordonnance & deflinent 1 epaiffeur. de là
façade. Les deux façades antérieure &. poMrieure
dont on vient de parler, font réunies, d’un côté
! comme de l’autre, par une ma'ffe de bâtiment
' moins élevée de la hauteur de l’attique , & percée
dans ces deux étages, au rez-de-chauffee & au
j premier, de fenêtres taillées dans des boffages qui
donnent à ces ailes un caraôlère fort male. Le milieu
en eft occupé par un avant-corps de quatre
ailes à bofî’age dont on a parlé. La critique trou-
veroit un peu à redire dans les façades, loi/pointa
; colonnes, femblables à ceux delà façade.
Nous avons dit que-qui décrivoit un de ces corps
d’édifices ,- décrivoit l’autre. Effectivement, tout
cet enfemble fe compofe de deux moitiés parfaitement
fymétriqiies dans leurs moindres détails.
La grande efptanade qui fépare les deux bâti-
timens dont on vient de parler j laifie voir, comme
mis en pendant , deux dômes allez exhauffés, qui
s’élèvent au-dèffus de portiques ifolés. Ces dômes
terminent de chaque côté de très-longs bâiimens
d’on ftyle évidemment poftérieur à celui à’Imgo
Jones. Le tout aboutit à une avenue qui conduit
par une pente douce , au célèbre 'obfervatoire de
Greenwich. > - -
Ce grand monument eft évidemment dans la
réunion de toutes les parties qui le eompofent,
l’ouvrage de temps différens & d’artiftes luoceffiis.
Le ftyle d’Inigo Jones ne fe‘ trouve que dans
les corps dé bâtiment , dont on a donné une description
plus fpéeiale. On ne peut s’empêcher fur-
tout de reconnaître le goût de Palladio dans les
difpofition des colonnes 8c des pilaftrès , foit
pour cette diftribution de malles & de corps
avancés, qui laiflènt l’entrée principale avec une
décoration leçon claire , lorfqu’il letnble qu elle
auroit dû jouer ici le premier rôle} enfin, pour la
pefanteur de Tattique qui écrale l ’ordonnance.
Mais celle compofilion n’en a pas moins de fort
grandes beautés'} elle préfente un caractère mâle
8c. févère , des malles grandioses, & cet enfemble
fymétrique & achevé dans les moindres parties,
qu’il eft rare de trouver dans les grandes enlre-
prifes d’architecture,
On cite à Londres, comme un ouvrage des plus
remarquables d’Inigo Jones> l’églilé cfe Saint-Paul,
fur la place de Covent-Garden. Ce monument offre,
à la vérité, un portique en colonnes d ordre appelé
tqfcan , & qui eft d’une grande {implicite. On ne
peut refufer à cette mafl’e un caractère affez fe—
rieux. Du refte , ni l’intérieur ni 1 extérieur du
temple né fe font diftinguer par un mérité de
compétition ni d’exécution , qui puifte arrêter les
regards.
Généralement on manque de notions bien confiantes
, & fur la vie & fur les ouvrages d’Jm^o
Jones. Le Diôlionnaire biographique de Chalmers,
que nous avons coiifulté, eft très-fuperficiel a
égard. Il faudroit des recherches qui n’ont point
été faites encore, pour diftinguer dans les ouvrages
j qu’on attribue à ce célèbre architecte , ceux dont
il a pu ne donner que les projets , & qui ont été
exécutés après lu i , ceux qu’il avoit .commences
& que Tes élèves ont continués , enfin , ceux qui
depuis lu i , ont été reftaurés.
On trouve dans quelques itinéraires, des mentions
affez, fréquentes de grandes maifons de
campagne , bâties en difïerens comtés de l’Angleterre
par Inigo Jones y mais ces notices font
infuflifantes. D’autre p a r t, le grand recueil des
oeuvres & Inigo Jones, publié par M. Kent , &
que nous avons déjà cité , contient une très-
grande quantité de plans, élévations & détails
de palais , foit de ville , foit de campagne. Mais
l’auteur de ce recueil a omis de faire connoîlre
fi ces deffins; font Ceux de bâtimens exiftans ,
ou fimplement de fimples projets trouvés" dans
le porte-feuille de l’artifte ; en forte que. celui
: qui voudroit y puifer la matière d’une notice h il—
..torique fu-r ces ouvrages, ne fauroit faire ufage
de ces nombreux deflins : car on ne peut pas citer
de fimples projets deflinés comme des monumens
fur lefquels puiffent s’affeoir la renommée d’un
arebiteôle & l’opimon de la poftérité.
Tout ce qu’on peut dire de ces deflins , c’eft
qu’il n’en eft pas un dont on ne doive ou defirer
q ne T exécution ait eu lieu , ou regretter qu’elle
n’ait pas!été réalifëe. C’eft partout le goût, le
ftyle la pureté, l’élégance de Palladio &. des