
tuitement l’invention d’un chapiteau, qui exiftoit
avant lu i, était de? Corinthe 3 ou fi ç’eft dans cette
ville que parurent pour la première fois des chapiteaux
faits en forme de vafe, & ornes ^d.è plantes ,
appelées acanthes. Long-temps ayant Lallimaque ,
& long-temps avant que les Grecs euflent fait des colonnes.
& des chapiteaux , on avoir taille en Egypte
des colonnes dont la tête, s’ornoit ou .de diverses
efpèces de Nymphées , ou des feuilles du palmier ou
de celles du loto, ainfi que de diveries plantes
facrées. i • : v
Quelle fut la raifon qui porta les Egyptiens a
donner à une de leurs efpèces de chapiteaux î la'
forme évafée, qui eft celle du chapiteau c o r in th i e n ? .
Je doute qu’il foit poflible d’en trouver une bien pe-
remptoire chez un peuple, oh les formes de 1 art
fe trouyoient aflùjetties à des rites façrés, auûl bien
qu’à la routine des opérations mécanique:* Il ne
faut que jeter ün coup - d’oeil fur ce qui nous, eft
refté des chapiteaux de l’Egypte^-, ( V o y e { Egyptienne
A rchitecture , ) pour fe, convaincre
qu’un grand nombre de leurs configurations«.font
dues' au caprice, & qu’aucune règle. , ni proportion
ne prélidoient àj leur comppfition. Cependant
' il femblè qu’on pourroit trouver à la forme élémentaire
du chapiteau à campant, une^railonau. moins,
bien plaufible! dans • les élémens, même de la conf-
truétion primitive , que les premières leçons dube-
foin enfeignèrent aux 'Egytiens. ,
Nous voyons en effet ces bizarres; & nombreules
configurations de chapiteaux égyptiens ,.fe réduire à
un petit nombre de formes élémentaires. La plus
fimple & fanVdoute la première de toutes, coniiite
en un dé de pierre, plus pu, moins élevé, ou en pn
tailloir qui pofe à cru fur la colonpe ^ fans y
être uni par aucun profil , & qui débordé aflez
peu fôn diamètre. .
En Egypte, où le principe élémentaire de 1 ar-
çhiteélure paroît s’être combiné des ufages de la charpente
ou du bois, St dé l’emploi de.la pierre, on
ne fauroit affirmer que ce couronnement de la colonne
ait eu le mên^e. objet qu’en Grece. On peut
lui en . fuppofer d’autres ; mais le plus yraiiem-
blable paroît avoir été d’exhaufier la colonne. Il
feroit difficile de fe refùfer à cette préemption,
lorfqu’on voitdans plufieurs mOnumens trois formes
d e -chapiteau placées l’une fur l’ autre. Un chapiteau
égyptien rapporté,par nous , fait voir iept al-
fifes ou plateaux impofés & debprdans 1 un fur
l’autre , de manière qu’ils vont du bas vers le hau t,
toujours en élargifiant. ' . •>":
l orfqu’à cet aflêmblage de pierres allant amii en
pyramide, ou en cône renverfé , on compare d, autres,
chapiteaux égyptiens, tel que celui dont Paul
Lucas nous a donné le deffin , & dans leque une
‘ feule pierre , taillée quarrément en biseau , remplace
les aflifes du précédent ,1 a marche analogique
de i’efprit d’invention permet de croire que
• rinconvénient de tant de mprceaux, aura fait naître
ridée d’y çn fubftituerjunfeul de la meme hauceqr.
L’ ufage une fois établi; d’èmfolpÿ'eï des n>Qr- I
ceaux d’une telle élévation au-deflùs de la colonne, I
le goût feuL ou. le plaifir des yeux de voit s’occu- I
per des moyens d’en façonner la forme & d’en m - I
fer le contour, quand même l’analogie du chapiteau I
à plufieurs. affifesv, n’en auroit pas faist.;naître I
■ l’idée. .. ■; ...■ > -, . . . /. ■ I
Cette forme .évafée étoit la plus naturelle de I
.toutes celles qui pouvaient joindre 1 apparence à I
la réalité de la folidité. On, verra à 1 article de I
l’archite.a.ure égyptienne comment le procédé con- I
traire a dû produire la forme, qui nous paroît fi I
bizarre , du chapiteau à renflement.
Lorfqu’on-cherche; l’origin.e de formes ou l ’in- I
dication'de lanatur;e, & l’empreinte fugitive de fa I
marche femblent toujours. vouloir fe cacher; fous I
le voile du caprice :, ou lès apparences de ce qu on I
appelle, le hafard , il feroit ridicule . d. .exiger des I
démonftrations rigoureufes ou mathématiques. Il me I
femble, que ce qu’on a vu jufqu’à poêlent , peut
fuifire à tout ce qu’on a droit d’attendre de fern-
blables recherches,: & fi l’onn en a pas, aflez pour
fe-convaincre; de Torigine. vraifembla.ble des chapiteaux
à campant dé l’Egypte , ce quijva fuivre, I
démontrera fans réplique-, que ce> chapiteau tut le
type de celui qui fait le .caraâère effentiel.de
, l'ordre, corinthien. .
Que l’on cônfulte les différentes figures des. chapiteaux
égyptiens rapportées (Eig* 273 & fuiv. ) , ■ & I
l’on verra combien la forme à cloche ou en maniéré I
de. vafe, étoit multipliée dans les .monumens de- j
l ’Egypte. Tous les voyageurs font d’accord fur cette
forme , St les variétés qui fe rencontrent dans leurs
.deffins font la meilleure preuve de la véracité de
leurs rapports. Il paroît d’apres ces differens deffins,
qu’aucun ufage confiant n’avoit réglé cette
configuration. Là., où l’emploi de toutes fortes de
chapiteaux dans un même édifice, avoit lieu, on ne
s’étonnera pas fi le même type de chapiteaux fe tiou-
voit lui-même fubordonné à beaucoup de diverfites.
Je ne doute pas qu elles ne fuient plus nombreufes
encore 9 que les voyageurs ne nous le laiffent.a foup-
conner. Parmi tant de fortes d’évàfemens, on doit
remarquer celui de la fig. 273, où 1 on trouve la
forme bien prononcée d’un vafe ; mais en con-
cluera-t-on la moindre intention d’imiter un vafe.
non fans doute, La même main , qui au milieu du
nombre infini de formes de vafes a conduit celle
du potier, a dirigé aufîi celle du fculpteur dans
la conformité que la' figure de ce chapiteau paroît
avoir avec celle d’un vafe. De telles analogies
ne fauroient être que fortuites, ÔC il n’appartiendroit
qu’à un puéril éfprit de fyflême , d’y voir autre
chofe, que la rencontre naturelle des procédés de
•l’art & d e là main; rencontre qui s’opère d’elle*
même , '&: a des'diftances de temps & de lieu , qui ne
peuvent faire foupçonner ni l’intention, ni la polu-
bilité de copier. I IA •#§'*??•,
A voir dans les monumens de 1 Egypte le char
plteau à çampme ou éyafé , employé tantôt p g
& tantôt embelli de fymboles ou de feuillages, la
première réflexion qui réfulte defon analvle , c elt
que fon type ou fa forme élémentaire fi a rien de
Commun avec fa décoration. Ce qui en fait le caractère
principal, c’ell la hauteur ; & a cet egard les
Grecs qui furent 11 ingénieufement régler les difte-
rens modes de l’architeaure par le plus ouïe moins
de force ou d’élégance,de péfanteur ou de legerete,
de fimplicité ou de richefle , ne purent faire un
meilleur ufage du chapiteau à campant que . fur
Tordre auquel ils avoient affigne & approprie tous
les caraélères d’élégance, de légèreté ou de richefle.
Ainfi le chapiteau à campant, quelque lifle & dénué*
d’ornemens, qu’on voulût le fuppofer dans fon
origine, feroit encore par fa forme/alongee, tel, qu il
deyroit particulièrement convenir à la colonne ,
dont les proportions feroiént les plus elegantes.
Si le type du chapiteau corinthien fe trouve fi
évidemment être originaire de l’Egypte doit- on
en conclure que les Grecs Tayent été puiser dans
cette fource ? II pourroit encore etre permis dé
révoquer en doute un emprunt, dont l ’authenticité
repoferoit fur des refl’emblances de forme, que
la nature feule des choies auroit pq. operer. Mais
lorfqu’on voit cechapiteau recouvert dejplantes de
toute efpèce , tantôt enlacées & tantôt recourbées
comme celles' de l’acanthe, offrir des points
de parallèle fi frappans avec le chapiteau des Grec^;
lorfqu’on fait enfui te qu’ elles furent en divers genres
les larcins que la Grèce fit à l ’Egypte, il faut avouer
que jamais analogie n’eût moins béfoin des preuves
de Thiftoire, & que jamais généalogie d’invention
ne fût plus évidente & moins conteftable que celle
dont il s’agit.
La queftion de favoir fi les Grecs font véritablement
en ce genre tributaires de l’Egypte seroit encore
fort indépendante de l’histoire du chapiteau
corinthien. I l fuffit à celle-ci qu’il fe trouve en
Egypte des chapitaux , dont la forme élémentaire
foit en forme de cloche renverfée ou de vafe ornée
de feuillages & de plantes, pour qu’on puifle hardiment
prononcer que ce chapiteau est originaire
d’Egypte. De favoir f i , quand et comment les Grecs
ont tranfporté dans leurs édifices cette forme &
cette décoration ; c’est ce qu’ aucune autorité ne peut
aider à réfoudre.
Je ne m’amuserai pas non plus à combattre
lesvifions de Villapende , fur l’origine qu’il lui plaît
d« donner à Tordre corinthien. Que le temple de
îérufalem ait eu des chapiteaux ornés de feuilles de
palmjer, rien de plus vraisemblable ; mais ce qui
l’eft encore plus, c’ eftque cette décoration y aura été
empruntée de l’Egypte, qui avoir déjà dès temples
magnifiques , lorfque le peuple hébreu menoit fous
la tente la vie paflorale , ou cherchoit au travers
des déferts un afyle à fes hordes fugitives.
C en eft aflez, je, penfe , pour fe convaincre
que l’Egypte donna naiflance à la forme & à
la décoration du chapiteau qui forme le principal
Caraclériftique de üordre Corinthien , je n’ai beut-être
JDUt. <TArchittâ. Tome IL
que trop eflayé de chercher ce qui put donner
en Egypte , l’idée d’ une femblable forme. Je dois
dire encore' cependant, que cette forme ainsi
évafée, paroît avoir été la plus généralement répandue
dans les monumens de ce pays : on la
retrouve couronnant tous les édifices par une
grande feotie qui leur tient lieu de corniche. Quant
a i ’embelliflement du chapiteau-, Ton ne fauroit
douter qu’il ne tînt, comme tous ceux de l*Er
gypte, à dè_s rites facrés ou à des coutumes re-
Irgieufes. De même que cette partie que nous
appelons la frife, & . que . les Grecs nommoient
\ophoros , portoit les' figures des animaux facrés ;
on peut croire de même que les. plantes feulptées;
fur les contours des chapiteaux ne s’y trouvoient
pas/ comme cela fe pratiqua depuis, uniquement
pour ie plaifir des yeux.
Il nous eft parvenu beaucoup moins de monumens
Corinthiens faits par, les Grecs , que de ceux
des autres ordres : fi l’on en jugeoit par les refies
très-nombreux de leurs villes, détruites ou enfe-
velies, on pourroit croire qu’ ils donnèrent toujours
la préférence à cet ordre indigène dans lequel la
nature & l ’art femblent avoir trouvé ce jufte
point de réunion., qui laifïe à douter lequel du
plaifir. ou du befoin a fait les frais de l’invention.
Prefque tous les temples qui relient fur pied font
d’prdre dorique ; un petit nombre d’ioniquesfub-
fifte encore. Quant à quelques monumens Corinthiens,
qu’on trouve à Athènes & dan^cl’autres villes
Grecques j ils font , pour la plupart,; des ouvrages
Romains., ou ils furent conftruits fous L’influence de
leur puifEmce & de leur goû t, chez les, peuples
qu’ils avoient conquis.
Cette clifette d’ouvrages Corinthiens , en Grèce ,
ne viendroit-elle pas - de ce que les Romains , ces
illuftres brigands, qui décoraient du nom ,de çon-i
quête & leurs vols & leurs ravagestrouvèrent
dans la richefle du Corinthien de quoi mieux fa-
tisfaire leur orgueiileufe cupidité. 0,n, ne ;fauroit
douter que les marbres les plus, précieux ,n’aient
été affe&és de préférence ; aux Ordonnances Corinthiennes.
La délicatefîe. du chapiteau & de ses
attributs , lès ornemens que. comportent les di*
verses parties de la modinature, tout dut engager
les Grecs à employer dans ce mode d’architeélure,
les matières les plus riches. Si à l’appui de cette
préfomption , on confidère ce nombre infini de
marbres étrangers à l’Italie, dont ell formé çet
inamenfe recueil de colonnes que R orne a jufqu’à
ce jour encore confervés comme en dépôt ;fi l’on
examine la fupériorité de travail d’un fi grand
nombre de chapiteaux Corinthiens, la nature St
la qualité de leurs marbres, on ne doutera point
que la Grèce ne fe foit-vu enlever avec fes ftatues’
les plus rares, la plus grande & la plus belle
partie de fes colonnes Corinthiennes.
C ’eft donc à Rome qu’il faut aller chercher les
plus beaux modèles de l'ordrç Corinthien ; cependant
, il convient d’exai»iner quelle fut la pro-*