
fond d’un fanchiaire obfcur & myftérieux , l’objet ■
d’un culle particulier, & les prêtres feuls a voient
accès dans le fe co s ou fandtuaire. Il fut donc
très-naturel que la réunion de tous ces cultes
dans une même enceinte , fût mife fous la fauve-
garde d’un myftère encore plus impénétrable 5
& de-là , les moyens imaginés pour rendre inac-
ceffible , à d’autres qu’aux initiés, les routes qui
conduüoient à chacune des falles correfpondantes
aux douze nomes primitifs de l’Egypte.
Pline donne bien encore à entendre de quelle
nature étoient ces détours par lefquels il falloit
puffer, & comment il étoit impoffible de s’eh
tirer fans y être guide. Il y avoit, félon lui , une
combinailon inextricable de routes .qui fe crpi-
foient'en tout fens. Mais, ajoute-t-il, ces circonvolutions
ne reffemblent point aux finuofités
qu’on voit repréfentées dans les çompartimens des
pavés , ni à des jeux d’enfans, où, fur la bande
étroite d’un ruban, on peut faire des milliers de
pas. Dans le labyrinthe 3 la difficulté de fe retrouver
provient de la multiplicité des portes,
& des ifl’ues percées exprès pour vous faire prendre
le change, & vous faire fans celfe retomber
dans le même égarement.
Les recherches des voyageurs modernes n’ont
rien fait connoître fur ce qui pourroit appartenir
encore aux débris d’un h prodigieux édifice. Pref-
que tous même fe font mépris fur le lieu de fon
emplacement. Il étoit fitué, félon Hérodote, un
peu au-defl’us du lac Moeris , & étoit peu éloigné
de la ville d’Arfinoé. Par conféquent, Tes ruines
devroient fe trouver dans le Feium , au fud-eft du
lac. A peu près dans ces environ;', il exifte des
débris, que quelques-uns ont pris pour ceux du
Labyrinthe} & qu’on a appelés palais ou château
de Caron. Paul Lucas a cru que c’étoit là les
relies du labyrinthe y mais ce voyageur mérite
peu de confiance. Pococke , beaucoup plus éclairé,, !
avoit découvert, un peu plus au nord de. cet endroit
, d’autres ruines , qu’il crut auffi avoir pu
etre celles du labyrinthe. Les derniers voyageurs
en Egypte s’accordent à penfer qu’il eft impof-
fible d’en retrouver les veftiges. Ainfi , ce n’eft
plus qu’à, l’aide des defcriptions & des mefures
des anciens écrivains , & auffi en s’appuyant fur
les notions ou lès pratiques bien éclaircies aujourd’hui
de l ’architetlure égyptienne , qu’on pourroit
reproduire un plan & un enfemble approximatif
du labyrinthe d’ Egypte.
Il paraît que cet édifice , foit dans fa defli—
nation, foit dans quelques parties de fa difpo-
fïtion , avoit été imité dans l’île de Crète 5 mais
Pline nous dit qu’à peine en avoit-on reproduit
la centième partie. Ce qui fignifiè que le labyrinthe
de Crète, foit par l ’étendue du plan, foit
par la multiplicité des conduits, des falles & des
conftrucKons de tout genre , foit par l’importance
de la bâtiffe , étoit à peine comparable à celui
de l’Egypte. Dédale n’en avoit copié que cette
complication de détours , qui tendoit à égarer
Gelui q u i, fans fil ou fans guide , auroit eu î’im
prudence d’y pénétrer. Au rapport de quelques
auteurs , ce n’étoit qu’une vafte caverne tortueufe !
ayant beaucoup de détours , & dont la forli*
étoit par conféquent très-difficile. Ce
rinthe étoit fitué prés de la ville de Gnoffe
Cependant Tournefort & Pococke n’ont rieû
trouvé de femblable dans les environs $ mais près
de Gortynia ils ont découvert une grotte lpaJ
cieufe , qu’ils ont prife pour le labyrinthe : cette
opinion eft dénuée de fondement. Quoi qu’il eu I
foit, le labyrinthe eft retracé fur les médailles
de Gnoffe. Malkeureufement, les repréfentalions’ I
des édifices fur les médailles, n’en reproduilentI
qu’une idée fi générale & fi fuperficielle, qu’il I
y a peu de ckofe à en conclure. Toutefois I
cette légère efquiffe indique des détours carrés I
& il en réfulte qu’en comparant celte indication I
avec les defcriptions du labyrinthe d’Egypte
le type d’un tel monument eft facile à retrouver I
en combinant fur une furface donnée , descon-l
duits parallèles, entre-coupés par des chambresI
& par des iffues toutes femblables , & toutes !
dégageant l’une dans l’autre dans des fens I
divers. -
Pline fait mention d’un troifième labyrinthe I
qui étoit dans l’île de Lemnos, & d’un quatrième
en Italie. Tous , dit-il , étoient voûtés en I
pierres polies...... Celui de Lemnos ( ajoute-t-il)I
n’avoit rien qui le diftinguât des précédens, fi 1
ce n’eft la beauté & la fingularité de cent cin-1
quante colonnes qui avoient été travaillées I
"au tour , par le moyen de pivots fi bien dif-1
pofés , que l’aêüon d’.un enfant fuffifoit pour I
faire, tourner les colonnes. Les arehiteûles de I
cet édifice furent Smillis, Rhoecus & Théodore,!
ce dernier natif de l ’île même de. Lemnos. Il I
eft à remarquer, çonlinue-tr-il, qu’il en l’ubfifte I
encore quelques veftiges, tandis qu’il ne refte plus I
rien de ceux de Crète 8c d’Italie.
A l’égard de cè dernier , nous nous difpen-1
ferons d’autant plus volontiers d’en rapporler la I
defcription, que Pline lui-même , après avoir dit j
qu’il avoit été bâti par Porfenna, roi d’Etrurie,
pour lui fervir de tombeau, n’a pas voulu prendre I
fur lui de le décrire. Ce qu’on en racontoit lui
parut fi déméfurément fabuleux, qu’il s’eft contenté
de rapporter les paroles de Varron. Ce J
récit étoit -extrait de ce que notre auteur a |
appelé les Fables étrufques.
Il paroît, comme on le voit, qu’il y a beaucoup
à rabattre fur le nombre de ces monumens, qui
n’exiftèrent pour la plupart que dans l'imagination
des peuples, ou dans des cavernes, des lou-
terrains ou des excavations auxquelles on s’etoit
p lu , comme encore de nos jours, à donner le
nom de labyrinthe. Ainfi, l'uivant Strabon, oU
voyoit près de Nauplia en Argolide , des cavernei
aanslcfquellesUyavoit un labyrinthe appelé cy-
"K^ploltatîon des carrières , en produlfantioùs
llll0 niultimde de chemins, d’ifl'ues & de ça-
: -L i r u i femblent foi-merdes falles, a pu donne!
v'a très-anciennement, à des dénominations qui
Aclèront le nom de labyrinthe , la èn firent auffi*
f noie! l’emploi, (’/eft ainfi qu’encore aujourd’hui,
mS ia ville d’Agrigeute en Sicile , on appelle
Xtitnntïiede dédale, des conduits foii terrainsqui
f nuèreui jadis une communication - fecrète ,
abouti Haut à la Citadelle de la v ille , & qui dut
i,re utile, en temps de guerre. .
On appelle labyrinthe,, dans l ’ornement, des
nelits carreaux alternatifs , formés de lignes croi-
!îées einbarrailéès, qu'on trouve fréquemment fur
je, vilfes grecs peints , & aulli fur les bords de dva-
i „cries des figures qui y fon l tracées.-Ces lignes ainfi
entrelacées , reffemblent aux carres des médailles
! de Gnoffe en Crète. Il ne faut pas confondre ces
entrelas avec ceux qu’on appelle méandres.
On donne auffi le nom de labyrinthe à des com-
partimens dè pavemeps formés par de plates-
Ibandes en marbre, & de couleurs différentes, 1
I qui £ par leur circonvolutions, imitent le plan
d’un labyrinthe. On en voit dans les pavés de plu-
I fieurs anciennes églifes. ' ;
On n’emploie plus guère aujourd’hui le nom
de labyrinthe que pour exprimer , dans l’ordre
moral, qu’un fujet eft impoffible à expliquer,
Iqu’une affaire eft très-compliquée , qu’un plan eft
difficile à fuivre. On dit alors,, par métaphore,
I c’eft un labyrinthe.
■ En fait d’art, on dit encore s
| Labyrinthe de carrière. C’eft la confulion
[qui s’établit entre les conduits nombreux d’une
[ carrière qui a été beaucoup exploitée. Il y en a
i ainfi dans le voifinage des grandes villes.
Labyrinthe de jardin. On donne ce nom à
une.••difpofition d’ allées , de plantations ou de
maffifs qu?on pratique dans de grands parcs , avec
des percés &. des îiïues tellement femblables, que
lorfqu’on y eft engagé, il eft poffible d y faire
beaucoup de chemin avant d’en trouver la fortie.
On a cité comme modèle de cette forte ^de badinage,
le labyrinthe pratiqué par Le Nôtre dans
les jardins de Verfailïes, lequel eft orné de fontaines.,;
dont chacune repréfente une des fables
d’Efope;_
Labyrinthe de pavé. Efpèce de compartiment
de pavé, formé de plates-bandes qui fe croifent
ou fe coupent èn fens divers, 81 ofirent, félon le
caprice qui a préfidé à ce deffin, une multitude
de tours, de retours & de détours.
LACER, arcliile&e qui vécut au temps de
Trajan.
Une belle ïûfcription gravée fur un petif édifice
faifant partie du célèbre pont antique dAl-r
cantara, qu’on, croit être la ISorba Cofarea de
P toléra é e , en Êfpagne , nous a confervé le nom
de Lacer3 comme arcliileêle de tout cet ouvrage ,
dédié à l’empereur Trajan.
Nous avons rapporté le texte de cette inferip-
tion à l’article Adcantrara. ( Voyez ce mot. )
Les deux vers :
Pontem perpetui manfurum in fecula mundi
Fecit divinâ nobilis arte Lacer,
indiquent bien Lacer comme archite&e de ce
monument. Mais comme d’autres vers donnent à
entendre qu’il auroit auffi été celui qui en auroit
! fait la dédicacé, on a voulu douter que les mots
fe c i t divinâ arte fignifiafl’ent Taâion précife qui
appartient à l’architeâe, parce qu’il arrive que
l e motfaire fe dit fou vent de celui qui fait exécuter,
comme de celui qui exécute. A cela-on
répond que, fi l’honneur de dédier un monument
étoit réfervé à des perfonnages d’un rang élevé,
l’hiftoire des arts prouve auffi que 1-art de 1 architecture
8l fa profeffibn ont fouvent été exercés
par des hommes tenant un rang diftingué dans le
monde, St que Lacer peut avoir été un de ces
hommes q u i, à d’importantes fonctions publiques,
auront fu réunir le g oû t, le talent 8t 1 exercice
de Parcbiteêture.
LACHE , adj. On dit un deffin lâché } ponr dire
un deffin dont les formes n’offrent aucune idée de
vigueur, dont le Irait eft foib le , dont l ’effet
eft mou. -
LACHE, adj. m. Ce mot s’emploie pour exprimer,
dans tout ouvrage d’a r t, une certaine négligence
qui quelquefois , comme dans une efquiffe ou une
ébauche, eft volontaire, 8t quelquefois provient
d’ignorance ou de pareffe.
LACONICON. Nom qu’on donnoit à une des
falles des bains chez les Anciens. ( Voyez Bains.)
LACRYMATOIRE. Nom qu’on a donné très-
improprement, à des vafes de terre, ou à de petites
bouteilles de verrë à long c o l , que l’on trouve
dans les tombeaux des Anciens. On ne fait quel
préjugé fit croire aux premiers antiquaires, que
ces petits vafes, de verre furtout, étoient deftinés à
recueillir les larmes des parens ou amis du mort
8t des pleureufes à gages. De-là le nom de lacry-
matoire. .. _ . V y- ■■
On eft convaincu., aujourd'hui que ces petits
vafes furent tout Amplement deftinés à renfermer
les liqueurs odorantes 8t précieufes qu’on
verfoit fur les-bûchers. Ces vafes , après avoir été
‘ ainfi employés, fe dépofoient dans les tombeaux
avec les morts, 81 cet. ufage eft un de ceux qui
peuvent expliquer Tufage fi général de renfermer
des vafes de toute efpèce dans les tombeaux.