
Ange *, fiquelques-unes offrent des variétés de décoration
ou de conftruélionaucune ne mérite uhe
place dans une hiftoire abrégée.
Le goût des coupoles fe répandit aufli dans le
refie de l’Europe. A-peu-près dans le même temps,
l’Angleterre & la France fe difputoient l’honneur
de rivaliier avec Rome , dans l’éreélion de fem-
bkibles édifices. Le chevaliér Wren bâtifloit Saint-
Paul à Londres, tandis que Jules-Hardouin Manfard
élcvoit la coupole des Invalides. Si le premier
approcha davantage de Saint-Pierre par l ’étendue
de foii diamètre , Je fécond fembla avoir voulu
s’en rapprocher par la magnificence de la décoration.
Ce que l’on remarque de particulier dans ces
deux édifices, trouvera fa place à l ’article fuivant,
qui traite de la conftruélion des coupoles. Mais ee
qu’on doit dire pour leur hiftoire , c’eft que le
chevalier Wren imagina le premier, d’ouvrir les
piliers maffifs du dôme, pour donner un partage
libre aux bas-côtés, & que Manfard perfectionna
la difpofirion des doubles voûtes de la coupole. 11
ouvrit le plafond de la plus baffe, il fit peindre
celui de fa plus haute, & l’éclaira par des croifées
percées dans un atrique, dont le jour pénétrant
entre les deux calottes , frappe fur la partie
concave de la voûte fupérieure, fans que les
Ipeélateurs, qui font en bas, puiffent appercevoir
ces croifées, & découvrir la caüfe qui donne un
fi grand éclat aux peintures dont la voûte eft
■ ornée.
Cette difpofition de voûtes vient d’être encore
perfectionnée au dernier dés grands ouvrage? qui
ont été produits , & probablement le feront à
l’avenir en ce genre ; je parle de la coupole
de la nouvelle églifè de Sainte - Genevieve , eon-
faarée, fous le titre de Panthéon français , à la
fépulture des grands Hommes. Si cet ouvrage
n’offre rien de nouveau dans fa conception , ce
qui étoit fort difficile , puifqu’il s’eft fait après
‘ tant d’autres, il préfente au moins l ’avantage d’une
conftruélion -toute en pierres de taille dans les
voûtes de fes trois coupoles, & cette particularité
feule lui feroit tenir un rang distingué dans L’hiftoire
des hautes entreprifes & des grands efforts de
la conftruélion. .( Voyrc^, à l’article fuivant, les détails'
de ce monument.} .
J’ai dit qu’il feroit probablement le dernier de
ce genre. Je penfe en effet que beaucoup de raifons
concourent à dégoûter déformais d’une efpèce d’en--
treprife , pour laquelle il faut épuifer des fommes
immenfês & confacrer des fièeLes. Cette réflexion
me conduit naturellement à la partie critique, &
aux obfes varions de goût par lefquelles j’ai réfblu
de terminer cet article.
A juger, de l’invention & de l’emploi des coupoles
modernes ou dômes , oa.r les dépenfes prodigieufes
qu’elles ont produites-, par les efforts de tout genre
qu’elles ©Ht néceffités, par l ’émulation qui a porté
dans ce genre tous les peuples de l’Europe à fe difputer
le prix de la hardieffe, de l’élévation, de là
magnificence , par l’admiration & la critique qui fe
font tour-à-tour exercées fur ce fujet ; il leiïibleroit
permis de croire que cette découverte a été comme
le maximum dès efforts de l’architeélure,qu’elle avoit
manqué à la gloire dès anciens peuples , & qu’enfia
la coupole q u i.réunirait les diverfes beautés que fe
partagent les plus beaux ouvrages connus en ce
genre, deviendrait le nec plus ultra du favoir & de
la beauté de l’art.
A entendre d’une autre part la critique s’ exercer
fur ce mode ambitieux dé conftruélion, & développer
tous les vices qui en font réfultés dans l ’architeélure
moderne; on feroit tenté de croire que
cette prétendue conquête auroit plutôt épuifé les
reffources de l ’art qu’agrandi fon domaine.
En effet, vous dit-on, qu’a gagné l’architeélure à
cette agrégation de formes, de maffes & de conf-
truélions fi difpendieufement réunies ? Les anciens ne
faifoient-ils point de vaftes faites,des nefs de bafilique,
prodigieufes par leur élévation & leur étendue ? Ne
faifoient-ils pas aufli des coupoles d’une dimenfion
fupérieure à ce que les coupoles modernes peuvent
produire? Que nous eft-il revenu de cette copulation
des bafiliques avec les coupoles ? rien, finon d’avoir
des bafiliques moins bien ornées & des coupoles
moins folides. \
Et puis, que fignifie cette impofition d’un édifice
fur un autre? A quoi bon ce temple circulaire,
placé fur un temple carré, dont la marte
extérieure ne femble faite que pour la décoration
des environs d’ une v ille, & dont l’ordonnance
intérieure femble aufli ne plus appartenir qu’aux
régions aériennes ?
Ces objections, répond-on, ne font que fpécieufes.
Si les anciens n’ont point réuni les deux genres de
conftruélion , qu’ils employoient féparément dans
leurs édifices, c’eft que jamais les ufages.de leurs
temples ne durent ni ne purent leur en faire naître
l ’idée. Quant à cette efpèce de fuperfétation dans
laquelle on croit voir un pléonafme d£ motif ;
pourquoi ne feroit-on pas la même difficulté à la
répétition des étages, à tout ce qui forme couronnement?
Lorfque la difpofition de deux nefs qui fe
traverfent femble inviter' à décorer '& à couvrir
plus majeftueufement le point de leur rencontre ;
lorfque la portabilité de tirer d’en haut une mafle.de
lumière impofante & magique, offre l’occafion de
produire les plus grands effets qu’ait enfantés l’at-
chiteélure ; lorfque l’oe il, ami des formes pyramidales,
lorfque l’imagination , non moins amie de
tout ce qui porte le caractère de grandeur & de
hardiefle, femble délirer ,'a u faîte de nos édifices
facrés , un couronnement dont l’ élévation aille pour
ainfi dire chercher la divinité qu’on y implore ;
que peuvent fignifier cés raifonnemèir> timides &
rétrécis? Il eft permis d’élever au-deffus.de toute
bafe tout ce qu’elle eft capable de fupporter, &
fauf les limites de la portabilité, c’eft au fentiment
plus qu’à, la raifon, c’eft au goût plus qu’au calcul*
W i l appartient de fixer à cet'egard. les bornes que
l ’amfte eft dans le cas ds fe prefenre. • . • j
On ne f.turoit nier que toutes ces confidératicns
ne puiffent avoir de la valeur, fur-tcut auprès de
ceux qui jugent des effets de l’areh.tcaure plus par
les fens' que par le fens moral, & qui cherchent la
grandeur dans l’excès des dimenftons plus que dans
la jufteffe des proportions. Cependant lorlqu on
veut fe rendre compte impartialement des cailles
iflui ont propagé l ’ ufage des e o u p o lt son ob.erve
[qu’elles repolent fur deux préjuges qui pourraient
bien aufli fe difliper & faire tomber avec eux les
difpendieufes décorations. a
Le premieride ces préjugés remonte au goût, qui
de l’architeélure gothique eft parte dans les ouvrages
de l ’architeélure régénérée par les temps modernes.
Lorfque les arcs-eurent perdu le fecret du vrai beau &
; les routes qui mènent à la vraie grandeur, ils irnagi-
tuèrent le merveilleux & le gigantefque. On crut faire
plus beau en faifant plus riche ; on crut faire
"plus grand en faifant plus haut. C ’eft alors qu’on
vit tous les temples fe difputer dans leurs portails
dans leurs tours, dans leurs combles, dans leurs
le goût de la faine antiquité vint purger l’archi-
teélure de tous ces préjuges qui faifoient gronder
la raifon , le feul dont, elle ne put triompher fut
celui qui avoit habitué les yeux a ce prodigieux
' exhauflément de conftruélion dans les temples. L’édifice
qui eût réuni tous les genres, de mérite en
architeélure eût, par la force de l’habitude , paiié
■ pour l ’oeuvre timide d’un art dégénéré, s il n’eut
pu foutenir le parallèle avec ces grandes nefs go-
■ thiques, que l’ignorance regarde encore aujourd’hui
‘'comme des monumèris de hardieffe, tandis que le
genre même de leurs points d’appui décèle leur foi-
r blefle ; il fallut donc continuer de faire très-élevé,
‘ afin de paroî.retrès-hardi.
* Le ftyle de l’archireéture antique ne fe prêtoit pas
fcà eçs prétendus tours'de force qui avoient fi longtemps
amufé des yeux igtiorans : les ordonnances
* de colonnes fur-tout contrarioient trop les difpofitions
favorables à ces jeux de la fantame. En
effet, dès qu’on emploie des colonnes , il faut s’en
tenir aux dimenfions que preferivent leurs proportions.
Des voûtes étendues ne peuvent prefque
■ point, avoir lieu fur les frêles points-d’appui que pré-
fentent des colonnes bien proportionnées, ou, pour
le faire, il faudrait fecrifier la largeur des nefs à
leur hauteur. On adopta donc de préférence le
goût des arcades ou des portiques qui prefentoient,
avec les moyens d’une décoration régulière , &
avec toutes les parties caraétériftiqaes de la bonne
architeélure , les reffources de la foiidité requife
pour porter- à une très-grande élévation les plus
amoitieaies conftruélions. On put dès lors rivalifer
en hauteur, en grandeur avec les plus fameufes
églifes gothiques ; on put même les furpaffer en
foiidité, 6ç fans le fémurs de ces mïfrrables étais qui
areboutoient les trop fragiles élévations des Goths,
perter auffi loin qu’eux le mérite de la grandeur.
Cependant les yeux s’étoient habitués à voir s’élancer
dans les airs ces flèches, ces aiguilles, ces
tours , ces découpures, dont toute la beauté confif-
toit à être apperçues de fort loin. L’idée des coupoles
remplaçoit bien avantageufement ees’futiles mefqui-
neries; elle fut donc &. dut être adoptée à l’envi par
toutes les villes jalôufes d’annoncer au loin la gloire
de leurs temples. On peut affirmer que cette
manie ; pour l'élévation des coupoles, eft un refte
de l’héritage des Goths.
Une pieufe pratique , comme on Fa déjà d it , fut
l’originé du fécond préjuge, qui donna naiflance
aux coupoles. L ’emploi que les premiers chrétiens
firent des Bafiliques pour y célébrer publiquement
leurs inyftères , put avoir également concouru à la
forme de croixy( vqyq; Ba s il iq u e ; ) mais il paraît
.confiant que l’gn s’étadioit, dans ces temps , à ré^
péter par-tout le figne d’une religion triomphante,
& que , foit hafard dans l ’origine, foit intention
dans la fuite, je plan en forme de croix devint ca-
raélériftique des temples du chriftianifme , fans
doute dans la nécefîité de réunir à un point commun
quatre nefs -, ce fut une heureufe idée que d’y
élever une coupole & de tirer la plus belle décoration
d’ un édifice de ce qui en faifoit le principal
vice ; mais aufli l’expérience amène les réflexions,
& voici celles que l’ufage fi répété des coupoles a
dû produire.
Eft-ce bien réellement la peine de faire tant de
frais pour épargner à la difpofition intérieure des
temples un ^défaut qu’on peut faire difparoître
bien plus fûrement, en revenant à une forme
plus fimple ? Cette forme de croix eft- elle tellement
preferite qu’on ne puiffe y renoncer? Une
feule d’exemples ne prouve-t-elle pas que l’architeélure
eft parfaitement libre dans le choix desformes
convenables aux temples chrétiens? Pour-
. quoi ne reviendroit-on pas à l ’ unité? Que préfente
eri effet cette difpofition en croix, finon deux
temples inferits dans un feul ? Quelle dépenfè
perdue, pour produire moins d’effet, & fi l’on
portoit cette dépenfe a l ’agrandiffement ou à l’ent-
belliffement d'une des deux parties du temple, combien,
fous tous les rapports ,n’y gagneroit-t-on pas-!
\ Qu’on juge, en outre, de toute l'a dépenfe de
conftruélion perdue , pour ménager les points
d’appui dont on a befoin , dans l’élévation cte
fem b labiés- martes; qu’on perrfe encore à tout ce
qui fe fait en pure perte , pour dérober aux
yeux le fecret de ces-points d’appui, & l’on verra
là une des principales- raifons du,petit nombre de
monumens , chez les modernes , en comparaifon
des rmciëns. Quand on examine de près tout ce
qui fe trouve employé , d’une manière invifible
• dans les monumens. en qusftion , on fe perfuade
difficilement qu’on ait pu fe réfoudrë à frire tant
de facrifiees à deux préjugés , que le bon goût
& le- bon ■ fens: pou-yoient fi facilement renver-ferv