
La coupole du Panthéon de Rome a environ
16 pieds d’épaiffeur à l’endroit oh elle fe détache
du mur d’enceinte qui la fupporte -, elle a quatre
pieds dix pouces, au-deflus du dernier gradin, Si
quatre pieds quatre pouces, joignant la plateforme
qui règne autour de l ’oeil.
L ’enceinte circulaire qui foutient cette coupole
a dix-neuf pieds d’épaifléur, mais elle eft évidée
par de grandes niches & renfoncement carrés,
q u i , fans diminuer beaucoup la réfiftance de ce
mur, en rédûiient le cube au tiers"; de façon que,
pour la matière mife en oeuvre, cette enceinte n’équivaut
qu’à un mur de fix pieds d’épaiffeur. La
forme & la difpofition des évidemens pratiqués
dans le mur d’enceinte , font combinées avec
beaucoup d’art ; de manière qu’il en réfulte la
plus grande force, avec le moins de matière
polîîble. Malgré que ce mur d’enceinte ne fbit
conftruit qu’en blocage avec des rèvêtemens de
briques , cette conflru&ion a été faite avec tant
de' précaution & d’intelligence que r quoi qu’en
petites pierres, elle équivaut, pour ia folidité ,
à. une conÆru&ion en pierres de taille. Pour éviter
îes taffemens confidérables & inégaux pouvant
réfulter d’une conftru&ion de ce genre, q u i ,
outre fon propre poids, avoit à foutenir une voûte
ammenfe, i®. on a formé de grands arcade décharge
à double rang de briques, de chacun 22
pouces de hauteur ; 2®. les revêtemens- font formés
de briques triangulaires pofées de plat; de manière
que la pointe entre dans le mgffif du mûr & que
le grand côté forme parement ; ce grand côté a
environ dix pouces & demi. 3^. Pour diminuer
l ’effet du taffemeiit & le rendre plus uniforme, de
quatre pieds en quatre pieds, on a formé un ar-
safement général, fur lequel font pofées à plat de
grandes briques carrées , appelées par les Italiens :
titvoloni , dont chaque côté eft de 22 pouces r Sc
ïépaiffeur de-deux.
Les antiquaires ne. font pas d’accord fur l’époque
» laquelle ce monument a été commenté; les uns
prétendent que e’eft du temps de la république ,-
d ’autres en attribuent la .conftruélion à Agrippa ,
gendre d’Augufte. Deux raifons femhdent le réunir
en faveur de cette dernière opinion : ia première ,'c’èft
que cet.édifice eft conftruit en briques cuites-, &
les romains n’ont commencé à_en faire ufage que
du temps d’Augufte. Voye^ l ’artide brique- La fécondé
raifon eft le fxlence que Vitruve a gardé
Sur un édifice de cette importance. Il eft plus que
probable que, fi: cet édifice eût exifté de fon
temps , il n’auroit pas manqué d’en parler dans
fon ouvrage fur l’archite&ure, fer-tout à l ’article
des temples ronds. Il eft à préfumer que cet
édifice ne fut bâti qu’âpres que Vitruve eut
pufcl.é fon ouvrage , & peut-être après fa mort.
La difficulté d’exécuter une coupole, d’ûne auffi I
prodigieufe grandeur, avec des ceintres ordinaires, j
a fait croire que , lorfque le mur d’ënceinte fut
j on ayoit rempli l’intérieur de terre, pour. I
former le galbe de la coupole & que , poil y. engager
le peuple à ôter ces- terres, on y avoit femé
de l’argent qui fut abandonné à-.ceux qui les en*
levèrent. L ’opinion vulgaire, à Rome, eft que le
mont Citorio' a tété formé parles terres qu'i fortirent
de l’intérieur du Panthéon, après "que la coupole fut
achevée. Ceux qui ont accrédité cette fable, n’ont
pas fait attention que l’ufege des temples circulaire»
étoit connu fort long-temps avant la conftruélion du.
Panthéon, & qu’il date des premiers fiècles de fe
république. Tels font les temples de R o mu lu s & de
Remus, deVenus, Vefta & autres. Ainfi lorfqu’on
commença le Panthéon, environ l ’an 14 de l’ère
chrétienne, il exiftoit déjà plufieurs temples ronds
voûtés en coupole. Le moyen dont on parie a'pi*
être mis en ufage pour la première coupole qui.
fut faite; mais il n’eft- pas probable que cet ufage
fe foit perpétué longrtemps &. qu’il exiftât encore
au fiecie d’Augtifte, oit Taré de bâtir étoit déjà,
porté à .fa perfection. Les voûtes en coupole ont
un fi grand avantage fur les autres voûtes qu’elles
pourroient même s’exécuter fans ceintre ; parce
que, comme nous l’avons déjà dit r chaque rang;
forme une couronne qui a .la propriété de fe
foutenir- d’elle-même , fitêt- qu’elle eft achevée.
Il ne faudroit à la rigueur,, ainfi que l ’a obièrvé
Leon - Baptifte Alberti, que quelques pièces de
bois taillées en courbe, pour foutenir 'les- parties de
chaque rang;, jufqu'à ce qu’il fôit clos ; ce rang,
achevé, on retaille rois ces- courbes pour fervir au
rang fupérieur, ainfi de fuite.
Cependant, je fuis très-perfuadé que pour exécuter
la grande coupole du Panthéon , on a fait
un ceintre, en charpente légère 7 qui fer voit en
même temps d’échafaud, & que fur ce ceintre on
avoit formé en relief les compartiment des-caiffons 3
ainfi q.u’on l’a. pratiqué pour la grande voûte de la
nef de Saint-Pierre de Rome.-Ce qui me fait- adopter
cette o p in io n c ’eft que j’ai vu aux thermes de
Caracalla Si dans plufieurs- autres voûtes antiques,
dont le dernier enduit étoit tombé, les marques des
planches, qui formoient le galbe .de ces-ceintres.
Dans pr-efque tous les anciens thermes dé Rome,
i l y avoit une ou plufieurs pièces circulaires voûtées
en coupole. La plus grande eft celle des thermes
de Caracalla,. dont le diamètre eft de 105 pieds.
Aux thermes de Titus., il y en avoit deux, de 8©
pieds de diamètre. Celle des thermes de Gonftantin
étoit de 72. pieds. Il y en- avoit trois aux thermes
de Dioclétien, dont deux exiftent encore : l’une a
'69 piecis- cinq pouces & l’autre 59 pieds un-
quart.- A en juger par- celles qui exiftent en entier
, & celles- dont on ne voit que des fragmens y
toutes ces voûtes étoient ouvertes par le haut,
comme-le Panthéon, & conftruites en pierres ponces
ou laves fpongieufes r tirées des environs du lac
d’Albane, qu’on peut regarder comme le cratère
d’un ancien volcan.-
Dans le golfe de Pouzzol, au port de Baye y
çn voit le» ruines de plufieurs édifices, dont detue~
eue j’ai mefurés , font circulaires; à l'intérieur &
voûtés en coupole. Le plus "grand, dont U voûte
& les murs exiftent et! grande partie, a quatre-
vingt-onze pieds huit pouces de diamètre. L autre,
dont il n’exifle que les murs & les naiflances de la
voûte, a quatre-vingt-un pieds huit pouces, pes
voûtes étoient conftruites comme celtes des édifices
antiques de Rome , en maçonnerie de blocage
d’écume de volcan & de pierres ponces.
Quant, aux temples antiques conftruits avant le
Cède d’Àugufte, comme ceux de Romulus, dé
Quirinus, de Vénus , près la porté Salare, leur diamètre
eft d’environ trente-ftx pieds; celui du temple
du Soleil ou de Vefta, près du Tibre, eft de
vingt-deux pieds, STcelilicle lâ Sibylle à T iv o li, eft
aulîi de vingt-deux pieds. Ce dernier eft conftruit
en maçonnerie de petites pierres irrégulières ap-
pelées par les anciens, opus incertum.
On a donnéle nom de coupole, non-feülement
aux voûtes hémifphériques qui couronnoient les
édifices ronds, mais encore à ceux, dont le plan
étoit un polygone régulier. Tel eft dans 1 antique *
le temple de Aiinerva medicu, vulgairement appelé
Gallucio, dont le plan eft un décagone inf-
crit dans un cercle de foixante-féize pieds huit pouces
de diamètre. La coupole de Cet édifice qui exifte
encore en partie, eft conftruite en briques & en
pierres ponces. Les parties en briques forment des
chaînes au droit des angles rentrans. Il paroît que
cette voûte n’étoit pas ouverte au fomipnet.
Il faut obferver que les voûtes de cètte efpèce,
que nous appelons voûtes en arc de cloître, ne prennent
le nom de coupole, que lorfqu’elles ont un
grand diamètre, & fur-tout lorfqu’elles font apparentes
à l’extérieur;, comme la coupole de Sainte*
Marie-des-Fleurs, à Flqrence.
La fcience des anciens ne fe bornoit pas à faire
des coupoles rondes &-~à pans , ils en ont fait encore
à pendentifs. Ainfi cette invention que plufieurs
auteurs'ont attribuée aux architectes .mon
fdernes, étoit connue de ceux de l’antiquité. On
en trouve la preuve dans une des falles de l’enceinte
' des thermes de Caracalla, dont le plan eft ô&ogone,
on voit encore les huit pendentifs qui racket oient
la voûte hémifphéfique qui couvroit cette faite
La faillie de ces pendentifs, qui font dans les angles
, eft de deux pieds fix pouces fix lignes.
A Catane en Sicile, auprès du Mont Saintes-
Sophie , on trouve un refte de bain antique où
eft une voûte fphérique couvrant un veftibulè, dont
le plan eft carré. Cette voûte eft rachetée par quatre
pendentifs dans les angles. Quoique cette voûte
n ait que fept pieds de diamètre,- elle ne prouve
pas moins que les pendentifs ne font pas une inven-
jtion moderne, & qu’ils étoient connus long-temps
avant Anthémiusde Traites, à qui on a fait l'honneur
de cette découverte.
Après les coupoles antiques (1 ), une des plus célèbres
& des plus anciennes, eft celle cîe Sainte*
Sophie, à Conftatitinople, bâtie par TEmpereui?
Juftinien. l es fondemens de cet édifice furent jetés
en 532, & la dédicace s’en fit en 537.
L’hiftorien Frocope ,. qui vivoit lorfqu’on a construit
cet édifice , dit que Juftinien fit venir de toutes
parts les plusexceliens ouvriers de fon fiècle. Anthé-
mius de Tralles , qui paffoit pour l ’archite&e le plus
habile de fon temps, fut chargé d’en faire les defens ÿ
& de conduire l’ouvrage avec Ifidore de Milet.
L ’intérieur de cet édifice forme une croix grec-»
que, terminée de deux côtés par Une grande niche,
& des deux autres, par des renfoncémens carrés^
Dans ces derniers, font pratiqués deux étages de
tribunes. Le centre où abeutiffent ces quatre parties,
eft un carré parfait, fur lequel eft élevée la
coupole, dont le diamètre eft d’environ cent cinq
pieds. Cette coupole eft formée par une calotte élevée
fur quatre pendentifs placés dans les angles du
carré, & qui rachètent la bafe circulai'13 ùe la calotte.
Les pendentifs font féparés par une efpèce de '
Gornichë qui porte une galerie circulaire , le bas
de la calotte eft perce d’un rang de petites fenêtres,
ornées de colonnes' à l’extérieur. La- courbe du
ceintre intérieur de cette Calotte ne s’accorde pas
avec celui des pendentifs, comme cela devfoir être *
fi la voûte 'étoit régulière; au lieu d’être formée*
par un arc de cercle, c’eft une courbe qui refe
femble à une demi-ellipfe. La hauteur du ceintre
eft de trente-huit pieds, c'eft-à dire , d’un peu plus
du tiers du diamètre. Le galbé extérieur de cette*
Coupole eft divifé par des côtes faillântes & arrondies
, couvertes e» plomb. Le milieu eft terminé
par un amortiffement en forme de baiuftre, lur-
iïi-onté d’ un croiffant.
Cette coupole n’eft plus celle qui. fut confirme©
par Anthémius Sc Ifidore. La leur étoit moins
élevée : elle fut détruite en partie, vingt-un ans*
après avoir été achevée, par un tremblement
de terre. Juftinien qui vivoit encore , en
confia le rétabli (Te ment à un fécond Ifidore, neveu
de celui qui avoir veillé à la co.iftruélion de
la première avec Anthémius. Ce nouvel architeéle
donna vingt pieds de plus à- l’élévation du ceintre
de là coupole qu’il fit conftru-ire , Si q-ué nous avons
ci-dèvant détaillée ; c’eft celle qui exifte encore#
Il employa pour fa conitruélion- dès'briques blanches
extrêmement légères, dont-cinq ne* pèfent pas
plus qu’une brique ordinaire..- On dit que Juftinien;
fit fabriquer ces briques' dans l’fte de Rhodes.
Il paroît, par la defeription que Proçope -a faite*
de la première Coupole, qu’elle r.edifféroit pas beaucoup
de celle* qui exifte actuellement- ; voici comment
il s’explique^
ec- Le milieu de l’édifice eft formé par quatre
» gros piliers , deux du côté du midi-, deux dit
» côte du nord , difpofés fymétriqnement, Si k
»■ des diftances égales. Entre les piliers qui for-
» mçnt face» latérales l 1)- Coupole de Sainte-Sophie, à Conftantinople* du midi du nord, il