
oans la compofition de certaines montagnes des
combinaisons de rochers & des accidens de forme,
qui peuvent fans invrailemblance fe prêter à de
tels caprices de l’art.
Le projet de Dinocrates de convertir une montagne
en ftatue, n’eft pas le feul dont l’hiftoire nous
ait tranfmis le fouvenir. Si l’on en croit Diodore de
S icile, un femblabie ouvrage auroit reçu fon exécution.
Semiramis, dit-il, fit réduire en ftatue , qui
étoit fon effigie, la montagne de Bagiftane dans la
Mcdie. La ftatue-montagne avoit dix-fept ftades
de haut, & étoit entourée de cent autres lia tues
du même genre.
La Chine auffi à en croire les voyageurs ■, s’eft
amufée à donner à des montagnes des configurations
d hommes ou d’animaux.
Pour revenir à Dinocrates, il paroît que fon talent
fut employé par Alexandre plus utilement qu’à'
découper des montagnes. Ce prince voulut donner
fon nom a une ville , & voulut que la magnificence-
de la ville répondît a la célébrité du norm 11 fonda
Alexandrie. Jamais fituation plus belle ne fut
choifie pour l’éreéfion d’une grande cité. D ’ un côté
les campagnes les plus fertiles de l’Egypte, avec
la navigation intérieure du Nil ; de l’autre un port
naturel, fpacieux & sûr dans la Méditerranée , tout
étoit réuni pour en faire le marché de T Afrique , de
l’Afie & de l’Europe.
Dinocrates fut chargé de la fondation de cette
v ille , qui fut environnée de murailles d’une grande
étendue, & fortifiée par un grand nombre de tours.
On y voyou des aqueducs, des fontaines , des
canaux , & un nombre prodigieux de maifons
particulières , de places , d’édifices «publics , de
théâtres : les temples & les palais y étoient fi
vaftes , qu’ils occupoient près d’un tiers de la ville,
oc leur magnificence fut telle qu’elle rendit
Alexandrie comparable aux villes les plus fa meules.
On croit que Dinocrates fut celui qui coriftruifit
le temple de Diane à Ephèfe , & qu’il éleva à
Alexandrie un temple en l’honneur d’Arfinoé,
foeur & époufe de PtoLémée Phitadelphe. Sa
voûte intérieure devoit être incrüfcée en • pierre
d’aimant, afin que la ftatue de la princeffe qui
devoit être en fe r , fe fou tînt en l’ air. Ce projet
mourut auffi dans la tête de fon auteur ; & ne
fut pas mis à exécution. L ’h-ftoire lui attribue
encore j ’érection du grand catafalque d’Epheftion,
qui coûta douze mille talens
DIOGNÈTES. C’efl: encore Yitruve ( liv. io,
ch. 2.2,. ) qui va nous donner i’Iiiftoire de cet hab
i l e architecte & ingénieur, Rhodien de miiffimce,
qui confacra fes talens & fon génie à la défenfe
de fa patrie, & en obtint tour à tour la recon-
noiffance & l’ingratitude.
X-.2 république de Rhodes, félon le récit de no-
tré hiftoricn ajchkeéle, faifoit à Diognètcs une pen-
• non annuelle, en confidération de fon mérite &
dé fes fervices. Un autre architefte nommé Cal-
lias, venu d’Arado à Rhodes , propofa au peuple
un modèle oh étoit un rempart fur lequel il pja.
çoit une machine tournante qui prenoit & enle-
voit une hélépole placée près de la muraille & fi
tranfportoit en dedans du rempart. Les Rhodien
enchantés de l’effet & du jeu de Cette naachi.se
en modèle, ôtèrent à Diognètcs la penfion dent
il jouiffoit pour la donner à Calliàs.
Quelque temps après , le roi Demetrius , appelé
Poliocerte , ou preneur de villes , déclara la guerre
aux Rhodiens. Ce roi avoit, dans fon armée ,
excellent architecte Athénien , nommé Epimachus
qui lui bâtit une helépole avec une dépenfe & un
travail tout-à-fait extraordinaires. Elle avoit cent
vingt-cinq pieds de haut & foixante de large ; elle
etoit couverte de"tliTusde poil & de cuir à l'épreuve
de la plus forte baïifte. Les Rhodiens fommèrent
Callias de mettre fa machine em-oe livre , d’enlever
l'hélépole & de la tranfporter au-delà du rempart,
comme il avoit promis de le faire. Mais le faifeu r
de projets n’eut d’autre reffource que de s’exeuftj
fur la différence du modèle à l’exécution , & fur
l ’impoffibilité. de réalifer en grand ce que fa machine
promettoit en petit.
Les Rhod iens comprirent qu’ils avoient eu tort
d’offenfer Diognètcs, pour se livrer à un théoricien,
dont les Spéculations ne les tireroient pas d’affaire.
Cependant l’ennemi faifoit des.progrès , les machines
avançoient, & tout leur préfageoit la ruine -
de leur ville. La peur les força de recourir à l’homme
qu’ils avoient éloigné. Diognètcs les refufa d’abord;
mais Iorfqu’il vit les inftances des pr.êtresJ'êt des en-
_ fans des plus nobles de la ville , il promit de fe
rendre, à condition que Y hélépole feroit, à lui, s’il
pou voit la prendre , ce qui lui fut accordé.
Alors Diognètcs fit percer le mur de la ville*
vis-à-vis le lieu ou la machine devoit s’avancer;
il ordonna à chacun d’apporter en cet endroit ce
qu’il pourroit d’eau , de fumier & de boue, pour
J les faire couler par des canaux , au travers de cet«
ouverture , & les répandre au-devant du mur;«e
qui fut exécuté, la nuit. Le lendemain , iorfque ]’«n
voulut faire avancer Y hélépole , avant qu’elle fut
approchée de la muraille , elle s’enfonça dmsia
terre , de manière qu’ il fut impoffible de ia faire ni
avancer ni reculer. Demetrius , fruftré dans
attente par l ’intelligence de Diognètcs , leva le fiège
& remonta fur fes vaifïèaux.
Les Rhodiens délivrés. s’ afTemblèrent pour remercier
leur libérateur, & lui accordèrent tous lis
privilèges & tous les honneurs par lefquels ils peu*
voient lui témoigner leur reconnoiilance.
Diognètcs fit entrer Yhélépole dans la ville & f'1
mit'dans la place publique avec cette infcriptiooJ
Diognètcs a fa it ce préfènt au peuple de U dcfonÿk
de fes ennemis.
mmmm
n iOPTRIQVE , f. f. Science qui traite de la -ré-
f^ion de ia lumière, & dont la xonnoiffance eft
néceffaire aux architeéles, peintres & décorateurs.
| r)IOTi SALVI. Architeéle du douzième fiècle.
Dans le petit nombre des grands^hommes auxquels
les arts & l’archne&ure ont dû leur rétabhf-
hfement, Dioti Salvi doit trouver une place recom-
m'andable. Et cependant i’hiftoire nous a laiflé ignorer
le lieu de fa naiffance, & cependant Vafari, cet
inveftigateur desartiftes des premiers fiècles,ne
[profère point fp'n nom. Tirabofcffi répare cet oubli
l Je rhifforien des arts , & fait une mention expreffe
de Dioti Salvi ,. qu’il fuppofe natif de^Pife , mais
que fon nom indique affez clairement être italien.
L’auteur des lettres Siennoifes en parle ainfi : Dioti
: Suivi, que je crois, par fimplefùppofition , •originaire
• de Sienne, de la noble famille Pttroni, fleurij}oit à la
moitié du douzième fiècle , époque où il bâtit le
■ Biipùjlke de Pife ,* monument qui, quoi quen dife
I un écrivain vivant, peut être regardé comme un des
| plus beaux & des mieux entendus de ce fiècle 6* des
deux fuivans.
Alélfandro da Morrona a cherché encore dans fa
Pifd illujlrata, à venger de l’oubli, le nom & la
mémoire de Dioti Salvi, & c’eft de lui ‘que nous
tirons les notions relatives à l’édifice fur lequel
repofe depuis fix fiècles la gloire de notre architeâe.
Pife avoit déjà vu s’élever dans le onzième fiècle,
par les foins de Bufchetto de Dtilichium ( voyeç ce
nom), la fuperbe cathédrale , dont la grandeur &
le plan rappellent les bafiliques de l’antiquité. Cet
édifice,, comme on l’a déjà remarqué, donna à toute
l’Italie une impulfion générale vers le goût , & le
|bon goût de l’architeélure. Ce fu t en face de ce
| temple que Dioti Salvi fut chargé d’en élever
1 un autre , fous le nom & dans la -forme de Baptif-
[tère; il fut commencé l ’an 115a on 115j , félonie
ftyle Pifan. C’eft ce que prouve l’infcription qu’on
' lit fur le premier pilier à main droite en entrant, &
. dont les çaraélè res font gothiques; elle porte:
MCLIII menfe Aug. fundata fuit heee ecclefia.
On la retrouve répétée fur le pilier correfpondant,
•n caractères encore moins bien formés.
Sur L’autre face du me.me
pilier fe trouve gravé
le nom de l’architecte :
Dioti Salvi magifler hujus operis.
L’hiftoire de Pife ( Brev. hift. Pif. ann. 1 i.t#-.
col. 171. ) nous apprend que le premier, ôt même
le fécond ordre de l’extérieur., étoient déjà élevés,
lorfque l’ouvrage fut fufpendu & arrêté faute d’argent.
Mais l’ambition des Pifans, & leur zèle à embellir
leur ville , leur firent bientôt trouver des
rcffouroes pour l’achèvement du monument en
^ueftion. Une contribution volontaire d’u» denier
ou d’un fol d’o r , équivalant à un florin par chaque
famille , fournit une fomme fu fia fan te à l'achèvement
du temple. Il fe trouva alors 3 4 mille familles
qui fe fournirent à la contribution > en comprenant,
fans doute , les habitans des campagnes, ce
qui montre à quel point s’élevoit alors la population
de Pife.
Nous avons déjà donné une defcription.de ce
remarquable édifice', au mot Baptistère. ( Voyc^
cet article.) Nous.nous contenterons d’ ajouter ici
les mefures exactes qu’en a données Alejfandro da
Morrona.
Voici fes dimenfions extérieures :
Diamètre de l’édifice à fon
foubaffement, ( braffes. * ) . . . . . 7^
Circonférence totale. . . . . . . 2.3® T
Diamètre de l’édifice
fans le foubaffement 62
Circonférence du mur extérieur.
/ , ............................ 194 y
Superficie de l’ aire totale de
l’édifice................................................. 453^ *
Hauteur du monument fans
compter le couronnement............... 94
Voici les dimenfions de l’intérieur :
Diamètre. . . . . . . . . . . . . 521
Circonférence ................................ f93
Superficie . . . . . . .................. 2124
Je terminerai cet article , en remarquant que le
monument de Dioti Salvi eft , avec le dôme de
Pife, le Campo Santo de la même v ille , l’églife
de Santa Maria del Eiore à Florence, un de ces
édifices que i ’hiftoire moderne de l’ architeélu re
ne fauroit trop étudier , pour y obferver le paf-
fage du goût gothique au bon goût. Auffi le nom
de Dioti Salviàon il figurer avec ceux de Bufchetto, -
d’Arnolpho di Lapo:, Jean de Pife , c’eft;-à-dire ,
des reftdurateurs de i’architeâure.
DIPTÈRE. Qui a deux ailes. C’étoit le nom
d’une efpèce de temple chez les Grecs &. les Romains.
En général, les temples des anciens prirent
leurs divërfes dénominations , fi l’on excepte le
temple à A n tis , in Antis, & l’ypathre , du mot
fiitlos, colonne, ou^ du mot pteron , aile.
Ceux des temples qui n’ont pas de colonnad«
environnantes , n’ayant par conféquent point ca
qu’on appel toit des ailes, fe défignent par le mot
llulos ; tels font le proftyle , laniphiproftyle. Le mot
pteron eft le dérivé de la dénomination des autres.
(*) La brafle Tofcané eft de 21 pouces,
E e a.
A