
» Quand on fera arrivé au-deflus du fol exté-
* rieur, on établira le mafîif qui doit fervir de
» foubaflement aux colonnes , de' manière qu’il
* ait en épaiffeur Ia^moitié en fus du diamètre de
* la colonne. De cette façon la partie inférieure,
» appelée par les Grecs J ié r é o b a te à caufe du
» poids qu elle porte, fera plus forte que la fupé-
» rieure , & offrira une aillette plus que fuffifante
» aux bafes des colonnes.
» On obfervera la même précaution pour les
* murs du temple. Les intervalles entre les maf-
» fils des fondations feront voûtés ou remplis
» de terre maflivée avec la machine à battre les
» pieux.
» Mais fi, après avoir creufé à une certaine pro-
* fondeur, on ne trou voit, au lieu de fond folide,
» que des terres rapportées ou marécageufes, alors,
» après avoir vidé la terre, on plantera dans le
» fond des pieux de bois d’aune, d’olivier ou de
* chene dur, dont le bout foit un peu brûlé5 on les
a enfoncera avec des machines très-près les uns des
» autres-, & , après avoir rempli leurs intervalles
» avec du charbon, on établira deflus les fonde-
* mens avec la maçonnerie la plus folide. Sur ces
» fondemens arrafés de niveau , on placera les
* ftylobates ou mafiifs deftinés à porter les colon-
s 11 e s , en les difpofant comme on l ’a indiqué "ei-
» deffus. »;
.Vitruve, liv. V , chap. o. Sur la conjlmclion des
théâtres.
« Si le théâtre doit être conftruit fur des mon-
» tagnes, la manière d’en établir les fondemens
» fera bien facile 5 mais fi l ’on eft obligé de le bâ-
» tir fur un terrain plat ou marécageux , il faudra
» en àifyoïer les fondations félon les procédés que
» nous avons décrits au trôifième livre , en parlant,
* de la manière de fonder les temples. »
Vitruve, liv. V I , chap. 11. De la folidité des
édifices.
« Les édifices dont l’élévation commence à par-
» tir du fol extérieur fe maintiendront, fans aucun
» doute, folides jufqu’aux tempslesplus reculés, fi
» leurs fondemens font faits comme nous l ’avons
» expolé dans les livres précédens ,-en parlant des
» murs & des théâtres. S’il s’ag it, au contraire,
» d’édifices fouterrams & de voûtes, leurs fonde-
» mens devront avoir plus d’épaifleur que ceux
» des édifices deftinés à s’élever hors de terre. »
Vitruve-, liv . V, chap. 12 , en parlant des ports,
fait le détail des différens moyens employés par
les anciens Romains pour fonder les moles dans la
mer.
« Quant aux conftruâions qui doivent être dans •
■ » l ’eau, voici ( dit-il ) comment il convient de les
». faire. On fera venir de la pouzzolane, qui fe
» trouve depuis Cujnes julquau promontoire de
j » Minerve ; on en broiera deux parties avec m,
» de chaux , pour faire le mortier 5 enfuiie da "
» dans l’endroit qui aura été déterminé, onïff
» mera des encaiflèmens avec de forts pou-an
» on les fera couler dans l’eau, où on les entre’
» tiendra folidement dans la dire&ion qu’ils doù
. » vent avoir, avec des chaînes ou des travers'
» Enfuite , après avoir égalifé & nettoyé fous]’e%
» la partie de l’encèinte formée par les encaiffe.
» mens, on la remplira avec des moellons & du;
• » mortier préparé comme on vient de le dire.
» Mais fi l’endroit, par fa pofition, eft tellement'
» expofé à la violence des flots qu’il ne foit pas.
» polfible d’y faire tenir les encaiffemens,. alors
>' on établira fur la terre pu furie bord du rivase
» une plate-forme le plus folidement qivil fera
« poflible. Pour former cet le plate-forme, le ter-
» rain fera difpofé de manière que moins de la
» moitié en foit de niveau , le furplus fera en
» pente du côté de la mer. De ce côté on conf.
» truira,-auffi bien qu’en retour,- des murs d’en-
» viron un pied & demi d’épaifleur, pour conte*
» nir le fable dont on le remplira , de façon à éga-
« lifer la partie en- pente avec celle qui fert de
» niveau*
» Sur cette plate-forme ainfi foutenue de niveau
» on conftruira un mafîif de maçonnerie auffi
» grand qu’on-le jugera convenable. Après qu’il
» fera achevé , on le laiüera fécher au moins-
» pendant deux mois. Au bout de ce temps, on
» démolira les murs qui foutiennent le fable : alors,
» les flots de la mer venant à l’entraîner, le mafîif j
» s’y précipitera. En répétant cette opération au-
» tant de fois qu’il fera néceffaire, on pouffera ta
'» conftruûlion en avant dans l’eau.
» Dans lès endroits où l ’on ne trouve point de
» pouzzolane, il faudra procéder ainfi. On ren-
» fermera l’efpace où l ’on veut fonder dans l’eau !
» par une double enceinte d’eneaifî’ement formée
» de planches entretenues par des iraverfes. L’ef-
- » pace entre les deux caillés fera rempli avec de
1 » l’argile & des paquets d’herbes marécageufes,,
1 » appelées ulva , bien foulées. Ce rempliffage étant
» bien corroyé & bien condenféon y placera des
» v is , des roues & des tympans pour épuiferl’eau
» de laieconde enceinte. Lorfque celle-ci fera à
» fe c , on creufera dans fon pourtour 1 es fonda-
yi'fions.
» Si le fond eft de terre , on creufera jufquau:
» folide, & plus large que le mur ne doit être. Si?
» le fond eft mou, on y enfoncera des pieux de-
» bois d’aune, d’olivier, &c. Après les avoirre-
» couverts de charbon , on bâtira lés fondemens-
» félon la méthode déjà prefcrite. »
Les pafîages de Vitruve qu’on vient de rapporter,
renferment ee qu’il y a de plus efléniiel lui'
la partie des fondations. Il paroî-t que c’eft dansi
cette fource qu’ont puifé Léon-Baptifte Alberli»-
Scamo.zzi, Philibert Delorme, & tous ceux qui ou*
écrit fur. l ’art de bâtir. C’eft- encore de.cet.ancn*
F O N F O N 4°5
I nue nous tirerons les obfervations que nous
|^ toe“srdeTe1°pper dans la fuite de cet article.
pe PépaiJJeur desjbndemens.
I Vitruve fe contente de dire que les fondemens
I avoir plus d’épaifleur que les conftruâions
P ioit établir deflus. Palladio penfe qu’il faut
tü Hier aux fondemens des murs le double de leur
K ” 'fleur au rez-de-cbaullee. Scamozzi conleille
K ^ ’ iart en fus j St au moins le fixième. Philibert
;i Delorme veut la moitié en fus. Milliard a fuivi
E-tte dernière proportion, aux Invalides à Pans.
I II eft allez étonnant que ces àrehiteâes & tous
Iceux qui les ont copiés n’aient pas fait attention
■ me l’étendue des fondations en plan doit fe pro-
t! portion 11er plutôt à la charge qu'à l'épaiffeur des
Kmi's. Souvent un mur ou on mallil fort épais prefle
Eioms le terrain, a raifon de fa grande fuperficie,
■ qu'un mur beaucoup plus mince. On ne donne
Ifouvent aux fondemens une .grande épaifleur que
Kjour les mettre dans le cas de réfifler à des efforts
yoûtes. ; -, - - .
Léon-Baptifte Alberti a propofé un moyen propre
à relier les fondemens de plufîeurs points d’ap-
Ipui ifolés, & de diminuer l’eftet de la preflion , en
la faifant porter fur une plus grande furface. Ce
(moyen eft de conftruire, dans les intervalles des
piliers, des arcs renverfés ,, qui renvoient une ^
partie de la charge fur les efpaces intermédiaires. |
f On a fait ulage de ce procédé dans les fondemens
[des c.olonnes intérieures de l’églife de Samte-Ge-
neviève à Paris.
K Léon-Baptifte Alberti ne regarde pas les fon-
[demens comme failant .partie des conftruâions
[établies deffus.. Selon lui , ce n’eft que la bafe fur
[laquelle elles doivent repofer. Il motive fon opi-
Inion en difant que fi le fol étoit fuffifamment fo-
llide, tel que ;le roc ou une maffe de carrière, il
[feroit inutile de faire desj^ôndàtions. D ’après cela,
[les fondemens ne feraient autre cliofe que des ba-
[fes artificielles pour fuppléerau défaut de fermeté
Ides terrains , & ils feroient inutiles fi l ’on pouvoit
[parvenir à procurer au fol une fermeté fuffifante
[par d’autres moyens. On pourroit efîéâivement
[adopter cette théorie dans certains cas où i l ne
| sagiroit que de la preflion - verticale qu’exerce le
I poids de la bâtiffe. Mais il faut dire que cet effort
[neft pas toujours feul : au contraire , il fe com-
Ibine avec d’autres y ce qui fait que, même fur les
pois les plus fermes, il eft prudent d’établir des
Ifondations* .
1 1 D après la difficulté qu’on éprouve à charger
[ immédiatement le terrain par un poids équivalent
la la prçlfion d’une conftruction , même, moyenne ,
! w manière la plus Ample d’y fu-ppléer nous paroilt
elie la chute des, corps.. Lorfque l’ufage du mou-
}°{î neff pas praticable, on peut fe fervir d’une
°hïe lerréé par le bout * ou d’une deoioilélle de
paveur. En effet, le principal objet des fondemens
étant l’aff’ermiffement du terrain, toutes les opérations
doivent fe diriger vers ce 'but effentiel.
Quelle que foit la bonté des conftruélions qu’on
établira fur un fol mal aff ermi, elles ne fauroient
procurer à l ’édifice une folidité véritable.
Des fondations f u r le roc ou fu r les majjes de
carrière*
Malgré la folidité apparente de ces deux ef*-
pèces de fol, il y a encore des précautions à
prendre pour y établir des conftructions folides.
Il faut d’abord s’affurer f i , fous le roc ou la maffe
apparente de carrière, il ne fe trouve pas des
cavités, & fi l’épaiffeur du maflif eft allez forte
pour fou tenir, fans fe rompre , le poids des conf-
truûlions qu’on fe propofe d’élever deffus. Lorfque
le roc ou la maffe ont peu d’épaiffeur, ou lorf-
qu’i l s’y trouve des cavités, il faut ou les foutenir
par des arcs, ou les remplir de maçonnerie.
Ainfi, lorfqu’on eut commencé à bâtir l’églife
du Val-de-Grâce à Paris, on crut établir fes fon—
demens d’une manière folide en les pofant fur une-
maffe de carrière 5. mais -à peine fut-on hors de
terre , qu’une partie de la bâtiffe s’affaiffa confi-
dérabiement* Après quelques recherches, on découvrit
que la partie fur laquelle on avoit fondé
avoit été fouillée anciennement, & l’on fût obligé
de foutenir le ciel de cette partie de la carrière
par des .Çonftruâions faites en deffous-.
Lorfqu’on s’eft afl’uré que le roc fur lequel or*
, doit fonder eft folide, on commence par faire
dreffer de niveau les parties fur lefquelles doivent
pofer les premières afîifes. Si le roc eft trop inégal,
on le divife par banquettes de niveau. Afin
que les parties baffes ne foient point dans le cas.
de taffer,. il faut, s’il eft poflible, les conftruire
en pierres de taille ou libages pofés fans mortier,,
à la manière des Anciens, jufqu’à la hauteur de-
l’arrafement général.. Si l’on eft obligé de conftruire
en maçonnerie de mortier & de moellons ,.
il faut avoir foin de la battre jpar afiife, pour
diminuer autant que poflible l’effet du taffement.
Quand on fera parvenu à l’arrafement général,,
il fera- à propos de lai lier repofer l’ouvrage pen—
«dant quelque temps., afin que la maçonnerie ae—
quierre une certaine confiftance avant qu’on conf—
truife deffus..
Si le rocher eft trop inégal, on peut fonder
par encaiffement avec de petites pierres, & les;
débris des rocs maçonnés,, à bain de mortier fait
- avec de bon fable & de la chaux nouvellement,
éteinte.
Quelquefois l’a- fermeté d’un fol tel que le roc
permet de n’établir les fondemens que fur. des;
poin ts d’appui éloignés les uns des autres, & réunis*
pair des arcs,. ainfi que l’ont pratiqué les Romains-
dans plufieurs fubfti'uâions de ce genre, qui fou«—
tiennent des parties de chemins & d!édifi.ces,.