
L A B
L a b o r a t o i r e , f. m ., figmfie une pièce, un
local deftiné au travail. Ce mot le dit ordinairement
des pièces confacrées aux opérations de
chimie ou de pharmacie, & qui doivent avoir des
fourneaux & autres accefl’oives propres à ces opérations.
Rien n’empêche fans doute que l’on donne
auili ce nom aux cabinets d’étude , ou pièces
deftinées à l’exercice des arts du deffin. Cependant
l ’ufage qui, dans les langues, perpétue certaines
dénominations dont le cours des idées &
l ’opinion font Sentir- l’impropriété, a confervé le
mot atelierx pour défigner le laboratoire de Par-
tifte , quoique ce mot ioitfpécialement afïeflé aux
travaux mécaniques ou induftriels. ( Voyez A t k -
JJER. |
LABYRINTHE, f. m. Ce nom eft grec, mais
eft originaire de l’égyptien. Nous ignorons ce
qu’il fignidoit dans cette dernière langue j car il
eft poflible que le nom donné au monument qu’on
labyrinthe, n’ait pas exprimé, en Egypte ,
l ’idée dont il eft devenu aujourd’hui l’expreffion,
l’avoir, celle d’une combinaifon de tours, d’iffues,
de chemins &. de dégagemens multipliés, à l’effet
d’égarer celui qui s’y engager oit' fans guide.
Le labyrinthe d’Egypte fut conftruit ainfî , &
dans cette vue ; mais il eut fans doute une defti-
nation plus importante. Il fe pëut qu’il ait été le
chef-lieu politique & religieux des nomes de
l ’Egypte. Il fe peut que cet édifice ait renfermé ,
dans autant de bâtimens ou de corps féparés &
réunis entr’e u x , les archives, les myftères &
les rites fecrets de cette agrégation de parties
qui formèrent cet ancien royaume 5 & comme le
fecret fut le principe de toutes les inllilutions, il
eft probable qu’on aura voulu renfermer les notions
primitives de ces inftitutions , dans un local
rendu impénétrable à la curiofité du vulgaire ,
par l’efpèce d’impoffibilité de s’y engager fans la
crainte de s’y égarer.
Le labyrinthe d’Egypte a été décrit par plu-
fieurs écrivains de l’antiquité, favoir, Hérodote ,
Diodore de Sicile, Strabon, Pomponius Mêla,
Pline. Il faut diftinguer entre ces auteurs, ceux
qui avaient vu le monument, de ceux qui n’ont
fait que copier, ou peut-être dénaturer les -def-
criptions des autres. Parmi ces cinq auteurs, il
n’y a que les trois premiers qui aient vifité le labyrinthe.
Hérodote & Strabon en ont vu & décrit
l ’intérieur (du moins dans la partie fupérieure).
Diodore de Sicile paraît être refté à la porte. Il
n’en décrit du moins que les dehors. Pomponius
Mêla traduit vifiblement Hérodote. Quant à la
description de Pline, elle eft vague, & ne permet
à l’efprit d’y faifir aucun enfemble5 elle Contient
des particularités merveilleufes, qui paroi fient
diélées par V admiration de voyageurs, dont la
curiofité avoit dû fe contenter des ouï-dire & des
hypothèfes qu’accréditoil la crédulité.
Il eft en effet très-naturel qu’un édifice, def-
tiné à être un myftère, foit refté pour la pofférité
une énigme.
Pour mettre le leêfeur à même de concevoir la
difficulté qu’on-- éprouve à fe former une idée
claire du labyrinthe ? nous allons rapporter les
trois defcripfions principales de ce monument.
(t J ’ai va ce bâtiment (d it Hérodote ) ,& je
» Par trouvé au-deffus de toute expreffion. Tous
» les ouvrages, tous les édifices des Grecs, ne
» peuvent lui être comparés, ni du côté da
» travail, ni du côté de la dépenfe ; ils lui font
» de beaucoup inférieurs. Les temples d’Ephèfe
» & de Samos méritent, fans doute, d’elfe ad-
» mirés, mais les pyramides font au-deffus de i
» ce qu’on petit en dire : chacune en particulier
» peut entrer en parallèle avéc plufieurs des plus
» grands édifices de la Grèce. Le labyrinthe
» l’emporte même furies pyramides. Il eft com-
» pôfé de douze cours ( bajileia ) environnées
» de murs , dont les portes font à l’oppofite
» l’ une de l’autre , fix au nord & fix au fud,
» toutes contiguës ; une même enceinte de mu-
» railles qui règne en dehors, les renferme. Les
» appartemens en font doubles. Il y en a i5oo
» fous terre , i 5oo au-deffus, -trois mille en tout.
» J ’ai vifité les appartemens d’en haut , je les
» ai parcourus , ainfi j’en parle avec certitude, &
» comme témoin oculaire. Quant aux appartemens
» fouterrains , je ne fais que ce qu’on m’en a dit.
» Les Egyptiens , gouverneurs du labyrinthe} ne
a permirent point qu’on me les montrât, parce
» qu’ils fervoient, me dirent-ils, de fépullure
» aux crocodiles facrés & aux rois qui ont fait
» bâtir cet édifice. Je ne parle donc des logemens
a fouterrains que fous le rapport d’autrui. Quant
» à ceux d’en hau t, je les ai vus, & je les regarde
a comme'ce que les hommes ont jamais fait de plus
» grand. On ne peut, en effet, fe lafî'er d’admirer
» la variété des paffages tortueux qui mènent des
a cours à des corps-de-logis, & des iffues qui eon-
» duifent à d’autres, cours. Chaque corps-de-
a logis a une multitude dé chambres qui abou-
-a tifient à des pqjlades y au fortir de ces paf-
a iodes y on paffe dans d’autres bâtimens dont
a il faut traverfer les chambres pour entier dans
a d’autres cours. Le toit de tous ces corps-de-
» logis eft de pierre, ainfi que les murs qui
a font partout décorés de figures en bas-relief*
» A u t o u r de chaque c o u r règne une colonnade
, „erres Manches parfaitement jointes en-
. t i , A l ’anirleoù finit ietnine. " O ■ . le labyrinthe rs’éilève
l i L pyramide de cinquante orgyes , lur lamelle
on a fculpté, en grand , des figures.
» fes parties : car il fe compofe de feize corps de
» bâtimens , dont les noms correfpondent à celui
» de chacune des régions ou préfectures de
» l’Egypte (appelées nomes). Son enceinte ren-
» ferme , en outre, des temples pour chaque
» divinité du pays , quinze ædicules confacrees
» à Néméfis , plufieurs pyramides de quarante
» braffes de hauteur , dont fix aboutiffent, par
» leur pied , aux murs d’enceinte.
i On s’y rend par un fouterrain. ( Traduction
«de Larcher.') ■ v .
» Ou trouve (dit Strabon) dans le nome Ar-
, 'limites, le labyrinthe, ouvrage égal aux py-
ramides ; & le long de ce monument, le tom-
I beau du roi qui l’a fait conftruire. Après avoir
" dépafl'é la première des deux entrées du
' canal on voit à la diftance de 3o ou 40
» ftades, un terrain plat comme une table, fur
a lequel font fitués un bourg & un vafte palais
a compofé d’autant de palais ( Aulai ) , qu’il y
, avoit jadis de nomes : car il renferme un
a égal nombre d'aula 9 entourées de colonnes ,
» & contiguës les unes aux autres, fur une même
L h<rae, toutes bordées d’un même mur ; en
s forte qu’elles fe trouvent placées en avant
» d’un long mur , à l’oppofite duquel eft Fen-
a irée de chacune de. c es aula. C’eft en avant
s de ces entrées, qu’oiïtrouve certaines cryptes
»longues & nombreufes, qui communiquent
» enIr’elles par des chemins tortueux,, en forte
!» qu’aucun étranger, fans guide, ne pôurroit ;
» parvenir à aucune des falles , ni en fortir, une ;
> Fois qu’il y feroit entré.
| » Ce qu’i l y a de furprenant ,- c’êft que la
» couverture de chacune des chambres eft mo-
» nolythe, & que les cryptes, dans leur largeur ,
i » font également couvertes de dalles d’un feul
» morceau, & d’une grandeur démefuréè, fans
» mélange de bois , ou d’aucune autre matière.
» Auffi, quand on eft monté fur ia couverture
» de l’édifice , qui n’eft pas très-élevé , cet édifice
» n’avant qu’un étage , on ne voit qu’une plaine
» formée d’énormes pierrea. Lorfqu’on redefcend
» dans les. aula y on les voit placées à la file
» l’une de l’autre, & foutenues chacune par
» 27 colonnes, monolythes. Les pierres qui en-
'» trent dans la bâtiffe des murs, nont pas une
» moindre grandeur que les autres.
» On eft déjà fatigué de la marche , lorfqu’on
» parvient à ces longs & inextricables détours
» ( dont on à parlé ). On monte à des falles
» élevées & à des galeries , par des efcaliers
» de 90 degrés. Ces falles & ces galeries font
» remplies de colonnes de porphyre , de fimu-
» lacres 'de divinités, de ftatues de rois, de fignres
» monftrueufes de toute efpèce. Il y a de ces
» falles tellement difpofées , que l ’ouverture de
» leurs portes produit dans leur intérieur, un
» retentiffement terrible & femblable à celui du
» tonnerre. Le plus fouvent, on paffe par des
» endroits privés de lumière. L a partie extérieure
. » du mur qui forme l ’enceinte de l’édifice.,
» ofire encore de grandes conftruôlions qu’on
j » appelleptemn. De-là, on entre dans les cham-
» bres fouterraines par des conduits creufés auffi
- » fous terre.
» A l’extrémité de cet édifice, qui occupe
» plus d’un ftade ( en tout fens ) , s’élève le tom-
» beau ( dont on a parlé ) , pyramide carrée ,
» ayant quatre plethres de côté, & uné hauteur
» égale, Ifmandes eft le nom de celui qui y
» eft enterré. On prétend qu’il fit conftruire ce
» nombre de chambres , parce qu’il g toit d’ ufage
» que des députations de tous les nomes vinffent s’y
» réunir chacune avec fes prêtres & prêtreffes,
» pour faire des facrifices , & pour juger les af-
51 faires les plus importantes. Ces députations le
51 raffembioient chacune dans l 'aula deftinée au
* nome (qui l’envoyoït). ( Traduction nouvelle
» de Straboni )
» Je n’entreprendrai point ( dit Pline ) l’im-
* poflible defcription du labyrinthe d’Egypte ,
* & d e f a i r e c o n n o î t r e l a d i f p o f i t i o n d e t o u t e s
» C’eft dans cette pabtie que furent faites les
» feules & légères réparations qu’ait éprouvées
» cet édifice'. Elles furent l ’ouvrage d’un certain
» Circummon, eunuque du roi Nectbebis , 000
» avant Alexandre. On ajoute que pendant qu’on
» faifoit à ces fouterrains des couvertures en
» pierre de taille, il les étaya avec des poutres
» de bois d’épine, enduites d’huile. »
Pline, au commencement Je l’article qui contient
cetle defcription du labyrinthe, beaucoup
moins précife que les deux précédentes, defcription
faite d’après des récits ou des relations
probablement inexaôles de difïérens auteurs, ne
laiffe pas de nous donner quelques opinions affez
préçieufes, & fur la deftination de ce grand
édifice , & fur le genre de complication , qui fut
le moyen de rendre inaceeffible, ce qu’on voulut
cacher au commun des hommes.
Les auteurs , dit Pline , expliquent diversement
l’objet d’une telle conftruâion. Démotèles
en fait un palais, & prétend qu’il fut celui de
Motherades 5 Lycéas le donne pour le tombeau
de Mæris; plufieurs autres y voient un édifice
confacré au Sole il, & c’eft là , ajoute Pline , l’opinion
la plus générale.
Il n’y a efïëSivement que la religion qui puiffe
faire entreprendre de paveils travaux 5, & ce
qu’il y a de plus probable fur celui du labyrinthe,
c’eft que cet édifice fut le chef-lieu de
la religion du pays, & le point commun où fe
réùaifloient les rites divers des différens nomes
de TEgypte.
Chacun des temples de l’Egypte recéloit, au