
Grèce auffi, comme la raifon d’ailleurs donne à le
p eu fer, Y architecture primitive fut un mélange de
charpente & de maçonnerie, & de ce mélange
naquit L’enfeuible de formes & d’orûemens, qui fut
perfectionné & réduit en fyftème dans la conftruç-
tion en pierre.
Les Etrufques, qui paroiflent, fur toutes les
parties des arts, être reliés ftatâonnaires en deçà du
point de perfection que les Grecs furent atteindre,
avoient confervé religieufement, dans leurs temples
, les pratiques & les erremens des premiers
temps. L ’ufage preferit du bois en nature dans
leurs architraves, favorifa-t-il celui des larges en-
tre-colonnemens, ou cette largeur commandée
par les rites religieux contribua-t-elle à perpétuer
l ’ufage eff'eftif du bois? Quel que foit le jugement
qu’on en porte, il faut reconnaître que le fyftème
primitif de l’ordre étrufque eft le même que celui
de Tordre dorique, à quelques modifications près.
Que l’on confuite, en effet, le deffin du temple
tufeau, tel qu’il réfulte néceffairement du texte &
des proportions de Vitruve, qu’y voit-on, finon
toutes les parties & tous les détails de Y architecture
grecque ?
Même principe de proportions, c’eft-â-dire,
même méthode de prendre poui1 module l’épaff-
feurdu diamètre inférieur de la colonne, d’avoir
ainfi un régulateur uniforme, qui mette le tout en
accord avec chaque partie, & réciproquement.
Ce fyftème proportionnel eft tellement propre de
Y architecture grecque, qu’on en chercheroit inutilement
les traces dans les autres architectures.
La colonne tofeane, telle que Vitruve la décrit,
a fept diamètres, & Pline l ’a répété fans doute
d’après Vitruve : quas feptimam tufçanicce. Au
•temps de Vitruve, l ’ordre dorique avoit été fort
«longé dans fes proportions 5 il arrivoit jufqu’à huit
diamètres & plus ; cependant aux meilleurs temps
de la Grèce, il ne fut pas porté au-delà de fix, & relia
plus volontiers am-deffous. Cette différence entre
la proportion tofeane & la proportion dorique des
temples grecs qui nous relient, ne fauroit établir
une objection contre l ’identité que l’on cherche à
prouver : autrement il faudroit dire aulïi que le
dorique de Vitruve n’eft plus l’ordre d’architecture
des Grecs. L’alongement ou le .raccpurciftement
des proportions de la colonne eft fans rapport avec
le principe & le caractère diftinctif d’une architecture.
Qui pourroit dire que la colonne tofeane
n*auroit pas auffi fubi quelques variations à Rome ?
La bafe'donnée par Vitruve à.cette .colonne,
établit .encore une diverlité enlr’elle 8c la colonne
dorique, qui paroît avoir généralement été privée
dç b aie , quoiqu’il y ait quelqu’exception à
cette règle. Cependant comme il s’agit moins ici
de comparer un ordre à un ordre, qu’une architecture
k une architecture y on dira qu’en donnant une
bafe à leur ordonnance, les Etrufqups ont fait ce
que Y architecture grecque pratiqua dans l’ionique
ii le corinthien, ün voit d’ailleurs cpinineut les
| entre - colonnemens ferrés des temples dorim
grecs dévoient faire proferire les faillies 'des baT
& comment elles furent fans inconvénient da '
les larges entre-colonnemens du temple tofean
L ’élévation de ce temple nous préfente dan-
tout le refte une entière conformité avec Yarvht
teCture grecque.Le chapiteau fe compote de même
d’un abaque, d’une échine & d’un collarin.
Nous avons vu que les parties de l ’entablement
g r e c l ’architrave, laTrife & la corniche régnent
de même & dans le même ordre au temple tol'can
Il y eft queftion de ma Iules dont les extrémités
comme en Grèce, recevaient des ornemens. *
Le fronton, ce membre elfe libelleraient carac-
tériftique du toit dans la cabane ou dans laconf-
trudlion en charpente, couronne de même l’ordre
tofean. Nous apprenons de Vitruve, liv. lu
chap. 2 , que Image des Etrufques étoit d’orner
leurs frontons de ligures en terre coite ou en bronze
doré, genre de fculpture dont on étoit maître de
diminuer le poids, pour alléger la charge impofée
aux plates-bandes en bois. Les Romains fuivoient
auffi cette pratique dans les aréoflyles, dont l’ufage
& les proportions paroiü’ent avoir été empruntés
aux Tofcans.
Quelques autres détails femblent auffi avoir
.pâlie de la difpofition des colonnes du frontifpice
tofean, dans certains temples. Vitruve nous en
inftruit, lia. IV 3 chap. 7 , & fait remarquer celte
réunion des méthodes tofeane & grecque. Mais
rien à inférer d e-là, qui puiffe porter à donner la
priorité à l’une fur l’autre.
De cet expofé il refaite que nous connoiffons
Y architecture étruj'que non pas dans quelque débris
ifolé, dans quelque refte équivoque & fans
date, mais bien dans l’ordonnance, l ’ enfemble,le
fyftème, les proportions, les mefures, les détails,
les. formes & les ornemeûs des temples , toutes
chofes , dont les communications anciennes & immédiates
de ce peuple avec les Romains, avoient
perpétué l’ufage à Rome, fous la fau v e -g a rd e des
rites religieux, qui durent veiller à la conferva-;
tion des anciennes traditions de l’art de bâtir.
De cet expofé il réfulte que le temple tofean fidèlement
reftitué, n’eft, à quelques variétésprès,
que de Y!architecture grecque.
Revient donc ic i la queftion. Les Grecs ont-ils
emprunté des Etrufques leur fyftème architeâo-
nique, on les Etrufques doivent-ils le leur aux
Grecs? Cette queftion ne pourra jamais être mo-
lue d’une manière ifblée & par les do eu mens hif-
toriques. Des nuages éternels nous dérobent la
connoifl'ance des temps où il faudroit pénétrer
pour acquérir des documens propres à fix e r lie-
certitude à cet égard. Rien de plus d iffic ile à démontrer,
que la priorité de fa voir ou d ’inventioe
entre celles des nations modernes qui furent, & font
en contaCl l ’une avec l’autre, Comment y parve"
nir, lorfqu’il ne nous refte aucun monument des
fiècles où fe font faites les découvertes dont
I , ^montrer le premier auteur? Tout ce
f i t c’eft que les habitans de la péninfule
l ' f l a&’ceax de la Grèce furent très-ancienne-
t "T i i& par une communauté d’écriture , de lan-
t ,en de religion & d’ulages ; qu’ainfi le même
f terne de fy * . fat très-anciennement commun
E ix ta s* Pe “ Ele8’ , , . , - l Ueite la reffonree des analogies, des conjec-
■ A 1 dire. des parallèles ■ 1res, c eit-a uuc , r , entre les deux
Ëaples fur les autres parties des arts.
I On a déjà vu que toutes les probabilités, &
inême des preuves allez convaincantes, fe réunif-
fent pour donner la priorité aux Grecs.
I Si je ne me trompe, on ne peut rien inferer de
WanhiteCture du temple tofean, qui porte à croire
■ me les Etrufques auroient été en ce genre les
maîtres des Grecs. Si leur manière de bâtir le per-
Ëjétuajufqu aufiècle d’Augufte, avec les caraGères
B’un o-oût qui annonce encore les habitudes premières
de l’art non perfectionné , n’eft-il pas per-
Eis d’en inférer que celui-là n’eut pas le mérite
d'inventeur , dans les temps à nous inconnus, qui
[[’inventa plus rien depuis le temps où il nous eft
Honné de le cônnoître.
; , D&ns toutes les autres parties de l ’art, tous les
ouvrages des Etrufques qui nous font parvenus en
vgrand nombre, font (à quelques exceptions près,
&idont on peut rendre raifon ) reliés à ce point
|ü’imperfe£hon ou de non perfection quon remarque
auffi dans les ouvrages de l ’antique école de
la Grèce', c’eft-à-dire, de celle qui précéda le
Êècle de Périclès ou de Phidias. L’art fe feroit-il
Eonc arrêté en Etrurie à ce point ? Rien n’eft plus
Probable, ^ \
E En effet, l’indépendance & la puiffance de ce
pays cefi’èrent d’exifter à une époque qui corref-
wpond à celle qui vit éclore en Grèce tous les genres
|}e perleüion imitative , dont les germes avoient
■ été auffi long-temps contrariés. Deux lièçles de
■ guerres fanglantes préludèrent à la deftruètion du
royaume des Etrufques. Ce fut un an après la mort
IdAlexandre-le-Grand, que toute la nation, lub-
Ijuguée par les Romains, vint fe fondre tous leur
^domination. Or, ces deux fiècles pendant lefquêls
Ba puiffance & la richeffe de l’Etrurie s’affoibiirënt
peu à peu, pour palTer en d’autres mains, lurent
précifément ceux où la Grèce reçut de toutes les
paufes politiques & morales qui font fleurir le
iirts, tout Taccroiffement qu’il lui fut permis d’ob
penir,,
I L’Etrurie n’eut plus , peudant ces deux fiècles
liés mêmes communications avec la Grèce. L
puerre abforba tous fes moyens & tous fes efforts.
IM arts ne purent-y fniVre les progrès qu’ils fai-
P ient ailleurs; ils ne purent profiter ni des mo-
peles ni des leçons des Grecs. Après fa conquête,
Etrurie livra les monumens & fes artiftes aux Romains,
qui n’avoient eux-mêmes alors que fort
P.eu de commerce avec la Grèce. L’çlpril de roupie
perpétua dans tous les genres le goût imparfait
& groffier des premiers âges. Voilà fans doute
pourquoi tout ce qu’on trouve d’ouvrages d un
travail notoirement étrufque ne correfpond, quant
au ftyle & pour le mérite imitatif, qu’à ceux de
l ’ancienne manière grecque. :I' ,
L’analyfe de Y architecture étrufque , telle qn’on
la trouve dans la defeription authentique du temple
tofean, nous offre un réfultat tout-à-fait fem-
blable. Tout force donc de croire & que Varchitecture
étrufque eft la meme que 1 architecture
grecque, 8c qu’elle refta en Etrurie au point où
relièrent les autres arts, c’eft-à-dire, dans l’état
qui précéda celui de leur développement en
Grèce.
ÉTUDE, f. f. Ce mot s’entend & fe prend en
plulieurs manières dans la langue des arts du.
deffin. .,
Et d’abord on .lui donne le feus général qu’il a
dans toutes les parties de la littérature & des feien-
ces. Dans ce fens on étudie un art comme on étudie
une fcience, c’eft-à-dive, par ce genre d’application
de l’efprit, qui eft furtout propre à l’a c -
quifition des qonnoiflances dépendantes de l’efprit.
L’ufage a mis , par le mot étude , une différence
allez remarquable entre les chofes fufceptibles
d’être enfeignées 8c apprifes. D’une part font celles
que l’exemple , la répétition des a£tes, & ce qu’on
nomme la pratique, démontrent facilement, 8c
qui n’admettent point, comme principale , l’action
de l’efprit & des hautes facultés de l’intelligence.
Telles font toutes les parties des arts induftriels.
De l’autre part fe trouvent celles qui de leur nature
dépendent plus fpécialement des facultés
morales, qui exigent l’aétion immédiate de l’e fprit
& du fentiment intérieur, qui repofent fur un
grand eufemble de connoiffances , & demandent
la réunion des rapports les plus délicats ou les plus
étendus. Telles font toutes les divifions des fciencés
8c des arts d’imitation. Ainfi l’on n’étudie pas un
métier; mais on dit étudier un art, fe livrer à i'étude
de la peinture, embraffer Y étude de l’architeûure.
L '‘étude d’un art d’imitation fe compofe donc de
plufieurs fortes d’études, les unes principales, les
I autres açceffpires. Au nombre des premières on,
| met Y étude de la nature (non pas entendue ici dans
l ’acception générale du mot nature qui embrafle
tout, mais dans le feus reftreint que les artiftes
donnent à la recherche de la conformation des
corps, 8c furtout du corps humain, ce qu’on ap-*
pelle dejjin), l ’étude de la couleur 8c des effets de
la lumière, Y étude de la perfpeêtive, Y étude de
la compofitipn, des paffions 8c de l’éxpreffion. On
peut ranger dans la claffe des fécondés , Y étude dit
coftume 8c des moeurs, celle de l’antiquité 8c de
l ’hiftoire. Toutefois le mot dCétudey comme défi-
gnant l’enfemble ou le réfultat de ce que l’artifte a
appris, 8c de ce qu’il fait, s’applique de préférence
à la partie qui eftla principale, c’eft-à-dire, le deffin
ou la fcience du nu ; 8c c’eft ordinairement de ce