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Après avoir montré comme lès écrivains ont varié
dans leur théorie, je vais m’attacher à ce qui concerne
les principales vues de Wierner fur cette matière.
Tous les filons proprement dits ont été, fuivant
ce minéralogifte, de véritables fentes ouvertes par
leur partiefuperieure, 3c qui, prefqüe toutes, ont
été par la fuite remplies par le haut.
Les fentes d’un autre côté peuvent provenir de
plufieurs caufes différences. i°. Les montagnes, formées
d’abord par l’accumulation des couches , ont
dû à la fuite s’affaiffer 8c fe fendre, en conféquence
d’une certaine retraite produite par le deffécbe-
ment. 2°. Les précipitations qui, par la voie humide,
ont formé les ftrates Scies couches, ont
également fourni les maffes desfilons.Cela s’eft fait
dans un tems où la diffolution qui a donné les précipités
couvroit le terrain où fe trouvoient les
fentes exiftentes, comme nous l’avons dit, 8c qui
étoient alors entièrement ou en partie vides & ouvertes
par leur partie fupérjeure. Les filons o n t été formés à des époques très-différentes, de les caractères
diftinCtifs de l‘ âge- relatif des filons font les
fui vans,
i°. Tout filon qui en traverfe un autre eft plus
nouveau que le filon tx iv e tfé &que tous ceux qu’il
traverfe. Par conféquent les filons les plus anciens
font traverfés par les autres plus modernes, 8c ces
nouveaux traverfent les plus anciens.
Cette manière d’étre des filons , des uns à l’égard
des autres, eft très-importante à obferver, &
même indifpenfable à connoîtra dans l’étude des
filons. La fubftance métallique ou autre qui eft dans Iè
milieu du filon eft d'une formation plus ancienne
que celle qui eft plus proche des falbandes , 8c ce
qu’on rencontre dans la partie fupérieure d’un filon çft également moins ancien que ce qui eft à une
grande profondeur.
Il eft affez aifé de reconnoître &de diftinguer
lgs diverfes formations des filons. Lorfque les filons ^enferment les mêmes gangues 8c les mêmes minerais
, 8c que ces matières y font placées dans le
même ordre, on peut croire qu’ils appartiennent
a une feule 8c même formation j & cette conféquence
eft d’autant plus fûre, que les filons contiennent
un plus grand nombre de minéraux de différentes
fortes. Les différences dans la richeffe des
filons proviennent delà quantité 8c delà nature des
fubflances métalliques qui y ont pénétré, foie par
la partie fupérieure ou par des canaux dérérens,
intérieurs, ou par une filtration à travers la maffe
du filon, foit par la jonCtion d'un nouveau filon métallifère.
Cette dernière caufe parole avoir eu lieu
a Kongsbergen Norvège, ou les filons abondent
en minerais, principalement lorfqu'ils traverfent
certaines couches de la montagne. C’eft dans des
diftriCts particuliers que l’on trouve des filons, 8c
ils y occupent des étendues plus ou moins confidé-
tables. Leur fréquence dans ces lieux dépend beau-
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coup de la forme de la montagne ou des chr.înes.
Dans les montagnes d’une pente douce 8cfur lès
plateaux qu'elles préfentent, on rencontre cesnom-
breu\filons ; mais les grandes montagnes efearpées,
les chaînes déchirées, ne contiennent peu de fouventque filons. Dans une feule 8c même contrée il fe rencontre
fouvent 8c à la fois des filons de formations très-
différentes. Ces diverfes formations conftituent un
diftnéfc de mines, 8c les collections de filons qui fe
trouvent dans ces circonltances ne portent pas feulement
les marques d’une formation différente,
mais encore les caractères diftinCtifs des époques
de leur formation. C’eft pour donner une idée de
ces filons3 que nous ferons connoîcre, d’après Wer-
net, le diftriCt des mines de Freyberg.
On verra d’abord , dans cette description abrégée
, deux efpèçes de fiions, très-différentes les
unes des autres. Une d’elles confifte eu filons méridionaux
8c fepientrionaux, c’eft - à - dire, en
filons qui courent depuis neuf heures jufqu’à trois
heures de la bouffole du mineur , c’eft-à-dire ,
entre le nord-oueft& le nord-eft. Ils donnent de
la galène, delà blende noire, des pyrites fulfureu-
fes, cuivreufes, arfenicales, du quartz 8c du fpatb
bruniffant. Cette formation, comme le premier
dépôt défilons métalliques, fera décrite par la fuite.
La fécondé efpèce de filons qui traveriènt la première,
8c qui n’en eft jamais traverfée, contient de
la galène avec un peu de pyrite rayonnée, dufpath
pefant, du fpath fluor 8c du quartz} elle s’étend
encre la fixième heure 8cla neuvième} elle formera
le troifième dépôt défilons. Le diftriCt des mines d'Ehrenfnederfdorf renferme
des filons3 dont les uns contiennent de l’étain ,
8c les autres de Fargent. Ceux d’étain font toujours
traverfés par ceux d’argenr, La direction des premiers
eft en grande partie entre fîx 8c neuf heures}
celle dôs derniers entre neuf heures 8c trois.
Les maffes conftituantes des filons, d’une formation
quelconque, fe découvrent dans des filons propres, mais encore dans l’interfeCtion de deux
filons d’efpèces différentes, 8c dans le milieu de
leur allure, 8c rarement fur une falbande d’un filon d’une autre efpèce.
En définiffant les filons, les produits des fentes
entr’ouvertes dans les roches & enfuite remplies
par la partie fupérieure de certaines fubftances, on
iuppofe drux effets dans la Nature. D’abord il s’eft
formé des fentes néceftaires aux dépôts des filons; puis les matériaux des filons ont rempli les fentes
dans leur étendue, à peu près fuivant les circonf-
tances. Ainfi les filons, quant à leur volume, à leur
poficion, à leur manière jüêtre les uns à l’égard
clés autres, ainfi qu’à l’égard des montagnes où ils
réfident, nous annoncent partout les fentes qui,
dans la longue durée de l’exiftence de notre Globe ,
fe/ont formées 8c fe forment tous les jours,
D’ailleurs, je crois devoir remarquer qu’outre
lesfi/pnsj on rencontré des matières fembiables à,
celles
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celles qui conftituent leur maffe, lefquellês fe font
dépofées fous la forme de précipités dans les fentes
qui exiftoienc alors, 8c qui étoient très-propres à les
recevoir. Je vais effayer de prouver que les efpaces
qu’occupent les filons font .des fentes qui fe font
ouvertes dans les roehers, & qui ont commencé par
être des fiffiires, des crevaffes, 8c enfin des fentes
ouvertes parle haut, 8c plus ou moins larges. Les
preuves de cette propofition fe développeront a:-
fément. i°. Eiles fe préfentent partout dans les
affaiffemens 8c les bouleverfemens que les maffes
de montagnes ont éprouvés. i ° . On*fait qu’il fe
forme chaque jour beaucoup de fentes plus ou
moins confidérables. 30. Les filons 3 quant à leur
forme & à leur pofition , reffemblent parfaitement
aux fentes qui fe font ouvertes dans la terre 8c
dans les roches. Ces filons, comme les fentes, fe
rétréciffent vers leur extrémité :1a plupart ont les
uns & les autres des inclinaifons qui fuivent les
pentes des montagnes. 4°. Les drufes, avec les crif-
tauxqui en tapiffent les parois, ne font que certaines
parties des filons ,qui ne font pas entièrement
remplies, 8c par conféquent font les reftes des
vides des fentes dans lefquelles les filons fe font
formés, y9. On a des filons qui font uniquement
remplis de galets ou pierres arrondies 8c roulées,
qui ont pénétré par la partie fupérieure bien ouverte.
Parmi les exemples de galets réüdans dans
les filon s, il n’en eft aucun de plus frappant que
celui dont Mi Duhamel fait mention dans fa Géomé-
(rie fouterraine. Voici fes propres expreffions: c<Le
» filon principal de la mine de plomb 8c d’argent
93 d’Huelgôat en Baffe-Bretagne eft accompagné,
M tant au toit qu’au mur, d’une épaiffeur de dix à
» douze pieds de pierres roulées ou galets de dif-
»» férentes groffeurs. Ils font parfaitement fphé-
9> riques ou oblongs, ;le plus grand nombre étant
•» quartzeux , 8c fembiables à ceux que l’on trouve
M fur les bords de la mer 8c dans le lit des rivières.
* Les interftices font remplis d’une terre blanche 8c
y quelquefois ocreufe. Les travaux font à cinq cents
S pieds au deffous delà montagne , 8c le filon eft
w incliné de foixante à foixante 8c dix degrés. La
M difpofition du filon ne permet pas de douter qu’il
*» a été formé poftérieurement aux bancs de galets
»* qui lui fervent de parois. Ne pourroit-on pas
*i penfer que les deux bancs de galets n’en ont fait
Sî qu’un, qui par la fuite fe fera fendu ou partagé
33 par de nouvelles caufes,, 8c qu’enfuite le filon fe
*» fera formé en rempliffant le vide? »
En li.fant cec article dans l’ouvrage de M. Duhamel
, Géométrie fouterraine (page 43 & fuivante) ,
on ne peut s’empêcher de rendre à ce favant la juf-
tice de dire qu’il a connu déjà depuis long-tems
( 1775 ) J a vraie théorie des filons , 8c qu’il a fu
diftinguer outre cela les diverfes époques de leur
formation. Le filon de la mine d’Huelgoat nous
préfente, ajoute-t-il, plufieurs, époques qui doivent
être très - éloignées les unes des autres }
i°. celle de la fente qui contient le filo n} 2°. celle
Géographie-P hyfique. Tome IV^,
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du rempliffage de cette fente par les galets 8c la
terre qui eft dans les interftices} 30. celle de la fé-
paration de cette maffe de pierres roulées} 40. enfin
celle de la formation du filon métallique. J’ajoute
que la diftance de chaque époque a dû confommer
des tems très-confidérables. Ori trouve à Cha-
lanches, près d’Allemont en Dauphiné , des filons qui font uniquement remplis de pierres roulées,
comme celui d’Huelgoat, fuivant ce que M. Schrei-
ber remarque dans fes O'bfervations furlesmontagr.es
de Chalanches. M. Wernernous dit enfin avoir vu
à Altenberg en Saxe, 8c dans une roche de gneis, un
filon dont il a retiré des cailloux de quartz, exactement
fembiables à ceux que l’on trouve dans le lit
des rivières. II réfulte définitivement que plufieurs
fubftances , tourmentées par les eaux courantes à
la furface du Globe, ont pénétré dans les fentes
qu’ont occupées depuis les filons.
6°. On remarque des fragmens de la roche adjacente.
Ces fragmens de la roche adjacente font
encore des preuves que les gîtes des fiIons ont été
des fentes ouvertes. Ces fragmens ont abfolument
la forme de débris détachés des parois 8c tombés
dans le filon. Lorfqu’ils font grands, leurs couches
font parallèles à celles de la roche du toit 8c du
mur} ce qui prouve qu’ils n’ont été que déplacés.
Mais lorfque les débris font petits, ils affeCtent
toutes fortes de directions: preuve évidente qu’ils
font confufément tombés dans des efpaces vides.
Au refie, il n’y a guère que les roches de nature
fehifteufe 8c feuilletée, telles que l’ardoife le
gneis, 8cc., dans lefquelles on puiffe obferver
cette fingularité que préfentent les difpofitions, les
fdraangsm leens s 8c les débris de roche que l’on remarque f i Ions. ~
7°. Fragmens de la majfe des filons dans les filons
mêmes. Les fragmens de la maffe du filon que l’on
trouve quelquefois en plus ou moins grande quantité
dans le filon même, 8c qui, empâtés dans une
autre fubftance, forment une véritable brèche
ces fragmens, dis-je, prouvent que les filons onc
été autrefois des fentes vides. Ils peuvent être
tombés dans le filon de deux manières différentes :
d’abord le filon peut avoir été rempli & s’être
ouvert de nouveau par la fuite, c’eft à-dire que
dans le filon il s’eft formé une nouvelle fente dans
la même direction que la première} fecondement
un ancien filon peut avoir été traverfé par une
nouvelle fente. Dans ces deux cgs, une partie de
la maffe du filon déjà formé peut être brifée 8c
les fragmens en feront tombés dans la fente dernièrement
formée. On trouve beaucoup de ces
brèches dans plufieurs filons du Hartz, &c.
8°. On trouve des pétrifications dans les filons. M. de Born, dans fes Lettres écrites fur divers
objets de minéralogie, pendant fon voyage en
Hongrie, cite desporphytes trouvés à une profondeur
de quatre-vingt- neuf toifes dans le filon de la
montagne Spitaîer , au milieu du cinnabre compare.
M. Baumer parle de pétrifications qui fa