
Les habitations font près de la grève; elles i
n’ offrent qu’un toit en pente, fait avec des mor- !
ceaux de bois, & couverts de gramens & de '
terre. Les flancs font entièrement ouverts ; le plancher
eft auffi de morceaux de bois s l’entrée fe
trouve à une des extrémités, & l ’âtre ou le foyer
par-ierrière. 11 y a près de la porte un petit trou
qui donne uneifîue à la fumée.
NORWEGE. C e pays occupe une étendue de
plus de i yoo milles le long des côtes de la mer du
N o td , dont les formes & les détails doivent nous
intéreffer, ainfi que les parties correfpondantes de
l’intérieur des terrés.
La côte court vrai nord au cap Staff , qui eft
la pointe la. plus occidentale de Sondmot; enfuite
elle tourne au nord-eft à fon extrémité au cap
Nord. De hauts rochers de granités compofent le
front de cette côte : la mer, donc la profondeur
eft depuis une braffe jufqu’à trois cents, lave la
bafe'de ces, rochers : une multitude de criques
étroites pénètrent très-avant dans les terres & dans
le maffif des rochers, qui, par leurs fommets élevés
, dominent & ombragent tous ces réduits. Les
bords de ees baies ont une profondeur égale à
celle de la mer adjacente le long deS côtes voifines,
& le canal du milieu,, large depuis cinquante juf-
qu 'à cent braffe s y avec quatre cents braffes de fond,
paroît avoir été creufé .& approfondi par la force
dts rivières torrentielles qai s’y déchargent. D'innombrables
légions de poüfons peuplent les bords
de ces réduits.
Les criques font en plufieurs endroits les routes
du pays > car les vallées qui le coupent dans l’ intérieur
des terres font tellement remplies de précipices,
& les montagnes fi hériffées de rochers,
qu’on ne peut les franchir : on eft donc obligé de
pénétrer dans les vallées par les criques, & par
conféquent de communiquer de l’ une à l’autre en
faififfan* ces débouchés. Les vallées à l’ouverture
defquel’es ces débouchés ne fe trouvent pas ou
ne font pas d’ un accès facile, reftent inutiles, par
l’impoffibilité où l’on eft de tranfporter les articles
de commerce qu’elles pourroient fournir.
Un nombre infini d’îles grandes & petites, des
écueils de toutes formes, font dtftribués le long
de cette côte. Les îles préfentent des bords efoar-
pés & des montagnes qui correfpondenc à celles
du continent, & quant aux matières & quant aux
fermes ; ce qui prouve qu’elles ont été détachées
du continent par la mer. Les montagnes de Lcëf-
fort au nord, lè terrible gouffre de Maëiftrorn,
encre les' îlqs de Moskhé & de Moskenças, g ra v
é e s par Lebrun, peuvent donner quelqu’idée de
cette côte. L’ intervalle de quatre, à fix lieues du
continent & des îles offre ou des brifans ou des
bancs de fable oblongs, courant nord & fud', &
. qui font à dix ou quinze braffes de profondeur :
c’ eft là où réfi lent,des légions de poiflbns, dont
la pêche eft d’un très-grand rapport.
Air cap Nord on a remarqué que les fortes rtia-
rées s’élevoient à huit pieds un pouce , & que les
baffes ne montoient qu’à fix pieds huit pouces j devant
le Naze & le long de plufieurs autres parties
des côtes de la Norvège ,-elies font peu fenfibles,
excepté dans les vents violens d’oueft, où elles
s’élèvent à deux ou trois pieds , mais elles retombent,
alors avec cës vents.
Au fond de toutes les criques ou petites baies
viennent fe décharger, comme nous l’avons d it,
des rivières torrentielles qui travérfent les monta*
gnes du continent jufqu’ à une certaine arête : ces
rivières lont inutiles pour la navigation, mais elles
font d’une grande reffource pour tranfporter le
grand article du commerce de ce pays, les n.ôts
ôc. les bois de charpente qu’ on tire par ce moyen
du fein de ces forêts, qui feroient inacceflïbles
par toute autre voie de tranfport.
Lesdsçbres coupés & précipités des fommets les
plus efcatpés, & jetés dans ces rivières, franchif-
fent des c a ta radies nombreufes, jufqu’à ce qu’ils
foient arrivés aux barres des pieux établis en travers
du courant pour arrêter les matières qui
flottent : c’ eft à ces eftacades que fe rendent les
propriétaires des bois pour les reconnaître.
L’efpèce de bois la plus utife eft le pin d’Ecoffe
& le pin des forêts-, de Linné : ce dernier croît dans
les terrains les plus fees, & v it fort & vigoureux
près de quatre cents ans } il eft d’un ufage univerfel
dans le Nord. Les arbres qui ne font pas deftinés à
faire des mâts font équarris en poutres : le refte eft
feié fur Les lieux dans un grand nombre de moulins à
fe ie , & enfuite tranfporté par tes rivières. On tire
auffi de ces arbres une quantité confidérable de
goudron , & même de'leurs racines long-temps
après la réparation du tronc. Le pin de Norvège
eft moins eftimé ; on en abat cependant annuellement
des parties eonfidérables : c’eft le plus haut
des arbres de l’Europe : il croît jufqu’à la hauteur
de cent foixante pieds.
Il arrive fort fouvent fur ces rivages, comme
fur ceux de l'Iflande, des Orcades & de Feroë, des
bois de toutes fortes, des-fruits qui font- apportés
de l’Amérique, 8c fartout du golfe du Mexique
par des courans dont nous avons fait voir la fui ce
&c la marche : outre cela, cette côte en fournit
elle-même à l’ Iffandé ; car le pin commun, le fa-
pin, le tilleul & Les faules y font tous, S: proba*-
bkment apportés de la Norvège.
Les montagnes de la Norvège font des objets de
recherche très-rmereflans pour un natu-ra lifte, Leur
étendue iramertfe, la variété des plantes quelles
produifenr, des animaux qui y vivent & des poiffons
quife pêchent dans tes Lacs nombreux diftribués a»
fond des vallées étroites qui les réparent, mérite-
rotent des voyages fuivis de la part des fa vans habitués
à l’étude de chacun de ces objets. En attendant
que nous ayons acquis , par des obfer va tiens
raifbnnëés , tontes les connoiffances dont nous
. aurions befoin , nous allons préfentet ici ce que
i
nous avons pu recueillir des divers auteurs qui en
ont parlé.* gj
Il eft difficile de dire où commence la chaîne de
ces montagnes a en Scandinavie elle part du .-grand
rocher. Koëlen, à l’extrémité du Finmarck; elle
entre dans la Norvège par le diocèfe de Dron-
theim ,, fe dirige à l’ojueft vers la mer, & s’y termine
par une côte efearpée à Lheirefofs, à trois
milles norvégi/ensde Lilter. Une autre branche fé-
pare la Notvège de la Suède, parcourtla- Laponie,
s’y élève & forme les fommets remarquables.
d-Horrilakjro, d’Avatska & de Ritcif, & fe-termine
en muffes éparfes de granité dans la baffe province
de Finlande : elle enferme la Scandinavie en
forme de fer à che.val, & la fepare des vaftes plaines
de la Ruffie fous le -nom de Seveberg, traduction
de l’ancienne dénomination que lui-a voient donnée
les Anciens, qui la connoifloient fous le-nom de
Sevomons.
Les montagnes, les îles & les côtes brifées dont
nous venons de parler,-offriroient effectivement
aux naturaliftes une .variété d’objets de tout genre,
une ample.matière à difeuflion, dont ils pourroient'
tirer des référais infiniment importans pour la
géographie phyfiqae de ce pays.
Les hauteurs des montagnes de- la Scandinavie
ont été exagérées par i’ év-êque Pontoppidan &
M. fixov/allius-: les calculs plus juftes & plus précis
qu’en ont fait plufieurs fa vans, nous prouvent
qu’elles ne font nullement comparables, quant à leur
élévation, avec les Alpes de Suiffe, & encore
moins avec les montagnes des. Cordillères, ficuées
fous l’équateur, 8c qu’ai n fi on peut établir comme
un ^principe certain, qu'il y a une augmenrauon
progrefti ve de hauteurs datas les montagnes depuis
le .nord jufqu’à l ’équateur. M. Afcanius, profeffeaide
minéralogie à Drontheiin, aiffure , d’après des
mefores récentes, q tie les plus hautes de ce dio-
cèfo>n’excèdent pas fix cents toiles au-deffus du
niveau de la mer ; que, dans les montagnes fi tuées
vers le côté occidental, il y a une dégradation régulière
fur une étendue de huit à dix milles, &'
du côté oriental, fur une étendue de quaranre
milles.- La plushauie eft, dans le Drontheim, Duvre-
FïÀl3 & dans le diocèfe de Bergen, la montagne de
Tille. En Suède il n’y a guère qu’une montagne
qui ait été mefurée avec foin, & dont la hauteur
ait été déterminée au-deffus du niveau de la mer.
Kinnekulle, dans la Gothie occidentale, n'a que j
huit cent quinze pieds anglais de hauteur au-deffus
du lac Wene r, ou neuf cent trente-un au-deffus
du niveau de la mer. Aorskata, montagne fpÜ-
taire du Jatntland, à quatre ou cinq milles fuédois
des plus hautes montagnes qui féparent h Norvège
de la Suède , a 6 162 pieds anglais au-deffus des rivières
les plus voifines} S^uckaftol, fur les confins
de ia Norvège, quatre milles fix cent cinquante-
huit au-deffus du lac Famund, qui lui-même eft
élevé de deux ou trois mille pieds au-deffus de-la
n^er j enfin Sy lficllen, fur lies confins du Jamtland,
I a trois mille cent trente-deux pieds de hauteur du '
fommet à la bafe. On fait que Pontoppidan don- ’
noie aux montagnès dé Norvège trois mille toifes
de hauteur, & que Browaljius prêtoit à celles de’
Suède dèux mille trois cent trente-trois toifes ; ce
qui les égaler oit aux plus hautes Alpes de la Suiffe
& de la Savoie, & même aux plus hautes cimes
des Andes du Pérou.
Dans le Finmarck, les montagnes, en certains'
endroits, fe prolongent fous la forme dé caps fort,
élevés fur la mer : dans d'autres elles s’en éloi-*
gnent, & laiffent des plaines fort étendues entre
leurs bafes & la mer. On remarque que les fommets’
' les plus élevés de ces chaînes font ce qu’on appelle
le dos des^ Alpes ( dorfum alpinuvt') : là," les fom-'
mets font couverts de neige : .au pied eft une ceinture
de montagnes d’un ordre inférieur, compo-
fées de fable & d’une terre dure & compacte ; mais'
elles font encore dépouillées de toutes fortes de
végétaux, excepté aux endroits où les montagnes
font couvertes de tpr-res végétales, dé débris des
rochers-, & fur lefquelJes fe montrent diverfes ef-.
p è ce s de faxifrages & la fanicle.: le diapenfia lapon ica,
1 a^a/ea prpeumbens , Yandromeda.. c&rulea & \hyp-
noides y font clair-fomés : plus bas font de vaftes
forêts de bouleaux, arbre utile aux Lapons comme'
aux Indiens de l*Amérique feptentrionale. Sur les
qiontagnes moins élevées croît en abondance le
lichen de renne, qui eft la feule nourriture de ce.
bétail; le bouleau nain, donc les graines cachées
fous la neige font la nourriture des gelinottes blanches
à longue queue pendant l’hiver dé" ce pays ,
quieft en même temps long & rigoureux; l’arbou-
ner des Alpes, l ’arboufier uva arfi, '$t enfin Vem~
petrum nigrum, ou les graines mures de bruyère
-, noire, dont les Lapons font ufage dans leurs mets.
Le pin d Ecoffe & le fapin de Norvège forment,
avec le bouleau, les immenfes,forêts de ia Laponie.
Le pin aime les terrains fecs ; Te fapin fe plaît
dans les terrain s humides, & ils y acquièrent un
volume confidérable; mais comme ces forêts-font
inacceffibles, les arbres qu'elles renferment, font
perdus pour les divers emplois qu’on pourroit en -
faire. Du côté du nord, ces mêmes arbres font
prefque nus & dépouillés de leurs branches par
l’aélion des vents du nord, & cettè obfervation
lert de bouffole aux Lapons pour fe guider dans'
ces forêts immenfes. La foudre en brûle fouvent
dé vaftes étendues, & les arbres féchés fur pied
par le feu font renverfés enfuitq par les ouragans.
L’écorce intérieure du bouleau, pulvérifée &
cuite au four , remplace le pain pour le peuple
dévoué à ces rigoureux climats. Ces trois arbres,
le bouleau nain, l’érabie & le faule, dont il y a
jafqu’à vifigc cinq efpéces, forment tous les arbres
dæ la Laponie : les autres qu’on voit en Suède
difparoiffefit àTapproche de cette contrée.
Tl y a une grande analogie entre les plantes de
ces Alpes du Nord & celles des hautes terres
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