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quels on lie des cannes ou rofeaux, .très-commodes
pour cet ufage.
Dans l'intervalle on fème alternativement du
blé & des fèves qui entretiennent une verdure
très-agréable, & donnent F idée d'un printemps
-continuel. Les oliviers, les orangers, les citronniers,
les cédrats, lesaloès, les caroubiers, les
lauriers, les myrtes, les grenadiers, contraftent
agréablement vers les Alpes, qui fe découvrent à
; deux ou trois lieues de diftance, & qui font fou-
yent chargées de neige.
La culture fe fait toute à bras d’hommes avec
inn feul outil, dont la forme eft celle d'une pioche
fort large & prefque carrée.
Les denrées y font abondantes & bonnes :
l'huile qu'on y recueille eft comparable à celle
d'Aix & coûte moins cher 5 le vin peut le difputer
aux meilleurs'yinsde la côte du Rhône, & porte
moins à la tête. Les -fruits à noyaux y font délicieux
& en abondance } il y croît peu de fruits à
pépins, mais les habitans en tirent quantité de la
Provence feptentrionale.
Le commerce confifte en huile', v in& foie. On
exporte encore des fuifs, des favons, des oranges,
des citrons, des effences & des fleurs, comme
, oeillets, giroflées, anémones, renoncules} on en:
envoie par la pofte à Paris, & même à Londres,
pendant l’hiver : elles arrivent très-fraîches dans
de la moufle.
.Nice eft fïtuéè au midi de Turin, à la diftance de
trente-trois lieues en ligne droite, & à pareille diftance
de Gênes & de Marfeille; elle eft le refuge
. des étrangers que le froid & l’humidité incommodent
, & il en eft peu qui paffent de France en Italie
. fans reconnoître cè pays, juftement célèbre par la
douceur du climat & la beauté dç fes campagnes}
d'ailleurs, le plus grand nombre des géographes
l'ont Compris dans cette belle contrée de l'Europe,
en donnant à l’Italie pour limite occidentale, le
Var qui tombe dans la mer à une lieue de Nice.
Cette ville eft adoffée à un rocher : en diftin-
gue la ville vieille & la ville neuve : celle-ci eft.
tirée au cordeau} les maifons en font bien bâties.
.E lle s’étend le long de la mer, où, l’on a fait un
beau fempart& ime fuperbe terraffe, d'où l’on
découvre, par un temps clair, les montagnes de
Corfe. Au pied.de cette terraffe eft une promenade
couverte, &r près de-là une place fpacieufe.
La ville vieille .n'a qu'un quart de lieue dans l'en-
.ceinte des remparts. Les rues font tortueufes,
étroites, inégales, extrêmement fombres & fort
fales. : cette partie ancienne forme un amphithéâtre
fur la pente occidentale du rocher.
Le port étoit féparé autrefois de la ville par le
même rocher qui le refferre d’ un cô té , tandis
qu’il eft borné de l'autre par une montagne de
pierres calcaires il y a dix-fepe pieds de pro-
fondeur d’eau, ce qui fuffit pour les bâtfmens de
.trois cenrs tonneaux. On a. diftribué avec inteili-
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gence -, vers le port,.les eaux d'une fontaine très-
abondante & très-bonne, avantage qui eft furcouc
apprécié par les marins.
Des environs de Nice.
M. Riffo, favant naturaliftede Nice, adonné,
dans plufieurs Mémoires, des notions fort inté-
reffames fur çe beau pays. G'e.ft dans ces Mémoires
que nous puiferons les détails que nous allons
rappçrter ci-âprès.
Le pic de Seneftré, dont le fommet s'élève à
1500 mètres au-deffus du niveau aéfiiel de la mer,
eft au nord du comté de Nice 3 & en confiitue le
point le plus élevé. C'elt de-là, comme d'un
centré, qu'on voit s'étendre,'d’ un côté, la chaîne
de montagnes qui, fe prolongeant à l'eft , donne
naiffanceaux Apennins liguriens , & qui;ife développant
de l'autre cô té , à l’oueft, forme les monts
inégaux de la Provence. Les Alpes maritimes, placées
au milieu, prennent leur direction, vers le
fùd , & v on t, après différentes ramifications, fe
joindre infenfiblement à la-Méditerranée.
La vue magnifique qui fe développe à''cette
élévation, rafpeétimpofant des fommets.de montagnes
nues & arides, la direction .finueufe des
vallées qui fe deffment fur leurs flancs tourmentés
, frappent l’efprit de tout obfefvàteur qui contemple
cet immenfe amphithéâtre. Bientôt il croit
y fuivre affez diftin&ementTes traces des révolutions
phyfiques que cette partie des Alpes a
fubies. Tantôt il voit l'Océan^ dès-lors habité,
comme aujourd’h u i, par une innombrable quantité
de corps marins, fe retirer rapidement &
avec précipitation, en renverfant tout ce qui
s'oppofe à Ton paffage } tantôt , au contraire, fl
voit les eaux calmes de la mer féjourner longtemps
dans les mêmes parages , abaiffer infenfi-:
blement leur furface, mettre lentement a decou-
! vert les rocs qu’elles avoient cachés, & former,
par les dépôts tranquilles de couches fücceffives ,
une partie de ces montagnes calcaires que nous
regardons aujourd’hui.comme primitives.
T o u t, ic i, femble encore indiquer- la traçed’une
longue fubmerfîon : là des corps marins attellent,
kparia régularité des couches dans lefquelies on les
voit dépofés.,- le féjour des eaux calmes „& ftation-
naires } plus loin , c'eft un détordre,' une confia*
fion qui ne retracent que trop évidemmenfla rapidité
&Ta fureur des courans. De tous côtés, des
maffes rehverfées, irrégulières, dont les fragme ns
conftitués de débris d’êtres aquatiques, font des
preuves, des monumens irrécufables de leur ex:f-
tence antérieure dans les mêmes lieux. Enfin,
tout* dans ces montagnes, fémble prouver que
l’énorme étendue d’eau dont elles étoient couvertes,
a reijverfé avec violence & rapidité les
obftacles qui s’oppofoient à fa chure, & a pror
duit ainfi ces ruptures immen.fes qu’ on, remarque
fur les grandes maffes de roches y la plupart Tapées
dans’leurs antiques fondemens. y
Une chute auflî précipitée feroit-elle devenue
la caufe. naturelle de ces grandes profondeurs , de
ces abîmes fous-mdrins dont la plage de '.Nice, elt
environnée , & qui fervent maintenant de. lieyx
de retraite, d’abri & de refuge à tant de poif-
fons extraordinaires qui abondent dans ces mer^?
Ges ruines de montagnes, ces bancs de. pierres
roulées , ces énormes amas dé poiffons, ces dépôts
de coquilles, enfin ces empreintes multipliées
de corps organifés; n’offrent-ils point
partout l'effrayant tableau des . anciens cata-
clifmes dont le naturalifte ne peut plus .aftigner .
les époques ?
Les eaux de la mer de Nice 3 portion du vàfte
baffin de la Méditerranée, viennent baigner ces
'décombres aux pieds des Alpes maritimes. Le
mouvement de leur flux’ & reflux journalier,
très-peu fenflble, n’eft réellement remarquable,
chaque année , que dans le mois de'février. Letrr
température à la furface fuit à peu près les variations
& les intempéries de l'-atmofphère^ mais à
de très-grandes profondeurs, on les a conftamment
trouvées plus froides de moitié dans les faifons les
plus chaudes.
La mer s’étend en ligne droite depuis le Yar
jüfqù'à la Taggia', fur ug efpace de ±8,000 toifes. 1
Cette plage , vue de la haute mer de Saint-Hofpice, '
fe préfente comme un golfe immenfe, bordé de
falaifes calcaires & de grès friables qui, s'avançant
en pointes , baiffent graduellementieur front dans
la mer. On y diltingue égilement des rives nues,
arides, couvertes de cailloux roulés ou de.fable
fin. Tout cet.horizon eft coupé du nord au fud
par des rivières & de petits golfes , par les finuo-
fites des vallons & lés cafcade,s des ravins, qui
donnent à cette côte ainfi aperçue de loin, fap-
parence d’une terre couverte de ruines & de def-
truêlioii. Quelques pins, nés ifolément & à de
grandes diiiances fur les pics de ces élévations
ftérilës, femblent limiter lesefpaces, qu'on ne
croiroic plus'habités par des êtres vivans-. Ces en-
fans des fiècles femblent feuis vivifier de trilles
contrées, animer de leur verdure un morne rivage
, fi différent en réalité de fa trompeufe apparence.
La profondeur de cette partie de la Méditerranée
varie fuivant l’élévation des côtes. On ob-
ferv e, en général, que, dans les parages qui cor-
refpondentatix plaines, les.eaux foiit très-baffçs,.&
qu’au contraire elles s'approfondi fient exceffiye^
ment au bas des montagnes, en raifon de la.hauteur
de ces dernières. C ’eft ainfi que,, fur les côtes de
San-Remo , de Vintimigle, de la Bordighera, la
mer eft peu profonde } qu’ à Menton , à Monaco,,
elle defeend à quinze cents pieds; que vers Villes
franche, elle en a trois mille fix cents ; qu’on en
teconnoît fix mille dans TanCe de Nicey & qu’elle
femble enfin incoromenfurable dans le lointain de
Biulfi-Rpuftî.
Ges grandes profondeurs font hériffées de rochers,
& ne font fréquentées que parles poiffons
des genres fqual'e, balifte, chimère* xiphias ,
gade, carahx , centroriote * lépidolèpre, trigle ,
centropome * holqcentre, bodian, tétragonure,
pomatome, Hic.
A neuf cents pieds de profondeur, en avançant
vers la terre * le fond de la mer eft recouvert d&
fange & de limon, féjour impur des raies, des
lophies, des. cépplés * des z é e s , des pleurone£les,
des oligopoles, enfin de tous les poiffons à chair
molle & baveufe.
En continuant à s’élever à quatre cent cinquante
pieds de profondeur, à peu prè$, la végétation
fe mànifefte.rTes algues , les catrlimes, les ulves ,
les cornerves,. les vareçs & les zoophytes qui tâ-
piffenc ce féjour., y appellent les ophfdi. s , les'
ilroriiatées * les murènes , les uranofeopes, les
vives., les feorpènes, les périftédions, les labres*
Tes fparës, les lutjans,Jes éfoces , les muroeno-
phis,. &ç.
Viennent enfuite les rochers du rivagfe * où les
fyngnathes, les centrifques, les blennies, les ba-
trachoïdes, les gobies* les notoptères font leur
demeure accoutumée.
Enfin, les belles plaines de galets & de fable ,.
où fe nourriffent les lépadogaftres ,. les ammodÿ-
tes , les calliopymes , les lépidopes-, les gymnè-
tres, les ofmères ,. Tes fcombréfoces,.les argentines,
les athérinès, k s ftoléphoîes * les mugils *
les dupées ik lesTerpes.
Les cétacés qui vifitent les rivages deNice font fe
la baleinoptëre rorqual, le dauphin ,.le marfouin,
l'orque & quelquefois le cachalot macrocéphale..
On prit dans les madragues * en 1787 , une balei-
noptère mufeau pointu, .du poids de près de quatre-
vingt-quatorze milliers.,
Le nombre des poiffons que M^ Riflfo a.obfervés
comme provenant de la mer, dé Nicet s’élève, à
près de trois cent cinquante, parmi lefquels un
grand nombre d’^fpèces n’avoient jamais été dé.*»
! crites par les ichtyOlogiftes. Il a reconnu que les-
plages de Nice nourriffoient beaucoup de poif-
Idns que,les auteurs avoient annoncé habiter les
mers-d'Amérique, d’Afrique & de la Norwège
& plufieurs autres dont on n’avoit point jufqu’à
préfent indiqué la patrie.:
- Si. les- environs de Nice font intéreffans par le
nombre prodigieux'des poiffons de fon golfe 8c
par les cultures d’arbres des pays les plus chauds
qu’on y. reiparque ,, ils ne le font pas moins fous
; le rapport de la géologie. Le rocher auquel eft
adoffée la ville, eft calcaire; fes fiffures font remplies
d’une fingulière brèche, entièrement corn-
pofée de fragmens d'os de mminans 8c d'autres
Aefpëçes d’animaux , dont les deux feules qu’on ait.
pu bien déterminer , fe font trouvées appartenir à
des .animaux que nous ne connoiffons plus. Mais.