
chappe perpétuellement un courant d’air. Lorf-.
qu’on en approche l’oreille, on entend le bruit qu’il
tait en fe dégageant de ces paffages tortueux &
©bftrués en grande partie.
Les vapeurs chargées de b i tu m e e n s'exhalant
dans l’atmofphère, fe mêlent aux nuages &
prodtiifent un phénomène qu’on nomme fata mor-
gana.
Tout le terrain du fond du grand badin du lac
eft très-mou , & cependant a une forte d’élafticité.
Lorfque le lac eft plein, l’ébullition des petits
baflîns fe fait toujours apercevoir, quoiqu’ ils ne
forment plus qu’ un lac avec lui î les jets de leurs
fources & des émanations qui les accompagnent,
font très-vifibles & très-remarquables , malgré la
couche d’eau qui les recouvre.
NAPLES ( Royaume & ville dé ). Le royaume
de Naples, une des plus belles parties de l’ Italie,
préfente toutes les richefles d’un fol extrêmement
fertile , les produits curieux de l’ancienne a&ion
des feux fouterrains, & les phénomènes étonnans
du mont Véfuve toujours en a&ivité.
; L’Apennin, qui s’étend jufqu'à l’extrémité méridionale
de l’ Italie , forme la chaîne des montagnes
qui fe trouvent dans le royaume de Naples j
il e ft, comme les Alpes, bordé par en bas dé
coliines coinpofées de fables , de grès'Se d’autres
débris, mais moins abondans & d’un moins grand
volume que ceux des Alpes. Les montagnes .de
l'Apennin font prefque toutes de fécondé formation
y calcaires, ollaires, fchifteufes , remplies
de rhines & de marbres. Depuis le mont Traverfo,
entre Bologne & Florence, on y trouve fréquem
ment-des vèftiges d’anciens volcans ; mais ils deviennent
plus communs à mefure qu’on approche
de Naplesy où tous les environs n’offrent que des
productions Volcaniques. Les îles voiftnes, telles
que Procida, Jfchia, Ventotiene, Monte-Chtiflo,
font entièrement volcaniques. A l’orient de Naples,
au milieu de tant de volcans éteints , le Véfuve
eft le feul dont les feux foient encore allumés.
Parmi les phénomènes phyfiques que la nature
étale dans ce pays , on remarque là grotte duChien,
fameufe par la mofette qui en fort, & la Solfatare,
'trinft nommée à caufe dé la quantité de foufre
quelle contient, & dont, en certains endroits,
le terrain eft brûlant à la furface.
Les'plaines de ce beau royaume, ainfi que toutes
celles de l’ Italie, ont été recouvertes par les eaux
de la mer dans des te,mps anterieurs à tous les
monumens hiftoriques , mais pourtant poftérieurs
à la formatipn d^s montagnes & aux premières
révolutions de notre Globe. Celle delà Campanie
heureufe a éprouvé l’adiôn des feux fouterrains;
fon fonds eft tout vokmique, mais il eft entièrement
recouvert d’épaiffes couches’ de fable de
gravier & de galets chariés par les eaux, &r mêlés
même encore de coquillages; enfin , dans les lieux
mêmes- que les volcans femblent avoir le plus- refpeClés,
on trouve fréquemment d’autres indices
de l’aCtion des feux louterrains, tels que des
fources chaudes, des vapeurs enflammées, des
bullicames ou fontaines qui paroifient bouillantes^
La variété des pierres de cette contrée eft im-
menfe : on fe contentera d’en indiquer quelques-
unes.
i p. Les laves proprement dites, qui font des
pierres ou des terres fondues par FaCtion des feux
des volcans. Les unes font informes , & d’autres
font en prifines réguliers ou bafaltes ; on y trouve
aufli des laves poreufes-, des -laves filamenteufes
ou pierres-ponces, & des débris atténués de ces.
différentes efpèces ou pouzolanes, &c.
i° . Les terres ou pierres qui n’ont été qu’à;
demi fondues , & qui ont coniervé en> partie les
formes & les earadlères qu’elles avoient avant
d’être attaquées par le feu :■ tels fonr les granires
volcaniques , dans le'quèls ôn reconnokencore les
criftaux du feld-fpath, les-tragmensdu quartz, &c.
'3°. Les pierres qui ont entièrement éludé ou
•furmonté l’a&ion des feux volcaniques; celles,,
par exemple , qui ont été lancées par des exploitons
Ibuterraines fans avoir fu.bi aucune altération
, comme ces fragmens de marbre que l'on
trouve épars fur les flancs du Véfuve, &c.
4°; Les mélanges de terre, de pierres & de
laves brifées qui-ont été vomies par les Volcans-
fous la forme d’une bouillie aqueufë , & qui ont
acquis enfuite une plus ou moins grande confifr
tance , tels que 1 eiùfa de Naples x le péperino de
Rome; telle eft encore là matière qui a englouti
Herculanum.
5a. Les laves ou autres productions-de volcans
qn i ont été decompofëes par faétion, foit de l’eau ,,
foit de l’air , foit des fumées fulfureufis , comme
les laves blanchies & le s argiles de la Solfatare.
6°. Les matières q u i, après être forties des
volcans fous quelqu'une des formes précédentes,,
ont étfé diffoutespar les eaux&enfuite criftallifées
o-u agglutinées fous dès formes entièrement nou-*-
velleSj. comme l’es hydropales de -Vicence, les-
brèches volcaniques du Val-d’Agno , & les matières
criftallifées qu-’on trouve dans les laves.
Le climatde ce royaume eft extrêmement chaud.
Les plantes d’orangerie de toute efpèce réunifient*
en plein air fans aucifn abri ; mais il gèle pourtant
encore,, même dans les lieux peu élevés au-def-
fus du niveau- de la mer.
L e territoire eft d’une fertilité prodigieufe en*
grains, fruits ,. & tout ce qui peut rendre la vie-
agréable & heureafe.. ~
Les vignes font abondantes dans ce royaume y
elles forrt toutes élevées fur des peupliers : cela-
rend les campagnes très-fraîches & très-riantes..
On ne peut rien voir de plus agréable que celles*
ou l’on p:fie en arrivant de Rome à Naples par
Capoue y le chemin eft bordé par des campagnes
couvertes de grands peupliers; ces arbres font
joints par des vignes- qui vont fou-vent. de. l!un-à>
Vautre en forme de guirlandes. Il y a trois ou j
quatre ceps de vigne à chaque peuplier, & dix à
douze pas de diftance d'un arbre à l’autre.. Dans
bien des endroits, les bords du chemin font couverts
par des- buiflbns de myrte mâle : cet ar-
briffeau , que les Italiens appellent mortella , eft
toujours vert; fa feuille eft alongée & d’un vert-
tendre, à la- différence de celui qu’ils appellent
improprement myrte femelle, donc la feuille eft
plus courte & d'un vert plus foncé : fon fruit,
qu’on appelle myrtille, eft une .petite baie comme
celle du genièvre, mais d'un goût plus agréable.
On y voit aufli, même à la fin de décembre i des
fleurs de toute efpècè, & furtout des narçiffes
qui y croiffent naturellement & en abondance.
C'eft à. tort qu’on a écrit que , dans ce climat,
la vieille feuille ne tombe point des arbres qu’elle
ne foit pouflee par la nouvelle :: cela n’eft pas
étonnant par rapport aux pins, cyprès, leccini
pu chênes-verts, & par rapport aux orangers qui
font verts en toute faifon ; mais à l’égard des
chênes ordinaires , des ormes, des noyers & autres
arbres qui chez nous quittent leurs feuilles
pendant l’automne, ils les quittent également dans
les environs de Naples, feulement fix^femaines
plus tard qu’ën France, & ils les reprennent fix
ièmaines plus tô t ; ces arbres s’y élèvent moins
hauts qu’en France & dans le Nord : :1a grande
chaleur les rend tortueux & petits, & ils fe couronnent
de bonne heure ; mais ils font plus denfes,
& furtout beaucoup plus durs .que les nôtres : les
ormes, les chênes , & même les noyers d’Italie
employés au charronnage -, durent lïx fois plus que
chez nous.
La verdure du printemps eft plus belle dans le
rpyaume de Naples : le vert des arbres eft moins
obfcur qu'il ne l’eft en France.
Les mûriqrs y font très-cultivés ; mais il y en.a
plus de noirs que de blancs, ce qui rend la foie
moins-belle que dans le refte de l’Italie.
Beaucoup de ruifieaux & de rivières contribuent
à l’extrême fertilité de ce beau pays. Plu-
fieurs ports de mer exceliens y entretiennent un
commerce avantageux ceux de Naples , de Gaëte,
de Baies, de Reggio , font précédés de golfes &
derad-js qui font très-favorables : celui deTarente
eft un des meilleurs de la Méditerranée.
Le commerce de Naples confifte ën b lé, huile,,
laine, troupeaux, foieécrue, taffetas, chanvre,,
poil de peaux de lapins, merrain pour les ton**
«eaux, manne , effences , marbres Vautres objets.
Le caractère des Napolitains eft extr-êmemenr.
txanquille :: les jaloufies cruelles , les vengeances
atroces qui étoienc fi communes dans les-derniers-
fiècles ,.ne paroilfent plus aujourd’ hui ; les Grands
vivent .en focié-té ainfi qu’à Paris, & avec la même
liberté. La fociéré y eft extrêmement agréable. La
nobleffe y eft riche , magnifique, & vit d’ une manière
pleine d’aifance & de charmes. Le peuple y
eft peu- laborieux., ce qui nuit à.la profgérité. de.
cet E ta t, qui offre d’immenfes reffources, tant du
côté de l’agriculture que du côté du commerce
& de la marine. Parmi lés arts agréables qu’ on y
cultiv e , la mulïque fe fait diftinguer; elle eft le
triomphe dès Napolitains. Il femble q u e , dans ce
pays-là, les cordes du tympan foient plus tendues „
plus harmoniques , plus fonores que dans le refte
de l’Europe : la> nation eft toute chantante; le
gefte , l’ inflexion de la v o ix , la profodie des Syllabes
, la converfation même,, tout y marque &
y refpire l’harmonie & la mufique : aufli Naples
eft-elle la fource principale de la mufique italienne
& des grands compofiteurSr
N a p l e s ', ville capitale de ce royaume, pré-
fente le plus fuperbe afpeél. On ne peut rien imaginer
de plus beau , de plus grand , de plus orné ,,
de' plus fingu ier à tous égards, que le coup d’oeil
de cette-ville, de quelque côté qu’on la voie : elle-
eft placée au fond d’un baftïn appelé en italien*
Cratere, qui a deux lieues & demie de largeur &
autant de profondeur ; il femble prefque fermé1
par l’île de Caprée qui fe préfente du côté du-
midi, &quoiqu’ à fept lieues de diftance, termine--
agréablement la vue. On croit voir aux côtés de
cette île deux ouvertures ; mais l’une a-1 plus de
huit lieues de largeur, & l’autre feulement' une
lieue ': quoique vues de Naples , elles- femblent
prefqu’ égales. Le contour de ce baflin eft’ ofné-,
du côté de l’orient, par le palais de Portici-, par
les villages & les maifons de campagne qui fe.
fui vent fans interruption depuis Naples jufqu’ait-
delà de Portici.Le Véfuve , qui s’élève par-delà,-
rend ce fpeétacle plus grand 35 plus* impofant
Herculanum & Pompeia font du même coté. A
-l’occident font les maifons' agréables & la grotte
fingulière de Paufilipe,. les feux-- de la Solfatare
& la grotte du Chien ^ tout ce qui environne ou
avoifine le baffm de Naples*, eft extraordinaire &
fameux. Du côté-du nord elle eft entourée par
des montagnes qui forment une couronne autour
de la ville; enfin, on y voit l’extrémité de la terre
de Labour,.c’eft à-dire , de ces campagnes fertiles
& 'célèbfes que lès Romains appelèrent la Cam•
partie- keureufe , & qu’ ils regard aient comme le
payé le plus riche & le plus beau de l’Univers. '
Naples-eft fîtuée au fond de ce théâtre, fur le
penchant d’une montagne ; elle embraffe la mer
par une vafte étendue de faubourgs,, la domine
par des châteaux , l’embellit par des maifons fu-
perbes ,-diftribuées-en amphitéâtre depuis le haut
de la montagne jufqu’ en bas ; ce développement
& ce coup d’oeil font une des plus^belles chofes
qu’ il y ait au monde, & tous les-voyageurs conviennent
qu’ ils ne connoiffent rien de comparable
à la beauté de cette fituation.. On ne peut lui*
oppofer que la vue de Conftantinople & celle de.
Gênes, qui eh approchent le plus.
Le balfin de-Naples eft terminé fur la droite pat
le cag de Mifène j. fur la gauche par le cap de Mafia..