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- 7°. Effectivement,.les Maures dominent en Ef-
fous le commandementdes gouverneursnom-
mes par les califes jufqu’en 7 5 6 , époque à laquelle
k maure Ab jou i Rahman, sfempare du fceptre
efpagnol ‘devient roi de Cordoue. Ses fuçceT-
feurs-continuèrent à. déployigr beaucoup de riche’(
Tes & depuiffance, & étendirent le commerce
à'Efpagne. Cette dynaftie fe maintint jufqu’en
1038 » qu’expira.le califat efpagnol.
La dixième époque eft remarquable par la conquête
du royau.me de Grenade, la dernière des
royautés maures, & par la réunion des couronnes
de Gaftille & d'Arragon dans les perfonnes de
Ferdinand & d’Ifabelle
On ne peut que difficilement fuppofer qu’il
exifte .quelques monum.ens .de ces, différentes
.époques. Si l’on excepte les monnoies des Car-
thaginpis, qu’ on a trouvées en grand- nombre ,
YEfpagne ne poiTède aucun monument authentique
de ce peuple célèbre.
Les antiquités romaines y font au contraire fi
multipliées, que le détail en feroit faftidieux. L’aqueduc
de Ségovie eft un des plus beaux édifices
qu’aient biffés les Romains. Il renferme ce'nt cin-
quantemeuf arches , qui occupent une longueur
de deux mille deux cent vingt pieds: fa hauteur,
au deffus de la vallée qu’iLtraverfe, a plus de quatre-
vingt-quatorze pieds. Le théâtre de l’ancienne
•Sagonte, qui a pu Contenir près de dix mille fpec-
tateurs, en taillé dans le r o c , travail moinsdif-
fficilequ’on ne pourroit croire, vu que les couches,
en Ejpagnej font affez généralement gypfeofes &
calcaires bien' décidées.
Mais les mônumens dès Maures y font nombreux
& pleins de magnificence; La mofquéè dé
Cordoue fut commencée par leur premier calife.
La mofquée de Cordoue étonne encore les voyageurs
par la multitude dés colonnes qui la_ décorent,
& qui font au nombre de huit cents. A
trois milles de Cordoue étoit uhe ville où le troisième
calife maure fit conftruire un palais magnifique.
Or y comptoit mille quatorze colonnes de
jrvarbre d’ Afrique & d ’Efpagrie, dix-neuf envoyées
d’ I t a l i e & cent quarante d’une beauté extraordinaire,
préfent de l’Empereur grec. On voit que
ces Maures avoient le. goût de la plus grande
magnificence.
* On a beaucoup vanté le climat d’ Efpagne ; cependant
l’air eft mal-fain dans les provinces méridionales,
& occalipnne quelquefois des fièvres
malignes qui enlèvent biçn’ d,ès, victimes. Ces
épidémies ont apparemment leur fource dans
l’état négligé du pays,, dans ces marais ftâgnans
qu’on pourroit, par le-defféchement, convertir
en eaux courantes. & en; vertes prairies. Mais
le plus terrible des fléaux quî frappe YEfpagne,
c’en ce funefte vent de /ùd-.eft, connu fous le
nom de folano ^quifemble/ouffief les défordres
èc les crimes. Ces effets font, tels q u e , fous fon
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inflûence | il: fe commet plus dé méurtres en
trois jours que durant tout le refte-de l’année..
Les chaînes de montagnes qui traverfent cette
.contrée Tçft à l’oueft fe Ciblent; tempé'rëË le
-cliipat & envoyer des b r i fe s ,-r a ira klûffmt=s ,D i ris
Je fud la b ri le de mer, fqufflant dès neuf heures du
.marin jufqu’à cinq du fo ir , vient fort à propos
• tiédir l’air brûlant de l’été î & vers le nord la rir
gueur de l’hiver eft adoucie par le voifinage de
l’Océan , qui donne des vents numides plutôt que
froids.
| Ce pays offre, prefque dans toutes les faifons.,
un afpeét délicieux. .Que laiffëroiept-ils à defirer
après ces pâturages embaumés , ces riche.s vignoT
blés ces bois d’o r a n g e r s c e s collines revêtues
de thym & de. mille autres plantes odorantes 3 ces
.rivières qui coupent les plaines & les fertililent,
puis arrofent les vallons ? enfin ces chaînes de
montagnes, qui répandent dans la per.fpeétive les
plus belles variétés ?
E a général,Je foLen Efpagne eft léger & porte
fur, des lits de gypfe, qui tft un excellent engrais.
Voici quel eft , aux environs de Barcelone, l’ordre
des cultures. Les champs reçoivent d’abord du
froment, qui mûrit en juin, &ç qui eft auffit.ôt
remplacé, par le blé de Turquie, le chanvre, Je
millet, des choux, des' haricots ou des laitues.
L’ année, fuivante les femences & les récoltes fe
fuccèdent dans le même ordre > mais dans la troir
fième on commence .par les orges , les haricots
pu la vefce, dont on fait la récolte avant le milieu
de lJé té , pour y fubftituer d’autres grains, comme
dans les années précédentes, fans autres changer
mens que ceux que demandent la faifon & le défit*
de varier autant qu’il eft poffible les efpèces fur le
même fol.
Le même guteur nous apprend (Towmfend)
qu’auprès deÇarthagène ç’eft a abord du froment,
la fécondé année de l’orge , & dans la troifième
on laiffe les terres en jachère. Ils. labourent trois
fois pour le froment, ce,.Je fèment. depuis le mois
de Septembre jxifqu’J la mi-novembre. En juillet
ils récoltent de dix à cent pour un, en proportion
de l’humidité de L’année...
. .La riche vallée d’Alicante., la Huerta, donne
une fucceflïon continuelle de rnoiffons; L’orge s’ÿ
fème en feptembre,, s’y moi (Tonne en avril, &
eft remplacé par le maïs, coupé en feptembre, &
par un mélange de plantes comeftibles qui viennent
enfuite. Le froment eft femé en.feptembrë, coupé
en juin. Le chanvre eft femé en feptembre , arraché
en mai.
Dans la vallée de Valence le froment rend dé
vingt à quarante pour un , l’orge de dix-rhuit à
vingt-quatre, l’avoine de vingt à trente,,le mais
cen t, le riz. quarante, La,terre eft prefqu’autîi
fertile Japs,.les.provinces m4tidionales,.& dansl.es
environs,,de Grenade.'on cultive avec fuccès la
canne à fucre. > n: /
Rien n’eft plus nyifible à Y agriculture efpagnole,
que
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que ces innombrables troupeaux à laine qu’ un code t
fpécial, la méfia, autorife à voyager de province en province, ik à paître, fans autre diftinétion que !'
celle des faifons, fur les montagnes & dans les
vallées. On compté de ces moutons privilégiés,
connus fous le.,nom de mérinos, cinq millions. Un
feul grand en poftede quelquefois quarante mille.
Leur laine eft eftimée une valeur double de celle des
autres brebis : malgré cela on ne penfe pas qu’ils
puiffent dédommager du tort incalculable qu’ils
font à l’agriculture.
Des trois provinces de la Bifcaye, celles deViz-
cafa & de Guipufcoa manquent de grains} mais
celle d’Alava eft affez fertile pour en approvi-’
fionner non-feulement les deux autres, mais même
une partie de la Caftille & de la Navarre. La Bifcaye
proprement dite produit une immenfe quantité de
châtaignes. On cultive la garance dans les environs
de Valladolid , ainfi que dans les environs de Bur-
gos & de Ségovie , dans les Afturies, l’Anda-
loufîe, TÀrragon & la Catalogne. Les environs de
Valès-Maga offrent encore les reftes de la culture
de la canne à fucre, introduite autrefois par les
Maures induftrieux, furtout à Torro.
Parmi les principales ri.vières d'Efpagne on doit
diftinguer l’Ebre , d’où l’ancienne Ibérie tiroit
fon nom. Ce beau fleuve naît dans les montagnes
des Afturies, au fond d’une petite vallée, à i’eft
de Reinofa. C ’eft l’ eau de la fource qui donne la
forme à la vallée. Elle pour fuit fa courfe au fud-
e ft, & fe jette dans la Méditerranée après avoir,
parcouru un efpace de trois cent quatre-vingts
milles. D’autres rivières de moindre importance
coulent â l’e ft, telles queleGuadalavir, laXucara
& la Segura, -qui arrofent les fertiles vallées de
Murcie. A l’oueft eft le Guadalquivir, autrefois
le Boe tis , qui donnoit fon nom à la contrée qu’il
arrofe maintenant. Il a fa fource dans Sierra-
Morena, & fe rend dans le golfe de Cadix après
un cours de trois cents milles. La Guadiana fort du
flanc feptentrional de la Sierra-Morena, quoique
fes principales fources femblent être plutôt dans
les montagnes de Tolède} elle arrofe le Portugal
dans une partie de fon cours, & , faifant un circuit
à peu près femblable à celui de l’Èbre, elle, va tom- „
ber dans le golfe de Cadix. Mais le Tage occupe
le premier rang. Humble à fa nailfance, ce n’eft
d’abord que le proJuitd’une rource connue auprès
d’Alberracin , dans la partie de l’oueft de l’Arra-
gon , fous le nom d‘Abrega (abreuvoir ) } mais ce
filet d’eau groffit en fuyant, & il devient enfin,
ufurpateur deplufîeurs eaux courantes, le premier
fleuve de tous. Le cours du Tage eft de quatre
cènt cinquante milles. Les fources du Douro font
près des ruines de l’ancienne Numance : fon cours
ne doit pas avoir moins de trois cent cinquante
milles. Le Minho fort des montagnes de Galice}
il eft. furtout. remarquable en ce qu’il forme une
partie des limites qui.féparent cette province du
Portugal. Plufieurs autres rivières parcourent les ^
Géographie-Pkyfique. Tome IV .
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( provinces feptentrionales} mais comme elles font
j
moins importantes, nous n’en parlerons pas main-
S tenant.
VEfpagne 2 fi peu de la cs, & ceux qu’elle a
font tellement circonfcrits, qu’ils ne méritent pas
qu’on en parle : nous dirons cependant qu’on voit
au fud-eft de la Nouvellé-Caftille une firg.ilière
fuite de petits lacs, qui foi ment, fuivantqueiques
obfervateurs, la fource de la Guadiana.
La nature a diftribué les montagnes fur la furface
de YEfpagne, en plufieurs chaînes diftinétes. On
regarde comme un prolongement des Pyrénées la
chaîne la plus feptentrionale, q u i, paffant au fud
de la Bifcaye & des Afturies , file dans la Galice.
Elle reçoit différens noms provinciaux, comme
montagnes de Bifcaye , Sierra, des Afturies, les
montagnes de Mondonedo en G alice, auxquels
il faut ajouter ceux de montagnes de Santillane,
de Vindo & d’Oca. Excepté les Alpes, les Pyrénées,
l’Apennin & d’autres de pays civilifés depuis
long-tems & familiarifés avec les vues générales
de la fcience , on conneît à peine une chaîne
de monts , diftinguée par une dénomination uniforme
} ce qui cependant eft bien néceffaire pour
la netteté géographique. Il eft-bon de reconnoître
ici que le terme Sierra, particulier à YEfpagne,
fignifie une chaîne de monts, dont les pics fuccef-
fifs offrent la forme d’une feie.
Les montagnes argiîeufes & gypfeufes de cette
contrée, montrant peu de ces élévations éminentes
qui diftinguent les montagnes granitiques, durent
naturellement fuggérer l’idée & le mot.
Une fécondé chaîne s’étend des environs de
Soria au nord-eft, vers le Portugal, dans une di-
reétion nord-oueft : on la nomme la chaîne d'Urbia
ou de Guadarama} ou encore les montes Carpenr-
tanos. Celle de Tolède , à peu près parallèle à la
dernière*, tient le troifième rang : ces deux chaînes
centrales paroiffent renfermer beaucoup de granits.
Vient enfuite, vers le fud, h Sierra-Morena»
après laquelle on voit la chaîne la plus .méridionale
, la Sierra-Nevada.
A l’eft eft encore une grande chaîne qui lie les
deux du centre, & s’avance vers la Méditerranée
dans le nord de Valence : il y a auffi dans cette
partie du royaume plufieurs longues fuites de collines
élevées, généralement dirigées du nord au
fud.
II ne faut pas paffer fous filence une montagne
folitaire & très-remarquable qui s’élève non loin
de Barcelone, & du fommet de laquelle on découvre
les îles de Majorque & de Minorque,
diftantes de cinquante lieues. Le mont Serrât préfente,
à une certaine diftance, la figure d’ un pain
de fucre ; mais de près, hériffé de rocs pyramidaux
, il pourroit rappeler le tronc du dattier. Sa
maffe eft compofée de poudingues. La région adjacente
montre un fehifte argileux comme Ia.com-
*pofition des Pyrénées, & principalement calcaire}