
Tourville. Le cap Duquefne, fitué au-delà, a fes
rivages ftériles , abaiffés 8e jaunâtres.
La baie Defcartes vient enfuite, puis après
le cap Béîidor, le cap Boufflers, la baie d’Eftaing, |
le cap Buffon ; à partir duquel , jufqu'à la baie de
K ivo li, le continent n’offre plus aucun' enfoncement
remarquable, aucune efpèce d'abri pour lés
plus foiblesbâtimens.Expoféede toutes parts aux
vents impétueux du fud-oueft, battue fans C'.ffc
par les flots de l’immenfe Océan auftralv cette
partie de la Nouvelle-Hollande eit plus afireufe
encore que celles dont nous avons pitié jufqu’à
préfent. Une lame terrible roule tout le long de
fon prolongement , 8e fait entendre inême<, durant
le calme , un bruit fourd 8e menaçant. La ftérilité
la plus hideufe eft partout empreinte, & nulle
part on ne découvre aucune trace du plus foible
ruiffeau. La mer n'y préfeiire que quelques phoques,
quelques falpas & des béroés, une belle
éfpèce de pomme; les dauphins & les thons s*y<
montrent quelquefois par troupes nombreufes.
La baie de Rivoli fe préfente fous la forme
d’un grand ovale de huit à dix milles de profondeur
, & fe termine au fud par le cap Lannes,
te au nord par celui de Jaffa. V e r s 'c e dernier
point, une groffe chaîne de reflîfs en reftreint l’entrée.
À cinquante milles au-delà s’ouvre la baie Lacépède,
qui a fix à fept lieues de largeur, & dont
lès rivages font encore plus affreux que ceux dont
il a été fait mention jufqu’ici. Ses roches font peuplées
de cormorans ,< & il paroît que le fond en eft
habité par les hommes. Les dauphins y font très-
nombreux ; ils vont par bandes fi confidérables,
qu’on les prendroir pour d’immerifes chaînes de
relfifs.
' Au-delà d’une baie de dix milles d’ouverture
environ, & qui a été nommée baie MoUien> on
découvre d’abord la prefqu’île Fleurus, longue de
quinze à feize 'lieues, formée de terres très-
hautes, qui fe delfinent fur plufieurs plans de montagnes
que tout annonce devoir être de nature
granitique. A l'oueft de cette prefqu’île fè pré-
fente un premier golfe , qui s’avance de cent milles
dans l’ inférieur des terres, & qu’on a nommé
golfe Jofephine. En avant de ce golfe , & prefque
par fon travers, eft l’île De c rè s , de deux cents
dix milles de tour, féparée par le détroit de C o lb
e r t, de la prefquîle Fleurus à l’eft, & par le détroit
de Lacépède à l’oueft, d’une fécondé pi ef-
qu’ île de cent vingt milles de longueur, qui à reçu
le nom de prefqwile Cambacérès. L’archipel Vauban,
compofé de huit petites île s , en eft à peu de distance,
vers fa pointe occidentale. Au-delà du
cap Berthier, qui termine, à l’oueft, cette dernière
ptefqu’ î le , la Nouvelle-Hollande s’ouvre de
nouveau pour former le golfe Bonaparte, qui s'enfonce
plus de deux cents milles au travers de ce
continent, & comporte plus de fix cents milles
dans le développement de fes côtes. Ce vafte golfe j
fe préfente fous la forme de l ’-embouchure d'un j
très^grand fleuve, &;fe termine en fe rétréciffant
infenfiblenient vers le fond par des bancs de fable
quiTobfhuent, Sut la-côte occidentale du golfe,
8e tout près de l’a pointe d entrée, on découvre
le^port Çhampagny, l’un dès plus beaux ôt des plus
1 fûrs qu’offre la Nouvelle-Hollande , 8e dont le rivage
eft revêtu de forêts épaiffes.
De petites îles, au nombre de huit, fo rment j
auprès du port Çhampagny, un petit archipel par-»
ticulier.
Non loin du golfe Bonaparte, la Nouvelle-Hollande
forme un grand cap ( cap Brune ) , puis elle
fe renfonce dans un efpaçe de plus, de foixante
milles, le relève à la hauteur du cap Correa,
préfente, fur ce point, le groupe des îles Jérôme.
Plus loin fe trouve la baie Lemonier, défendue
par une chaîne de reffifs dangereux. DépafTant içs.
petites îles Cuvier , on fe trouve par le travers de
la baie Louis , qui préfente un développement de
côtes de plus de cinquante n>illes, & qui paroît
peuplé.
A ce dernier point de la terre Napoléon , le.s
îles fe multiplient , & d’abord l’archipel Saint-
François préfente fes treize ou quatorze îles ftériles
8e blanchâtres. A peu de diüance , & dans 'e^
nord-eft de ce premier groupe, s'offre celui des,
îles Saint-Pierre, qui font au nombre de trois.
Plus loin, 8é tout proche de la terre continentale,
fe découvrent, les îles Jofephine, hériffées, pour,
.ainfi,dire, de toutes parts de.brifans & de hauts-
fonds, & c . Ces îles qui, réunies à toutes celles
qui accompagnent la terre Napoléon, s’éièvënt à
plus decent foixante, font ftériles comme le continent.
.Crite terre, finit au cap. des. Adieux* par 31°.
15?' latitude âuftrale , & par 128° 42' long. eft.
Après cette deferiptioh fuccin&ede la terre Napoléon,
il convient de revenir avec quelques détails
fur les principaux points de cette terre qui
ont été vifités par les navigaréurs français.
L’île Decrès eft de toutes celles qui fe rattachent
au fyftème de la Nouvelle-Hollande, la plus grande
qui foit connue : elle a près de cent milles de longueur
de l’eft à l’oueft, fur une largeur déplus de
trente milles environ du nord au fud , & fa circonférence
n’a pas mpins de trois cénts milles.
Toute fa côte méridionale eft expo fé e , fans abri,
aux flots impétueux du grand Océan auftral. Le
golfe Jofephine lui correfpond vers le nord , 8e le
détroit Colbert, à l’eft, la fépare de la prelqu’îie
Fleurus. A l’oueft, la grande prefqu’île Cambacérès
lui eft oppofée, & le détroit Lacépède préfente
fur ce point fon magnifique canal. Ses côtes
offrent plufieurs caps, notamment ceux qui ont
reçu les noms de Bedout 8e de Borda, à l'oueft j
les caps Forbio, Prony, Caflini, d’Eftàing & Vendôme
fur lacpte nord, le cap Dclambre au nord-
eft, le cap Sanë.à la pointe eft de l’î l e , 8e ceux de
Linois, Gantheaume, Kerfain & duCouedicfur le
rivage dji fud. Qn y diftingue trois grandes baies 4
celle de Bougainville entre les caps Vendôme &
Delambre, celle qui porte le nom A'Efirée, bornée
par les caps Sané & Linois, 8e celle de Vivonne,
limitée par les caps Gantheaume & Kerfain : ces
deux dernières ne font pas tenables, tant là mer
y brife avec violence. Au-delà du. cap Bedout on
découvre une ravine profonde, qui paroît fervir
jde lit à quelque torrent, & qui a reçu le nom de
ravine des Cajoars , du grand nombre des animaux
,de ce genre qui èxiftent dans l’île Decrès.
. La baie de Bougainville eft le plus çonfidérabte
de tous les enfonceméns que préfente l’île ; elle
en eft auflî le'plus important fous tous les rapports :
la fîtuation la met à l’abri des vents du fui-oueft,
te fon étendue la rend 'propre à recevoir des flottes
nombreufes. Elle a plus de vingt milles d’ouverture
fur une profondeur de huit à dix milles,
& le fond en éu bon 8e fuflSfamment profond.
L'île Decrès ne prëfente , malgré fon étendue,
aucune efpèce de montagne proprement dite. La
charpente entière du pays fe compofe de collines
plus ou moins élevées, mâis dont les fommets font
prefque partout réguliers & uniformes. Tt ut le
long de la côte méridionale, ces collines fe développent
fur un fenl plan de deux à trois centspieds
de hauteur perpendiculaire. Les pentes en font
tellement unies, que, dans leur partie fupérieure,
elles paroiffent gliffantes ; mais au bord de la mer,
ces mêmes collines font taillées à pic & s'élèvent
prefque partout comme un rempart. Leurs couleurs
-font triftes & fauvàges; elles varient du gris au
brun , ou même au noirâtre 5 les efpaces moins
rembrunis font d’ un jaune d’ ochre plus ou moins
fale. Du cap Bedout jufqu’à la ravine des Cafoars,
-la terre n’offre qu’ un feul plan de collines parfaitement
fembiables à celles de la partie du fud,
mais plus hautes ; & bien qu’elles foient dépour- |
vues de toutes efpèces d’arbres, on y diftingue 1
■ pourtant çà 8e là quelques traces de verdure. A
travers cette chaîne, la ravine des Cafoars laifle
apercevoir dans l’intérieur d’autres collines dont
quelques parties font boifées. La côte du nord éft
aride 8t nue comme celle du fud , & fe montre
partout avec une conftitution analogue.
1 Les rivages de la baiè Bougainville font formés
eux-mêmes de collines peu élevées i mais la verdure
qui les couvre 8e les forêts dont les fommités
fe montrent fur divers points, donnent à cette
.partie de l’île un afpeét plus riant & plus agréàble.
L’eau eft peu abondante fur l’île Decrès, &
les nombreux kanguroos 8e cafoars qui l’habitent,
font obligés, dans la faifon chaude , de venir fe
défaltérer dans les eaux de la mer.
Lès produits minéraux de l’île Decrès confident
èffentiellement en diverfés efpèces de fehiftes primitifs
, entre les couches defquels fe trouvent
quelques veines de quartz opaque, le plus ordinairement
blanchâtre, 8e quelquefois rougeâtre.
Toute la partie occidentale de la baie Bougainville
eft principalement compafée d’ un grès ferrugineux
rouge & très-dur. C ’eft à cette roche fingulière
que les petits caps de l'intérieur de cette baier,
ainfi que le cap Vendôme , doivent la teinte rougeâtre
& fombre qui les fait diftinguer au loin.
Deux autres efpèces de grès exiftent encore fur
l’ île Decrès ; l?une , primitive, quartzeufe &
très-compaéte, forme des parties de côtes affez
étendues j l’autre, fecondaire, calcaire & moins
dure , joue dans l’hiftoire géologique du fol un
t ô le , fioon plus important, au moins plus fingulier
que la première efpèce. C ’ eft au milieu de cette
roche que-font enfouis des arbres, on pourroit
même dire des portions entières de forêts pétrifiées.
En plufieurs endroits où les dunes font taillées
à p ic , on diftingue parfaitement les troncs dè
ces arbres j on peut en fuivre les plus petits dé’-
tailsj on voit leurs rameaux, également pétrifiés ,
s’enfôncèr & fe perdre dans la gangue commune
il n’ eft pas jufq'u’aux plantes parafites & grimpantes
qu’on ne retrouve dans le même .état de pétrifi-
• c-tion, de ferpentant autour des arbres dont il s’ agit.
Sur quelques points les dunes de grès fe font
éboulées j les décombres en ont été fucceffivement
entraînés par les eaux pluviales , difperfés par les
vents. Le fol s’efl: aplani 8e pîéfente des furfaces
plus ou moins égales, & quelquefois très-étendues.
Là fe montrent d’une manière encore plus remarquable
ces finguüères pétrifications. Coupés naturellement
au niveau du fo l, les troncs des arbres
forment comme de larges mofaïques. En examinant
ces troncs avec beaucoup de foin, on y re-
connoît encore les diverfes couches du tiffu ligneux.
Sur plufieurs points de la baie de Bougainville
on rencontre deux efpèces de pierres calcaires;
l’une, d’un grain plus ferré, d’ un tiffu plus homogène,
fe rapproche de la nature des grès; l’autrè'
reffemble davantage aux fubftances crétacées. Ces
pierres calcaires font ordinairement fuperpofées
aux roches fehifteufes , ainfi qu’ aux grès primitifs.
On les obferve à plus de cinquante ou foixante
pieds au-deffus du niveau de la mer, & à cetfq élévation
elles contiennent une grande quantité de
détritus 8e de débris de coquilles pétrifiées. Le
fable du rivage eft très-fin, de nature quartzeufe ,
mélangé d’environ une cinquième partie de terre
calcaire fortement atténuée. C e labié, repouffé
du bord de la mer par les vents 8c par les eaux,
s'élève, fur une grande partie du rivage, en dunes
de foixante à quatre-vingts pieds de hauteur. Dans
le fond de la grande baie Bougainville on rencontre
des forêts qui paroiffent fe prolonger affez
loin vers l’intérieur du pays, 8e qui fe compofenr,
comme toutes celles de ces régions lointaines , d»
diverfes efpèces d’eucalyptus, de bànkfia, de phe-
balium 3 de mimofa, de cafuarina, de metrofîde-
ros, de leptofpernies, de fiypkelia , de conchyum ,
de diofma , d'hakea , d*embothrium , & c . Parmi
ces arbres, 8e furtout parmi les jflus gros, il eh
éft un grand nombre qui font fi complètement gâtés