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ment horizontale à fa fuperficie , maïs qu'elle doit
fe comporter comme le fonddts couches ondulées.
Il paroït, lorfqu-on regarde du milieu de la to ile ,
que cette mafle s'incline vers les extrémités fep-
tentrionales & méridionales de cette foffe en pente
très-douce j comme cela arrive dans les collines *
qui s'aplati{fent ; mais on n'a pas encore pu déterminer
d'une manière pofitive jufqu’à quel degré
de profondeur cette mafle dé fel peut pénétrer.
M. Paîlas fit trouer avec une tarière Se mineqr
ce maflïf dans les endroits les plus n t5 de la toiley
pour en fonder l’ épaiffeur. Après de grandes diffi
cultes qu’ cffVoit la dureté du bloc qu’on avoic à
percer , on arriva à vingt 8c quelques archives
fans rencontrer autre chofe que du fel tout pur. A
la fin on atteignit une pierre noire fi dure, que la
tarière refufa tout-à-fait d'y mordre, & l'on fut
obligé d’abandonner ce travail.
Le fel de cette mine eft en général très-pur,
très-compaèle & de couleur blanche, n°. i . Lorf-
ou’on le détache, il la vile paroître très-aifément la
forme cubique qui lui eft propre, & quelquefois,
lorsqu'on le détache* il fe-fépare en differentes
pièces qui laiffent des cubes très-réguliers.
La dilfolution de ce fel dans l’eau fe fait plus lentement
que celle du fel marin ordinaire dans l'eau
commune. On prétend même s’être convaincu par
des preuves économiques, qu’il ne fale pas auffi
bien que les fels marins d'Indercki & de beaucoup
d’autres lieux.
On rencontre dans différens endroits, furtout
à la fuperficie, des maffesdiftinétes d'une grandeur
médiocre, & dont le poids furpaffe rarement celui
d’un poude; elles affeétent ordinairement la figure
cubique, avec une pureté & une tranfparence qui
égalent fouvent celle du criftaide roche lepluspar-
fait. Ils:nomment dans ce pays ce fel très-pur coeur
de f e l, & le bas-peuple l'emploie très-fréquemment
dans les. maladies des yeux quand ils ne font pas
iifage de fucre, qui eft auffi un de leurs remèdes
les plus familiers dans ces circonftances.
On a trouvé dans ces nouvelles exploitations aux
endroits où il y avoit eu d'anciennes foffes, non-
feulement des coins, des leviers & d ’autres uften-
files de bois, mais encore des charbons qui étpient
entièrement recouverts par la mafle folide du fe l,
& il eft aifé de voir que ces corps étrangers y ont
été renfermés lorfqùe des eaux qui avoient fé-
journé long-tems dans des maffes de fel ont été
chariées dans les lieux où étoient ces uftenfiles ,
& ont fini par s'y criftallifer ou s’y folidifier.
On voit fur les deux rives de la Soljanka une
grande quantité de ces foffes, dont la majeure
partie fe trouve pleine d’une eau fortement faturée
de fe l, qui eft due aux eaux pluviales & aux neiges
fondues, 8c aux veines fouterrjines qui filtrent
entre les différentes couches, & qui diffolvent le
fel pur qui eft dans les cavités, 8c s’en faturent.
M. Paîlas trouva, à la fuite d'une longue féche-
fpfle, cene eau faline fi pefante, qu’un-très-bon
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hydromètre y monta au deffus du niveau ordinaire
> ce qu'on a attribué à quelques mélange,s de
lels amers. Le fond de ces petites mares d’eaux
falées fe couvre ordinairement d une forte croûte
,de fel qui affeéfe la forme de glaçons.
Les Kirgifiens regardent cette eau, qui paroït
bourbeufe & d’une couleur tirant fur Je brun ,
comme très-falutaire dans différentes maladies, &
fe rendent fréquemment dans ce lieu pour s'y baigner.
On trouve près de Torba enTranfilvanic des
foffes femblables remplies d’eau faturée de fe l, &
Ls Valaques s’y baignent, de même que lès Kiigi-
liens dans celles dont nous parlons. M. de Born
rapporte qu'on voulut lui faire croire qu'il n'étoit
pas poffible d'aller à fond dans cette eau falée.
La.di Ablution de cette eau falée paffe pour être fi
chargée, qu'on avance que., dès qu’ un^ perfonne s’y
enfonce juiqu'à la poitrine, elle fe lent foulevée,
& qu elle peut fe coucher fur la furface en y fur-
nageant comme une planche. Ce que dit M. de
Boni fe rapporte à cèla.
On affuie généralement, dans le pays, qu’il y a
des tems 8c cela fouvent même dans l’arrièrë-fai-
fon | où cette eau falee, qui à la vérité eft toujours
ftoide à fa furface, devient fi chaude dans le fond,
qu'il n’eft pas poifible d’y laiffer féjourner la main ;
ce qui eft très-probable : nous en avons pour preuve
les marais faians de l’Europe.
La plante la plus commune dans ces lieux eft la
latiçornia herbacea. Les effàis qui ont eu lieu fur
•cette plante dans un laboratoire d’Orenborrg ont
fait connoître que le. fel marin qu’elle contient,
y eft dans une proportion extrêmement forte.
Soixante 8dfeize livres de ce végétal defféché ont
donné vingt livres de cendres très-falées, 8c c’eft
beaucoup.
On remarque encore dans ce voifinage différens
petits lacs qui fé touchent. Ils commencent à environ
deux cents toifes du rocher de gypfe que
nous avons décrit, & ils s’étendent depuis une
autre colline jufqu’à la Soljanka. L’eau qu'ils renferment
vient d’un ruiffeau voifin; elle eft limpide,
très-bonne au goût & nullement falée ; auffi
nourrit-elle des poiffons & des tortues, & cependant
les bords de ce ruiffeau, du côté du nord ,
ne préfentent qu’ un fol très-falé & très-abondant
en plantes falines. On a même creufé près de là ,
à vingt toifes de diftançe, différentes foffes qui
font totalement remplies d’eau falée; 8c ce qui eft
étonnant, c ’eft q u e , dans les lieux où ces lacs s’approchent
de la Soljanka, on peut découvrir le fel
gemme fous le fable, prefqu’ÿ la furface du fol de
la rive qui lui appartient.
Cependant ôn fera moins furpris en réfléchiffane
qu’ il eft impoffible que lés eauxdouces ne viennent
pas d’ un endroit où il ne s’eft fait aucune diffolu-
tion de fel marin, parce qu’il ne s’y en trouve pas Ilà ; qu’ il n’eft pas moins impoffible qu’en coulant
fur des rives voifînes du fel marin elles s’imprègnent
de la folution de ce fel, parce que quoiqu’infiniment
près
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près du fel gemme , elles ne le font pas affez
pour être en contaèl. Nous avons obfervé antécé-
demment qu’ un petit ruiffeau d'eau pure, douce
& limpide s’échappoit à travers les mines de Wié-
liczka en Pologne ; mais ce qui paffoit autrefois
pour merveilleux dans cette circonftance s ’eft
évanoui dès qu’on s’eft afluré que ce ruiffeau cou-
loic fur des fubftances pierreufes incapables de fe
diffoudre 8c de fournir aucune de leurs qualités à
l'eau qu’elles fupportent'. M. de Born fait mention
de dix-fept lacs remplis d’ eau douce, & qui fourmillent
de poiffons dans les falines domaniales de
l’Empereur, où la mine de fel eft abfolument à côté
de ces différens réfervoirs d’eau douce.
Les fels allllet^ky s’exploitent, pour la majeure
partie, pendant l’été : on y paie les ouvriers qu’on
y emploie à raifon d’ un demi-copeck par poude
de fel; mais le plus grand tranfport s’en fait en hiver,
& le fel eft envoyé de la mine vers la petite
rivière d’A fchkadeo, où il eft embarqué fur des
bâtimens qui le conduifent parla Béluka & le Kuma
dans le Wolga. A la faveur de ces débouchés ilfe
tranfporte dans tout l’Empire ruffe, où il peut fe
répandre en trois années plus d’ un million de pou-
des. Il n’eft pas-douteux que les changemens avantageux
qui ont été introduits nouvellement dans
l’exploitation j de ces mines, & l’établiffement de
deux nouveaux entrepôts fur 11k & fur la Samara,
ne procurent encore par la Cuite un débit beaucoup
plus considérable.
Les échantillons qu’on a pu fe procurer de la
mine dTllet[ky font, n°. 1 , une efpèce de cube
alongé, d’une très-grande blancheur & affez tranf-
parenti.n°. z , c’eft un fragment d’une mafle de
fe l, dont la criftallifation étoit confufe i il forme
un fel b lanc, demi-tranfparen: 8c d’ une très-bonne
qualité ; n°. 3, fel de couleur rofée, en malle demi-
tranfparente, paroït contenir beaucoup de parties
féléniteufes.
Ces fels ne me femblent pas différer beaucoup
de ceux de la Pologne, qu’on vient de décrire ; &
l’on croit d’ailleurs que les fels gemmes en général
, de quelques pays qu’ils foient, à quelque
nuance de couleur ou de pureté près, doivent fe
rapprocher infiniment les uns des autres.
Après avoir fait connoître celle de toutes les
mines de la Sibérie,qui paroït la plus curieufe, &
dont les auteurs fe font le plus occupés, nous ne
pafferons pas fous filence les fources d’eau chargée
de la même fubftance, defquelles la Sibérie tire
le plus grand avantage , & qui paroiffent le plus
mériter quelqu’attention.
Auprès des monts Gouffelmi, dans le pays des
Jakoutes, fur la rive droite du ruiffeau de Kap-
tindei, qui fe jette dans le V i io u i, il y a plufieurs
fontaines falées qui fortent de te r re , qui contiennent
une grande quantité de fel blanc comme
de la neige ; il fe trouve mêlé dans l’eau en petites
parties crittallines, tel qu’on le prendroit pour
du fable très-fin. Ce fel fe dépofe autour & au
Géographie-Phyfiquc. Tome IV ,
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deffus des fontaines en morc'ecurx qui reffemblent"
à des pierres très-blanches, formées du fable lé
plus fin. Les canaux de la fource ne s’engorgent
pas : l’eau apporte fans ceffe de nouveau fe l, qui,
fe joignant à celui dont les fontaines font couverte
s , s’élève quelquefois jufqu’ à quatre pieds au
deffus de fa furface.
| A environ fept lieues de cet endroit, vers l'orient
, fur la même rive du Kaprindei, on voituné
montagne de fel haute de rrenre toifes, longue de
cent vingt, compofée, jufqu’aux deux tiers de fa
hauteur , de gros criftaux cubiques très-durs ,
tranfparens, réunis 8c très-purs : leur partie fupé-
rieure eft recouverte d’ une, argile rouge qui contient
un talc blanc, tranfpacent, de la plus grande
beauté.
Il y a , du côté de Solikamskaia & dans la Permie ,
des falines renommées ; elles font excellentes pour
la quantité & pour la qualité du fel. Les pluscon-
fidérables font celles qu’on nomme Novo-Oujfolie.
Quand on y creufe des puits pour les falines, c’eft
un très-bon ligne de rencontrer une argile grife r
dans celles de Solikamskaia cette faline contient de
petites marcaflires cubiques, de couleur d’or pâle;.
On trouve auffi du . fel très-pur à Straganow & à
Piskore. On remarque que les puits'ont en géné-‘-
ral d’autant plus de fel 8c de dutée, qu’ils font plus
profonds.
M. Gmelin , dans fon Voyage en Sibérie, parle
d’ un lac falé très-fameux à Jamicha, à deux lieues
a l’orient du fort qui lui doit fon nom; il a une figure
ronde & plus de deux lieues de tour. L’eau eft
extrêmement chargée; elle eft rouge au fo le ilv
comme celle qui réfléchit les premiers rayons du
jour ; on y voit du fel criftallifé au fond. Les bords
de ce lac font tout couverts de ce fel, qui a la blancheur
de la neige & lacriftallifation cubique. Il y en
a une telle quantité, qu’on en chârgeroit en peu de
tems plufieurs bateaux ; & dans les endroits où l’on
en prend, il s’en reforme du nouveau fi vîte & fi
facilement, qu’ au bout de cinq à fïx jours il ne pa-
roît pas qu’ on en ait pris. Ce f e l , qui fournit lés
provifions de Tobolsk & de Jenifei, ne coûte que
huit deniers la livre.
Nous pouvons faire ici une réflexion qui confirme
celles que nous avons déjà faites fur les
mines de fel des autres pays de l’Europe, c’eft que,
d’après la description des auteurs, ces lacs falés
& ces montagnes de fel gemme dont nous venons
de parler font tous entourés de terrains qui contiennent
une grande abondance de gypfe & de
foflïles de tout genre ; ce qui ne laifle pas plus de
doute fur l’origine foufmarine des mines de fel de
Sibérie, que fur celles des mines de fri de la Pologne,
de l’Autriche, de la Tranfilvanie, & c .
Il faut encore faire obferverque le fel d'illct^ky
ne diffère point, quant à l’extérieur, dès fels blancs
de Pologne ; il a la même tranfparence, la même
forme cubique; mais on lui trouve une pefanteur
fpécifique plus coniidérable.
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