
tion* relièrent & font encore aujourd’hui c e qu'elles
furent primitivement* des lacs. Elles ont > à la v é rité
, diminué de capacité : on peut les divifer en
fupérieures & inférieures. Les premières font
deftinées à devenir* avec le rems* des plaines plus
enfoncées : tels font les lacs des Ofvegos ,
des Aflendas & du Saint-Sacrement j les autres
font* comme on le fait, les réfervoirs qui donnent
naîffance aux grands fleuves. Les montagnes font
la première & la plus intéreffante des parties du
domaine de l’homme. Quoique* dans le principe*
il les ait découvertes fans ménagement, cependant
elles lui préfentent en Europe, particuliérement
en France, dans la partie méridionale, des grains
de bonne qualité* des vins exquis* de bonnes
huiles & de bons fruits. Entre les tropiques les
montagnes offrent le meilleur café * le cacao, le
coton* l’indigo, les épiceries fines* le meilleur
fucre , le riz fec , & c . Les montagnes fon t, en
dernière analyfe, les mères nourricières des meilleures
productions, & fournifient les bois dont on
ne peut fe pafier nulle part.
C ’eft faits doute d’après ce qui vient d’être dit*
relativement aux plaines, qu’Hérodote a avancé
que le Delta étoit feulement de formation nouvelle
: c ’eft donc fans fondement qu'il a été
contredit par beaucoup d’écrivains * notamment
par James Bruce * qui vint fur les lieux * & qui a
pris comme à tâche de contredire tous les voyageurs
qui l'ont précédé en Egypte. II s'eft élevé
particuliérement contre ce voyageur grec * qui a
démontré d’ une manière certaine cette grande
vérité géologique, qui préfente dans tous les pays
du Monde la maiche inconteftable de la nature
fàr la formation des plaines : celles formées par
la Taroife* le Humbert* la Garonne* l’Aliier*
la Seine & le Rhin auroient dû prouver au
voyageur Bruce, qu’il étoit dans l'erreur. Rapportons
feulement une des fables dont la foule
gonfle fon voyage * de voyons entr’autres chofes
ce qu’il dit.
Par exemple * il avance avoir vu en Égypte des
bornes de granit taillées en têtes giganceiques*
ce font fes exprefiions , qui fixaient les Limites
des biens de cette contrée dès la plus haute antiquité,
fans qu*on s’apperçoive qu'elles foient plus
enterrées qu'à l ’époque où elles furent placées.
Il faut que ce voyageur n'ait vu que de loin
ce qu’il a pris pour des bornes«. S’il s’en fut approché
* il auroit vu que ce n’étoit autre chofe
que de petites colonnes de terre d’environ un
mètre de diamètre , & deux de hauteur. Ces colonnes
font épatfes au milieu des champs cultivés
de la Haute-Égypt* , & les fellaches ou payfans
montent defius pour écarter * en -frappant avec
force dans leurs mains, fok en jetant des mottes
«je terre, ces légions d’oifeaux qui aflîègettt de
toutes parts les femences & lés récoltes.
Ges colonnes de tetre n’ont aucun rapport
avec des blocs de -granit. Obfervons en outre
r qu'il n’y a de borné en Égypte que les houfliers,
les biens des mofquées & très-peu d’autres, &
que ces limites font formées avec de petites bornes
qu’on ne peut appercevoir qu’en voyageant par
terre.
J’ajouterai cependant qu’on a lieu d’être un
peu furpris qu’Hcrodote n’ait pas remarqué que
non-feuL-ment le Delta * mais encore Y Egypte
entière, eft de formation nouvelle ; car cette contrée
préfente partout une pente uniforme & une
même nature de terre. On remarque feulement,
en remontant du côté de Siène * & furtout aux
approches de l'embouchure des torrens defféchés,
que la terre eft plus rude^ plus grofiîère* que les
couches font moins épailfes que dans les partie^
voifines du centre de la vallée. Il eft aifé de rendre
compte de ces différences.
Tout le monde a pu remarquer que les torrens,
indépendamment des terres qu’ils charrioient, en-
traînoient pareillement des pierres * des arbres ,
des quartiers de rochers. Ces différentes maffes
■ font portées à des diftances très-inégales ; elles
le dépofent à rai fon de leur pefanteur fpécifique :
c eft pourquoi l’on diftingue * dans le lit des
torrens * des pierres énormes * d'autres d’ une
moindre grofléur * dont les angles * plus arrondis *
plus ufés * diminuent de volume fuivant la distance
cjue les eaux leur font parcourir.
Ainfi les maffes confidérables font roulées &
abandonnées à de très-petites diftances de l’em-
- bouchure des fleuves & des torrens; elles font
; immédiatement lui vies dés lits de pierres plus ou
moins vokimineufes , dont les parties terreufes
rempliflent les intervalles : c'en au defious de
celies-ci que fe placent ces cailloux ovales* ronds
ou de toute autre forme, puis ces lits de graviers *
: de gros ou moyen fable , qui s'allient avec la
terre la plus groiiière. • %
, A l'égard des teitcs plus légères, elles fe mêlent
aux fables les plus fins. L’eau les divife à l’infini *
\ de manière qu'elles font dépofées à mefure que le
couvant d ’eau diminue de vkeffe : c'eft pourquoi
^ elles iont aulii portées à de plus grandes drftances ;
en forte que les terres du Delta font tellement
atténuées * qu’on diroit qu’elles ont été tarni-
1 fées. C et arrangement occafionne les différentes
\ épaifleurs & qualités dans la couche végétale
> des .plaines * de même que les inégalités dans
| leur furface i c ’eft pourquoi on y remarque ces
| grandes flafches qui occafionnent par faite de
< tems >• des contre-pentes dans les plaines. On les
rencontre en Égypte dans les baffins de Thèbes,
i de Girgé , de Syout *de Benefnes, de Memphis-,
■ de fielbeys, dansl’Abairrey & dans le Delta. C ette
vérité eft connuede toasles ingénieurs-géographes
q»ri -ont parcouru {‘Égypte. Les grandes crues du
Nil * qui font nappes immédiatement au defious
dès cataractes de Siène, entraînent la ûiperficie
du terrain , & contribuent à la ‘médiocrité du fol
de-la partie Supérieure de la vallée.
D’après ces obfervations fur la formation des
plaines, il eft aifé de concevoir que le Saïd* qui
eft fur la même pente que le Delta, ne peut appartenir
à l ’ordre des plaines des continens, qui
font les plaines de première formation. Il faudroir,
pour que le Saïd fût une de ces plaines, qu’ il y
eût * entre lui & le Delta, une digue naturelle*
telle qu’un banc de rocher qui traverferoit le
pays * joignant le mont Mokaltam à la chaîne
libyque , en face des pyramides,; mais il n’ y a ,
rien de femblable d’un bout de Y Egypte à l'autre.
Au contraire, le Nil* en face de Memphis, a
moins de pente que partout ailleurs. Cette digue*
qu’il auroit fallu pour lutter contre les flots impétueux
de la mer avant la formation du Delta, j
n’exifte réellement qu’ à Siène, où fe terminoit
cet ancien golfe parallèle à là Mer-Rouge. ^On re- ;
marque affez généralement * dans le s ,chaînes de j
montagnes qui bordent la vallée de l'Egypte * que i
l'angle faillant d’une montagne répond à l’angle j
rentrant de l’autre : il y a feulement deux endroits \
ou cettecorrefpondance n’a pas lic-u; par exemple. ’
au defius d’Elnech* à Guebelein (les deux mon- :
tagnes ) & au defious d'Edfon, à Guebel-Silcily j
( paflage de la chaîne )- On voir dans ces deux ;
endroits,que les anglesfaillans dé l’une & del’autre ;
chaîne font oppofés ; ils fe rapprochent tellement*
qu’ il n’y a de place que pour le lit du fleuve.
J’obferyerai pareillement que la vallée de YEgypte
, depuis les cataractes au cap Bourlos, eft
d’une pente uniforme, fans aucune interruption
brufquée , &■ qu’il n’y a d’inégalités que celles
faétiees provenant des déblais des canaux creufés
de main d’homme * de même que les collines
formées par les décombres qui font aux environs
des villes modernes * ainfi que dans le voifinage
de Remplacement des anciennes cités d‘Egypte.. Il
faut cependant excepter de ces fortes d’inégalités
les petites collines naturelles qui font dans le Delta*
au nord de Métoubès. Elles fe prolongent de l'eft
à l'oueft. La nature de leur terre * qui eft grofiîère
& graveleufe, indique affez que ces collines furent
autrefois de petites îles au milieu de cet ancien
golfe. Elles font aujourd'hui ftériles, & environnées
de lagons &r de marais qui fe deffèchent .en partie
lorfque le Nil eft bas.
D’ après ce qui soient d’être obfervé, on voit
que la vallée de Y Egypte incline un peu au nord.
Les couches de la terre font partout les mêmes *
loit qu’on les remarque dans les fouilles des puits
à roue qu’on veut eonftruke, fok dans les profonds
trous ou fouilles qui font auprès de chaque v illage
, dans lefquels on prend la terre pour fabriquer
les briques deftinées à la bâti fie.
Lorfque le Nid eft à ion plus bas.* on remarque,
fur les berges qui l’encaiflent, ces couches de
terre d’ un brun-noirâtre plus ou moins fon cé ,
ou mélangées de fablon jaunâtre : l’on en remarque
encore d’ une couleur de rouille plus ou
moins forte. C e s nuances fout les mêmes .fur
les côtés du canal Jofeph, & forment , d’après
l’analyfe qui a été faite de la terre cultivée de
l’Egypte y cet heureux mélange d’alumine , de
A lice, de carbone , de carbonate de fe r , d'un
peu de fel marin & d’ un peu plus de nitre. Les
iëis y exiftent en petite quantité * le carbone en
quantité très-confidérable , le carbonate de fer
dans une moins grande * & l’alumine &r la fi lice
dans une proportion telle * qu’ il .réfuite de ce
mélange une terre extraordinairement légère. Ces
molécules font fi atténuées* qu’elles permettent au
fluide d’y circuler librement & r jpidement. Joignez
à ces qualités une épaifleur de terre depuis fix
jufqu'à dix mètres * avec une chaleur tempérée
une partie de l ’année* très-chaude pendant l’autre,
& vous aurez une jufte idée des caufes de la pro-
digieufe fertilité de YEgypte. Je dois cette analyfe
à la complaifance de M. Noël * pharmacien de
première clafte & chimifte inftruit employé dans
l'armée françaife en Egypte.
C'eft pareillement cette furface plane, d'une
pente imperceptible * prefqu'au niveau de la
mer * qui occafionne , fous un ciel toujours
pur * cette chaleur exceffive concentrée entre les
chaînes des montagnes dont l’élévation moyenne
eft entre-quatre cents & cinq cents pieds; Elles
. réfiéchifienr encore cette chaleur à mefure qu’on
fe rapproche de Siène * où la vallée eft plus
étroite & les montagnes plus élevées. Pendant
- fon féjour à Mimé* M. Chabrié a obfervé le -thermomètre
dans la campagne * à l’air libre & â
l’ombre. Expofë au nord , il lui a donné conf-
tamment iy à 20 degrés.
I! eft aifé de juger, par ce tableau, de la chaleur
qu’ il devoir faire, à la même époque, à Efnech &
à Siène, plus rapprochés du tropique : telles font
les nuances, particuliérement occafionnées par
les vents de fud-eft , de fud & de fud-oueft *
qui entraînent dans leurs courans cette chaleur
réfléchie par les déferts qu’ils parcourent avant
d’arriver en Egypte , où alors elle eft par fois
fuffoquante* furtout quand elle eft refoulée par le
. vent du nord.
Cette température n’eft naturelle à YEgypte que
par la difpofition de fon fite , puifqe'à la vérité
on ne la retrouve nulle part fous la même latitude
, très-rarement même entre les tropiques *
& je 11e me fouviens pas d’ avoir vu le thermomètre
à cette hauteur dans les plaines où coule
l’ Amazone; il ne defeend jamais au defious de
14 degrés dans cet endroit. Cette vérké me
perfuade que i’atmofphère qui occafionne 1a
marche du tableau n°. 1 , où le thermomètre a
marqué q6 degrés & demi* eft la çaufe de la
dégenération de la majepre partie des produ&ions
dei contrées feptentrionailes de l’ Europe * no-
j tamment de celle de la végétation ligneufe ( dont
j ia grofliur & la faveur du fruit font fi différentes
j de ceux de l’Europe ) , ,à Laquelle le repos do
!' l ’hiver paraît û nécefiaire. Mais je fuis pareille