partie du rivage qu’elle traverfe dans le cours
qu'elle prend, un limon noir, couvert d’un depot
blancde lait. Cette fourceeft la plus forte de toutes
celles qu’on a obfervées autour du lac , & e d e :
eft > ainlï que toutes les autres, falée prefque juf-
qu*au point de facuration.
On apperçoit, dans une des cavités de ces rivages,
une argile qui contient quantité de frag-
mens de greffes huîtres & de bélemnites. Au del-
fus de cette argile grife, & en d’autres endroits
au deffus de la rouge, on trouve une terre très-
noire, combuftible , compacte & fèçhe, qui fe
fend volontiers en cubes, quoiqu’elle n'ait rien
d’argileux, & qu'elle fe laiffe réduire , en pouf-
iière ; elle eft difpofée par blocs & par petites couches
interrompues. Le meilleur noir de cheminée
n’tft pas pluslnoir que cette terre. Lorfqu’on l ’allume
fur du charbon ou à la chandelle , elle brûle
en exhalant une vapeur de charbon de terre, & ne
s’éteint pas facilement; mais elle n’eft pas tout à
fait affez compa&e, & fes couches; ne font pas
allez confiantes. Il elt cependant très-probable
qu’on poùrroit découvrir des lits de véritable
charbon de terre dans les environs du lac In-
derski. Il y a , dans la partie la plus élevée de fes
bords, unè marne en pouflière fine, feche, &
d’un rouge v if ; elle eft très-abondante : les Cal-
moues , ainfi que les Kirgifiens, en viennent chercher
pour peindre les baguetces.de leurs tentes de
feutre. On affure même que ces derniers, en teignent
aufli, ou plutôt en enduifent la laine donc
ils fabriquent leurs feutres. Il y a des collines entières
de cette montagne, qui ne font compofées
que de cette marne,
Le même phénomène a lieu dans toutes les fa-
lines de la Tranfilvanie, & dans celles de Marma-
rofa & de la' haute Autriche. Celles qu’on exploite
près de Wielizlça en Pologne font pareillement
accompagnées de gypfe ; & M. de Haller
dit pofitivement dans, fa Description des falines
d’A ig lç , au canton de Berne, que les montagnes
qui y fourniffent l ’eau falée font comme revêtues
d ’une cuiraffe de gypfe , qui fe trouve en quantité
d’endroits imprégné de foufre. Ne fe pourroit-il
pas que l’acide marin, comme très-proche parenr,
peut-être même une production directe de l’acide
vicriolique, ait eu le pouvoir de convertir çn gypfe
la terre calcaire qu’on rencontre pareillement dans
la proximité de toutes les falines, furtoqt fi ce
mélange s’eft fait dans un tems où la chaux , encore
molle, pouvoit être aifément pénétrée par
l ’acid e, & fe pétrifier avec lui? M, de Born ap-
puie encore cette conjecture fur les raifons fui-
vantes : x°, fur la propriété qu’a le gypfe de fe
diffoudre dans le fel de çuifine, les eaux falées imprégnées
d’acide marin dépofaptconfhmment dans
les canaux par lefquels on les fait couler, une matière
gypfeufe qui eft intimement liée avec lé fel ;
a°. fur ie fel de Glauber, qui s’engendre partout où
l’on fajt du fe l, mais furtout dans les falines de.la
haute Autriche, où il fe manifefte en grande quantité
, fous la forme de gros crifiaux blancs à planeurs
faces & félénireux, dans les engelots des
chaudières, & dans les grands, refervoirs deftinés
a imprégner l’eau de plus de f e l , au fond defquels
ce tel de Glauber fe précipite lorfqu’on en fait
couler 1 eau falée. Il eft même très^remarquable
que dans les falines de la couronne , en haute Autriche
, ce font précifément celles qui font les plus
riches en fel de Glauber, qui font les plus envi*
ronnées de gypfe. C ’eft auffi h rai on pour.laquelle
Au lien elt le lieu qui fournit le plus de fel de Glau-
ber, tandis qu’ il s’en torme moins à Hallftatt &
a lich e l; 3°. fur ce que Hall r a obfervé pendant
évaporation de l’eau falée de la faline d’A igle, que
la vapeur qui s’ en exhaloit, contenoit des parties
vitrioliques que l'ébullition faifoit exalter ; 40. fur
ce que M. Pallas a remarqué que la terre argileufe
qui environne le lac Valant.'tflnderski déceloit
pareillement, lorfqu’on la faifoit rougir au feu
quelque chpfe de vitriolique,, & exhaloit fur le
charbon ardent une odeur fulfureufe. Enfin, fur
ce que d’autres auteurs avoient déjà foupçonné
que l acide marin pourroit fort bien n’être autre
cnofe qu’un acide vitnolique déguifé, conje&ure
que M. Pott lui-même me contredit pas abiolu-
ment. Mais il eft encore réfervé à des hommes
très - exercés dans les expériences chimiques , &
capables de porter des vues profondes dans les fe-
crets de la Nature, de donner à ces conjectures un
plus haut degré de vraifembiance. (Born, dans fes
Mémoires d une Société particulière de favans en
Bohême, tom. 1. )
INDOSTAN. L Indojlan eft le pays renfermé
entre 1 Indus & le Gange, deux fleuves célèbres
qui vont le jeter dans les mers des Indes, à quatre
cents lieues 1 un de 1 autre. Ce long efpace elt traverfe,
du nord au midi, par une chaîne de hautes
montagnes qui, le coupant par le milieu, va fe
terminer au cap Comorin, en féparanc la côte de
Malabar de celle de Coromandel.
Par une.Angularité frappante & peut-être uni-
que, cette chaîne eft une barrière que la Nature
lemble avoir élevée entre les fai ions oppofées. La
feule épaiifeur de ces montagnes y fépare l’été de
1 hiver, c eft-a^-dire, la faifon des beaux jours de
celle des pluies ; car on fait qu’il n’y a point d’hi-
• verentre les tropiques j mais par ce mot on entend,
aux Indes, le terri, de i année où les nuages que
le foleil pompe au fein de la mer, font pouffés
violemment par les vents contre les montagnes
s'y bnfenr & le diffolvent en pluies accompagnées
de fréquens orages : de là fe forment des torrens
qui fe précipitent, groffiffent les rivières & inondent
les plaines. Tout nage alors dans des ténè*
bres humides, épaifles & profondes. Le jour même
eft obfcurci des plus noires vapeurs ; mais, fembla^
ble à l'abîme qui couvroit les germes du Monde
ayant la création ., cette faifon nebuleuie eft celle
de là fécondité. C ’eft alors que les plantés & les
flciirS-ont le plus de fève & de fraîcheur; c'eft alors
que la'plupart des fruits parviennent à leur maturité
»
L’été fans doute conferve mieux fon caraCfère
que l’hiver dans cette région du foleil. Le ciel, fans
aucun nuage qui intercepte fes rayons, y prèlente
l’afpeét d un airain embraie. Cependant les vents
de mer, qui s'élèvent pendant le jour, & les vents
de terre, qui foufflent pendant la nuit, y tempèrent
l'ardeur de l’atmofphère par une'alternative
périodique; mais les calmes qui régnent par intervalles
étouffent ces douces haieines , lailfent fou-
vent les habitans en proie à une féchereffe dévorante.
L’ influence des deux faifons eft encore plus marquée
fur les deux mers de l’ Inde, où on les dif-
tingue fous le nom de moujfons sèche & pluvïeufe.
Taudis que le foleil, revenant fur fes pas , amène
au printems la failon des tempêtes & des naufrages
pour la mer qui baigne la côte de Malabar , celle
de Coromandel voit les plus légers vaiffeaux voguer
fans aucun rifque fur une mer tranquille, où
les pilotes n’ont beloin ni de fcience ni ae précaution.
Mais l’automne à fon tou r, changeant la face
des élëmens, fait paffer le calme fur la côte occidentale,
& les orages fur la mer orientale des
Indes; tranfporte la paix où étoit la guerre, & la
guerre où étoit la paix. L’ infulaire de Ceilan, les
yeux tournés vers la région de l’équateur aux deux
làifonsdei’équinoxe, voit alternativement les flots
tourmentés à fa droite, & paifibles à fâ gauche.
Pour faire connoître YIndojlan relativement à
fôn hydrographie, nous donnerons ici tous les détails
que le major Rennel a publiés fur les fleuves
& les rivières qui l’arrofent.
. Les fleuves du Gange & duBurram-Pooter,avec
leurs branches nombreufes, coupent le Bengale
dans toutes fortes de direétions, & donnent les
moyens de naviguer intérieurement dans ce pays
avec la-plus grande facilité. Ces canaux naturels
font diftribués d’une manière fi égale & fi avanta-
geufe dans cette contrée parfaitement plate, qu’en
exceptant les cantons de Burdwan Sc du Birboom,
qui font environ la fixième partie du Bengale, il
n’y a pas un endroit de la plaine, qui n’a it, même
dans la faifon fèche, un canal navigable à vingt-
cinq milles de diftance. Ordinairement la diitance
des canaux navigables, aux lieux habités, n’eft
guère que de huit milles.
On croit que cette navigation intérieure em- !
ploie trente mille matelots : on n’en fera pas étonné j
en réfléchiffant que tout le fel & la plus grande i
Partie des fubfiftances confommées par dix millions ;
d individus font communément tranfportés par '
eau, à quoi il faut ajouter le tranfport des importations
üc des exportations du commerce,, qui
monte ordinairement à cinquante millions par an ;
les échanges des denrées & des produits des manufactures
, les pêcheries, les voyages , & c .
Ces deux fLuves, que l ’on a qualifiés de frères
& de rivaux, fe reiïemblent on ne peut pas plus ,
foit pour la maffe de leurs eaux, foit pour leur
couleur, leur cours uni, l’afpedt de leurs bords,
les îles qu’ ils forment, l’étendue qu’ils parcourent,
enfin la hauteur à laquelle ils parviennent dans
leurs crues après les pluies périodiques. Le Bur-
ram-Pooter eft le plus confidérable des deux; mais
la différence n’elt pas fenfible à l ’oeil. On fait
maintenant que l’un & l’antre prennent leur fource
. dans les montagnes du T ib e t , & commencent à
couler dans des directions oppofées. Le Gange fe
dirige d abord à l’oueft, & le Burram-Pooter à l’eft
pour gagner les plaines de Y Indojlan. L’ un & l’autre
parcourent, pendant un long efpace, des vallées
étroites, & dés défilés dans des contrées dc-
fertes. Le Gange, après avoir fait huit cents milles
dans les montagnes, débouche dans les plaines, &:
; réj0uitj par fapréfence, les habitans du Bengale.
Depuis Hurdoar, fous le trentième degré de
latitude, où ce fleuve fe montre dans les plaines,
il parcourt un efpace de treize cent cinquante
milles avant d arriver a la mer j il eft navigable dans j
toute cette étendue , où il répand Tabondance-,
foit par les fubfiftances qu’il fournit, foit par les
facilités qu’il donne pour leur tranfport. C ’eft
une route qui traverfe tout le pays, & par-là il
rendues magafins inutiles. Les avantages qu’il offre
furpaffenc de beaucoup ceux de la navigation intérieure
de l ’Amérique, parce qu’il n’y a pas de portages.
Pendant fa traverfeè de la plaine le Gange reçoit
onze rivières, dont quelques-unes égalent le
Khin par la maffe de leurs eaux, & dont aucune
n’eft pas moins confidérable que la Tamife. Beaucoup
d autres rivières de moindre importance fe
joignent également à ce grandfleuve. C ’eftàla réunion
de ce nombre prodigieux de rivières qu’il fauc
attribuer la grande fupériorité du Gange fur le Nil
quaiK à la malle des eaux, quoique le cours du Nil
loit d’un tiers plus long. Quant à cette longueur du
cours , le Gange eft aufli furpaffé par plufieurs des j
rivières du nord de l’Afie; mais il n’y a pas lieu do
croire qu’aucune-de cesrivières voiture une quantité
d eau aufli confidérable dans la mer, parce
qu’elles ne fe trouvent pas dans les limites des
pluies périodiques annuelles.
Le lit du Gange, ainfi qu’on peut l’imaginer,
varie beaucoup en largeur. Depuis fon arrivée
dans la plaine jufqu’ à fa confluence avec la Jummah,
la première grande rivière qu’ il reçoit , il a entre
un milte & un mille un quart de largeur, & fes
finuofités ont moins d’étendue que dans la dernière
partie de fon cours. Il acquiert plus de largeur,
& fon cours eft plus tortueux. Il reçoit fuc-
ceflivement la Gogra, la Soane, la Gonduch &
beaucoup d’autres rivières, & aprèsxette réunion
il acquiert la plus grande largeur qu’ il conferve.