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mille toîfes. Autrefois on n’exploitoit pas la mine
à plus de vingt-cinq à trente toifes de profondeur.
Depuis quelques années on s’eft enfoncé , &
on marche a&uellement environ à cent cinquante
pieds au de (Tus du niveau de la mer. 11 a femblé que
la mine qu’on droit du fond écoit généralement
plus riche & mieux criflàllifée que celle qu’on pre-
r.oit dans le haut. Il eft à préfum r que plus on
s’enfonceroit, plus on auroit lieu d’être content ,
par la raifôn applicable à toutes les mines en général
, que les filons doivent être d ’autant plus
riches , qu’ ils paroiffent plus voifias du centre d’ où
femblent partir les émanations métallifantes. On
fait cependant qu'il y a des mines dont les filons
fe montrent plus riches dans la hauteur que dans
la profondeur 5 mais cela eft rare. Il y auroit d’autant
plus d’avantage à s’enfoncer dans celle-ci, qu’on
s’épargneroit le déblai de la croûte de cette tnafte
dont on ne t r e point de mine, puifqu’il e ft, comme
ôn l’a déjà d i t , tout de terre végétale , quelquefois
fur une épaifteur de trente à quarante pieds ;
déblai cependant indifpenfable pour marcher en
avant.
Tout le travail de Fexrraéilcn de cette mine
confifte à déblayer d’abord cette croûte, enfuite
les amas de cette même terre qui fe trouve
ftaêlée avec lés roches , les tas de pyrites , les
micas, les oc re s , les argiles, & c . Plufieurs de
ces matières, la roche furtout, fourniraient peut>
être une mine dont on pourroit tirer un aulïi bon
parti, & peut-être meilleur que la mine crifta1-
hfée , qui ne rend pas tout ce qu’elle promet à
l’oe i l , ainfi qu’on le verra par la fuitej mai^ ce
choix exigeroitdes connoiffances & de l’attention
dans les mineurs. On a trouvé plus fimple de
borner leur difcernement à la mine criftallifée, q u i,
offrant l’éclat métallique le plus décidé , ne peut
tromper l’homme le moins connoiffeur.
On déblaie donc tout ce qui n’eft pas de cette
faine. Ces déblais confiftent pour la plupart en
ferre facile à piocher, ou en fable ou en argile,
& oppofant conféquemment peu d’obftacles. Le
rocher pur y eft rare, & fe pre'fénte encore plus
rarement en grofte maffe. Au refte , comme il eft
toujours environné de terre , on le cerne, &
s'il eft trop gros on le laifte à fa pla cé, & on
marche aux blocs de mine, qui, avec les terres,
forment la plus grande partie de la minière. Quand
on a mis ces blocs à découvert on les attaque par
le pétard, qui les met en éclats. On rompt ces
éclats à coups de maffe, on fépare la mine crif-
taliifée de celle qui ne l’ eft pas, ainfi que des
morceaux de roche, de quartz ou d/autres matières
terreufes qui peuvent s’y trouver adhérentes. On
tranfporte enfuite fur la plage, qui eft à cinq cents
troifes, cette mine , qui eft alors affez pure pour
n'avoir pas befoin d’être bocardée : c’eft là qu’ on
la vend le quintal environ vingt-quatre de nos fous
aux bâtimens qui viennent la charger;
On n'en fond point du tout dan« l’île d’Elbe >
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à caufedu manque abfoludebois, qui oblige les habitant
à femer des rofeaux pour échalaffer les vignes.
Il eft à préfumer cependant qu’ il y en avoit autrefois
, car ce terrain y eft généralement très-convenable
5 mais les anciennes exploitations de la mine
1 s auront fort diminués, & le peu de vigilance lur
cette impori ante reproduéfcion les aura détruits.
Le manque de bois, qui fait que dans l’ île d’Elbe
on n’a pu établir même un feul fourneau, fait aufti
qu’on renonce à extraire du vitriol des tas de pyrites
qu’on rencontre quelquefois dans la minière,
& qu’ il faut déblayer pour attaquer la mine de fer.
Ainfi , tout ce qui n’eft pas mine de fer criftal*
lifée eft porté aux déblais. Quelques ouvriers
mettent feulement à part des ocres fines lorfqu’ils
en renconrrent, & ils les vendent aux peintres
pour leur compte particulier.
Cette mine fournit à la confommation en fer
de la plus grande partie des Etats du roi de Sardaigne
, de ceux du Grand-Duc, à 1 État de Gênes,
à celui de FÉglife, & jufqu’à ce moment-ci à la
Corfe, Plufieurs de ces p a y s & la Corfe notamment,
ont cependant des mines de fer 5 mars Je bas
prix auquel la facilité del’extraétion a permis d’établir
la mine d’Elbe, la commodité du tranfport
pour tous ces États maritimes, la facilité d’ en
tirer un excellent fe r , l’y font paffer.
G’eft principalement fur la côte de Tofcane que
fe fait la grande confommation de la mine d’Elbe.
Sur cette côte & dans tous les autres pays où Ton
fait ufiîge de cette mine, excepté l’État de Gênes
& la Corfe , on la fond après,. bien entendu , lui
avoir fait fubir un long grillage : on n’y ajoure
aucun fondant, cette mine par fa nature n’en ayant
pas befoin ainli qu’on a pu le voir. Ce travail étant
abfolumentle même que le nôtre, ne mérite aucun
détail.
Mais dans l’État de Gênes & en Corfe on opère
d’ une toute autre manière : on extrait le fer fans
fondre la mine , félon la méthode ufitée en Cata-
lanne.
Il fuffit de dire ici que -la manière d’opérer ordinaire
ou par les hauts fourneaux la mine d’Elbe
rend environ foixante-dix pour cent en gueufe ou
fer coulé , & que cette gueufe fe réduit de foixante-
dix à cinquante lorfqu’elle eft en fer battu.
On eft étonné de ce produit, qui paroîr fi
foible lorsqu’on confidère le poids &t l’éclat de
cette mine, qui la feroit prendre pour du fer pur.
C e déchet inattendu eft caufé par le foufre, q u i,
étant très-abondant, fait d’abord une perte con-
fidérable de poids par fa difparition , mais qui en
occafîonne une autre encore par une portion con-
j fidérable de la partie ferrugineufe de la mine, qu’il
J entraîne en fcories.
I Mais le fer qui réfulte de Fune ou l’autre ma-
j nière d’opérer ,.lorfque les opérations ont été bien
dirigées , eft de la meilleure qualité. Il fe travaille
! à chaud & à froid avec la plus grande facilité : il
’ eft d’une difficulté fingulière à rompre > il fe lime
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& fe polit trèj-bien 5 il foutient parfaitement le
feu quand on Je ménage comme il faut, & on le
fait aifément arriver à cet étae qu’ on appelle nerveux
, qu’on doit regarder comme l’état de perfection
du f e r , puifque c’eft celui où il jouit de
toutes fes propriétés avec le plus d étendue, la
malléabilité, la ténacité , &c.
E LB EUF, ville du département de la Seine-
Inférieure, chef-lit u de canton , fur la rive gauche
de la Seine , à deux lieues oueft du Pont de-
l’Arche. La ville d’Elbeuf eft célèbre par une
manufacture de draps-qui s’eft toujours fouçenue
depuis i667 qu’eiley fut établie, jufqu’à nos jours.
Cette manufacture a plus de trois cents métiers,
d’où il fort par an dix mille pièces de draps de
cinq quarts, façon d’Hollande & d Angleterre ,
qui rapportent ptus de deux millions de francs. Elle
occupe & fait exifter, tant dans la ville que dans
les environs, plus de neuf mille ouvriers de tout
genre. Les draps d’Elbeuf font d’une qualité inférieure
à ceux de Louviers, Sedan & Abbevilie;
niais le bon marché leur procure un plus grand
débit. Outre les draps, Elbeuf a des fabriques de
bas & de tapiferies de Bergame & de point de
Hongrie, qui occupent plus de cinq cents individus.
Il y a d’ailleurs des tanneries, deux moulins
à blé & un moulin à foulon, que. le petit ruiffeau
oui vient d’un coteau voilin d’Elbeuf fait mouvoir.
tUbeuf a un fous-iofpeCteur des forêts.
ÉLÉPHANS FOSSILES. Quoiqu’on ait remarqué
depuis long-tems entre les êléphans d’Afîe &
ceux d’Afrique des différences coyfidérables par
rapport à la taille, aux habitudes & aux lieux dans
leiquels ils habitent 5 quoique les peuples afiatiques
aient fu de tems immémorial apprivoifer les êl.ê^
phans qu’ ils prennent à la chafle, tandis que ceux
de l’Afrique n’ont jamais été domptés, & qu’on
ne les chalfe que pour fe nourrir de leur chair,
pour leur enlever leur ivoire ou pour fe'débar-
r.affer de leur dangereux voifinage , cependant les i
auteurs qui ont traité de Fhiftpire naturelle des
Méphfins les. ont toujours regardés comme ne formant
qu’ une feule & même efpèee.
Les premiers foupçons qu’il y en a plus d’une
font nés de la comparaifon de plufieurs dents
molaires qu’on favoi.t appartenir à des êléphans, &
qui prèfentoient des différences confidérables, les
unes ayant leur couronne comme fculptée en forme
de lofange > les autres en forme de rubans feftoti-
nés.D
epuis on a. fu que les têtes d’êléphans qui ont
des dents à rubans feftonné.s venpient de; Çeilan ,
& que celles dont les dents ont des lo fanges ve-
noiept.du Cap 4e Bonne-Efpér.ance. Outre cela, en
jetant un coup-d’oeil furce-s têtes , on v o i t , foit
dans feu? profil, Coit dans leurs proportions , des
différences qui ne petoie-teent pas de les regarder
tomme la. même e.%àc$. Cette, bafe, décidée par
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les anatomifles, peut fervir à ceux qui s’ occupent
de la ftruéture de la T e r r e , qui recueillent les
monumens.de Fhiftoire phyfique du globe.
Chacun fait qu’on trouve fous terre, en Sibérie,
en Allemagne, en France, au Canada, & même
au Pérou, des offemens d’ animaux énormes, &
qui ne peuvent avoir appartenu à aucune des ef-
pèces qui habitent aujourd'hui dans ces climats.
On en trouve par exemple dans tout le nord de
l’Europe , d e l’Alïe & de l'Amérique, qui reffem-
blent tellement aux os d’ êléphans par leur forme
& par la texture de l’ ivoire qui conftitue leurs dé-
fenfes, que tous les favans les ont pris aujourd’ hui
pour tels : d’autres ont paru être des os de rhinocéros
, & s’en rapprochent effectivement beaucoup.
O r , il n’y a aujourd’hui d’ êléphans & de
rhinocéros que dans la zone torride de l’ancien
Continent. Comment leurs dépouilles offeufes fe
trouvent-elfes en fi grand nombre dans le nord des
deux Continens ?
On s’eft épuiié là-deflus en conje&ures. Les uns
ont fuppcfé de grandes inondations qui les y auraient
tranfportées. Les habitans de la Sibérie
croient que ces os proviennent d’ un animal fouter-
rain , femblable à nos taupes, qui ne fe laiffe jamais
prendre en vie. Ils le nomment mammouth , & les
cornes de mammouth , qui font fembl.ables à
l’ ivoire , font pour eux une branche affez inté^
reffante de commerce.
Rien de tout cela ne pouvoit fatisfaire un natu«
raliite éclairé. L’hypothèfe de Bufifon étoit plus
: plaufible , en fuppofant qu’elle ne fût pas com-r
; battue par desraifons d'un autre genre. La Terre,
i félon lu i , fortie brûlante de la maffe du fo le il,
avoitçommencé à Çe refroidir par les pôles : c’éroit
là qu’avoit commencé à vivre & à s’établir la na->
ture vivante. Les efpèces formées les premières,
& qui ont befoin de plus de chaleur, avoien.t été
chaffées fucçeffivement vers l’équateur par Fac-
^ croiiTement du froid , & , ayant parcouru toutes
les latitudes, il n’étoit pas étonnant qu’on en
trouvât partout les dépouilles. ,
Un examep fçrupul.eux de ces os fait par les
anatomifles, en nous apprenant qu’ ils ne font pas
affez fembl.ables à çeux^^dé Y éléphant pour être re-
gardés comme absolument 4.e la même, efpèee 9
pourra-t-il nous difpenfer 4’avoir leeours aux explications
dont nous venons 4e parler. Les 4ents de
mammouth fes mâchoires ne reffemblent pas ,
il eft vrai , t.rès exaélément à celles de Xéléphant.
Quant aux mêmes parties dans l’animal de l’Q h jo ,
il fy^ t d’u.u coup-d oeii pour voir qu’elles s’en
éloignent encore davantage.
Mais que font devenus: ces deux énormes animaux
, s’ il* ne font pas des êléphans , fi les rhino.-»
eéros foflUes de Sibérie fqnt très-différeys. de tous
(es rhinocéros, connue l II en eft de même des prétendus
ours fofitfes d’Anfpacfi , du crocodile fof-
fiîe de Maëftriehic, de. l’efpèee de ce r f du même
1; lieu » de l’ animal de douze pieds de long fans