
titude de havres & d’encrages. L’anfe qui eft au
côté oriental de l’ entrée , au côté oriental de la
plus grande des île s , eft à l’abri de la mer, mais
elle n’a guère d’autre mérite ; car elle eft expo fée
àux vents du fud-eft, qui y foufflentavec beaucoup
de violence : on aperçoit en bien des endroits les
ravages qu’ ils produifent par intervalles^
Le terrain qui borde la côte de la mer eft uni &
d’une moyenne élévation > mais en dedans de l’entrée
il offre prefque partout des collines efcarpées
qui annoncent une formation commune} car elles
le terminent en fommets arrondis ou émouffés , &
elles préfencent fur leurs flancs des filions de
peu de faillie. Plufieu^s de ces collines peuvent
fiiee réputées hautes, tandis que d’autres font d’ une
élévation très-médiocre : elles font toutes, même
les plus élevées, couvertes entièrement de bois
épais jufqu’à leurs fommets ; chaque partie de s
plaines qu’on trouve vers la 'mer eft également
boifée ; elle offre dans une largeur confidérahle
de grands arbres droits qui pré tentent à l ’oeil-un
très-beau point de vu e , & Une vafte forêt. Il y a
cependant des efpaces nus fur les flancs de quelques
unes des collines} mais ils font en petit nombre,
& ils indiquent que ces collines font en général
des rochers : à proprement parler, elles n’ont
d ’autre fol qu’une efpèce d’engrais d’ au moins deux
pieds de profondeur, qui vient du détriment des
moufles & des arbres. Leurs fondemens ne doivent
donc être regardés que comme des rochers énormes,
d’ane teinte blanchâtre & grife dans les endroits
où ils ont été expofés à l’air'} & lorfqu’ on
les brife, on les trouve d’un gris-bleuâtre, comme
ces rochers qu’on rencontre partout à la terre de
Kerguelen. Les côtes efcarpées ne font pas autre
choie} & les petites anfes qu’on voit dans l’entrée,
ont des grèves compofées de fragmens de ces rochers,
& d’ un petit nombre de cailloux. Toutes
les anfes offrent une quantité confidérable de bois
qu’y amène le flot, & des ruiffeaux d’eau douce
affez abondans pour remplir les futailles des vaif-
feaux. Les ruiffeaux femblent provenir uniquement
des nuages pluvieux & des brumes, fufpenJus autour
du fommet des collines : on ne doit pas, en
effet, compter fur beaucoup de fources dans un
pays fi plein de rochers', & l’eau douce qifon voit
dans la partie fupéric ure de l’entrée eft vraifembla-
biement produite par la fonte des neiges. Les na- ;
tutels du pays n’ont jamais dit que l’entrée reçût j
une rivière confidérable, & l ’on n’a d’ailleurs aucune
raifon de foupçonner qu’il exifté une pareille
rivière : l ’eau des ruiffeaux eft parfaitement claire,
& elle diffout le favon avec une grande facilité.
Le temps que le' capitaine Code éprouva pendant
fon féjour fur cette terre, approche beaucoup
de celui qu’il avoit eu en travers de la côte.
Lorfque le vent fouffle des points du compas qui
fe trouvent entre le nord .& l'oueft / le ciel eft
beau & ferein} mais f i le vent vient du fud ou de
l'oueft, l’acmofphère s'embrume, & il tombe de
la pluie. Le climat, autant tju’on en peut juger,
eft infiniment plus deux que èeîui de la côte,
orientale d’Amérique, au même d^gré de latitude
& à la même époque de l’année, c’eft-à-dire, au
commencement du printemps. Le mercure du baromètre
ne fut jamais au-deffous de quarante-deux
degrés, même pendant la nuit, & durant le jour il
s’ éleva fouvent àTojxante. On n'apercevoit point
de gelée fur les terrains bas; la végétatjon.y étoir,
au c o n t r a ir e fo r t avancée, car on vpyoit de
l'herbe qui avoir déjà'plus'd’un pied de longueur.
La mer eft haute à 11 heures 20'^dans les'nouvelles
& les pleines lunes ; elle s’élève de huit
pieds neuf pouces} on parle de l’élévation qui a
lieu durant les -marées du matin, & deux ou trois
jours-après la nouvelle & la pleine lune. Les mat ées
de nuit montent alors dé deux pieds plus haur-
Cette élévation plus confidérable fut très-marquée
dans la grande marée de la pleine lune qui eût lieu
après l’arrivée des navigateurs anglais. Il part ît
donc clair qu’il en feroit de même lors des marées
de la nouvelle lune. Au refte, la relâche de Cook
ne fut pas allez longue dans Ventrée de Nootka
pour s’en affurer d’une manière pofitive. j-j
On ne doit pas paffer fous filence quelques ob-
fervations relatives à cette matière, qui eurent lieu
tous les jours que les Anglais relièrent dans ce parage
: ils trouvèrent beaucoup de^bois flottans fut
la côte de l’anfe , où ils firent de l’eau &: du bois ;
ils étoient obligés d’en enlever unç partie pour arriver
à l’aiguade : fouvent de gros morceaux ou
des arbres qu’ ils avoisnt rangés durant le jour par-
delà la laiffe de la mer haute, fe retrouVoient flot**
tans le lendemain fur le chemin de l’aiguade. Tous
lesétabliffemens dont ils fe fervoient pour remplir
les futailles 3 étoient jetés pendant la nuit loin des
endroits où ils les avoient placés, quoiqu’ils de-
’ meuraffent immobiles durant les maréés de jour.
Le bois qu’ils avoient féndu pour les cheminées de
leurs vaiffeaux, & dépofé par-delà la laiffe de la
marée de jour, fe remetroit également à flot pendant
la nuit. Quelques-uns de ces événemens eurent
lieu chaque nuit qui fuivit les trois o\i quatre
jours des hautes marées, & durant cet intervalle -
les navigateurs anglais furent contraints d’attendre
la marée du. matin pour débarraffer fe chemin dé
l’aiguade.
On ne peut dire fi le flot tombe dans l'entrée
du nerd-oueft, du fud-oueft ou du fud-eft. Coclç
penfe qu’ il ne vient pas dû dernier point} il n’a là-
deffus qtfe des conjectures fondées fur ies obfer-
vations fuivantes : les coups de vent du fud-eft
qu’ il éprouva dans l’entrée., diminuèrent la hauteur
de.la marée au lieu de î’a< croître, ce qui n’aur.oit
guère pu arriver fi le flot & le vent avoient eu la
même djreélion.
La pointe occidentale de l’entrée, préfente une
bourgade précédée d’ unepnfe bien fermée, dans
laquelle la fonde.rapporte de neuf à quatre bralfrs,
fond de joli fable. Les habitons de ce village foitj:
nombreux} ils accueillent les étrangers d’une manière
très-amicale , & ces hommes hofpitaliers leur
donnent toutes fortes de marques de poli té (Te.
De ce village /en remontant la bande occidentale
de l’entrée , la côte, dans l'efpace d’environ
trois milles , eft couverte H'î ots qui bftVent plu-
fieurs hâvres commodes, fur une profondeur qui
varie de T rente à fept braflls, bon f./nd. Deux
tyeues en dedans de l’entrée, ci ri trouve au côté
oueft un bras qui fë prolonge ai! nord-nord-Oueft :
deux mille, s plus loin il y en a un fécond dont la direction
eft à peu près la même, & en face duquel
on voit une île affez grande.
’ On aperçoit les relies d'une bourgade un milles
au-deffus du fécond bras il y a quelques ver veux
devant ce village abandonné-, mais on ne découvre
perfonne qui puiffe en prendre foin. On.voit au-
delà des ruines de ce canton, une plaine peu étendue,
revêtue des plus gros pins qu’on ait jamais
rencontrés. Ceci eft d'autant plus remarquable ,
que le terrain, élevé fur la plupart des autres parties
de cette bande orientale de l ’entrée eft nu.
- Sur la bande orientale on traverfe un bras de
mer qui fe prolonge au nord-nord-eft, m»rs à peu
de diftance. En face de l’extrémité oueft^de la
grande île , ondécouvre_fur le continent un village
affez confidérable } mais les habitans n’ ont pas la
politeffe de ceux de 1a bourgade dont on a parlé
plus haut. Leur accueil eft froid, plein d’humeur,
& les largeffès qu’on leur fait ne changent rien à
cet air défagréable. Les femmes, au contraire ,
s’empreffent autour des étrangers, & leur témoignent
le plaifir que leur vue leur caufe.
On trouve fui:tout dans les bois, le pin du C a nada,
le cyprès blanc, le pin fauvaga, & d.ux ou
trois efpèces de pins-non moins communes: Le pin
'd u Canada & le cyprès blanc' forment prefque les
d.ux tiers des .arbres ; on les confond de loin, car
ils offrent également des fommets épointès en aiguilles}
mais on les diftingue bientôt à leur couleur
lorfqu’on en approche : lé fécond eft d'un vert,
beaucoup plus pâle que le premier. En général, la
végétation des arbres eft très-forte, St ils fu it tous
d’une grande taille.
Ou remarque peu de variétés dans les productions
végétales, mais comm'e l’examen de cette
terre a été fait à l’époque peu avancée du printemps,
il eft probable qu’une partie des plantes ne
fe déyeloppoient"pomt encore. On trouve autour
des rochers &r an bord des bois, des plants de
fraisés & de ffamboifiers. On: ne fe permettra aucun
détail fur les produ&iôns diverfes de ce canton ;
on fe bornera à dire qu'elles font, en général, de
• 1-’efpèce de celles qui croiffent en Europe & dans
les pa/ties connues de l'Amérique.
Les quadrupèdes qu’on trouve fur certe terre
préfentent une brandie de commerce^ très-confi-
ciérabïe par les fourrures qu’on en n tire. Les renards
font en grande ab 1nd.1p.ee’, ils offrent bien-
des variétés. Des.îonps,, des daims} desours, la
martre ordinaire, la martre de pin, une troifième
qui a la robe d’un brun plus clair, & lés poils plus-
groflirs que les-deux-p-femières} les hermines, les
ratons & les écureuils, telles font les richeffes que
les rtavigàteürs peuvent fe procurer dans ces contrées
lointaines. '
Parmi les quadrupèdes dont on vient de parler ,
il en eft deux qu’on ne peut décrire : leurs peaux
feules, A: apprêtées par les naturels, ne permettent
pas à un certain point d’aflîgner le genre auquel
ils appartiennent ; cependant il y a lieu de conjec-*-
tu fer que l’un eft unélan, & l’autre une efpèce àsf
chat fauvage' ou de lynx : la longueur de la peau-
dé celui-ci, non comprife !i tête, que les h a bi lans-
ôtent toujours, eft d'environ deux pieds deux pouces;
elléeft couverte d’ un très beau poil follet, ou-
d’ une très-belle fourrure d’un brun-clair ou’ d’un
jaune-bhnchâtre, entre-mêlée de longs paris noirâtres
fur le dos, & d’unÛalanc d ’argent fur les
côtés, où ris‘ont plus de longueur que fur le dos r
ils font de la couleur du poil follet fur le ventre,,
où ils font plus longs qu’ ailleurs} mais les poils
blanchâtres ou argentés dominent fi fouvent, que
la robe entière en prend la-teinte : la queue a trois*
pouces & une pointe noire.
La race des cochons, des chiens & des chèvres
ne s’eft pas encore établie fur cette partie de l’A mérique.
Les baleines , les marfourns & les veaux marins-
font les animaux de mer qu’on aperçoit en travers
de la côte. La loutre de mer y eft abondante : on fe
dîfpenferoit de la décrire, fr elle ne préfemoit pas-
ces différences avec l’animal connu fous ce norn.
Elle offre un noir éclatant ou luftré}; mais la plupart
des poils étant blancs à la pointe, préfent : nt au
premier coup d’oeil une teinte grifàtre : la face ,.
le cou & la poitrine font d’un blanc-jaunâtre ou
d’ un brun très clair, qui, dansl 1 plupart des peaux,,
fe prolonge fur toute la longueur du ventre. Chacune
de tes mâchoires a fis dents incifives; deux-
de celles de la mâchoire inférieure font très-petites
& placées en dehors, & à la bafè des deux
dents du milieu..Cette efpèce parok diff.rer fous
ces rapports, des loutres de mer qu’ont rencontrées-
des Rafles; elle.en différé de plus en ce qu’elle n’a
pas les orteils des pieds de derrière bordes d une
membrane. On remarque beaucoup de variété
dans la couleur des peaux, qui éprouvent des chah-
gemens aux différence s époques de la vie. Les jeunes
loutres ont le poil brun & la robe peu fournie
au-deflbus. Lorfqu’elles ont acquis toute leur croif-
fance, leur robe n’ eft plus notre ; elles prennent
une couleur d’un brun foncé ou de fuie; mais
elles ont alors une fourrure bien fournie, où l’ on
aperçoit à peine quelques longs- poils. D ’autres,
plus vieilles-encore , font de couleur de châtaigne,
& l’on remarque trè>-peu de peaux dont la couleur
fort parfaitement jaune. La fourrure de ces
: animaux eft lûrement plus douce & plus fine que
celle d’aucun autre quadrupède, & la dfc-o'.iVcr.ee