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dépôts du fleuve, on décriroit bien tes limites
de l'ancien fol &: du fol nouveau. / .
Si ron*connoiffoit aufli partiqplièrernent l’orga-
nil'ation du fol des plaines de la Louifiane , on fe-
roit en état de décider fl la mer n’a pas, avec le,
fleuve, contribué à la formation de cette plaine
immenfe; fi les matériaux apportés par le fleuve
n’ont pas été arrangés dans le badin de la mer , à
peu près de la même manière que fe font fotmès
& que fe forment tous les jours les dépôts im-
menfes qui font cachés fous les eaux, & qui s’é*'
tardent à cjgjquante lieues plus loin que les côtes
de la mer. On peut mettre au même rang ces amas
immenfes de fable que les vents & les vagues accumulent
fur les côtes à la Vera-Cruz & à la Floride
5 mais cette décifîon fuppole un examen fuivi
de tout ce pays, & des observations combinées
avec foin fur des principes.
§. II. Lacs de la Louifiane,
Les principaux lacs de la Louifiane font appelés
Borgne , Pontckartrain , Maurepas. Ils environnent
la partie,du nord & de l\ ft de File de la Nouvelle-
Orléans, & font formés par la mer qui.s’introduit
.entre cette île & le continent. On peut confidérer
ces lacs comme un golfe dont la mer entretient*
par le mouvement continuel dé la marée, les digues
& les paffes. Cette même diftribution de terres
& d’eau fe remarque fur les côtes de Languedoc,
où ces amas d ’eau fonc connus fous, le nom d’ étangs
y ils font alimentés, de même que ceux-ci,
par les eaux de l’intérieur des terres. Nous allons
faire connoître en détail ce mécanifme.,
Les eaux qu’on tire du Miffiflipi & celles qui
s’amalfent par les pluies vont fe rendre^pux lacs
Borgne, Pontchartrain & Maurepas dans toute
l ’étendue de l’îlé où eft fituée la Nouvelle-Orléans,
étendue' qui comprend foixante-huit lieuês depuis
l’embouchure du fleuve jufqu’au canal, qu’on
appelle improprement rivièred’Ib erville3 c’eft-à-dirè,
•du fud-eft au nord-oueft, en comptant les flnuofi-
tés du fleuve,.
L’entrée de la mer qui fe porte aux lacs s’app
e lle ^ Rigole; elle eft allez large pour admettre
coûtés'forfes de vaiffeaux ; elle a feize à dix-huit
pieds d’eau du côté de la mer, & dans toute fa
longueur douze b iffé s de profondeur; mais cette
profondeur décroît enfuite jufqu’ à onze ou douze
pieds : c’eft la profondeur qu’elle a au lac de Pont-
.chartrain. En l'ortant de ce lac on entre dans celui
de Maurepas, de forte que la longueur du canal
de communication, qui eft de trois lieues, forme
une étendue d'eau qui a au moins cinquante pieds
de profondeur à fon entrée & à fa fortie.
Le premier de ;ces trois lacs, appelé Borgne, eft
moins profond que les deux autres > & h’a que
jflx ou huit pieds d’eau du côté de l’ eft. Cette
eau eft lourde, de mauvais goû t, & d’une odeur
*re.bu,tante. La copieur en eft verdâtre comme celle ,
L O U
des mares, qui eft couverte de beaucoup de plantes
aquatiques; mais depuis le milieu du lac jufqua
l’oueft, la couleur de l'eau eft la même que celle
du fleuve, & elle eft bonne à boire : cette différence
vient de ce qu’il n’y entre de ce çptë-ci aucun
canal ni lagunes qui altèrent les épanche-
1 mens du Miflillipi comme de l’autre côté. On
arrive de ce lac a la mer, & la rigole fe trouve
près de fon embouchure :o r , cette rigole eft l’entrée
des deux autres lacs de Pontchartrain & de
Maurepas. Les eaux en font fa ees & fe mêlent
avec les eâux douces qui s’y rendent par différens
* canaux & étangs, où l’on va prendre celle dont
on ufe dans l’ île de la Nouvelle-Orléans.
Tout l’horizon fe découvre fur ces trois lacs.
Quoique les eaux n’y foiént pas fort profondes,
elles font cependant très-agitées lorfqu’ il s’élève
un vent impétueux : on ne peut y voguer que fur
des barques couvertes. Les paffes & les bancs de
fable qui font aans les canaux de Sainf-Jean &
autres qui fe rencontrent près de la Nouvelle-
Orléans n’admettent pas de plus grands bâtimens.
En effet, l’ eau n’ a fur ces derniers qu’un pied &
demi à deux pieds de profondeur . On y pêche beaucoup
de poiffons de différentes efpèces, & fur-
tout des dorades fort grandes. Ce font ces lacs
qui fourniffent fi l’ approvifionnement de la Nouvelle
Orléans & des habitans des bords du Miffif-
fipi dans les environs de fon embouchure. (Voye\
M i s s i s s i p i . )
§. III. Climat & température de la Louifiane,
Le plat pays de la Louifiane paroît être le. fond
d’»une eau llagnante^ & avoir été formé, d’un côté,
des fables & de ce que la mer rejette, & de
l’autre des vâfes & des bois que le Miflîffipi entraîne
pendant une inondation de trois mois,
& qu’il y dépofe ; à quoi il faut ajouter les feuilles
des arbres qui tombent pendant l’hiver, & les
rofeaux qui croiffent en grande quantité & qui
pourriffent. En creufant au-deffus de la Nouvelle-
Orléans pour faire un puits, on trouva, vers
vingt pieds de profondeur, un cyprès dont le
tronc avoit trois pieds de diamètre. Le fol s’étoit
donc élevé de vingt pieds depuis' que cet arbre
avoit été abattu. O r , ce bois étant très-léger, &
furnageant toujours, il n’eft pas à préfumer qu’il
fe foit enfoncé de lui-même dans le fol amolli de
l’île.
Au refte, les rives du fleuve qui fe trouvent
plus élevées que les terres intérieures du pays,
prouvent qu’elles ont reçu cet accroiffement par
ies dépôts de la vafe & du limon que l’eau châtie,
& dont elle laiffe une moindre quantité dans lès
terres à mefure qu’elle s’éloigne du lit du fleuve.
On trouve même à cent lieues de la mer des monticules
qui ne font formées que par des amas de
coquilles d’huîtres. Une tradition s’ eft même con-
fervée parmi les habitans'de ces contrées * que la
P ' ,fnçt
mer s’étolt étendue jufqu’à ces collines ; mais les
dépouilles des animaux font des monumens beau-’
coup plus fûrs de l’ancien féjour de la mer. Si donc
J’on examine attentivement la conftitution du fol
delà Louifiane, on verra qué c’eft une 4 e ces contrées
qui ont été abandonnées par la mer en différens
temps , à caufe des dépôts que le fleuve y
forme chaque jour. Tel eft effeélivement la cô te ,
tant à l’oueft qu’à l’eft de l’embouchure du MiflîT-
fipi ; elle eft encore inhabitable, parce qu’eiîè n’eft
pas encore au-deffus des eau-x.
La Louifiane eft un de ces pays qui fournit une
des preuves les plus frappantes de la différence
qui fubfifte dans la température des climats de
l'Amérique, indépendamment du plus ou moins
d’éloignement de i'équateur. Les chaleurs qu’on
éprouve pendant les quatre mois d’été à la Nouvell e-
Orléans, qui en eft la capitale, favoir, depuis juin
jufqu’en-feptembre, y font plus grandes qu’ à la
Havane & quevdans d’autres contrées qui font
encore plus rapprochées de l’équateur : o r , cette
capitale eft à 3 0 d. 7 de latitude nord. Pendant
Jes mois d’hiver, les froids & les chaleurs fe fuc-
cèdent fi fouvent, qu’après trois ou quatre jours
de fortes gelées, on y éprouve, pendant plufîeurs
autres jours, des chaleurs prefqu’auflï fortes que
dans l’été ; mais ce qu’ il- y a de plus remarquable,
c’eft que le vent fous lequel il gèle en hiver ,
eft le même fous lequel on éprouve en été les
plus fortes chaleurs. Ces phénomènes, ces fuccef-
fions d’effets variables par les mêmes câufes, pa-
roiffent propres aux climats de la Louifiane. 11
paroît contraire à l’ordre de la nature qu’on éprouve
alternativement pendant le froid, les neiges & la
gelée, des chaleurs auffi fortes que fi les rayons du
foleil tomboient perpendiculairement fur le pays.
Les vents y changent continuellement ou n’y ref-
tent toqt au plus que deux jours au même point.
En hiver il y pleut par les vents de fud-eft & de
fud ; mais à la même heure qu’il ceffe de pleuvoir,
le Vent tournant au nord, le froid fe fait fentir.
MH s’y maintient plus de vingt quatre heures, ;
on eft fur d’avoir de la gelée ; mais s’ il n’eft pas j
confiant & qu’ ilpaffe à l’eft, quoique pour peu de
temps, le froid n’ èft pas confidérable ; alors il
quitte l’eft pour paffer au fud ou au fud-outft :
[ auffuôt la pluie recommence, il tombe de là neige,
|j & le vent fait encore le même tour qu’auparavant.
Les vents de nord-oueft & de nord y caufent des
gelées très-fortes; mais ces mêmes vents y produi-
I fgnt en été une chaleur fi fuffocante, que fi ellë.du-
roit deux ou trois jours, les habitans ne pourroient la
fuppotter, & beaucoup périroient infailliblement.
. . La caufé du froid que ces vents produifent en
hiver .à la Louifiane eft la même qu’on a obfervée
dans tout l’ hémifphère feptentrional ; mais celle
de la chaleur vient de ce que ces mêmes vents .
traverfant de vaftes plaines, de très-grands marais
qui exhalent des vapeurs ardentes qui s’y volatifi- ■
fent par l’effet de la grande. a#ivité des rayons
Géographie-Phyfique. Tome IV ,
P o l a i r e s ,T a i r , é c h a u f f é p a r c e s '^ m o y e n s y d e v i e n t
f u f f o c a n t a u l i e u d e r a f r a î c h i r la p o i t r i n e ; & da-ns
c e c a s la c h a le u r e f t b e a u c o u p , p lu s in f o u t e n a b i e
q u e q u a n d e l l e e f t a c c o m p a g n é e d ’ u n g r a n d c a lm e .
N o u s p o u v o n s c o n f i rm e r c e s v a r i a t io n s f in g u -
I iè r e s d e l a t e m p é r a t u r e d u. c l im a t d e l a Louifiane
p a r l e s r é f u l t a t s d e s o b f e r v a t i o n s m é t é o r o l o g i q u e s
q u i y o n t é t é f a i t e s . L e s j o u r s o ù la c h a l e u r f e
n t l e p lu s f e n t i r , e n 1 7 6 7 , à l a N o u v e l l e - O r l e a n s ,
f u r e n t le s 1 2 , 13 & 1 4 ^ m o i s d ’ a o û t . L e 1 2 ,
à c in q h e u r e s d u m a t in , l e t h e rm o m è t r e é t a n t
d a n s u n e f a l l e d o n t l e s p o r t e s & le s f e n ê t r e s é . t o i e n t
o u v e r t e s , m a r q u a 23 d . e x p o f é à l ’ a i r . D a n s u n e
g a l e r i e fp a c i e u f e & c o u v e r t e , i l m a r q u a 2 2 d .
A t r o i s ' h e u r e s ap’r è s - m i d t , é t a n t d a n s la f a l l e ,
i l m a r q u a 2 7 d . , & 3.2 d . d e h o r s . A m in u i t o n
e u t 2 6 a . 7 e n d e d a n s d e la f a l l e , &: 2 6 d e h o r s . L e
t em p s f u t t r è s - c l a i r l e jo u r & l a n u ic . L e m a t in i l
n ’ y e u t p o in t d e v e n t . A t r o i s h e u r e s a p r è s -m id i -
i l f o u f f l a f o i b l e m e n t d e i ’ o u e f t - f u d - o u e f t , & f u t
o u e f t - n o r d - o u e f t p e n d a n t l a n u i t .
L e 1 3 'd u m êm e m o i s , à c in q h e u r e s d u m a t i n ,
l e t h e rm o m è t r e m a r q u a 2 4 d ; e n d e d a n s d e I4 f a l l e
& d e h o r s . A d e u x h e u r e s & d e m i e a p r è s -m id i
i l m o n t a à 2 7 d . ■ £ , & d e h o r s à 35 d . J . A t r o i s
h e u r e s & d em i e a p r è s -m id i iL m a r q u a 2 8 d . e n
« d e d a n s , & 3 2 d . | d e h o r s . A c in q h e u r e s i l é t o i t
à 2 8 d . f e n d e d a n s , & à 5 2 d . 7 d e h o r s . A m in u i t
i l é t o i t à 2 7 d . 7 d e d a n s & d e h o r s . L e v e n t é t o i t
n o r d & f o i b l e .
L e 1 4 , à c in q h e u r e s - d u m a t i n , l e t h e rm o m
è t r e é t o i t à ‘2 y a . 7 d a n s l a f a l l e , & à 2 y d . d a n s
la g a l e r i e o u v e r t e . L ’a tm o f p h è r e é t o i t fa n s n u a g e s
& l e v e n t n o r d . V o i c i l ’ é t a t d u t h e rm o m è t r e p e n d
a n t l e s h e u r e s f u i v a n t e s d u m ê m e jo u r .
■ A n e u f h e u r e s , d a n s l a f a l l e 2 6 d . J , & d a n s l a
g a l e r i e 3 0 d . 7 .
A d e u x h e u t e s ‘ a p r è s -m i d i , d a n s l a f a lle 2 7 d . 7 ,
& d a n s la g a l e r i e 3 2 d . 7 .
A t r o i s h e u r e s & d em i e 2 8 d . 7 d a n s la f a l l e ,
& 3 2 d . | d ans frla g a l e r i e . .
A c in q h e u r e s c r o i s q u a r t s 2 9 d . 7 d a n s l a f a l l e ,
6 3 2 d . | d a n s l a g a l e r i e .
A m in u i t 2 7 d . 7 d a n s l a fa lle - , & 2 8 d . d a n s l a
g a l e r i e .
L e b a r o m è t r e é t o i t l e m ê m e jo u r à 2 7 p o u c e s
7 l i g n e s .
D e p u i s n e u f h e u r e s d u m a t i n , l e v e n t & l a
g r a n d e c h a l e u r c e f f è r e n t . O n f e n t i c f e u l e m e n t d e
t em p s à a u t r e q u e lq u e f o i b l e f o u f ï l e d e n o r d - e f t .
L ’ a tm o f p h è r e f u t c h a r g é e d e n u n g e s . O n v i t q u e l q
u e s é c l a i r s l a n u i t : i l s é c o i e n t la f u i t e d e la
g r a n d e c h a l e u r .
L e 1 5 o n f e n t i t d è s l e m a t in l e s e f f e t s q u e l a
c h a le u r d u jo u r p r é c é d e n t a v o i t p r o d u i t s d a n s
l ’ a tm o f p h è r e . L e s t h e rm o m è t r e s é t o i e n t d o n c
à 1 6 d. à c in q h e u r e s d u m a t in ; à în f t p lu s h a u t
q u ’ à l a m êm e h e u r e l e j o u r p r é c é d e n t , c e q i i
i n d i q u o i t p lu s d e c h a l e u r ; m a is l e v e n t é t o i t d é j à
t o u r n é à l ’ e f t - fu d - e l l p a r l e n o r d - e f t : c ’ e f t p o u r -