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tant continuellement. On a devant foi une montagne
en retour , qui ferme le haut du vallon , 8c
va s appuyer contre le Wetter-Horn ; 8 K le
Scheideck, qu'il faut franchir pour a!ler dans le
pays de Eajli. Les fehiftes font feuilletés & d'un
bleu-noir. Les maffes , qui font faillantes en différons
endroits, font d’une fi énorme grandeur,
qu’elles paroilfent appartenir aux rochers qui corn-
pofent la chaîne des montagnes par lefquelles le
vallon eft ceint de ce côté, mais i’inclinaifon des
couches obfervées attentivement prouve que ces
mafles font détachées & déplacées. Les fchiites des
fommets font tous horizontaux , & prouvent que
ceux qui font plus bas, & dont les couches font
inclinées en tout fens, ont été culbutés. Ce re tour
dû Scheideck, qui va s’appuyer lur le W e tter
Horn , qui elt une montagne calcaire, n’offre
rien de contraire à la loi contiante de la Nature ,
que les rochers calcaires font toujours, ou établis
lur les roches fchitteufes & graniteufes, ou bien
adoflées contr’eiles ; 8c les parties fchitteufes 8c
Ç'raniteufes qui fe trouvent élevées au deflus des
pierres calcaires ne font qu’une continuation des
bafes femblables qu’on trouve dans les parties inferieures.
Les malfes calcaires dont font formées les montagnes
de l’Egher, le Mettenberg 8c le Wetter-
Horn , qui font en avant & entre les glaciers du
Grindelwald, quelque hautes qu’elles foienc, &
quoique perpétuellement chargées de neige, font
des maffés formées par la Nature, poftérieure-
ment aux maffes fchitteufes & graniteufes qui leur
iervent de b a fe , ou contre lefquelles elles font
adoffées i comme nous l'avons prouvé par les débris
de pierres fchitteufes & quartzeufes micacées
que les glaciers détachent & amènent. Dans le cas
préfent on voit que les hautes rnâflès calcaires
font placées 8c formées fur le pied de |Fà maffe
fchitteufe qui leur ett oppofée; que celle-ci eit
établie elle-même fur le mailîf de granit qui ett
derrière le Wetter-Horn , 8c que bien loin que
ce qui compofe le Scheideck foie fur le Wetter-
H orn, au contraire c'ett le mallïf de celui-ci qui
porte fur le Scheîdeck.Ces rochers calcaires, monl-
trueux pour leur hauteur, qui font actuellement
dégradés & efearpés, ont dû fournir d'immenles
débris dans leur écroulement, débris qui non-
feulement ont été enlevés des vallons loriqu’ils fe
font approfondis, mais encore qui les ont comblés
enfuite en partie en recouvrant l’ancien fond.
Ces débris ont couvert ici le pied ou les fonde-
mens (chifteux fur lefquels repofent les montagnes
calcaires. C ’ett par la dettruction & la decompoli- i
tion de ces fehiftes, que fe font affaiffées & écroulées
les maffes calcaires qui étoient deffus, &
celles qui reftent maintenant à pic annoncent par
leurs faces efearpées les relies des derniers écrou-
lemens. C ’ett ce que nous avons déjà fait voir à
l'article de la G emjæi & de l’ Oiche dans le haut
Yallais. Le feul moyen de fixer l'attention fur ces
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grands phénomènes eft de dreffer des plans & des
cartes de chacun de ces maflifs ; c’ett avec ces
fecours qu’on peut fe pafler des deferiptions 8c
même de l’infpedtion des lieux.
Il faut regarder cette partie du Scheideck, qui
ferme le haut du vallon pour aller s’appuyer contre
le Wetter-Horn, comme un relie des anciens maf-
lîfs détruits par les moyens Amples dont nous avons
parlé. On trouve fur le Scheideck des pâturages
d'été , c’eft-à-dire, des pâturages qui font les plus
elevés que les beftiaux ne peuvent fréquenter que
pendant les plus grandes chaleurs, parce qu’ils
font au pied’des fommets couverts de neige. Cette
montagne eft fort haute, & , quoiqu’en partant de
Grindelwald déjà fort é le v é , il faut encore mar-
j cher ueux heures & demie pour arriver à fon fom-
? met. Quand on y elt placé de manière à pouvoir
| contempler les deux vallons en même tems, dont
le Scheideck fait la féparation, on voit la même
chainé calcaire qui règoe dans le vallon de Grin-
detvald , le prolonger dans le vallon de Eajli qui
eft de l’ autre cô té , ainli que la chaîne des monta-i
gnes fchitteufes fe prolonge également du côté
oppofé.
Le haut du Scheideck eft abfolument nu, c’ eft-
à-dire , fans aucune production ligneufe. Les dernières
qu’on trouve à une demi-lieue de fon fom-
met font le laurier des Alpes & quelques genévriers
rabougris & fans graines, & toute la terre
eft couverte d’ un gazon très-fin. Les mares d’ eau
ftagnante qui font en divers endroits de cette mon-'
tagne font jaunes & même rouges, tant elles font
chargées des principes ferrugineux des fehiftes.
Le premier objet qui attire les regards du côté
du vallon de Eajli eft une fuite prodigieufe de
grandes & fuperbes aiguilles ou pics de rochers,
qui couronnent la chaîne de roches calcaires qui
règne lur la droite, 8c forme, comme nous l’avons
déjà remarqué, la fuite de celles qui bordent le
vailon de Grindelvrald > elles font fort élevées. A
côté du fommet du Scheideck eft le glacier de
Schvrartz-Waldi il defeend du Wetter-Horn : à
fa gauche eft le Weu-Horn. Ce premier glacier
eft fort éleyé au deflus. Suivant la règle générale,
il y a de grands amas de neige . Il fe termine fur
un rocher à pic, d’où les glaces fe font précipitées,
8c ont formé un autre glacier au deffous , qui eft
encore fort confidérable. C e dernier s’étend fur
un rocher en pente, & il eft également terminé
par un rocher à pic, où la chute de la glace fe fait
de même, & au bas de ce rocher il fe forme déjà
un glacier, car on y trouve une certaine quantité'
de neige & de glace que la chaleur de l’été ne peur
pas fondre.
De cette hauteur du Scheideck on parcourt de
l ’oeil tout le vallon de Eaflï ; il eft étrpit, entrecoupé
de pâturages ou de bois. On appercoit auffi
le vallon où eft fitué Meiringen. Il y a cinq lieues
du haut du Scheideck à Meiringen. Lés premiers
fapins qu’on rencontre après avoir defçendij pen-
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dant quelque tems la montagne, font fort gros,
fort anciens, & couverts de longues moufles, Le
chemin eft fort feabreux à caufe des Ichiftes rou-
lans fur lefquels on n’a pas le pied alluré. En parcourant
ce. vallon de HaJH on n’entend que du
bruit & du fracas, occaiionnés par la chute des
glaces & des neiges qui defeendent par les vallons
latéraux qui font ouverts entre les pics dont nous
avons parlé : une partie de ces neiges eft réduite
enpouffière. On voit outre cela, au pied de ces
pics, des monticules ou adpflemens formés de
leurs décombres. Sur la gauche ou fuit la continuation
des rochers de fehiftes, & de belles caf-
cades s’y précipitent. Plus bas , dans unendroit ou
le vallon eft plus ou v e r t, on apperçoit Un amas
de glace à travers les fapins ; c eft le glàcier Ro-
feniavi. i‘ r ' ■ v,
Ce glacier defeend de Wetter-Horn : il y a au
deffus des amas immenfes de neiges, qu’ on ne
reconnoît bien qu’à une demi-lieue de l'embouchure
du glacier ; il va beaucoup en pente, & préfente
un amphithéâtre, comme fi lamas de glace
étoit placé fur une fuite de marches ; il s enfonce
dans le milieu, n’a que très-peu de pyramides fur
la droite, & la marèmé eft du même côté. Un
rocher qui eft fut la gauche, vers le h au t, a interrompu
fa marche, Se l’ a forcé de fe replier à
droite, où il s’eft dirigé & où il défendra de plus,
en plus-, vu la maffe énorme de neiges 8e de glaces
furincumbantes qui le preflént dans les parties fu-
périeures, la pente rapide fur laquelle le glacier
defeend, & le peu d'obftacle qu'il trouve dans le
-bas s auffi n’a-t-il pas d'enceinte ou très-peu. le s
rochers qui font fut fes côtés font calcaires. Le
pic qui elt au deflus du glacier eft le Toffe : à
droite eft une partie du Weiter-Horn. Les rochers
de la gauche font nommés Bourg-Homer (cornrs
des châteaux ) , parce qu’ils rellembltnt en effet à
d'immenfes ruines, a des tours Sc a des châteaux.
Les eaux qui découlent de ce glacier & des autres
forment le beau ruiffeau de Richenbach. La fuite
des montagnes de la gauche eft toujours fehifteufe j
mais il s’eft placé en avant des roches calcaires qui
font beaucoup élevées. On en diftingue parfaitement
les couches, qui font de couleurs différentes.
Elle eft étroitement liée à la maflè fehifteufe
qui eft derrière, 8e s’eft mife de niveau avec e lle ,
puifqu’il en tombe une cafcadè qui vient de la
fonte des neiges qui font fur le fommet. Cette
cafcade eft une des plus hautes qu'il y ait en Suilfe.
De l ’autre côté du vallon, à droite, les couches
font également horizontales dans la montagne calcaire.
Enfin, on parvient dans une petite plaine
cultivée où eft placé Meiringen , chef-lieu du
pays de Hafii. De belles cafeades tombent du milieu
des montagnes, qui font derrière Meiringen.
On y trouve des pâturages, des arbres, des bois,
des cabanes 8c quelques champs labourés. L’Aar
paffe au milieu de ce vallon. La defcence continue
à être rapide. Sur ia gauche , une brume épailfe
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r s’élève à une grande hauteur; elle ett occaïïonnée
par. la chute du Richenbach, qui fe précipite à
| travers Tes rochers qu’il a creufes.
Meiringen eft un bourg bien bâti. On y trouve,
-ainii que dans le canton qui l’environne, une belle
race d’hommes. Il n’eft pas rare d’en voir de lix
i pieds, & des femmes de cinq pieds quatre pouces;
elles ont la figure intéreffante &c noble. Le fond
du vallon où fe trouve fitué Meiringen eft vifîbie-
ment formé par un dépôt des eaux, vu qu’il tft
de niveau partout, & qu’il s’étend ainfi l’efpace
de trois lieues en lcngu ur ju(qu'au lac ce Btientz,
à la fuite duquel eft le même terrain nivelé qui
s’étend jufqu’au lac de Thun , dont nous ayons
parlé à l ’article Berne.
Une autre obfervation qui concourt à favori fer
ce fentiment, c’ett que tomes les roches calcaires
qui bordent ce vallon font à pic; qu'on y remarque
des cavités circulaires & des enfoncêmei.s à
la même hauteur i qui annoncent la fouille d. s
eaux & leur aétion contre ces faces. La terre végétale
eft bonne dans ce fond par' le mélange de
la terre calcaire & de la terre argileufe, comme
font prefque toué les fols fertiles.
L ’A ar, qui traverfe ce vallon, y fait des ravages
affreux par les debordemens qu’occafïonne la
fonte des neiges. On retrouve fur les bords de
cette rivière, à une lieue de Meiringen, le pied
de la maffe fehifteufe, 8c qui eft recouverte par
une maffe calcaire. Les fehiftes font remplis d®
cornes d’ammon , dont un grand nombre font pyrite
ufes.
Derrière la paroiffe de Meiringen il y a deux
très-belles cafeades à côté l’une de l’autre : ce font
l’Alpbach & le Dorfbach, qui fe précipitent du
haut de roches calcaires à plus de deux cents
pieds.
. A l’orient du vallon on monte, 8c l’on paffe la
croupe du Balmberg, qui ferme la vallée de Eajli.
L’ Aar s’ y eft ouvert un partage où il n’y a de place
que pour fes eaux, qui y font refferrées enrre deux
rochers calcaires, fur lefquels l’eau a tracé du haut
en bas les différens progrès de l’approfondiffement
de cette brèche. On defeend enluite tout à coup
dans un petit vallon entouré de rochers à pic fort
hauts, dont les couches font inclinées de fîx à fepr
degrés. Il y a quelques années, l'A ar , à la fuite de
grandes pluies 8c d'une fonte de neige abondante,
ayant entraîné une quantité de bois , le partage
dont on vient de parler fe trouva fort obftrué,
inonda tout le vallon à une grande hauteur, & y
forma un lac. Le fond du vallon y eft de niveau
comme celui de Meiringen : il y a beaucoup de
pâturages, d’ arbres fruitiers, & quelques terres
cultivées autour d’ un hameau. A d ro ite, fur le
haut d’un petit vallon, eft le glacier d’Urbach :
c’eft le revers de celui de Rofenlavi. L’Aar entre
dans ce vallon par une gorge fort étroite, qu’elle
s'eft creufée a travers un rocher calcaire. On
trouve, fur fes bords Sc dans fon li t , des gianics