
g e s , îngénieufes, & toujours analogues aux
lujets. Nous pourrions citer une infinité d’exem-
les de travaux de ce genre : mais nous nous
ornerons à celui que nous offre l’ intérieur
de la chapelle des enfants trouvés de Paris.
Tout ce qui dépend du deflin, de l’ouvrage
& de l’ exécution dccèle le goût 8c l’ imagination
des artiftes, N a toire 8c B ru n etti père
& f ils , qui fe font accordés pour ce grand
ouvrage. Heureux fl préférant la peinture à
frefque, ils n’ eufient pas exécuté à l’huile cet
enfemble ingénieux , que nous avons vu faire
& que nous voyons s’éteindre & périr.
L’abbé Laugier remarque avec raifon dans
fes obier varions, que j’ai citées plus haut, que
les trop grands blancs de l’archite&ure nuifent
à l’effet d’un pla fon d. Les dorures, les marbres
de couleur, les bronzes, les meubles les
plus riches s’accordent merveilleufement avec
ces.peintures. Cependant nous ferons ici une
obfervation effentièlîe , c’eft que les objets trop
bruns dans la pièce qui porte le pla fo n d peint,
féconderaient quelquefois encore jnoins que
les blancs , les effets de la peinture. C’eft ce
qui me refte à examiner fur les moyens de féconder
les vues d’ un archite&e qui fent le
prix & tous les charmes de notre art.
La lumière du jour ne peut fouvent frapper
la voûte que par les rayons réfléchis de
celle qui entre par les croifées placées au-
deffous du pla fon d. Ainfi la réflexion qui par?,
tira des murs de la pièce, fera infiniment
Lourde fi les objets qui là décorent font de couleur
brune : c’eft donc un inconvénient à éviter.
S’ ils font trop blançs ils occupent l'oe il, le fatiguent
& lui ôtent.l'a jouiffance du plafond. Si
ces murs font couverts d’étoffes de laine, comme
des tapifferies, elles abforberont une grand partie
de la lumière ou n’en réfléchiront plus.
Ainfi l’emploi des dorures * des marbres & des
ftucs légèrement colorés pour les niurs, & pour
le plancher des marbres blancs, ou un pavé
en mofaïque de couleur claire, feront les décorations
les plus propres à éclairer les p la fo
n d s. Noublions pas de prévenir que la corniche
de l ’ojdre n’aura pas trop de faillie; car
autrement le pla fo n d ne devant recevoir q ïi’ une
lumière de reflexion venant du bas , une large
corniche y produiroit une grande ombre.
Un conftruéleur prévoyant difpofe de routpour
fervir l’art qu’ il chérit. II ne compte pas feulement
fur les réflexions lumineufes qu’il tire de
l ’intérieur; il difpofe encore fes ouvertures de
manière que le tableau qui orne la voûte puilîe
être éclairé par des lumières que les terraffes ou
les murs voifins de fon bâtiment peuvent réfléchir.
dans la pièce. Ces moyens font les plus
puiffans que l’art de bâtir puiffe ménager à l’ai*t
de peindre. Car quoique les réflexions dont je i
parle'foient plus éloignées de l’ouyirage que celles !
qui partent des murs & du pavé de la pièce, elles
lui donnent fouvent une clarté bien plus grande
a raifon de l’étendue & de la blancheur de fon
principe & à raifon de leclat 8c de l’abondance
des rayons de lumière direéle qui font reçus de
toute part.
Le Peintre de fon côté connoîtra bien tous les
objets qui doivent réfléchir la lumière fur fon
ouvrage, & placera fous les rayons les plus vifs ,
les parties de fa compofition où il veut répandre
le plus de jour & le plus d’ intérêt.
■>' Nous n’avons jufqu’ici parlé que des plafonds
éclairés par le jour; mais on connoîttout ce que
la lumière fait & peut produire d’éclat à un tableau
en p la fo n d y lorlque fur la corniche on a
j 1 adreffe de cacher des lumières artificielles qui
éclairent l’ouvrage par les rayons nombreuxd’une
clarté direéle. Nous avons vu l’effet lè plus heureux
de eet artifice ingénieux dans unfallon de
b al, élevé par M. Louis dans une fête donnée en
1770, par l’Ambaffadeur d’Efpagne, à l’occa-
lion du mariage du Roi.
Cet effai avoit trop bien réufli pour ne pas en
uferau plafond, de laîaJle de fpeâacle de Bordeaux,
avec cette attention , que les fumées des
lampes qui éclairent le p la fo n d font renvoyés
au dehors & ne peuvent le noircir.
Le noir eft un inconvénient qu’ il faut fur toute
chofe bien éviter. Et malgré tous les éloges que
nous prodiguons aux peintures des pla fon ds
nous avouons que nous ne pourrions foutenir là
puilïance de leurs charmes, fi on les fuppofe
bruns , foit: que le peintre les ait exécutés de ce
coloris, foit que la nature des couleurs qu’il a
employées y ait contribué, foit enfin que. le
temps & le-défaut de précaution ayent produit
cet effet. Autant l’oeuil efl fatisfait d’ un tableau
clair & lumineux placé au deffus de lu i, autant
il fe plaît à en confidérer les détails ; & autant
il eft repouffé par une peinture qu’en vain on
appellera vigoureufe , dans laquelle il ne peut
rien lire & qui lui .préfente des objets menaçants.
Au lieu de percer la voûte, ils fem-
blent prêts à tomber à terre. Dans ce cas l’effet
efl manqué. Alors fi l’ouvrage eft d’un ar-
tifte habile, je defire que détaché d’une voûte
qu’il furcharge avec déplaifance, il puiffe être
placé verticalement, & que là mon oeil ait la
faculté d’ en contempler aifément les beautés.
Le peintre chargé d’un p la fo n d , doit renoncer
au projet de faire venir en avant les objets
des premiers plans, par des maffes fier .s 8c
très-vigoureufes : nous venons d’en expofer les
défavantages. Si le ton général eft trop blanc
le tableau fera fans mouvement ; & fa(je *
il ennuira l’oeil du fpe&ateur. Ainfi riche &
gai de coloris, il faut que dans fes maffes les
plus brunes , on puiffe lire aifément comme
dans toutes les autres parties de l’oiivrage.
La ppiffance des teintes, bien plus que la force
des maffes ombrées, doit fervir à faire diftin-
guer la diftance des plans.
Quant à la nature des couleurs préférables
pour peindre les p la fo n d s , nous pouvons affurer
qu’il ne faut pas héficer à choifir la frefque (i) ,
fi toutefois le fond permet l’emploi de cette
peinture. Ce fond ne peut lui être convenablef
que lorfqu’ il eft fufceptible de recevoir un
enduit de chaux êc fable : mais fi l’ouvrage
doit fe peindre fur un fond de plâtre, de toile
ou de bois, nous confeillerons l’ufage de la
peinture en détrempe, qui , faite avec tous les
foins qu’elle e x ig e , fera encore d’une grande
durée; la vie d’aucun homme qui l’aura vu
faire, ne la verra fe détruire, fi elle eft à
l ’abri de la fumée & de l’ eau, fi les fonds
font folides, 8c fi le peintre a été praticien
dans le degré d 1encollage néceffaire à cette
peinture.
Tout ce qui nous entoure , montre qu’on doit
à jamais proferire l’ufage de la peinture à l’huile :
fi l’artifte a tendu à quelque vigueur, elle
devient noire: & c’eft comme nous l’avons
d i t , le premier 8c le plus grand des vices d’ un
plafond. Si les couleurs en font trop claires,
elles jauniffent & fe tachent en raifon du plus
ou du moins d’huile que le peintre aura employé.
C’eft ainfi que 1 e p la fo n d d’Hercule à
Verfailles, par leM oyn e , n’eft plus digne de
nos regards, & que la plupart des ouvrages
de le Brun font trop noirs & attriftent les
pièces où ils: ne devroient répandre que des
îiijets d’agrément 8c d’admiration.
Citerai-je au contraire tous les exemples dé
la durée 8c de la fraîcheur confiante de la
frefque, dans les ouvrages de Tib aldi, des
Zuccharo, d’Annibal Carrache, du Domini-
q uin , de P. de Cortonne, d’Andréa SacchL,
& d’une quantité de maîtres qui ont enrichi
toutes les villes d’Italie; & dans ceux que
nous avons en France, de Primatiee, de
Nicolo, de Mignard, de Romanelli, de la
Foffe, & c ? Parlerai-je de ces peintures à frefque
dont les fragmens font échappés à la barbarie
& à la négligence des poffefleurs, & qui datent
du règne de François I er; telles que celles qui
fe voyent encore dans le château de Beaure-
gard dans le Blaifois, & à la chapelle de l ’Abbatiale
de Châalis ï_.
I l ne nous refte plus de preuves à donner fur
la préférence de la frefque dans les p la fo n d s,
preuves développées d’ailleurs dans l’article con-
facré à ce mot -, mais nous avons à former les
voeux les plus fincères, 8c les plus ardens pour
l’honneur des architeéles de notre, école: e’eft
qu’ ils ramènent le goût des p la fon ds dans les
monumens confiés à leur g.éniër; 8c «pour l’honf
i ] Voyez l’article Frefque,
neur de notre art & des habiles gens qui le
profeffent, c’ eft: qu’ils, aient à ne les executer
qu’avec l’efpèce de peinture que nous leur con-
feiilons d’employer, & qui peut feule répondre
a la confiance des conftruéleurs 8c des propriétaires,
8c éternifer les éloges qu’ ils feront en
droit d’attendre de leurs travaux.
(A r tic le de M . R o b in ) .
PLAIRE. ( v. n. ) Le plus noble objet des
arts eft d’ infteuire; mais ils ne peuvent pas
toujours fe propoler pour but l’inftruélion.
Souvent même, leur maniéré d’inftruire eft
incertaine , obfcure, énigmatique, ou du moins
peu lenfible pour un grand nombre dVfprlt,
Il y a même d-s arts à qui paroît entièrement
refufée la faculté de donner des leçons. T e lle
eft l’architeélure ; car quelle inftruétion peuvent
nous donner des murs 8c des colonnes ?
Mais il efl un autre objet donc les arts ne
peuvent jamais s’écarter impunément: celui
de plaire. L’artifte peut plaire fans inftruîre;
mais s il ne p la ît pas, il n’inftruira jamais.
Le moyen de plaire en attachant,* en captivant
les efprits, en leur imprimant un long
fouvenir, eft de pofféder les deux grandes
parties de l’a r t,.l’expreflion & la beauré. On.
p la ît encore avec un talent moins fublime
quand on joint aune bonne couleur , à un beau
pinceau, des difpofitions, & des agencemens
capables de flatter les y eu x , & quand on fait
fuppléer l’agrément à la beauté. Ce n’eft point
là le mérite fuprême de l ’ar t, celui qui confl
u e l’artifte de génie; mais celui qui constitue
le bon peintre.
Quand j’ ai dit que pour p la ire , le peintre
devoit avoir un bonne couleur, un beau pinceau,
je n’ai pas entendu dire qu’ il fût obligé
d’avoir la couleur du T itie n , le pinceau du
Correge : mais il faudrait qu’ il poffédâc à un
bien haut degré quelque grande partie de
l ’ art , s’il parvenait à plaire avec un pinceau
mal-adroit & peiné, avec une couleur fale
morne, défagréable à l’oeil. Les vices du pinceau
ne font pas généralement remarqués ; ils
ne peuvent même être reconnus que de près*
mais un vice choquant dans la couleur bléffè
tous les yeux. Le tableau eft condamné avant
d’être examiné , & il n’y a guère d’appel de
ce premier arrêt. Le peintre aura rempli toutes
les conditions de l’art, quand après avoir
flatté les yeu x, il touchera l’ame 8c fatisfera
la raifon.
Quoique plaire foit le véritable moyen d’avoir
de'sfuccès, on n’a vu que trop d’artiftes
qui pour chercher indiftinâement à pla ire
ont manqué les véritables fuccès qu’ ils auraient
dû fe propofer, & fe font contentés d’obtenir
des applaudiffemens paffagers & vains. Ils ont
cru plaire en captant les luffrages du mauvais