forte de terre , & ils fe fqndroienc & fe vitri- .
fieraient à le fi" l’ un par l’autre,.
Perfuadé de la vérité de ces principes ,
Homberg examina avec attention toutes les ef-‘
peces de terres ; & après^en-avoir fait l’analyle , -
il s’arrêta à une certaine forte decraie qu’ il trouva
très-peu chargée de fel , & qui par cette rai-
Ibn lui parut plus propre qu’aucune autre matière
à l’accompliffèment de fon deffein. Cette
craie j qu’ on nomme communément du tripoli,
j'ert à polir les glaces des miroirs & la plupart,
des pierres précieufes. On en connoît de'deux
efpeces : celle qui fe tire de France eft blanchâ-.
tre , mêlée de rouge & de jaune, & quelquefois
tout-à-fait rouge: eUe eft ordinairementfeuille-
tee & tendre, he tripoli du levant, plus connu
fous le nom de tripoli de Venife, eft au contraire
rarement feuilleté: fa couleur tire fur le
jaune von n’en voit pas de rouge ; & il eft quelquefois
fort dur.
Qu’on fe ferve de l’un ou de l’autre , il faut
choifir cëlùi qui eft tendre & doux au toucher
comme du velours , & rejetter celui qui pour-
roic être mèlé d’autre terre ou de grains delable.
Maïs on doit fans difficulté donner la préférence
au tripoli de Venife ; il eft plus fin , & par con-
fëquent il itiôiilë plus parfaitement que le tripoli-
de France.1 Outré cela le verre ne s’y attache jamais
au feu ; ce qui arrive quelquefois au nôtre.
Cependant comme il eft rare & dher à Paris, on
peut; pour épargner la dépenfe, employer à la
fois , dans la même opération , les deux fortes de
tripoli, en obfèrvantce qui fuit.
Chacune des deux efpeces de craies exige une
précaution partioulieré. On pile le tripoli de
France dans un grand mortier de fer ; on le paffe
par un tamis, & on lé garde ainfi pulvérife pour
s’en fe rv ir , connue ôn le dira bientôt : au lieu
que le tripoli' de Venife demande à être graté'
légèrement , & fort peu à la fois , avec un couteau
ou avec des éclats de Verre à vftre. Il ne
fuffitpas de l’avoir enfuitë paffé par un tamis de
foie très-délié & très-fin ; il faut encore le broyer
dans un mortier de verre, avec un pilon de verre.
Ce dernier tripoli, étànt particuliérement deftinë
à recevoir lesempreintçs , plus ilfpra fin , mieux
51 les prendra.
L e tripoli ayant été ainfi réduit en poudre, on
, prend unecertaine quaptitp 'de celui dç France
qu’ on huipefte avec de l!.eau> jijfqu’à ce qu’ il fe
forme en un petit gâteau quand on en preffe un
peu avec les doigts : à-peu-près comme il arrive à la mie de pain frais y lorfqu’ on la pétrit de même
avec les doigts. On remplit de ce tripoli huniefté
un petit eyeufet p lat, dç la profondeur de fept à
huit lign e s, & du dianietr.e qui..çony'iëptàla
grandeur de la pierre qu’on a deffein de mouler.
On prpfie légèrement le tripoli dans le creufet ,
puis PO niet par~deffps une couche de tripoli de
Vênife en poudre fecbe,-affez épaiffe pour pouvoir
fiiffireau relief qui doit y être exprimé. 1
La.pierre, qu’on veut mouler étant pofe.e fur .
cette première, couche, de maniéré que fa fu-
pepficie gravée, touche immédiatement la lu-
perficie du tripoli, on appuie deffus, en preffant
fortepient avec lçs deux pouces, & l’on ne doit
point douter que l’impreflion ne fe faffe avec
toute la nett'ejé poflible ; car elle fe fait fur ie
tripoli de V en ife , & ce tripoli a cela de propre,
qu’ij eft naturellement doué d’une, [égçre onc-
tuofité, & q ue , lorfqu’on le preffe , les petites
parties q u i, comme autant de grains , écoi.ent di?
vifées, le réunifient, & fe tenant collées en-,
femble, forment une malle dont la fuperficie eft
aufli liffe que celle du corps le mieux poli. On
applatit, ;ou bien on enleve avec le d oigt, ou
avec un couteau d’ivoire, l ’excédent du tripoli
qui déborde la pierre. En çet é ta t, on laiffe re-
pofer le moule , julqu’ à ce qu’on juge que i’hu-
midité du tripoli de France ait pénétré.celui de
Venife , q u i, comme on l’a vu , a été répandu
en poudre féçhe , & qu’elle en ait lié toutes les
parties. Avec un peu d’habitude , on faura ai*
jufte le temps que cela demande. Il convient ,
pour lors, aeféparer la pierre d’avec le tripoli,
Four ce la , on l ’enleve un peu avec la pointe,
d’une aiguille fpchaffée dans un petit manche de
bois -, &: l’ayant éb^nlée , on renverfe le creu -
fet •, la pierre tombe d’elle-même ^8e le fujet qui
y eft gravé refte imprimé dans .le creufet. On
réparera , s’ il eft néceffaire, les bords du tripoli
que la pierre auroit pu déchirer en les quittant,
èc on laiffera fécher le creufet dans un lipu fer-s
mé , où l’on feraaffufé qup lapoufiiere n’entre^
point & ne pourra pas gâter l ’imprefiion qu’on
vient d’achever.
Il eft lurtout d’upe grande impprtapçe qu’il
nç foit abfolument refté aucune portion de tripoli
dans le creux dp la pierre qufon a moulée , &
que le dépouillement de cette pierre fe foit faiç
dans tout fon çntjer, quand ellg s’eiSféparée du
tpipoli : autrement Fimpreflion du verre fe feroit
imparfaitement. Tout çp qui feroit demeuré,
dans la pierre formerqit autant de vuides dans la
copie. Ij faut donc y regarder de près ; & fi l’on
remarque quelque partie emport.ee , quelque dc^
cjiirure, on recommencera une nouvelle empreinte
fur le mêqie trip oli, qui pourra fpryir,
iuppofé qu’ il foit encore moite.
Si lp moulp eft en bon état, 8ç lorfqu’on fera
affuré que le tripoli dont le erpufet eft rempli
eft parfaitement fec , on prendra un morceau de
yerre de quelque couleur qu’on voudra, iln’im-
portp : mais j.1 eft. pourtant à.pfopqs qu’il imitg
autant qu*il eft poflible la çoujeiir des agathps,,
des j^pea, des co/nalînes, des amçthiftes r ou
de quelques unes des pierres fines qu’on choifit
ordinairement popr graver. On le taillera de la
grahcjeup convenable, on lepâlïbrafur le moule,
en forts
énforte que le verre ne touche en aucun endroit
la figure imprimée , car il l’écraferoit par fon
poids. On approchera du fourneau le creufet ainfi
couvert de fon morceau de verre, & on l’échauffera
peu-à-peu , jufqu’à c& qu’on ne puiffe pas
le toucher dés doigts fans fe brûler. I l eft temps
pour lors de le mettre dans le fourneau , qui doit
être un petit four à vent, garni au milieu d’une
«noufïle autour de laquelle il y aura un grand feu
de charbon , ainfi que deffus & deffous.
On pourra mettre un ouplufieurs creufetsfous
la moufïle, félon fa grandeur j on bouchera l’ouverture
de la mouffle avec un gros charbon rou-*
g e , & on obfervera le morceau de verre. Quand
il commencerai devenirluifant, c’eft la marque
qu’il eft affez amolli pour fouffrir l’ impreflion:
il ne faut pas tarder à retirer le creufet du fourneau
, & fans perdre de temps, on prelî'era le
verre avec un morceau de fer plat, pour y imprimer
la figure moulée dans le creufet. L’impreflion
finie, on aura attention de remettre le
creufet auprès du fourneau , dans un endroit un
peu chaud, & où le verre à l’abri du vent puiffe
refroidir peu-à-peu ; car le paffàge trop fubit du
chaud au froid, le feroit furement pétiller & y
occafionneroit des fentes •, & même, afin de prévenir
cet accident, qui arrive fouvent peu de
temps après l’opération , particulièrement quand
le verre eft un peu revêche, on ne doit pas
manquer d’en égruger les bords avec des pincettes
, auflirôt que, rout-à-fait refroidi, le verre
aura été ôté de deffus le creufet.
Tous les verres ne font cependant pas fujetsà
cet inconvénient. Il n’y a pas d’autre réglé pour
les connoître , que.d’en imprimer deux ou trois
morceaux qui enfeignerônt affez la maniéré dont
il faudra les traiter. Ceux qui font les plus durs
à fondre, doivent être préférés ; ils portent un
plus beau p o li, & ne fe rayent pas fi facilement
que les tendres.
^ Si l ’on eft curieux de copier en creux une
pierre qui ëft taillée en re lie f, ou de mettre en
relief une pierre qui eft gravée en creux, on
pourra s’y prendre de la façon fuivante. On imprimera
en cire d’Efpagne ou en fouffre, le plus
exadehient qu’il fera poflible, la pierre qu’ on
veut transformer. Si elle eft gravée en creux,
elle produira un relief, & fi c eft un relief, il
viendra un creux. Mais comme en faifant ces
empreintes, on ne peut empêcher que la cire ou
le fouffre ne déborde, il faudra gavant que
d’aller plus loin , abbattre ces balevres & ne
laiffer fiibfifter que la place de la pierre, dont
on unira le tour avec la lime ou avec un canif.
Le cachet ou empt»ûue étant formé, on le moulera
dans, un creu-Wc rempli de tripoli, de la
même maniéré que fi l’on vouloir mouler une
pierre , & l’on imprimera de même au grand feu ,
dans ce moule , un morceau de verre , en observant
tout ce qui a été preferit ci-deffus.
B eaux-Artf. Tome IL
Sur la manière de faire l e s empreintes en
fouffre , voyez l’article Empreinte.
Quanta celles qui feront faites en cire d’E f pagne
, on les appliquera fur de petits morceaux*
de bois , ou fur du carton fort épais, pour empêcher
qu’elles ne fe tourmentent; car s’il arri-
voit que la carte ou le papier fur lefquels elles
auroientétémifes, pliaffent dans le temps qu’on
les imprime fur le tripoli, la cire d’Efpagne Ce
fon d ro it,& le tripoli venant à s’ infinuer dans
cesfeïites, on ne pourroit éviter que l’impreflion
en verre ne fût traversée de raies qui la défigii-
reroient horriblement, ou qui feroient penfee
que la pierre qui a fourni le modèle auroit été
caffée.
Enfin, pour que la pierre contrefaite imite
plus patfaitement fon original, il eft néceffaire
de lui faire prendre une forme bien régulière, &
qu’elle foitexaéiement ronde , ovale , & c . Pour
cet effet, on la fera paffer fur la meule , l’ufarie
fur fon entour aux endroits qui ne feroient pas
unis. La pâte de verre ainfi perfectionnée, on la
monte en bague , ou on la conferve dans des
layettes comme les véritables pierres gravées, &
l ’on peut affurer que , pour ce qui concerne le:
travail du graveur , elle fait à-peu-près le même
plaifir, & ferc aufli utilement pour l’inftruélioa
que ces dernieres. Je dois avertir qu’au lieu de
creufet, il y a des gens qui employentun anneatr
de fe r , ce qui revient au même. Cet anneau dure
plus longtemps, & c’eft le feul avantage qu’i l
peut avoir fur le creufot.
Soit que le verre repréfente un re lie f, foie
qu’il fe charge du travail de la gravure en creux ,
on ne peut, en fuivant le travail dont on vient
de rendre compte, qu’imiter une pierre d’une
feule couleur, & jamais on n’exprimera les variétés
& les différens accidens de couleurs d’un
camée. Voilà cependant ce que les-anciens ont
fu faire dans la plus grande perfe&ion , & l’on
doit regretter la perte d’un fecret fi propre à muL
tiplier des ouvrages aufli excellens quefinguliers*
On voit des pierres faétices antiques, qui fem-
blentêtre de véritables agates-onyx. Je ne parle
point de ces fardoines-onyx où, pour contrefaire
cette efpece de pierre fine , q u i, quand elle étoic
régulièrement belle , n’avoît pas de prix . un ouv
vrier patient & adroit ,colloit enfemble trois petites
tranches d’agates fort minces & parfaitement
bien dreffées , l’ une noire, la fécondé
blanche, & la troifiéme rouge, & le faifoit fi
habilement que les joints ne paroifl'oient abfolument
point, & les agates ayant été bien afforties
pour les nuances , il n’étoic prefque pas poflible
d’appercevoir la fraude & de s’en garantir. Eh *
qui fait fi dans les fardoines-onyx que nous admirons
, il ne s’ en trouve pas quelqu’une d’artificielle
, & où l’ on a nfé anciennement de la fu-
percherie que je viens de faire ob fer ver ? Mais
ce n’eft pa* ce qu’ il s’agit d’examiner préfeate-»