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beaucoup étudié Paul Véronèfej 8c Tes grandes
compofitions font dans le goût de ce maître.
I l ornoit fouveht fes tableaux de beaux' fonds
d’afchiteclure. I l joignoit à une belle couleur
une grande intelligence du clair-obfcur, &
les, ordonnances font bien conçues. I l eft mort
à Anvers en 1715 ? âgé de quatre-vingt-fix ans. ’
(130) Abraham D ièpenbeke , de l’école
Flamande, étoit de Bois-le-Duc. On-ignore
l ’année; de fa .naiffance-, mais on a des raifons
pour le croire de quelques années plus jeune
què Van-Dyck. I l fut l’un des élèves eitîma-
bles de Rubens, & voyagea en Italie. Il pei-
gnoic à l’huile 8c fur verre : il exerçoit déjà
ce dernier talent avant d’entrer dans l’école
de Rubens. Son aèflin, trop chargé, étoit dans
le goût , de ce maître' :ï il avoit une compofi-
i»on facile ^ iun coloris vigoureux, une belle
entente de clair-oblcur. Il àuroit y peut-être,
une plus, grande réputation .dans la peinture,
. s’ il ne s’etpit pas fouvent diftrait de cet art
pour faire des deflins défîmes à l’ornement des
cl ivres., ou à être diftribués aux. confrairiés. On
a beaucoup gravé d’après ce maître-, nous nous
\contenterons de Citer ici le Temple des Mufes
qui eft connu recherché. Il fuffit pour faire
connoître fon goût de deflin 8c de compofition.
Cét artifte eft mort.en 1675.
(140) T héodore van T huiden , de l’école
Flamande , né ( à- Bois-le-Duc en 1607 , fut
élève de Rubens. 8c travailla fous ce grand
maître , à la célèbre galerie du luxembourg. Il
peignit: à l’âge, de vingt - trois ans la. vie de
Saint Jean de Matha dans ;l’ég-lifé des Mathu-
rins -, mais ses tableaux ont • été entièrement
repeints , 8c il ne -relie, plus .que la compofition
de l’auteur. Il fe difting'uoit dans l’hif-
toire , mais fon goût le ramenoit toujours à
peindre les petits fujets. Il eft noble dans le
grand , piquant & fpirituel dans le-petit. Son
génie étoit Fécond', fes penfées élevées , fon
deffih encore moins corréd celui de fon
maître , fa couleur moins b e lle , fon clair-obf-
çur non moins rempli d’ intelligence. Il gravoit
bien à l’ eau - forte , 8c a donné lui - même
l ’hiftoire de Saint Jean de Matha qu’ il avoit
peinte , 8ç quelques, tableaux du Primatice.
. {141) Anne Marie Schùurmans * de l’école
Hollandoife , né à Ütredit en 1607 , mérite
d’être comptée au nombre des enfans prodigieux.
E lle patloit latin dès l’âge de fept ans , 8c. à
dix ans , elle traduifoit en allemand 8c en flamand
plufieurs traités de Seneque. Ses progrès
dans la langue grecque ne furent pas moins
rapides. Elle fut élève d e , Vpflius poiir la langue
hébraïque. Elle a écrit en vers 8c;eh prbfe
Jjaiis la plupart, des. langues Payantes 8c yulgai-
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tes. Elle poffédoit la fclence de la mufique ,
jouoit bien du luth , touchait bien dii clavecin.
Elle .a peint ; elle a gravé à l’eau -.^orte , au
burin 8c fur le cryftal avec une pointe de diamant.
Elle a fculpté en petit 8c modelé en cire.
Ayant adopté les opinions religieufes d’Abadie ,
elle le fui vit à $ltona , 8c y mourut en l6j#
âgée ;dè foixante 8c onze ans. On a fôn portrait
gravé .par elle - même.
( 1 4 2 ) Gérard T erburg-, de l’école S o lia
« do ife , né en 1608 à Zw u l, dans la province
d’Over - Hfel, fut-élève de fon père. Il avoit
déjà de la réputation avant de faire le voyage
d’Allemagne 8c d’Italie , 8c en effet d’après le
genre qu’ il adopta, 8c la manière dont il l’a
traité, on ne voit pas que l’étude des chefs-
’d’oeuvre de l’Italie ait pu lui être fort utile.
Le fini précieux de fes ouvrages les fit rechercher,
8c il étoit déjàalfez riche, lors du congrès
de Munfter, pour y paroître avec magnificence.
Le tableau où. il repréfenta tous les miniftres
de ce Congrès» eft regardé, comme fon chef-
d’oeuvre. I l paffa enfuite en Efpagne où le roi
le fit chevalier , 8c où toutes les dames voulurent
avoir leur portrait de fa main ; mais le
peintre étoit d’une figure 8c d’ un efprit agréables
; la jaloufie des maris l’obligea de quitter
ce royaume. I l s’établit à Deventer, 8c devint
bourg-meftre dé cette v ille fans abandonner
fon art. I l y mourut en 1681 âgé de foixante
8c treize ans.
Ce n’ eft point la beauté du deflin qui fait
rechercher fes ouvrages; il n’eft ni élégant ni
correét ; mais on y aime un foin , une propre-
..té, que l’on prend pour le fini, 8c qui doit en
être diftinguée : car on peut en effet finir bien
, davantage , fans tomber dans cette manière léchée.
On peut voir des ouvrages de grands maîtres
qui femblent heurtés,8c dont les têtes 8c les mains
font réellement plus finies que dans les tableaux
de Terburg. Son pinceau a quelque chofe de pe-
fant ; mais il rendoit bien les étoffes 8c fur tout le
fatin b lanc, 8c il trouvoit toujours lé moyen d’en
introduire dans fes ouvrages , ce qui devient
en quelque forte fon cachet , 8c ce qui fert à
le faire reconnoître. C’eft cetre partie açcefloire
qui rend fes petits tableaux fi précieux aux amateurs
, quoiqu’on, n’y trouve ni efprit, ni ex-*
preffion, ni mouvement, ni invention , ni com-
pôfition , 8c , que lé choix de la nature y foie
.très'‘commun.
La paix de Munfter a été gravée par Suy-
derhoef; Einftruélion paternelle, par Wille .
(143) Adrien Brauwer, de l ’école Hol*
landoife , né à Harlem en 1608, d’une famille
très-pauvre^ fit dès fon enfance des deflins de
broderfe poiir les parures des payfannes. François
Hais >. .tjrè$->ofi ; pejntre 4e portraits quj
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P E I ffe fon temps, n’avok de fupérieur que Van-
0 vck , crut démêler quelques dilpolmons dans
les deflins du .jeune Brauwer; il le demanda
pour élève à fe. parens, lui fit faire des progrès
rapides , & le renferma dans un grenier,
où il l’occupoic le jour entier à faire des tableaux
quMl vendoit fort cher , tandis qu il
donnoit à peine à l’auteur une maiivaife nourriture
& quelques haillons. Brauwer ne fe
doutoit pas qu’ il eût du talent, il en fut averti
par quelques élèves de fon maître , & prit la
fuite. I l fè réfugia chez un aubergifie d Aml-
terdam, qui avoit peinttdans fa jeuneffe, &
oui lui fournit les matériaux néceflaires a- la •
peinture. Brauwer fit un petit tableau reprefen-
tant une querelle de jeu entre des payfans &
des foldats. L’aubergilte étonne-, alla montrer
cet ouvrage à un amateur qui s ecria : « voila
» le maître qùfe je cherche depuis longtemps
» à connoître , & dont Hais m’a vendu fi cher
,, les tableaux ». „11 donna aulu-tot ƒ ent ducats'
de celui qu’on lui préfentoit ; ils furent
rendus fidellement au peintre qui ne pouvoir
croire qu’une fomrne fl confidérable lui appartînt.
I l l’ a prit enfin, forrit de l’ auberge , &
n’y rentra que quelques jours après , avec
tout l’extérieur, de la gaieté. On lui demanda
ce qu’il avoit fait de fon argent : « Je m en
» fuis défait, dit-il, & je m’en trouve plus
» heureux ». Il conferva ce bonheur toute
fa v ie , ne gardant’ jamais d’argent, ne travaillant
que lorfqu’il éioit fans reffources,
ii’ayant guère d’autre afyle que. les cabarets
& quelquefois les prifons, préférant ces priions
à l’afyle honorable qui lui fut offert par
Rubens ; & mourant enfin d’une maladie hon-
teufe dans un hôpital d’Anvers, en 1640 , âgé
dé trente-deux ans. Rubens verfa des larmes
en apprenant la mort de cet artifte qui avoit
fl mal reconnu lès bontés; il le fit exhumer
& lui procura des funérailles-honorables.
Ses tableaux repréfentent l’es lieux qu’ il fré-
quentoit & .le s aâions-dont il étoit aâeur ou
témoin, des cabarets , des jeux de cartes', des
débauches de village. Ce font les mêmes fujets
qu’a choifis Téniers ; mais des connoiffeurs
trouvent que Brauwer l’a encore furpaffé par
la couleur. Son pinceau eft large , fa touche
ferme, fon qxprefïïon aufti vive que vraie, .
I l a gravé lui-même à l’eau-forte. Corn.
Viffchcr a gravé d’après ce peintre les payfans
de bonne humeur : Suyderhoef un vieillard
c’arefianc une jeune femme : L. Vorfterman,
l ’orgueilleufe , la pareffeufe , le gourmand ,
l ’avaricieux.
(144) Jean Goeim'ar , de l’école Flamande,,
né vers l’époque que nous parcourons , n’ eft
pas un peintre fort connu ; mais il, fournit
l ’occafion de parler du goût de certains ama-
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leurs Flamands, qui fe contentaient d’ornefr
leur cabinet d’un feul tableau', mais qui vou-
loient que ce tableau renfermât le plus grand
nombre qu’il étoit poffible des objets qu’offre
la nature. C’e f t , dit M. Huber , pour contenter
un de ces amateurs , que Goeimar a
repréfenté, dans un grand tableau , Jéfus-Chrift
chez Marthe 8c Marie. La fcène eft dans une
grande falle : d’un côté eft la cuifine , de
l ’autre le garde-manger. Le tout eft rempli
de toutes lortes de fruits , de légumes, de
viandes cuites & crues > d’animaux vivans
8c morts , de vafes & d’uftenfile» de toutes
, les efpéces de métaux. On' voit aufli de fem-
blables tableaux en Hollande. Ce qui femble
prouver que celui de Goeimar n’étoit pas mé-
prifable du côté de l’exécution, c’ eft qu’ i f a
été gravé par le célèbre Bolfwert.
(145) G eorges-A ndré Sir an ï , de l’ école
Lombarde , né à Bologne en 1610 , fut élève
du Guide, & doit être mis au nombre des
peintres agréables. Il a gravé lui - même à
l’eau-forte quelques-uns de l'es tableaux, 8c
entr’autres, Saint-Jérôme en méditation. I l
eft.mort en. 1670, à l’âge de foixante ans. Ce
font les ! talens de fa fille , encore plus que les
liens, qui ont rendu fon nom célèbre.
Elisabeth Siranï mérite une place diftinguée
entre les peintres d’hiftoire. Son def-
fin étoit b eau, fa manière ferme,, fes têtes
gracieufes , fes ombres fortement frappées ;
elle avoit une belle couleur, & fe diftinguoit
par l’agréable fraîcheur de fes demi - teintes.
Telles font les qualités que l’on remarque dans
fon tableau de Téglife de Saint - Léonard, â
Bologne, qui repréfente St. Antoine de.Pade
baifant les pieds de l’Enfant-Jéfus. On retrouve
même dans fes ‘ tableaux inférieurs, une belle
manière & un pinceau moelleux^ Cette femme
fi rare fut empoifonnée , & fon père- ne put
lui furvivre.
F . Bartolozzi a gravé, d’ après cette aimable
artifte , un enfant niid 8c endormi ; 8c Virile .
Gupidon brûlant les armes de Mars.
(146) Adrien van Osta.de femble de volt
appartenir à l’école Allemande par fa naiffance
dans la v ille de Lubeck en 1610, mais la
Hollande a droit de le revendiquer, pùifque'
ce fut à Harlem qu’ il ^reçut fon éducation pic—
torefque. Il fut élève de François Hais , &
compagnon de Brauwer : ce fut lui qui avertie
ce dernier de fes' talens, 8c qui lui infpira
le courage de fecouer le joug d’ un maître
avare.
Oftade a toujours réfidé à Harlem ou à Amf-
I terdâm. Il avoit une grande intelligence de
clair-obfcur. une couleur chaude , vigoureufe
! 8c transparente ? un pinceau flo u , un deflin