» confidérabîemept par elle-même, a eaufe de
» l’extrême raccourci des figures qui appro-
» chent du centre.
» un peu fortes, lorfqu’on ne prend pour
» reculée que la largeur de la nef ; à plus
» forte railbn, si on les regardoit du milieu
» du chteur où elles font placées. La nef de >3 Saint-Pierre de Rome eft le double de celle-ci.
» Quelle fera donc la proportion des figures
» qui y conviendroit ?
» Si l’on cherche une règle pour la fixer,
» dans le problème d’optique dont jufqu’ ici on
a fait ufage, on trouvera des proportions
» monftrueufes , fur-tout pour celles qui feront 33 placées à diverfes hauteurs, ainfi qu’on l’a 3> fait voir. Si on la cherche dans la perfpec- 3) tive , on trouvera qu’ il faut doubler la gran- 3> deur de la figure dans une diftance double,
» pour avoir la même apparence. Mais comme
» il faut obferver en même temps que nous 3> combinons naturellement la grandeur de
33 l’image de la figure avec la diftance où nous
33 la voyons, & que par conféquent fila figure 33 eft grande, nous la jugerons telle ; que d’aile
33 leurs s’il eft vrai qu’on pourra voir cette >3 figure de la plus grande-diftance que donne
33 la n e f, on pourra la voir auffi de plufieùrs’
33 points beaucoup plus prochains ; qu’ en mê-
» me temps donc que celui qui feroit placé au
33 point le plus éloigné, n’y trouveroit peut-
>3 être rien d’ exceflif, çelui qui s^en trouve- >3 roit plus proche feroit choqué d’une aufiî'
» grande difproportion avec la nature humaine ; >3 il s’enfuit qu’ il faut prendre un milieu entre >3 la grandeur de fix pieds & celle de douze *
» -c’eft-à d ire, que les figures feroient d’une
33 grandeur convenable, fi elles avoient neuf >3 pieds -, que celui qui les verroit de prés >3 excuferoit leur grandeur à caufe du lieu
33 vafte où elles font placées, &- que celui
» qui les verroit du point le plus éloigné fen- >3 tiroit que fi elles lui paroiflent lufceptibles
r> vde pouvoir être plus grandes, c’ eft parce
>3 qu’ il en feroit fort éloigné. Cette diminution
>3 l’aideroit à juger de la grandeur d e l ’ efpace
33 & il concevront fur le champ que l’églife
» eft d’une grandeur extraordinaire. L’ effet
» qui en' réfulteroit, feroit l’étonnement que
» produit toujours lamajefté dè l’édifice; éton- >3 nement qu’ont droit d’exciter J es grandes
33 çhofes, & que l’on n’éprouve dans S’aint- >3 Pierre de Rome, qu’après des-réflexions quî
» fuiverit l’examen des détails.
>3 Mais qiielle que foit la grandeur que l’on
33 voudra fixer aux figures, c’ eft-à-dire, ou
33 la proportion que nous propofons, ou même
33 une plus grande encore, il fera toujours >3 ridicule de l’augmenter à mefure qu’elles >3 s’élèveront. Ces figures font; en quelque
» manière-, lés habitâns fi61 ifs dé cét édifice
33 8c ne doivent point grandir, à qûelqu’étage >3 qu’on les place. Il en eft de même des
» figures que les peintres exécutent dans les
» De tout ce qui a été dit ci-deflus, nous j
» conclurons que la raifon & le goût ne per-
». mettent pas que, dans les édifices ordinaires
» 8c faits pour l ’ufage des hommes, les figures,
» foit en peinture, foit en 'fculpture, s’éloi-
» gnent trop de la grandeur naturelle. Nous
» convièndrons cependant que la fatisfàclion
» de l’oe il, & futtout l’ habitude , peuvent exi-
» ger que les figures foient plus fortes dans
» les lieux où l’on a beaucoup de reculée pour
» les voir. Mais il ne s’enfuit pas que cette
» augmentation puifle être portée aux excès dont
» on a parlé ci-devant.
» I l eft encore à obferver que î'a fculpt,ure ,
» à moins qu’elle ne foit placée dans l’ intérieur
» d’ un appartement, demande à être de la
» proportion de fix pieds ; elle repréfente prefque
« toujours la nature nue en tout ou en partie :
» o r , la nature elle-même, dépouillée de vête-
» mens, paroît plus petite qu’elle ne J’ eft en
» effet. D ’ailleurs la proportion de fix pieds
» n’ eft. pas hors de la nature, & le fculpteur
» eft toujours fuppofé devoir repréfente.r la
» nature la plus belle.
» Nous convenons que, dans un bâtiment
» très vafte, il peut être avantageux , & mê- j
y» me, fi l'on, veut, nécelfaire d’augmenter la
» proportion des figures : mais on ne doit
s - pas en conclure qu’on puiffe étendre cette
» licence jufqu’ à la difproportion qu’il y a
» entre u*ne ftatue de fix pieds, & une de dix-
» huit, ou même de "vingt-cinq, c’eft-à-dire,
» neuf ou feize fois plus volumineufe, Effayons
» de trouver une proportion raifonnable qui
» concilie à la fois quelque rapport avec la
* nature humaine & la loriqu’on crpit impo-
» fée par le goût d’obferver quelque relation
» avec le colloflal de l’édifice. Mais ne per-
» dons point de vue que tout bâtiment eft fait
» pour être préfenté à des hommes accoutumés
» à juger de la grandeur de leurs femblables
» à toutes fortes de diftances; de forte que
» fi l’on employé des figures colloflales, ils
» les jugeront toujours telles: à quelque dif-
» tance, à quelque hauteur qu’elles puiffent
» être. Si nous prenons des dimenfions plus
» grandes, ce n’ eft donc pas dans la vue de'
» }es tromper, mais afin que les beautés dont
x, la fculpture eft füfceptible ne foient pas per-
» dues par le trop grand éloignement.
7) On conviendra q ue , dans une nef d’ en-
» viron quarante-deux pieds, telle que celle
» de Téglïfe Saint-Sulpice, des figurés de fix
» pieds feroient fuffifantes. Il eft vrai que Ml
» Bouchardon leur a donné quelque chofë- dé
p plus .-mais il eft vrai anfli qu’elles paroiflent '
» plafonds 2
» plafonds ; elles doivent être afliijettîes à la
» grandeur donnée des figurés d’en-bas >3.
Nous aurions craint d’affoiblir les raifonne-
mens de M. Cochin , en les abrégeant." D’autres,
peut-être, défendront contre lu i, dans
l’occafion , la pratique des grands artiftes qu’ il
combat; nous nous permettrons feulement quelques
légères réflexions.
, Comme on a fournis l’architeélure à des proportions
rigoureufes, il feroit à defirer, fans
doute, qu’on pût y foumettre de même les
figures fculptées ou peintes dont elle peut être
accompagnée. Etablir que ces figures, à quelque
diftance* qu’ elles foient placées , doivent
tracer dans l’oeil une image égale à celle qu’y
traceroit une figure humaine vue d’une diftance
modérée-, .c’eft confidérer feulement ces
figures relativement au fpe.élateur, 8c non
relativement à l’architeélure qu’elles décorent.
Il feroit peut-être d’ailleurs plus jufte d’établir
que la figure la plus voifine de l’oeil dans 1
un édifice étant une fois donnée, les autres,
à quelqu’ élévation qu’elles foient placées,,
doivent tracer dans l’oeil une image égale.
Mais il reftera toujours à déterminer la proportion
de la première figuré relativement aux
dimenfions de l ’édifice.
Tant qu’on n’aura pas déterminé les proportions
dont il s’agit ic i, comme on a réglé
celles des ordres d’architeélure qui reftent
.toujours invariables dans toutes les dimenfions
qu’ ils peuvent recevoir, les fculpteurs ou- ar-
.chiteéles. n’auront pour regie que le goût dans
la grandeur qu’ ils donneront aux figures dont
l’architeélure peut être accompagnée, & le
goût laiffe toujours-quelque choie d’arbitraire.
Si les figures paroiflent trop fortes au fronton
du Luxembourg, 8c au portail de Saint-
■ Gervais, ce' n’eft pas relativement au fpec-
tateujr , maïs . relativement à l’architeélure
qu’elles.accompagnent. C’eft de même, relativement
à l ’architeélure , que des figures de
dix pieds de haut paroîtroient trop grandes à
côté de colonnes, hautes deMlouze pieds. Ce
n’eft donc pas relativement à la proportion
de. la figure humaine , mais relativement à la
.proportion de l’édifiçe que les ftatues décorent,
qu’elles font trop petites ou trop grandes.- '
Il n’ eft pas donné à la peinture d’hiftoire,
encore.moins à la fculpture,. de> faire illu-
fton., & d’être prifes pour la nature elle-même.
Il ne faut donc pas regarder les figures fculp-
-tées qui accompagnent un édifice , 1 comme de
véritables figures humaines , mais comme des
objets, de décorations qui deviennent des membres,
de cet édifice, & qui doivent être-proportionnés
au corps entier. C’eft ce qu’ont penfé
les illuftres artiftes qui ont décoré la Bafilique
de Saint-Pierre de Rome. Les figures doivent
colloflales dans un édifice çoJJioflaL
fieaux-Atts Tome IL
Un bénitier eft en même-temps, dans une
eg life , un uftenfile & un objet de décoration
qui fait partie de l ’églife èlie-niêmè. Comme
objet de décoration , un bénitier ordinaire,
quï ne fo leroit élevé qu’à la hauteur de la
main d’ un homme de taille commune, pro^
duiroit un effet mefquin dans l’églife dé Saint-
Pierre , & c’étoit de la décoration- que les artiftes
dévoient s’occuper, fauf à fuppléer par
quelqu’autre moyen à l’uftenfile. Us ont dono
donné au bénitier une proportion relative à la
dimenfion coHdffale du temple; ils ont fiîivi
le meme principe dans tous les autres objets
de décoration , & ils ont été généralement
applaudis.
On voudroit du moins que, dans un édifice
colloflal, à raifon que les figures font placées
a une plus grande élévation, on en diminuât
la dimenfion au lieu de l'augmenter : il réfulteroit
de ce principe que, dans un édifice col-
loffal, les figures les plus baffes étant col-
lolfales elle-mêmes, les plus élevées ne feroient
que des figurines. • ■
Mais une figure même dont la dimenfion ne
feroit que médiocrement exagérée, .& qui feroit
placée à une très-grande élévation , ne paroî-
troit aux yeux des fpeclateiirs qu’ une petite
figüre, ou plutôt un ornement mefquin dont
■ ’* ne pourrait déterminer la forme. Sans doute
les détails d’ une figure.éloignée du ipeflareur,
en -la luppofant même colloffale, ne doivent
pas être apperçus comme ceux d’une- figure
tî u> eft pour ainfi dire fous’ les yeux; mais fi
1 on ne peut pas diftinguer aux moins les
grandes formes, celles qui déterminent l’ef-
:■ fence de l’objet, fi l ’on peut à peine fe décider
fur ce que cet objet repréfente, autant
vaut fùpprimer cette inutile décoration.
. : ‘ t a dégradation perfpedive des. figures dans
un tableau, eft une loi rigoureufe & dont il
n’eft pas permis de s’écarter. L’objet de l ’art
de peindre eft d’offrir les apparences de la
nature vifible : ’ il n’en eft pas de même de
l’architeélutè: fi elle eft un art d’imitation
c’eft fous un rapport très-différent de’ celui dè
la peinture, & abfolument étranger à la quef-
tion qui nous occupe. Relativement ' à cette
queftion , nous pouvons dire que î’ai-chïte'clure
eft un art qui le montre comme art, & non
comme imitation des apparences naturelles*
il ne fe cache pas, il ne cherche à faire aucune
forte d’ illufion: ce qu’ il produit ne doit pas
femblef'autre chofe que ce qu’ il produit ; fes
portes font des portes ; fes colonnes, des
colonnes; fes ftatues, des ftatues, & rien autre
chofe. Sa fin eft de fâtisfaire à cet égard le
fens de la vue par de bonnes proportions • &
il ne lés fatisferoit pas, en lui offrant ’des
ftatues q u i, par leur foible proportion ne
feroient ^ue difficilement reconnues pour ce