» en plufieurs autres , & avec de petites pinces
» on égrilë ce qui pourroit le trouver de mal-
» propre. Il faut ainfi palier tous les morceaux
» en revue , & n’ en pas mettre un feul qui puiffe
» être tant foit peu foupçonné,
» Toutes ces opérations font en petites dofes ,
» parce que l’on a remarqué qu’en les faifant en
* *roP grandes dofes , la compofition étoit fu-
» jette a pafler au travers du creufet. I l fautaufli
» faire attention q ue ,fi Ton n’obferve pas fcru-
» puleufement toutes les manoeuvres indiquées ,
» ou fi l’on ne travaille pas avec la plus grande
» propreté, on ne doit pas être furpris de trou-
» ver des réfultats tous différens , & de ne pas
» réufîir. »
On a reconnu que le fondant, qui vient d’être
décrit, broyé,tam'fi, & gardé en cet état pendant
deux ou trois ans, s’altère, & que le poli
ou le luifant des couleurs n’ eft plus aufli parfait ;
il faut donc n’ en broyer qu’ une petite quamiré à
la fois, ou bien il faut pafler un peu d’eau fécondé
furie fondant broyé que l ’on foupçonné ;
c’ eft-à dire , le lailfer féjourner quelque temps
dans de l’eau mêlée avec un peu d’efprit de nitre
ou d’eau forte; on lavera enfuite ce fondant
broyé dans plufieurs eaux, & on le fera fécher,*
par cette opération il reprendra toutes les qualités
qu’il avoit auparavant. Au re fie , cet inconvénient
ne doit point étonner, puifqu’ il arrive
suffi à Vémail blanc dont on fait les fonds ; les
émailleurs s’en délivrent en prenant'les précautions
que l’on vient de rapporter.
Tous les chymiftes tombent d’accord que
c’e fi un fluide qui eft le principe ou la caufe
des couleurs ; ils conviennent en même temps
que ce fluide eft fi fubtil, qu’ il pénétré tous les
corps, & qu’ il eft l’ame ou l ’agent de tous les
phénomènes de la nature.. Les uns le regardant
comme le principe du feu , l’ont appellé Amplement
matière inflammable ; d’autres l’ont mom-
nié f o u f r e principe ; enfin Stahl lui a donné le
nom de phlogiftique ( i ) , qui a été adopté par
tous ceux qui l ’ont fuivi. Le phlogiftique n’ayant-
aucune couleur par lui-même, & étant toujours
intrinféquement de même nature , ne peut oc-
cafionner tant de variétés de couleurs dans les
corps, qu’aurant qu’il y rencontre une bafe à
laquelle il s’ unit en plus ou moins grande quantité.
C’eft à la quantité du phlogiftique, à la
nature de cette bafe, & à la façon dont il eft
combiné , qu’ il faut attribuer la variété des couleurs.
Cela pofé, fi le phlogiftique eft légèrement
combiné , il produit certaines couleurs ;
s’ il l’ eft plus fortement ou en plus graftde quantité
, il en produit d’autres. Les chau.x de plomb
( i) Nous couferveions le mot phlogiftique par-tout
où il eft employé par M. de Montamy , quoique depuis
les idées & le langage des chymistes aient changé.
différemment colorées, fuivantles differens degrés
de feu qu’elles ont foufferts, ne laiffent rien
à defirer fur la vérité de ce que l’on avance ici.
I l faut trois chofes pour faire un verre coloré.
i° . Unefubftance qui mette là matière vitri-
fiablë en fufion.
a°. Une fubftance qui fe vitrifiant avec e lle ,
foit de nature à retenir le phlogiftique.
3 • Une fubftance qui fourniffe le phlogiftu-
que , & dans laquelle il foit affez fixe pour n’être
pas diflipé par le feu , avant que le verre foit en
fonte.
Ce qui arrive dans les procédés qu’on vient de
donner, pour faire les deux efpéces de fondans
ci-deffus, paroît conforme à ces principes i la
couleur rouge foncée que prend la compofition
dans le procédé du premier fondant, a été produite
par le phlogiftique du nitre, qui venant à
pénétrer le verre des tuyaux de baromètres en
fufion, y demeure fixé par la manganefe , qui
avoirétéemployée dans la première origine de
ce verre.
Dans-le procédé du fécond fondant où il n’entre
point de manganefe , cette couleur rouge ne
paroît point, parce que le phlogiftique du nitre
ne trouvant point de matière qui le fix e , part®
tout au travers de la compofition, & fe diflipe
par la force du feu. Ce n’eft point la manganefe
feule qui a produit cette couleur foncée,puifi*
: qu’il n’ en paroiffoit aucune dans le verre des
tuyaux de baromètres,^puifque cette couleur
lorfqu’elie a paru , s’ éftdiflipée à mefure qu’elle
eft reftée plus longtemps ëxpofée au feu. La
manganéfe cependant continue de refter dans le
verre; car fi l’on vient à le remettre au feu avec
du nitre , la. couleur rouge foncée reparoît de
nouveau , parce que la manganefe, à qui la
force du feu avoir enlevé le .phlogiftique du
nitre, en étant débarraffée, fe trouve, par ce
moyen , en état d’arrêter encore le phlogiftique
que lui fournit le nouveau nitre. D’où l’on voit
que , dans ce procédé , c’eft le borax qui a mis
le verre en fufion ; que c’ eft la manganefe qui a
retenti le phlogiftique qui a coloré le verre 8*
que c’eft le nitre qui a fourni le phlogiftique.
On a fait entrer l’arfenic dans la compofition
'.du fécond fondant à la place de la manganefe
non-feulement parce qu’il eft lui-même un fondant
, mais encore parce qu’étant extrêmement
vola til, il entraîne avec lui, en fe fublimant
les fubftances qui auroient pu donner de la couleur
au verre., ce qui lui donne plus de netteté
& de brillant. I l faut cependant prendre garde
que la dofe n’en foit pas trop forte ; parce que
dans ce cas, il nuirait àla trartfparencc du verre
& le rendroit laiteux.
Après avoir vu les raifons qui ont engagé! retrancher abfolument de la compofition du fondant
toutes les préparations de plomb , on pourroit
demander pourquoi on ne les bannit pas aufîi
delà compofition de ¥ émail b lanc, danslaquelle
entrent ces préparations. Ne doit-on pas craindre
que les couleurs qu’on applique par-deftus , ne
revivifient le plomb , & ne fe trouvent par-là
noirciës & gâtées? Il eft certain que cela ne
manqueroit pas d’arriver s’ il n’entroit que du
plomb dans la compofition de Vémail blanc;
mais il faut faire attention que le plomb y eft
combiné avec l’étain : tout le monde fait combien
la chaux de ce dernier métal eft difficile à i
revivifier, quelque feu qu’on lui donne, quand
on ne l’a pas mêlée avec des matières g rafles,
parce qu il n’y a qu’elles qui puiffent rendre à
l ’étain le phlogiftique qu’il a perdu. C’eft donc
l ’étain qui empêche, dans la compofition de
\ émail blanc, que^e plomb ne foit aufîi fufeep-
tible d’être revivifie, qu’ il le feroit fans cette
combinaifon.
Le fondant fa i t , dans la peinture en émail,
le même effet que l ’huile, la gomme ou la colle
font dans les autres peintures; lorfqu’ il entre en
fufion, il fert de lien entre les petites molécules
de la couleur, & il les attache en même tempsà
la furface de Vémail blanc , & vitrifie les cou- ,
leurs avec lui ; il fuit de là que l’on ne doit point
fe flatter de pouvoir employer les fubftances
dont le feu enléveroit la couleur avant que le
fondant lui-même fût entré en fufion ; telles font
celles qui font tirées des végétaux, & c . Mais
Comme il fe trouve des fubftances qui fe vitri-
fientavec le fondant plus ou moins facilement
on eft obligé d’obferver fur chaque couleur la
quantité de fondant, qui lui eft néceffaire pour
la faire entrer dans une parfaite vitrification. Si
l ’on met trop peu de fondant, la couleur refte
bien attachée fur Vémail blanc ;mais le fondant
n’étant point en affez grande quantité pour la
pénétrer & la vitrifier , elle refte terne & fans
aucun luifant. Si l’ on met trop de fondant, non-
feulement l’on affoiblit la couleur, mais elle
s’étend & s’ imbibe dans Xémail blanc ; les contours
ne font point exafts & terminés, & les
traits déliés deviennent tout-à fait impoflibles
parce qu’ ils ne relient point tels que le peintre
les a faits.
I l faut donc avoir grand foin d’examiner les
petits effais que l’on fait de chaque couleur
afin de favoir fi 1 on doit diminuer ou augmenter
la quantité du fondant; on en jugera aifément
par les remarques que l’on vient de faire. Il pourroit
cependant arriver qu’ une couleur exigeront
une trop grande quantité de fondant, pour que
la peinture eût le luifant qu’elle doit avoir. On
a éprouvé que lorfqu’on mettoit avec une couleur
plus de fept fois fon poids de fondant, elle
étoit difficile à employer, parce qu’alprs la couleur
ne coule point facilement au pinceau, &
l’on retombe prefque dans le même inconvénient
qu’ on eprouvoit, quand on peignoit avec
du verre ; dans ce cas, il n’y a d’autre parti à «
prendre que d’abandonner cette couleur, & de
fe retourner d’un autre côté.
Il refte cependant un moyen , maîç dont il ne
faut fe fervir que dans la dernière néceflité. S’ il
arrivoit qu’après l’ouvrage fini, on vînt à s’ap-
percevoir que quelque couleur n’eût pas pris le
luifant que doit avoir l’ouvrage total, on pourroit
y remédier par le moyen du fondant que
l ’ou broyeroit pendant longtemps fur l’agat®
avec de l’eau fimple , & que l’on appliqueroit
avec le pinceau , uniquement fur Tendroit qui
n’a pas pris le luifant ; fi , après que l’ouvrage eft
fe c , on le met à parfondre de nouveau, l’endroit
qui n’étoit pas luifant fe trouvera rétabli.
Le fondant bien broyé avec l’eau , fera une couleur
blanche qu’ il faut avoir attention de coucher
avec la pointe du pinceau, 8c fi c la ire ,
qu’elle ne forme fur la couleur que l’on veut
rendre lui l'ante, qu’un petit nuage prefque imperceptible.
On en a dit affez fur le fondant : il faut présentement
parler des couleurs avec lelquelles
on le mêle. On va les traiter féparément, en
commençant par le blanc, comme la plus utile
pour former, avec chaque, couleur, les différentes
nuaftees ou teintes, dont le peintre peut
avoir befoin.
Le Blanc. Si les peintres en émail d’aujourd’hui
ne 1e fervent point dé blanc dans leurs
ouvrages, ce n’eft pas qu’ il ne leur foit bien néceffaire
;la difficulté d’en avoir de beau , jointe
à celle de pouvoir l’ employer avec facilité , les
a déterminés à s’en palier ; pour y fuppléer, ils
ont pris le parti de ne peindre crue fur des fonds
blancs , & de fe fervir du fond, en l’épargnant,
pour produire les blancs & les clairs dont ils
ils peuvent avoir befoin.
On fera peut-être furpris de ce qu’ ils n’ one
pas cherché à employer , pour leurs blancs , la
même matière dont ils fe fervent pour les fonds,
c’eft-à-dirë , Ÿémail blanc ; mais il faut faire
attention que Vémail eft un verre , & que l ’on
a vu qu’ il étoit impoflible de peindre Amplement
avec un verre. D’un autre côté , il ne faut pas
que la couleur porte d’épaiffeur fur le fond , c e
qui ne manqueroit pas d’arriver fi l’on fe fervoic
d'émail blanc: La difficulté étoit de ménager le
fond pour faire paroître le blanc dans les petites
parties où il étoit abfolument indifpenfable de le
voir pur ; par exemple, dans une tête, les deux
petits points blancs qui doivent être fur la prunelle
, devenoienc impoflibles à ménager par
leur extrême petiteffe. C’eft ce qui a quelquefois
obligé des peintres à ne mettre ces points
blancs dans les yeux , qu’après qu’ ils étoienc
entièrement finis ; & pour cela ils choififloîenc
dans de l'émail écrafé deux petits grains qu’ ils
colloient avec de la gomme, & ils les faifoiene