
.d’oeuvres mefquins , quand il a dit que ce ,
n’étoit autre chofe qu’ une perte de temps.
Cependant Myrmécide avoit la vanité de le
.comparer à Phidias.
(44) A lcamene, d’ une bourgade de l ’At-
tique, fut un des plus illuftres élèves de Phidias.
Il fleurit , fuivant Pline, dans la 83e
olympiade , 448 ans avant notre ère. Pline cite
de lui une ftatue en bronze repréfentant l’ un
de ces athlètes que les Grecs nonimoient
Pentathles , parce qu’ ils difputoient la vi&oire
dans cinq fortes de combats : il falloir que le
vainqueur eût furpaffé fes adverfaires dans la
courfe à pied, la lu tte , le pugilat, le faut,
& le jet du difque ou du javelot. Le chef-
d’oeuvre d’Alcamène étoit une Vénus de-marbre
qui fe voyoit à Athènes dans le quartier
qu’on nommoît les jardins ; on la dcfignoit
par le nom de Vénus aux jardins. On a prétendu
que Phidias y avoit travaillé ; c’étoit
peut-être une calomnie inventée par les envieux.
Paufanias obferve que cette ftatue étoit
digne de fixer les regards , dans une ville où
les regards étoient appelles pour un fi grand-
nombre d’ouvrages admirables. On vanroit
.fur-tout la belle forme du fein, & en général
toute- la partie antérieure de la figu re , la
beauté & l’excellente proportion des mains &
la fin elfe des doigts qui fe terminoiênt en une
pointe douce: fi l’on adjniroit -à Athènes la
Vénus d’Aicamène, on n’eftimoit pas moins
l ’Amour qu’ il avoir fait à Thefpies. Vuicain
fut auffi compté entre fes ouvrages célèbres :
î ’amft« avoit' eu l’ adreffe de dilhmuler plutôt
que dp çaphçr par une draperie la difformité 1
de ce dieu boiteux. On voyoit encore du
même artifte , à Athènes, une fiatue de Junon,
celle de Diane, celle de Bacchus en or & en
iv o ir e , Progné & Itys fon fils , dont elle médite
la mort ; à Corinthe , une Hécate, com-
pofée de trois figures réunies, & n’ en faifant
qu’ une feule ; avant .Aîcamène . on n’a voit
donné qu’une tête & qu’ un corps à cette ]
déeffe, I l avoit décoré d’une ftatue d’EfçuJape
le tpmple confacré à ce 4ieu dans la v ille de
JVïantînée, Êc avoit fait deux ftatues coloffales
pour le temple d’Hercule’ à Thèbes; l’une re-
préfentoit Hercule lui - même , & l’autre , JVIi-
nerve. Ce fut lui qui orna de bas7reïiefs la
fr ife de l’une des ailes du temple de Jupiter
à Elis ; il y repréfenta le combat des Centaures
3c des Lapithes aux noces de Pirjthoüs.
Pirithoüs lui-meme occupoit le milieu de ce
bas-relief; d’un côté, on voyoit Eurytion qui
enlevoit la nouvelle époufe, & Cénée qui la
défendoit ; dp l’autre , Théfee , armé d’une
hache , comcattoit les Centaures. L’artifte
avoit enrichi fa cojnpofition d’une épifode, où
j j avoit reprpfenté deux Centaures, l’un enlevant
un jeune garçon, l’autre une jeune fillëy
remarquables l’une & l’autre parleur beauté.
Comme l’hiftoire de l’arx de Winckeimann eft
un ouvrage juftemenc célèbre, il n’eft peut-
être pas inutile d’avertir qu’il a mal entendu
. le partage de Paufanias où il eft parlé de ce
bas-relief,'8c qu’ il l’ a expliqué d’une manière
très-confufe/ L’antiquité regardoit Aîcamène
comme le premier fculpteur de fon temps
après Phidias. v ;
( 4 5 ) A goracrite de Paros apprit fon art
de Phidias , qui parta même pour avoir publié
plufieurs de fes ouvrages fous le nom de cet
élève qu’ il chérifibit. Pline raconte qu’Ago-
facrite & Aîcamène concoururent enfemble
pour une Vénus, & que les Athéniens donnèrent
la préférence à celle du dernier, favo-
ril'ant plutôt leur concitoyen-contre un étranger
, que rendant juftice au vrai talent. Ago-
racrite , irrité de leur injuftice , fit de fa Venus
une Néméfis , déeffe de la vengeance, &
la vehdit aux habitans de Rhamnus. Vatron la
regardoit comme la plus belle de toutes les
ftatues.
II eft vraifemblable que cette Vénus étoit
un de ces ouvrages que Phidias donnoit fous
le nom de fon élève : c’ eft même ce qui eft
affirmé par Suidas , ou plutôt par quelqu’au-
teur plus ancien dont il rapporte le partage
dans fon Diélionnaire. Paufanias attribue cette
ftatue à Phidias, fans parler même d’Agora-
crite. Ainfi les Athéniens, en prononçant contre
Agoracrite en faveur d’Alcamène , auront,
pour favorifer leur patrie, prononcé contre un
de leurs concitoyens fans le connoître.
Le changement d’ une figure de Vénus, en
celle de Néméfis , prouve ce que nous avons
dit à l’article Mythologie , que les ancien»
repréfentoient fous les traits de la beauté le*
divinités les plus terribles. Eh ! ponrqueii au-
roient-ils donné des trairs hideux à Néméfis,
à la Vengeance célefte, qui puniffoit leçrima
fans paffion & fans colère ?
On cite peu d’ ouvrages d’Agoracrïte , qui
peut-être ne montra plus qu’ un talent médiocre,
dps que fon maître eut ceffé de travailler
pour liji : Pline, dit feulement qu’à
Rhamnus , où étoit fa Néméfis 3 on voyoit auffi
de lui une autre ftatue dans le temple de la
mçre des dieux,, & à Delphes les ftatues en
bronze dp Minerve & de Jupiter.
(46 ) C o i o t è s , autre élève de Phidias,
avoit travaille avec ce grand maître à la fta-
tue de Jupiter Olympien. Ce fut lui qui fit
l’égide de Minerve , à la ftatue que le
même artifte fit de cette déefle. On connoilv
foit auflfi de lui des philofophes , & un Eicur
lape de broqze , dont ça çélébrçit la beauté.
ï l ne faut pas confondre avec ce Colotès, un
autre artifte du même nom qui étoit de Paros & *
difciple de Pafitèle, & qui fit à Elis la table ;
d’ ivoire & d’o r , fur laquelle les vainqueurs
dépofoient leurs couronnes.
( 47) P olvclete d’Argos. C ’eft peut-être
ic i que doit être placé l’ un des Polyclètes
d’Argos : car il faut convenir que la chronologie
d’ un affez grand nombre, de fculpteurs
grecs eft fort incertaine, & qu’au moment où
l ’on croit pouvoir l’appuyer fur des faits, on
la trouve renverfée par d’autres faits qui les
contrarient. Comment pourrions - nous être
exaéis dans une matière où les anciens qui nous
fervent de guides paroiffent eux-mêmes avoir
manqué d’exaftitude ?
Nous ayons déjà obferve que Pline a confondu
le Polyclète de Sicÿone avec un des
Polyclètes d’Argos , & peut-être avec tous les
deux. Lorfqu’ il dit que Polyclète faifoit fes ftatues
quarrées , qu’ il eft le premier qui ait
imaginé de faire pofer les ftatues fur une feules
jambe , que fes ftatues fe reflembloient prefque
toutes, cela doit s’entendre du plus ancien des
Polyclètes, de celui de Sicyone. En effet, ce
font autant de traits qui caraétérifent l’arc encore
peu éloigné de fon berceau, manquant
encore de foupleffe & de variété.On faifoit
alors les ftatues quarrées, parce qù’on n’a voit
pas étudié toutes les lignes que décrivent les
contours, & dont les artiftes expriment le
mouvement fouple & varié, en les nommant
ondoyantes , ferpentines, flamboyantes. On
faifoit porter les figures fur les deux pieds , &
c’étoit le premier pas que l’ art avoit fait,
quand il ceffa dé s’ en tenir aux Hermès. Celui
q u i , le premier, ofa les faire porter fur un
feu! pied, fut regardé comme un artifte hardi.'
Enfin , toutes les figures fe reffembloient en-
tr’elles , parce. qu’on n’avoit pas encore découvert,
par des études multipliées, l’ extrême
diverfité des formes, ou plutôt parce que les
artiftes n’avoient point encore l’adreffe d’exprimer
toutes ces diverfités. Je croirois auffi
qu’on pourroit attribuer à l ’ancien Polyclète
cette figure qu’on appelloit la règle ; car on a
des preuves que les anciens ont trouvé de
bonne heure les proportions au moins en longueur,;
& vquand les Grecs n’auroient pas eux-
mêmes fixé ces mefures , ils les trouvèrent établies
en Egypte , dès qu’ ils eurent quelque
ccninuinlcarion avec cette contrée. Il feroit
abfurde de fuppofer que les proportions furent
trouvées par un artifte qui vivoit dans la 87e
olympiade, 43 z ans avant notre ère , & qui
étoit par conféquent poftérieùr à Phidias, puif-
qu’il réfuireroit de cette fuppçfition que Phidias
ri’ auroit pas connu les proportions.
Nous pouvons hardiment rçftituer au jpoly-
Beause-Arts. Tjome IL
clete d’Argos la plupart des ouvrages que Pline
attribue au Polyclète de Sieyone, tels que ce
Diadumene dans lequel l’artifte avoit fu exprimer
de la molleffe, qualité qui tient à la
plus belle exécution, & ce Doryphore, dans
lequel il avoit repréfemé la vigueur ; car ce
n eft qug dans un fiècle où l’art eft confom-
me, qu’ il eft poffible au même artifte d’exprimer
deux caraéleres fi diffefens. Nous en diront
autant des deux enfans qui jouoient aux ofle-
lets ; c a i.e e n’ efi pas dans le temps où l ’on
ne fait faire encore que des figures quarrées,
que l’on peut rendre avec fuccès la nature
enfantine, & Pline ne nous laiffe pas ignorer
qu on admiroit encore ces deux enfans dans le
: temps où il écrivoir. Enfin , ce brave qui pre-
1 n° ic armes pour voler au combat, ne pou-
voitêqe ƒ ouvrage du ftatuaire q u i, le premier
ayçit oie faire porter Les figures fur un feul
pied.
Croyons en même temps que c ’eft du fécond
Polyclete que parlent les anciens , lorfqu’ ils
celebrent la grandeur & la dignité qu’ il don-
noit a fes ouvrages. Ces caraftères appartiennent
au, temps où les grandes parties de l’art
a connues> & où il conferve encore
1 auftérité.
.. ^ Lin, des> chefs-d’oeuvre de cet artifte étoit
à Mycene dans lé temple de Junon : c’ étoit la
ftatue de la déeffe elle-même, en or & en
ivoire , & d’une grande proportion. On voyoit
iur fa couronne les Saifons & 1 es Grâces ; d’une
main elle tenoit une grenade, & de l’autre un
foeptre. Au jugement des' anciens, elle ne le
cedoit aux grands ouvrages de Phidias, que
parce qu’elle, étoit moins riche & moins col-
lortale. . >.. .
Son Hercule tuant l ’hydre étoit admiré du
temps de Cicéron ; l’adion de cette figure exi-
geoit du mouvement, & ne pourroit être attribuée
al ancien Polyclète, à celui dont la manière
tenoit encore de la roideur que les Egyptiens
aonnoient a leurs ouvragés. Mais qui fur-tout ne
reçonnoîtroit pas l ’arc perfeaionné dan's la def-
cription que Cicéron nous a laiffee de fes deux
canéphores. C’éroit deux ftatues d’airain, d’ une
proportion médiocre, mais de la grâce la plus
exquife leur vetement, leur maintien ren-
doient témoignage à leur virginité. Elles por-
toient fur la tête les chofes fàcrées , à la
maniéré des vierges athéniennes qu’on nommoit
canephores. Les perfonnes même qui n’avoienû
aucune idée de l ’a r t , ne pouvoient fe défendre
d’en admirer, la beauté.
La ftatue de Jupiter Mélîchius ou le Clément,
ouvrage de notre artifte, étoit en marbre
blanc , de même que fes ftatues d’Apollon
de Latone & de Diane , dans le tèmple de
! cette déeffe, bâti au fommet d’ une montagne
‘ fur le chemin d’Argos à Tégfe. I l avoir fait