le vé par la p efte, fut un fécond coup auquel ]
il ne put réfifter. I l tomba malade, & recouvra |
la fanté , mais non la force de fon efprit. I l \
*® jetta dans une dévotion minutieufe ce ftu-
pide. Si l’ancienne habitude ou la néceflité le
rappelloient à fes pinceaux , ils n’obéiffoient
plus à fa main , ou plutôt fa main n’étoit plus
conduite par le même efprit qui les avoit autrefois
animés. Le graptd maître fut réduit par
la mifère à peindre des ex-voto & ne fe montra
pas fupérieur à ce genre. I l avoit le malheur
«e comparer fes derniers ouvrages à-ceux qui
ayoient fait fa gloire , & cette comparaifon
aigriffoit fa douleur 5 il avoit honte de lui-
tnême & de fon exiftence. Enfin il préféra
l ’humiliation de demander l’aumône , à celle
de dégrader l ’art qu’ il abandonnoit & qu’ il
continuoit de refpeâer. I l mourut à Bologne
en 1660 à l ’âge quatre-vingfi'ans.
Son deifin étoit élégant & correâ , fon coloris
un peu rougeâtre. Ses principaux ouvrages
font à Bologne. C’eft là que , dans l’églife .
dé mendieariti di dentro , fe voit un ouvrage
de ce peintre repréfentant Saint Pétrone 8c
un autre Saint à genoux devant la Vierge &
l ’enfant Jefus qui font au haut du tableau.
» Ce morceau , dit M. Cochin, eft de la plus
» grande beauté , on y trouve toutes les par-
» ties de l’ art dans un excellent degré : belle
» ccmpofinon , belle couleur , belle vérité ,
» foit dans les têtes , foit dans l’exécution des
» étoffes -, touche facile & pleine-d’ art. Le livre
» de.s curiofités de Bologne dit que le Cave-
»' done a cherché dans ce tableau le goût
» du Titien ; mais le bas du tableau femble
» plutôt dans la touche & dans le goût du
» Guide : la Vierge & le haut du jtabieau
y> tiennent davantage du goût des Carraches. Il
» femble réunir lés manières des plus grands
» maîtres : les têtes ont toutes les beautés
» de détail ‘, & les draperiés font de. céttè
» belle exécution qu’on admire principalement
33 dans le Guide 5 les ombres ont toute la force
» du Garavage , ' les demi - teintes ont la
>3 fraîcheur des grands peintres Vénitiens. Le
» grouppë de la Vierge eft d’un grand carac- 3>.tète de deflîh 3>. ■ "
On voit deux tableaux du Cavedone au
Palais - Royal -, une Junon; endormie, & une
Vierge affife, donnant à tetter à l’enfant Jefus,
avec Saint Étienne & Saint Ambroife.
Giac. Gioyanini a gravé d’après ce maître
l ’ame de Saint Benoît portée-au ciel par les
Ajngesi . . - .■ / - :
( 94) Josse Mbnper, de l’école Flamande ,
né à Anvers en 1580 , fe fit une manière toute
differente de celle des peintres de# fon pays.
Gomme on ignore quel fut fon maître on
fuppôfe qu’il n’en eut pas d’autïe que la nature,
8c que ce fut elle qui lui infpira une manière
qui ne reffemble à celle d’aucun peintre donc
ïl eût pu voir les ouvrages. Les Flamands
le diftinguent en général par un fini précieux :
Mon per 7 au contraire ne finiffoit r|en 8c ne
peignoit qu’à l’effet. Ses ouvrages vus de près
n offrent que des efquifes touchées : regardés
a une jufte diftance , Us font l’effet de la
nature qu’ il ne man.quoit jamais de confulter.
Son genre étoit le payfage : il écoit heureux
dans le choix de fes fîtes , riche par J ’étendue
qu’ il donnoit à fes compofitions, intelligent
dans la distribution des lumières , lavant
dans l’art des dégradations : mais maniéré dans
la touche de fes arbres , & jaunâtre dans fa
teinté générale. Il ornoit fes payfages de figurines,
& confioit quelquefois à Breughel
le foin de les faire. Quel que fjiôt le mérite de
cet a r tifte , la négligence qui régne dans fon
travail empêche de les rechercher. On ignore
l ’année de fa mort.
Corn. Viflcher a gravé d’après lui le printemps
; Van Panderen , l ’ été j Th. Galle les
deux autres faifons.
( 95 ) JEAN W iidens , de l’école Flamands
eft né a Anvers ; on ne fait pas précifémenc
en quelle année. I l mérita la confiance de
Rubens , qui , dans fes tableaux , lui abandonnoit
la partie du payfage. Ce grand peindre
lui accordoit une fcience qui n’eft pas mé-
prifable ; celle d’accorder les fonds avec le
lu jet fans nuire à l ’harmonie générale , & de
faire croire que tous les accefToires qu’ il pla-
çoit dans un tableau y étoient abfolument né-
cêffairès. » D’ailleurs il avoir', dit M. Defcamps.,
33 tous les talens de fon genre •, un génie heu-
* yeux dans le choix de la' nature , une
» exécution facile , une bonne couleur , une
» grande légèreté dans les ciels 8c dans les
» lointains ». Deux grands tableaux placés
dans l’églife des religîeufes Facfces , rendent
témoignage à fon talent.
( 9 6 ) Jean V an 'Ravestein , de l ’école
Hollandoife , né à la Haye en 1580 , excella
dans le portrait. On ignore quel fut fon maître ;
on fait feulement qu’ il furpaffa dans fon genre
tous les peintres des Pays - Bas qui l’avoient
précédé, & qu’ il ne fut peut-être furpafle dans
la ftiite que par Van-Dycfc..& Vander Helft.
On ne peut voir fans admiration les trois tableaux
de ce maître qui font placés dans les
falons du jaçdin de l’arquebufe à la Haye.
Le premier peint en 1616 repréfente les principaux
bourgeois arquebufiers. Le fécond ,
long de quinze pieds eft de 1618 : il contient
26 figures de grandeur naturelle -, dans le troi-
fième on voit fix officiers du drapeau blanc.
On n’admire pas moins le tableau de J’hôtelïtb
vîlle qui repréfente les magiftrats en charge
en 1636, » Ravèftein a voir, dit M. Uel-
» camps , toutes les parties d’un grand maître :
» Tes compofitions (ont pleines de feu & de
x jugement ; il favoit trouver des polirions
» agréables & variées. Tout paroît en mou-
» ventent. I l entendoit bien la perfpeciive ae-
» rienne & le mélange harmonieux des cou-
» leurs. Ses lumières & fes ombres font re-
» pandues avec art. Cette dernière intelli-
x gence fe fait remarquer dans fes ouvrages
» d’une manière à furprendre. Sa couleur eft
bonne, & fa touche large ».
On ignore l’année de la mort : quelques
uns la placent vers 1656. .
\V. Delfft a gravé d’après lui le portrait de
Jean Buyefius Monickendam.
(9 7 ) Dominique Zampierï, dit le Dottli-
ïiiquin , de l’école Lombarde , né à Bologne
en 1581 , eft encore un des grands- peintres ;
qui reçurent les premières leçons dans l ’ecole
de Calvart..Maltraité par ce maître qui le fur-
prit copiant un defîin d’Annibal , il le quitta
pour fe mettre l'ous la difeipline des Carraches.
I l n’y étoit que depuis peu de temps , lorfqu’ ils
propoferent à leurs élèves un prix de defîin. Le
Domïniquin fans ambition , fans efpérance de
le remporter, travailla comme les autres, 8c
lorfque fes émules préfenterent leurs ouvrages
avec confiance, le regardant lui-même avec
le dédain de la fupériorité , il s’avança timidement
, ôfant à peine préfenter .le defîin qu’il
auroit voulu cacher. Louis le prit, l ’examina,
& déclara le Domïniquin vainqueur. Ce premier
fucçès , fans donner a^i jeune élève une
préfomption funefte, ne fit que l’exciter à de
nouveaux efforts.
I l contra,éla dans l’école une liaifon intime
avec l’Albar.e , 8c fit avec lui le voyage de
Parme , de Plaifance & de Regio pour y con-
tèmpler les ouvrages du Corrége : mais il'n e
le fuivit. point à Rome où fon ami l’appella
bientôt. Des deflins d’après Raphaël que Louis
reçut alors , déterminèrent le Dominiquin à
ne pas différer fon départ. 11 fuivit à Rome l’école
d’Annibal qui peignoit la galerie Farnefe.
Annibal lui confia la peinture dé quelques
parties de cette galerie dont lui-même avoit
fait les cartons , & lui permit de faire entiè*
rement de lui-même , dans la loge du jardin
du côté du Tib re , la mort d’Adonis au moment
où Vénus s’élance de fon char pour fecourir
fon malheureux amant. Le Dominiquin, dans
l ’ invention & l’exécution de ce morceau , fe
montra digne de la confiance d’Annibal qui
ne fie laffoit pas de le . célébrer.
Les applaudiffemens du maître fouleverent
contre l’elève , qui éroit déjà un habile maître
lui-même ,d a jaloufie de l ’école. Le Dominiqiiln
ne commençoit point un tableau qu’ il
ne l ’eût longteriips médité ; -il n’en abandon-
noit aucune partie qu’ il ne l ’eût parfaitement
terminée. Le génie qui l’animoit ne faifoit point
d’ explofion au dehors , & lui -laifloit un extérieur
tranquille, & même froid & pefant. Ses
rivaux affeétoient de ne -voir en lui qu’un
efprit le n t , capable à peine de produire avec
les plus laborieux efforts : ils l’appelloient le-
boeuf. » Ce boeuf , leur dit A n n ib al, rendra
» fon champ fi fertile , qu’ un jour il nourrira
» la peinture 33. .
Lorfqu’Annibal dont la fanté s’ afFoibliffoît
chaque jou r , fut obligé de renoncer aux ouvrages
qui lui étoient offerts , il obtint du
moins qu’ ils,.fuffent confiés à fes élèves. Ce fut
à fa recommandation que les ouvrages de l ’é- •
gîife de Saint Grégoire fur le mont Célius,
demandés par le cardinal Borghefe , furent
partagés entre le Guide & le Dominiquin.
Celui-ci fit le fameux tableau de Saint André
fouetté par des bourreaux , & le Oarrache
déclara qu’ il l’avoit emporté fur fon émule :
jugement glorieux pour le Dominiquin., mais
qui ne peut dégrader le Cuide dont on fait
qu’Annibal étoit jaloux.
Le fuffrage du grand maître de l’école Lombarde
, loin d’être utile au' Dominiquin , ne
fit que lui fufeiter une foule d’ennemis. I l avoit
des défauts -, on s’appliquoit à les faire remarquer
, à les exagérer , & l ’on gardoit un
filence malicieux fur fes beautés. Entre ceux-
roêmes qui ne fe laiffoient pas conduire par la
pafrion , le plus grand nombre étoit entraîné
paroles grâces du Guide , 8c né rendoit pas
affez de juftice aux beautés plus févères de fon
rival.
Annibal mourut , & le Dominiquin perdant
l’ efpérance d’être employé dans une v ille
où fes talens fembloient mal appréciés , fe pré-
paroit à partir pour Bologne , lorfqu’ on. lui
propofa de faire le tableau de Saint Jérôme
de la Charité qui repréfente la dernière communion
de ce Saint mourant. Le Dominiquin
refta & fit un chef-d’oeuvre. Le Pouffin mettoit
ce tableau au nombre des*trois pltft beaux de
Rome ) les deux autres étoient la Transfiguration
de Raphaël 8c la defeente de croix de
Daniel de Volterre. Mais le Dominiquin n’étoit.
plus quand ce jugement fut porté , quand il
fut ratifié par tout les connoilfeurs. Lui-même
ne reçut que cinquante écus pour falaire de
cet admirable ouvrage4, tand s qu’il voyoit le
Guide recevoir un prix confidérable de fes
moindres productions. Ceux qui l’employoient,
le récompenfoient mal par ignorance ; fes rivaux
le déprécioient par malignité, & le prix
qu’il reçut de fon chef-d’oeuvre Tut l’accufa-
tion d’ un honteux plagiat. Auguftin Carrache
avoit traité le même fujetj Laiifrtinc foutins