
que par tous les diffolvans , & l’extrême divifion
dans laquelle il peut être mis ,1e rendent lufcep- j
cible d’être transporte dans les petits canaux des
végétaux'; s’ il eft vrai que ce foit lui qui y produite
tomes les différentes couleurs que nous y
appercevons, on doit tout attendre , dans la
peinture en émail, des propriétés d’un métal,
qui par les différentes combinaifons où il peur
entrer, peut produire une aufli grande variété de
couleurs.
Le rouge écarlate que produit le fafran de
mars, étoit furtout de la plus grande importance
pour les peintres en émail. Cette coulqpr, dont
le jaune paroît être la baie , étoit ablolument
néceffaire dans les carnations , fur-tout dans
celles des jeunes perlonnes. Lachofe ne paroif-
foit pas difficile; la caîcination du vitriol de
mars , celle de la couperofe verte, &' toutes les
préparations de fafrans de mars, décrites dans
l ’art de la verrerie de Kunckel , fourniffoienc
abondamment un très-beau rouge, & facile à
employer au pinceau. Mais, malgré toutes les
édulcorations qi e l’on avoir pu faire à ces cou -
leurs ,& les divers fondans qu’ on y avoit appropriés
, elies étoient enlevées par le feu au moment
qu’elles commençoient à parfondre , & ne
laiffoient fur Vémail, que quelques traces fales
& informe». Il falloit donc, pour conlerver ces
couleurs, les retirer du feu avant qu'elles fuffent
tout-à-fait parfondues , & avant qu’ elles eulfent
pris le luilant. Les fondans danslefquels il entre
du plomb , paroiffoient plus propres à les fixer ;
mais ils ne laiffoient pas l'avantage de pouvoir
en faire des mélanges avec les autres couleurs.
Ces inconvéniens ont paru fi grands aux peintres
en émail, que depuis Petitot, qui poffédoit
l’ art de les employer, il ne s’en trouve prefque
aucun qui ait ofé s’ enfervir. Us ont mieux aimé
employer dans leurs carnations le pourpre , qui
e ft une couleur fine, au rifque de les faire pa-
roître violettes , que de s’ expofer à perdre leur
travail, en fe fervant des fafrans de mars. Oif fe '
trouvoit privé de toutes les couleurs que l ’on |
tire du fer j & quffont de la plus grande utilité
dans la peinture en émail, comme des bruns ,
de l’ écarlatte, des couleurs de bois , des olives,
des noirs, & c .
» On appellera ici les couleurs que l ’on tire
j» du fer, fies fafrans de mars \ parmi tous ceux
» dont on va donner la préparation , il n’y en a
» aucun qui ne foit de la plus grande fixité , &
» qui ne fe mêle très-bien avec toutes les autres
» couleurs. . S
» Prenez de la limaille de fer très-»épurée,
n comme celle que l’on vend aux apoticaires ou
» aux médecins ; ou , pour être plus afTuré de la
» pureté du fer -,prenez des doux des plus petits
» qui le faffent en f e r , que l’ on nomme do u x
♦ i d'épingles ; il fera mieux encore de prendre
n un paquet d’aiguilles très-fines que l’oit {ftf* » fera au feu pour les détremper.
» Mette» environ deux gros de ce fer dans utt
» gobelet de verre ; verfez de l’eau deffus, jul-
» qu’à ce qu'elle couvre le fer de lahauteur d’ utt
» bon pouce.
» Vertbz dans le gobelet de l’huile de vitriol
» ordinaire, peu à peu, en remuant le gobelet
>» de temps en temps, jufqu’à ce que vous ap-
» perceviez du mouvement dans le fer qui eft
» au fond, & qu’ il s’en détache un grand nom-
» bre de petites parties qui montent à la furface
>» de l’ eau en bouillonnant.
» Mettez tout ce qui eft dans le gobelet, en
* l’agitant^ de péur qu’ il ne refte rien au fond,
» dans un vafe de terre verniffée, qui puiff©
» fupporter le fe u , & le Iaiffez fur la cendre
» chaude pendant cinq ou fix heures.
» Verfez dans le vafe au moins le double d’eau
» chaude , de celle qùi s’y trouvera ,* entourez
» alors le vale de charbons allumés, jufqu’à ce
» que l’ eau jette un bouillon.
» Retirez le vale du feu & le Iaiffez refroi-
» dir. Remarquez qu’ il faut qu’ il foit relié au
» fond du vafe une petite portion du fer qui n’ait
» pas été diffoute; fi celanVtoit pas, vous feriez
» obligé d’ y ajouter un peu de fe r , & de faire
» bouillir le tour de nouveau.
» Pallez la liqueur dans un papier gris ployé
» en double, & ajufté en filtre dans un enton-
» noir de verre.
» Mettez l’eau qui aura paffé au travers du
» filtre de papier gris, dans le même vafe de terre
» verniffée, où vous l'aviez mife d’abord ; ( la
r> porcelaine de la Chine feroit ce qu’ il y auroit
» de meilleur, ) & entretenez de la braife chau-
» de deffous & tout autour, jufqu’à ce que l’eau
» étant très-diminuée, vous apperceviez qu’ il
» commence à fe former des cryftaux au fond
» & tout autour des bords du vafe.
» Retirez alors le vafe du feu , & le Iaiffez ,
o fans y toucher, dans un lieu frais, pendant 24
» heures ; fi vous appercevez que les cryftaux
» ne foient pas formés , faites encore évaporer
» un peu en remettant le vafe fur la cendre chàu-
» de , & Iaiffez repofer de nouveau pendant 24
» heures.
>V Vous trouverez dans le vafe un fel en cryte
» taux verds & une efpéce d’ochre jaune au fond.
» Choififfez parmi les cryftaux lés plus purs &
» les plus verds ; mettez les fécher fur une
» feuille de papier gris , dans un lieu qui ne foie
» point humide.
» Lorfque ces cryftaux auront perdu la plus
» grande partie dq^leur humidité , mettez les
» dans un vafe deverrq ou de porcelaine placé
» fur une étuve ou fur des cendres chaudes;
» ayez foin de les remuer de temps en temps,
» afin qu’ ils ne s’attachent point ail fond du.
il vafe : ils perdront peu à peu leur' couleur
» verte ,
» v e r te , & fe mettront en une poudre qui
» deviendra plus blanche .à melure qu’elle fera
» plus féche.
» Mettez cette poudre blanche fur un teffon
» ou fragment de ces petits pots de grès dans
» lefquels on apporte le beurre de Bretagne ,
» placé fous une mouffle dans le feu ; fi. vous
39 n’avez pas de mouille, vous pouvez vous
» fervir à fa place d’un autre teffon de pot de
» grès: il fera bon, pourvu qu’il foit affez
» grand pour empêcher la cendre & le char-
» bon de tomber dans la poudre blanche ;
» entourez la mouffie d’abord d’un très-petit
» feu; augmentez enfuite un peu le leu en'
b mettant quelques charbons allumés iur la
» mouffle ; la poudre blanche commencera par
b devenir jaune ; enfuite elle prendra une coti-
» leur orangée , & finira par devenir d*un beau
» rouge.
» Retirez alors la capfule , o u , pour mieux
» d ire , le teffon du feu; la poudre paroîtra
-» noire en fortant du feu-, mais lorfqu'elle fera
» froid e, elle fera très-rouge.
» Mettez cette poudre dans un grand g e -
» belet de verre ; verfez deffus de l’eau riede
» très-propre; laiffez-la repofer jufqu’à ce que
» vous voyez la poudre rouge toute entier«
b au fond, & l’eau qui lui lurnage devenue
f» claire.
» Vuidez cette eau claire en inclinant douce-
» ment le vafe, juiqu'à ce que la poudre qui
» eft au fond , foit prête à en fortir ; remettez
» de nouvelle eau chaude -, réitérez cette ma-
» noeuvre cinq ou fix fois, jufqu'à ce que
» vous voyez qu’ il rëfte un peu de poudre
b rouge fur la iurface de l’eau, quoiqu’elle
» paroiffe dans le refte très-claire; vuidez alors
p l’eau pour la derniere fois ; brouillez ce qui
» refte au fond, & le renverfez brufquement
p dans une taffe de porcelaine.
b Laiffez repofer le tout, jufqu’à ce que
vous voyez que l’eau qui fumage la pou-
» dre , foit claire. Tenez la taffe un peu pen-
» c h é e & mettez-y un bout de mèche de co-
» ton que vous aurez auparavant fait tremper
» dans de l’eau; ajuftez votre mèche de façon
» que le bout le plus court trempe dans l’eau
b de la taffe, & le plus long pende au-dehors; par
» ce moyen toute l ’eau s’écoulera goutte à goutte,
b & la poudre rouge reliera à fec ; on peut
» même, pour s’ affurer que la poudre eft parfai-
b tement feche, placer la taffe fur les cendres
o chaudes.
» Ce fafran de mars feroit v o la til, fi on
» l ’employoit tel qu’ il eft. Mais pour le rendre
» fixe, prenez-en la quantité que vous vou-
» drez , mêlez-la avec le double de fon poids
» de fel marin bien blanc , que vous aurez
» auparavant fait rougir dans un creufet cou-
» vert ; triturez long-temps ces deux matières
l$£ aux-Arts. Tome IU
» enfemble dans un mortier de verre ou de
» porcelaine, avec un pilon de même matière*
» Mettez ce mélange air feu dans un creafet
» que vous couvrirez ou dans un teffon de grès
» fous une mouffle pendant deux heures, en
» commençant par un petit feu , & fini!-
» fant par couvrir & entourer la mouffle de
» tous cotés avec des charbons allumés.
» On retire la matière du feu ; on la laiffe
» refroidir, & on la triture .dans le même
» mortier dont on s’eft fervi la première fois 5
» on la met dans un grand gobelet de fayance ,
» qui ait un bec pour verfer plus alternent i
» on verfe deffus de l'eau chaude que l’on
» agite avec une lame de verre; on décante
^ ou l ’on vuide tout de fuite ce que l ’eau
» emporte; on continue de verfer de nouvelle
» eau chaude fur ce qui eft refté au fond, de
» l’agiter avec la lame de verre, & de dé-
| » canrer l’ eau qui fe trouve teinte de la cou-
» le u r , jufqu’à ce que l’on voie qu’elle n’ en
» prenne plus, alors on peut négliger ce qui
» refte au fond du gobelet.
» Toutes les eaux qui ont entraîné de la
» couleur ayant été décantées dans un grand
» gobelet de v erre, on les y laiffe repofer jufi-
» qu’à ce qu’elles paroiffent tout-à-fait claires,
» & que la couleur foit entièrement dépofé©
» au fond; on décanté alors cette eau c la ire ,
» & on en met de nouvelle fur le réfidu ; on
» réitéré cette manoeuvre cinq ou fix fois, on
» verfe le réfidu dans une taffe de porcelaine ;
n 011 l’y laiffe repofer, & on en retire l ’eau
* par une mèche ae coton, comme on F«a dit
» ci-deffus.
» Lorfque ce fafran de mars eft fe c , on en
» trou ve, à très-peu de chofe près , la même
» quantité & de la même couleur que celle
» qu’ il avoit avant de l’avoir calciné avec le
» fel marin , avec la différence qu’ après cette
» derniere calcinatien il n’eft plus volatil &
» qu’employé avec trois fois fon poids de notre
» Fondant, il prend un b élu luifant, reliant
» fixe à tous les feux ; ce qui fait qu’on peut
» le coucher fur lémail au premier feu comme
» au dernier. On peut auili hardiment le mê-
» 1er avec toutes les autres couleurs, fans
» craindre qu’il en gâte aucune.
» I l eft abfolument effentiel, lorfq u’on a
» fait la derniere calcination avec le fel ma-
» rîn, & lorfqu’on a verfé de l ’eau chaude
» pardeffus dans un g ob elet, d’ agiter cette eau
» avec une lame de v e r re , comme on l’a dit
» pour ne prendre que la couleur qui fe laiffe
» entraîner par l’ eau; parce qu’on eft affuré
» par ce moyen de n’avoir que le fafran de
» mars, qui a été véritablement diflbut; fans
» cela on feroit fujet à trouver de petits points
» noirs dans la çouleup, qui ne viennent uni