
lettres, & M. l’Abbé de la Chau. ( * ) Il n’ au-
roit pas manqué non plus d’accorder de julles
éloges à la colle&ion des pierres gravées du
duc de Marlborough, d eflmées. par Cipriani,
habile artifte , mort ces années dernières a
Londres, & gravées par Bartolozzi. Enfin il
auroit renvoyé fes lecteurs aüx ouvrages du
lavant Winckelmann. )
Des collections de pierres gravées.
Non-feulement l’antiquité nous fournit desexemples
de pallions pour les pierres gravées ;
mais elle nous fournit des génies lupéricurs &
les plus diftingués dans l’état qui formoient
de ces collections. Quels hommes que Cél'ar
& Pompée ! Ils aimèrent paflionnément l’ un 8c
l’ autre les pierres gravées, 8c pour montrer
l’ eftime qu’ ils en failoient, ils voulurent que
le public fût le dépofitaire de leurs cabinets.
Pompée mit dans le capitole les pierres gravées
, .& tous les autres bijoux précieux qu’ il
avoit enlevés à Mithridate, & Célar confacra
dans le temple de Vénus furnommée Genitrix,
celles qu’ il avoit recueillies jui-même avec des
dépenfes infinie- ; car perfonne n’égaloit fa
magnificence quand il s’agiffoit de chofes cu-
rieufes. Marcellus, fils d’O d av ie , & neveu
d’Augufte, dépofa fon cabinet de pierres gravées
dans le fanétuaire du temple d’Apollon,
fur le mont Palatin. Marcus Scaurus, beau-
fils de Sylla , homme vraiment fplendide,
avoit formé .le premier un femblable cabinet
dans Rome. Il falloit être bien puiffant, pour
entreprendre alors de ces collections : le prix
des belles pierres étoit monté fi prodigieufe-
ment haut, que de fimples particuliers ne pou-
voient guère fe flatter d’y atteindre. Un revenu
cor.fidérable fuffifoit à peine pour l’achat
d’une pierre précieuje. Jamais nos curieux ,
quelque paflionnés qu’ils loient, ne .poufferont
les chofes aufli loin qne l’ont fait les.anciens.
Je ne crois pas qu’on rencontre aujourd’hui de
gens qui , femblabîes au fenateur Nonius ,
préfèrent l ’exil & même la profeription, à la
privation d’une belle bague.
I l eft pourtant vrai que, depuis le renouvellement
des beaux arts, \es pierres gravées
ont été recherchées par les nations polies
de l’Europe avec un grand empr Ifement; &
ce goût fcmble même avoir pris de nos jours
une nouvelle vigueur. Il n’ y a prefque point
de prince qui ne le falfe honneur d avoir une
colleétfon de pierres gra ees CeLe du ro i,
Sc celle de l’ Impératrice reine de Hongrie font
(1) Le tome I de la Defcription des principales pierres
pavées du cabinet de M . le duc d Orléans j in'fol. , a
paru en 1780 , & le fécond- en 178*.
confidérables'. Le recueil de M. le duc d’Orléans
eft très-beau. ( * ) On vante en Angleterre
les pierres gravées recueillies autrefois par le
comte d’Arundel, préfentement enti e les mains
de Miladi Germain-, celles qu’avoit ralfemblées
Milord Pembrock , & la colleétion qu’avoit
fait le duc de Devonshire, l’ un des plus il-
luftres curieux de ce liècle.
C’eft néantmoins l’Italie qui eft encore remplie
des plus magnifiques cabinets de pierres
gravées. Celui qui avoit étéjformé par les princes
de la maïfon Farnefe a fait un des principaux
ornemens du cabinet du roi de Sicile. La collection
du palais Barberin tient,.en ce genre, un
des premiers rangs dans Rome, qui, de même
que Florence & Venife, abonde en cabinets
de pierres gravées. Mais aucune de ces collections
n’égale celle que poffedoit le grand duc,
qui paroît être la plus fingulière 8c la plus
complette qu’on ait encore vue,puifque lemar-
quis Maffei allure qu’elle renferme près de
trois mille pierres gravées. On fait que les
plus remarquables fe trouvent dans le Ma-
foeum Florentinum. Auffi faut-il convenir que
les peuples d’Italie font à la fource des belles
chofes. Fait-on la découverte de quelque rare
monument, de ceux d’ une ville même, d’ un
Herculanum , par exemple ; ils font les premiers
à en jouir. Ils peuvent continuellement étudier
l’antique qui eft fous leurs yeux ; & comme
leur goût en devient plus fûr & plus délicat
que le nôtre, ils font aulîi généralement plus
fenfibles que nous aux vraies beautés des ouvrages
de l ’arc.
Des belles pierres gravées,
Pour avoir des pierres gravées exquifes en
travail , il faut remonter julqu’au temps
des Grecs. Ce font eux qui ont excellé en ce
genre, dans la compofition, dans la correction
du deflin, dans l’ expreifion , dans l ’imitation
, dans la draperie, en un mot dans toutes
les parties de l’art. Leur habileté dans la re-
préfentation des animaux eft encofe fupérieure
à celle de tous les autres p.eyples. Ils étoient
mieux fervis que nous dans leurs modèles, &
ils ne taifoient abfolument rien fans confulter
la nature. Ce que nous difons de leurs ouvrages
au lu jet de la gravure en creux , doit s’appliquer
également aux pierres gravées en relie
f appellées camées. Ces deux genre? de gravure
ont toujours, chez les Grecs, marché
d’ un pas égal. Les Etrufques ne les ont point
égalés , & les Romains., qui n’avoient point
l’ idée du beau, leur ont été inférieurs à tous
(1) Cette belle collection appartient maintenant à l’im-
1 pératrice de Ruine, qui l’ a payée 450 mille livres.
égards. Quoique curieux à l’exces des pierres 1
gravées, quoique foutenus par l’ exemple des 1
graveurs Grecs qui vi voient-parmi eu x , ils |
n’ont eu,en cc genre,que des ouvriers médiocres /
de leur nation & la nature leur a été ingrate. |
Les arts illuftroient en Grèce ceux qui les
exerçoient avec fuccès : les Romains au contraire
n’empïoy oient à leurs fculptùres que des
efclaves ou des gens du commun ( * )
De la plus belle pierre gravée connue»
La plus belle pierre gravée fortie des mains
des Grecs, & qui nous foit reftée, e f t , je
penfe , la cornaline connue fous le nom de
cachet de Michel-Ange. C’eft le plus beau
morceau du cabinet du roi de France & peut-
être du monde. On dit qu’ un orfèvre de Bologne
, nommé Augujlin TaJJï, l’eut après la
mort de Michel-Ange & le vendit à la femme,
d’un intendant de l'a maifon dé Médicis. Ba-
garris , garde du cabinet des antiques d’Henri
I I I , l’acheta huit-cents écus , àu commencement
du dernier fiècle, des héritiers dte cette
dame qui étoit de-Nemours : le fieur Lauthier
le père l’ eut après la mort de ces antiquaires,
8c ce font les enfans dudit fieur Lauthier qui
l’ont vendue à Louis XIV.
( La cornaline qu’on .nomme le cachet de
Michel-Ange eft fans doute très-précieufe par
le travail , l’étendue de la compofition
qu'elle contient dans un fort petit efpace ajoute
à fa fingularité : mais il eft hardi d’affirmer,
ou même d’ infinuer qu’elle foit la plus belle
des pierres antiques. La petitelfe des objets
qu’elle renferme femble s’oppofer elle-même à
ce jugement ; car pour louer la beauté d’un
ouvrage, ,il faut que l’oeil puilfe fuivre le développement
de fes parties. Ainfi les vrais juges
des arts accosteront peut-être la préférence à
des pierres qui contenant un moins grand
nombre de figures 8c même feulement une
figure ou une tête, leur offrent des beautés
mieux développées, des beautés rendues &
non pas feulement indiquées. Mais on doit
admirer, dans le cachet de Michel-Ange ,
l ’adreffe & la patience de l’artifte, & l’on eft
étonné qu’on ait pu traiter de fi petits objets
dans un temps où l’on ne connoiffoit pas les
verres oculaires. )
Des pierres gravées de Vancienne Rome,
I l femble, par ce que nous avons remarqué'
tout-à-l’heure, qu’il y a v o it, parmi lès
Romains, une forte d’ inluffifance pour la culture
(1) Il faut obferver que le bel âge des arts dans la Grèce
étoit paffé, quand les Romains commencèrent à les exercer.
1 Enèore lés 'ont-ils peu cultivés par eux-mêmes Ils les aban.-
donnoient à des efclaves affranchis, la plupart Grecs de
: jn.aiffan.ee, mais abbâtardjs par la fervitude 6c l’humiliation.
D’ailleurs, il eft vraifemblable qu’on attribue fou vent aux
Romains des ouvrage? médiocres des Grecs.
des arts. J’ajoute que ce n’eft pas la feule
nation qui , pour avoir poffédé les plus belles
chofes, & les avoir, en apparence, aimées avec
paillon , n’a pu fournir ni grands peintres ni
grands feuipteurs. Je n’ai plus qu'un mot à
dire au fujet de certaines gravures fur le cryf-
tal par les modernes.
Des gravures modernes fur le cryjlal.
Les graveurs, modernes ont gravé en creux,
fur des tables de c ry fta l, d’allez grandes ordonnances
d’après les defilns des peintres, 8c
l’on enchâffoit en fuite" ces gravures dans des
ouvragés d’orfèvrerie pour y tenir lieu de bas-
reliefs.
On peut lire dans Vafari les deferiptions
qu’il fait d’ un grand nombre de des gravures
qui enrichiffoîent des croix. & des chandeliers
deftinés pour des chapelles & de petits coffres
propres à ferrer des bijoux. P'alerio Vicentini
en avoit exécuté un qui étoit entièrement de
cryftal , & où il avoit repréfenté des fujets
tirés de l’hiftoire de lia palfion de Notrg-Sei-
gneur. Clément V I I en fit préfent à François
I , lors de l’entrevue qu’il eut avec ce prince
à Marfeille à l’occafton du mariage de Catherine
de Médicis, fa nièce, 8c c’étoit au rapport
de Vafari, un morceau unique & fans
prix. ( Article de M . le Chevalier de J air-
court j dans Vancienne Encyclopédie. )
PINCEAU, (fubft. fem. ) , infiniment avec
lequel le peintre pofe la couleur. On en parlera
dans le dictionnaire pratique.
Le mot pinceau eft pris dans le fens figuré,
pour lé réfultat du maniement du pinceau.
C’eft ainfi qu’on dit le pinceau aimable de
l’Albane , du Parmefan ; le pinceau fier de
Vélafquès, de Jouvenet ; le pinceau léger &
fpirituel de Téniers, parce que la manière de
peindre de ces habiles maîtres étoit aimable,
fière, légère ou fpirituelle.
Avant l’ invention de la peinture à l’ h u ile ,
on ne metroît pas grand mérite dans le maniement
du pinceau. S’ il y en avoit un reconnu
, il fe réduifoit à la netteté, à la juf-
telfe avec laquelle on devoit en ufer. Le mouvement
du pinceau eft prefque perdu dans la
détrempe qui ne laiffe guère voir que le traie
& les touches de bruns. Le pinceau eft encore
plus abforbé dans la frefque : d’ailleurs
par la diftance exigible pour ce genre de peinture
, le maniement ne s’apperçoit pas;.