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falir'dans les boutiques, il eft clair que cette prépa^
Tation eft non feulement vaine & infidelle, mais encore
vicieufe. Le nitre purifié doit donc dans tous
les cas, être préféré au cryfial minéral.
Le nitre appellé effcnfifficatum ou infuccatum dans
plufienrs pharmacopées, allemandes fur-tour, eft
du /iitre diflbus dans des infuiions , décodions ou
fîtes de plantes, ou de fleurs, ou bien dans des diffo-
liitions de fucre, de fels tels que celui de faturne,
&c. 6c évaporé jufqu’à ficcité. Il eft fpécifié par le
nom des:diverfes matières employées à cette préparation
, ce qui fait le nitrum violatum, rofatum ,
fchordiatum ffaccharatum , faturninum, &c. On trouve
encore dans ces pharmacopées un nitrum perla-
ium'i corallatum, &c. c’eft-à-dire cuit ou évaporé à
ficcité , en remuant la diflolution jufqu’à ce qu’elle
commence à s’épaiffir , avec des perles, du corail,
ou d’autres terres abforbantes en poudre. Le nitrum
nitratum cryflalli nitri, ou draco fortificatus, des mêmes
pharmacopées, eft le nitrt furfaturé defon propre
acide. Toutes ces préparations font à-peu-près
inconnues dans nos pharmacopées, & abfolument
exclues de notre pratique ; 6c certes ce n’eft-là réellement
qu’un vain fatras.
Les Médecins françôis n’emploient que le nitrt purifié
, 6c même ils l ’emploient rarement, du moins
en comparaifon des médecins allemands modernes,
6c fur-tout des ftahliens. Juncker a écrit d’après
Stahl, que le nitrt méritoit prefque le premier rang
parmi les remedes les plus précieux, inter fummaar-
tis rnedicet proejidia ; 6c le traité où Stahl célébré tant
le nitre, a pour titre : De ufu nitri medico Poly-
chreflo.
Les vertus attribuées au nitre, d’après cette vi-
cieufe méthode qui ne fubfifte que trop encore , de
défigner les propriétés des remedes par l’interprétation
dé leurs effets cachés; ces vertus, dis-je, ainfi
évaluées; font la vertu rafraîchiffante, tempérante,
félon Hoffman réfolutive, félon Stahl coagulante ,
antiphiçgiftique, antiaphrodifiaque, peftorale.
Mais pour expofer, félon la méthode que nous
avons préférée, des propriétés-plus évidentes, plus
pofitives du nitre pris intérieurement, nous difons
xl’après l’expérience, que le nitre eft diurétique lorf-'
qu’on le donne à petite dofe, à celle d’un gros ou de
deux tout au plus, dans une quantité de tifane
deftinée à fournir la boiffon d’un jour entier, 6c purgatif
à une dofe plus honnête , 6c même à cette même
dofe donnée en un feul verre; qu’il fait merveilles
étant mélé avec le quinquina dans les fievres intermittentes
, principalament quotidiennes accom-
pa’gnéës de chaleur excelïive ; 6c dans les fievres de
cette claffe, principalement dans les quartes, lorf-
que l’excès vicieux de férofité, colluvies ferofa, exif-
te',ou eft imminent. Secondement, étant ajouté aux
tifanes fudorifiques, aux émulfions, aux décoctions
des farineux, ordonnées contre les rhumatif-
mes, 6c quelquefois dans des maladies de la peau.
■ Troifiemement, dans les tifanes appropriées aux
ophtalmies anciennes & rebelles. Quatrièmement,
qu’il mérite un rang diftingué parmi les remedes fe-
condairas des inflammations ; & principalement des
éréfipeles. Cinquièmement, qu’il eft d’un ufage très-
utile dans le commencement des gonorrhées virulentes
; qu’il calme les ére&ions douloureufes 6c les
ardeurs d’urine, qui font les fymptomes communs
de cette maladie ; & que non feulement il n’empê-
-che point l’écoulement utile, prefque néceffaire,
qui en fait l’effence, en enfermant (comme on dit
-d’après un proverbe-vulgaire ; & une erreur ration-
•mile ) le’ loup dans la bergerie ; mais qu’au contraire
les tifanes rafraîchiffantes nitrées 6c les émulfions
nitrées, provoquent & entretiennent convenable-
-'Bient ce flux. Sixièmement, c’eft le retnede le plus
ufité contre les coliques ou douleurs néphrétiques J
il n’eft pourtant pas lythontiiptique. Septièmement;
on le combine utilement avec les hydragogues dans
le traitement des hydropifies. Enfin, on dit qu’il modéré
l’appetit vénérien, & qu’il prévient les pollutions
no&urnes.
Les végétaux éminemment nitreux, 6c d’ailleurs
dépourvus de tout principe médicamenteux-a&if,
tels que font la bourrache , la buglofe , la pulmonaire
, la pariétaire, &c. n’exercent des vertus vraiment
médicamenteufes qu’à raifon de ce principe.
Or , comme ces plantes tiennent un rang diftingué
parmi les bechiques ou peâoraux appell és incififs,
la vertu peélorale-réfolutive du nitre, célébrée par
plufieurs modernes, & confirmée par des expériences
direâes , eft d’ailleurs établie par les effets reconnus
de ces plantes.
Le nitre entre dans la poudre tempérante de Stahl ,
voye{ Poudre tempérante. Il eft dit dans la dernière
édition de la Pharmacopée de Paris, qu’il entre
dans l’anti-heéficjue de Poterius 6c dans le lilium de
Paracelfe, & qu’il fert à la préparation de l’antimoine
diaphonique , &c. O r , comme le nitrt concourt
abfolument 6c exactement de la même maniéré
à la production de ces trois médicamens, on ne devine
point pourquoi on dit du nitre qu’il entre dans
les deux premiers , 6c qu’il fert à la préparation de
l’autre. Quoi qu’il en foit, le nitre fert à la préparation
de l’antimoine diaphorétique, 6c n’entre point
dans la compofition.de l’anti-heCtique , ni dans celle
du Lilium. V oyez ces trois articles.
On emploie le nitre à quelques üfages médicinaux
extérieurs: on le diffout dans lesgargarifmes anti-inflammatoires
, & quelquefois , quoique rarement,
dans les lavemens laxatifs. Il entre dans la compofi-
tion de la pierre médicamenteufe, divine , ou ophtalmique
deCrollius, &de quelques autres auteurs »
H B :
NITREUX, ACIDE , ( Chimie & Mat. méd. ) L’a-'
eide nitreux eft un des trois acides minéraux, c’eft- à-
dire, un des fels primitifs, un de ceux dont les Chi-
miftes n’ont point encore opéré la décompolition
6c qui concourent, comme principes , à la formation
de plufieurs compofés chimiques. Foye^Sni..
Les qualités extérieures & particulières de l’acide
nitreux font celles-ci : lorfqu’il eft fuffifamment concentré
, il eft d’un rouge plus ou moins v i f , plus ou
moins orangé ou pâle félon fon degré de concentration
; il exhale en très-grande abondance des vapeurs
de la même couleur, même par le grand froid, 6c au
point qu’un flacon à demi plein de cette liqueur a fa
partie vuide conftamment 6c très-fenfiblement remplie
de fes vapeurs. Lorfqu’il eft très-foible, i f n’a
point de couleur. Un phénomène fort fingulier, c’eft
que fionaffoiblit un acide nitreux un peu fort en y
mêlant de l ’eau, il devient verd fur le champ, mais
cette couleur ne dure point. De l’acide nitreux affez
foible pour être décoloré peut néanmoins être encore
un peu fumant, 6c les vapeurs qu’envoie celui-
ci ont encore une légère teinte rouge. Toutes ces vapeurs
font fuffoquantes 6c d’une odeur déteftable. Il
eft beaucoup pluspefant que l’eau; 6c, malgré l’ef-
pece de volatilité annoncée par cette émiflion continuelle
de vapeurs, il eft fufceptible de concentration
par la diftillation qui fait élever un phlegme
foiblement acide , 8c qui retient l’acide comme plus
fixe. Cet acide nitreux ainfi déphlegmé ne jette pourtant
point de vapeurs, à moins qu’il ne foit agité
par une chaleur confidérable ; en forte qu’il paroît
que quoique l’acide nitreux jette d’autant plus de va- •
peurs qu’on l’a plus concentré d’avance immédiatement
, par les circonftances de la diftillation par laquelle
on le retire du nitre ; il paroît, dis-je, que la
matière de ces vapeurs pourroit bien n’être pas une
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émanation pure 5c fimple de l’acide nitreux 9 maïs
Une fubftance un'peu diverfe.
Les qualités fpécifiques 8c effentielles , ou proprement
chimiques de l’acide nitreux, font fes affinités
avec diverfes fubftances, la génération des nôu-!
veaux êtres chimiques qui réfultent de fa combinaison
avec ces fubftances, 8c l’ordre ou le degré de
fes affinités avec ces fubftances par rapport aux autres
acides.
L’acide nitreux fe combine avec le phlogiftique ,
& forme a v e c , ce foufre éminemment inflammable
qui eft le vrai principe de la déflagration du nitre.
Foyeç l'article précédent.
il diffout l’alkali fixe , tartareux ou nitreux, 8c.
forme avec, le nitre appellé régénéré, qui n’eft autre
chofe que le vrai nitre parfait. Foye^l'article précéd.
Il produit par fa comblnaifon avec l’alkali fixe,
de foude ou marin , le nitre quadrangulaire ou cubique
dont il a été parlé aufîi dans l'article preced. •
Il cqmpofe avec l’alkah volatil le fel ammoniacal
nitreux. Foye^fous le mot Sel.
Avec las terres calcaires, un fel dont les propriétés
font rapportées à l’art. Chaux. Foye^cet article.
Il diffout l’argent, le cuivre, le fer , l’étain, le
plomb, le mercure, l’antimoine, le zinc ; le cobhalt,
le bifmuth, & l’arfenic en partie, en un mot, toutes
les fubftances métalliques excepté l’o r , & même ce
dernier métal d’après une expérience véritablement
expofée afléz obscurément dans les Mém. de Suède,
par M. Brandt. Nous ne parlons pas de la platine, à
calife des juftes foupçons de M. Margraf contre l’o pinion
qui fait regarder cette matière métallique
comme une nouvelle efpece de métal. Foye[ zyec
quelles circonftances l’acide nitreux agit fur chacune
de ces matières, 8c quels font les produits de ces diverfes
combinaifons, aux art. particuliers Argent ,
Cuivre, Fer, Ét a in , Plomb,Mercure, Bismuth,
Z inc, Antimoine, Arsenic,C obhalt ;
V0yc{ auJJiOR & PLATINE.
L ’acide nitreux concentré fiibit avec les huiles une
cffervefcence violente , fuivie de l’inflammation.
Ce phénomène eft rapporté 6c examiné à l'article
Huile. Foye^cet article.
L’aftiôn de l’acide nitreux fur l’efprit-de-vin , la
nature des principaux produits de cette réaûion, fa-
voir, une huile éthérée très-fubtile , 6c l’efprit de
nitre dulcifié, 6c la maniéré d’obtenir ces produits
font expofés à l'article Ether nitreux. Foyc^ cet
article.
L’acide nitreux diffout auffi le camphre, & produit
avec cette fubftance, trop peu définie jufqu’à-
préfent, une liqueur finguliere connue des Chimif-
tes fous le nom d’huile de camphre. Foye[ Camphre.
L’ acide nitreux foible épaiffit fingulierement les
huiles par expreffion. C ’eft fur cettè propriété qu’eft
fondée la préparation d’une affez puérile compofi-
tion pharmaceutique, connue fous le nom de baume
d'aiguilles , 6c qui n’eft autre chofe que de l’huile
d’olive qu’on a fait nager fur de l’acide nitreux diffol-
vant a&uellement quelques aiguilles , Sc qui a été
épaiffie en confiftance de baume dans cette opération.
Enfin, le foufre commun, pénétré par des vapeurs
d’acide nitreux, eft fingulierement altéré dans fa
confiftance ; il devient mol, duCtile, flexible comme
du cuir mouillé.
L’acide nitreux ne diffout point les fafrans & chaux
métalliques vraies , telles que le fafran de Mars , le
colcothar, le fafran de Vénus, l’antimoine diaphoré-
tique , &c.
L’acide nitreux n’eft point inflammable par lui-
même. Sa prétendue fpécification par le phlogiftique
n eftfondéefur rien que fur la couleurde cet acide ,
çe qui eft encore un indice bien conteftable y voye^
ÎPhlôgistique. Car l’influence de Éacïde nitreux
dans la production des inflammations-, déflagrations,
.détonnations , calcinations , &c. ne prouve
rien pour la préfence de ce principe. On explique
tous ces phenomenes bien plus naturellement, plus
Amplement, d’après une exaCte analogie , par la
grande affinité de l’acide nitreux avec le phlogiftique.
En effet l’acide vitriolique 6i l’acide du fel marin ;
dans lefquels on ne fuppofe point ce principe, n’en
ont pas moins une affinité plus ou moins grande
avec lui, & n’en font pas moins propres à produire
avec les fubftances phlogiftiques des mixtes & des
phénomènes, par lefquels ils ne différent qu’acci-
dentellement, feulement quant au plus 6c au moins
de l’acide nitreux.
Voici l’ordre d’affinité des différentes fubftances
ci-deffus mentionnées avec l’acide nitreux. Le phlogiftique
, le foufre » l’arfenic, l’un 6c l’autre alkali-
fixe , l ’alkali-volatil, les terres ablorbante-s ( ces
deux dernieres fubftances fe précipitent réciproquement
dans diverfes circonftances), le fer, le cuivre ;
le plomb, le mercure, l’argent. L’ordre des autres
fubftances métalliques n’a pas été obfervé, du moins
publié.
L ’ordre d’affinité de l’acidé nitreux 8c des autres
acides à l’égard de diverfes fubftances eft celui-ci :
il occupe le fécond rang eu égard aux fels alkalis,
tant fixes que volatils, 6c aux terres abforbantes t
l’acide vitriolique a plus de rapport que l’acide nitreux
avec tous ces corps ; mais ce dernier acide en
a davantage avec ces mêmes corps, que l’acide du
fel marin , que l’acide végétal, 6c que l’acide animal.
M. Margraf rapporte dans fon Mémoire fur le fe t
microcofmique, une expérience qui femble prouver
que l’acide microcofmique a plus de rapport avec
l’alkali-fixe que l’acide nitreux ; mais cette expérience
n’eft rien moins que décifive. Foyeç Sel mi-
crocosmique.
L’acide nitreux a moins de rappèrt que facide dii
fel marin avec toutes les fubftances métalliques que
l’un 6c l’autre de ces acides diffolvenr. L’ordre de
rapport de l’acide vitriolique 6c de l’acide nitreux
avec les corps que l’un 6c l’autre attaquent, n’eft:
bien conftaté que fur un petit nombre de fujets ; il
l’eft , par exemple, fur l’argent & fur le mercure,
avec lefquels l’acide vitriolique a plus de rapport
qu’avec l’acide nitreux. La table de Geoffroi peut
pourtant fubfifter affez-généralement en ce point
particulier quimet l’acide«/fre«A'aprèsracidemarin>
6c l ’acide vitriolique dans l’ordre des rapports deâ
acides minéraux avec les fubftances métalliques , 6s
qui le place à cet égard avant l’acide du Vinaigre.
Foyc{ Rapport & Précipitation.
L’efprit de nitrë différé à quelques égards felori
l’intermede qu’on a employé à fa préparation. Selon
Stahl, l’acide nitreux le plus fixe eft celui qu’on retire
par l’intermede du bol ; celui qu on retire avec
l’alun l’eft moins , mais cependant plus que celui à
la diftillation duquel ori a employé le vitriol. Celui
qu’on retire du nitre bien fé'ché, par l’intermedë
de l’huile de vitriol bien concentrée , eft le plus
concentré, le plus pefant, le plus rutilant, le plus
fumant qu’il eft poffible. L’acide nitreux de couleur
bleue 6c fingulierement volatil de Stahl, eft préparé
en diftillant une demi-livre de nitre pur, une livre
de vitriol calciné au rouge, & trois onces de magnes
arfenicalis. Foye{ VITRIOL & Magnes ARSENI-
CALIS. L’acide nitreux, diftillé avec les terres bo-
Iaires, s’appelle communément efprit-de-nitrè, & celui
qui eft diftillé avec le v itriol, eau-forte. Les acides
obtenus par ces deux divers intermèdes, peuvent
différer réellement, félon diverfes circonftanced
du manuel, 6c porter des différences, dans plufieurs
travaux ; mais la différence prétendue effentielie *