362 ( E C O ( E C O crétoires, l’excrétion de l’humeur féparée , &c. &c.
&c. toutes ces fonctions fe prêtent un appui mutuel;
elles influent réciproquement les unes fur les autres,
de façon que la léfion de l’une entraîne le dérangement
de toutes les autres , plus ou moins promptement
, fuivant que fa fympatkie eft plus ou moins
for te , avec telle ou telle partie ; le défaccord d’un
vifcere fait une impreffion très-marquée fur les autres
; le pouls, fuivant les nouvelles obfervations
de M. Bordeu (recherch. fur le pouls par rapport
aux crifes) , manifefte cette impreffion (ur les organes
de la circulation. L’exercice quelconque de ces
fonûions, établit fimplement la vit ; la j'anté eft formée
par le même exercice, pouffé au plus haut point
de perfeûion & d’univerialité ; la maladie naît du
moindre dérangement, morbus ex quocurnque defeelu.
La mort n’eft autre chofe tpie fon entière ceffation.
Six caufes principales effentielles à la durée de la vie,
connues dans les écoles fous le nom des Jix chojes
non naturelles , fa voir , l’air , le boire & le manger,
le mouvement 6c le repos , le fômmeil 6c la veille,
les excrétions , 6c enfin les pallions d’ames entretiennent
par leur jufte proportion cet accord réciproque
, cette uniformité parfaite dans les fonûions
qui fait la fanté; elles deviennent auffi lorfqu’elles
perdent cet équilibre les caufes générales de, maladie.
L'aûion de ces caufes eft détaillée aux articles
particuliers non naturelles ( chofes ), air, mouvement,
repos, boire , & c . Voye^çts mots.
On a divifé en trois claffes toutes les fondions du
corps humain : la première claffe comprend les fonctions
appellées vitales , dont la néceffité , pour perpétuer
la vie , paroît telle, que la vie ne peut fubfil-
ter après leur ceffation ; elles en font la caufe la
plus évidente , 6c le ligne le plus affuré. De ce nombre
font la circulation du fang , ou plutôt le mouvement
du coeur 6c des arteres, la reipiiation ; 6c ,
fuivant quelques-uns, l’aûion inconnue 6c inapparente
du cerveau. Les fonûions de la fécondé claffe
font connues fous le nom de naturelles; leur principal
effet eft la réparation des pertes que le corps a faites;
on y range la digeftion, la fanguification, la nutrition
6c les lécrétions , leur influence fur la vie
eft moins fenfible que celle des fonûions vitales ; la
mort fuit moins promptement la ceffation de leur
exercice. Elle eft précédée d'un état pathologique
plus ou moins, long. Enfin , les fonûions animales
forment la troifu-me claffe; elles font ainfi appellées
, parce qu’elles font cenfées réfulter du commerce
de l’ame avec le corps ; elles ne peuvent pas
s ’opérer (dans l’homme) fans l’opération commune
de ces deux agens ; tels font les mouvemens
nommés volontaires , les fenfations externes & internes
; le dérangement 6c la ceffation même entière
de toutes les fonûions ne fait qu’altérer la fanté ,
fans affeûer la vie. On peut ajouter à ces fonûions
celles qui font particulières à chaque fexe , 6c qui ne
font pas plus effentielles à la vie , dont la privation
même n’eft quelquefois pas contraire à la famé: dans
cette claffe font comprifes l’excrétion de la femen-
c c , la génération , l’évacuation menftruelle , la
groffèffe, l ’accouchement, &c. Toutes ces fonûions
ne font, comme nous l’avons dit, que des modifications
particulières , que le mouvement & le fenti-
ment répandus dans toute la machine,ont éprouvées
dans chaque organe, par rapport à fa ftruûure , fes
attaches &c fa fiiuation. L’ordre, le méchanifme,
les loix 6c les phénomènes de chaque fonûion en
particulier, forment dans ce diûionnaire autant d’ar
rides féparés. Voye5; les mots C ir c u l a t io n , D ig
e st io n , Nu tr it io n , R esp iration , &c. Tous
ces détails ne fauroient entrer dans le plan général
d’économie animale, qui ne doit rouler que fur ies
caufes premières du mouvement, confidéré en grand
6c avant toute application ( le fentiment n’eft vraif-
femblablement que l’irritabilité animée par le mouvement
) ; il y a tout lieu de croire qu’il en eft du
corps humain comme de toutes les autres machines
dont l’art peut affembler, défunir, 6c appercevoir
les plus petits reflbrts; c’eft un fait connu des moindres
artiftes,que dans les machines, même les plus
compofées, tout le mouvemenr roule 6c porte fur
une pieice principale par laquelle le mouvement a
commencé , d’où il fe diftribue clans le refte de la
machine, & produit différens effets dans chaque ref-
fort particulier. Ce n’eft que par la découverte d’un
femblablc refl'ort dans l’homme qu’on peut parvenir
àconnoître au jufte & à déterminer exaûement la
maniéré d’agir des caufes générales de la vie , de la
f anté, de la maladie , 6c de la mort. Pour fe former
une idée jufte de Vcecogomie animale, il faut néceffai-
roment remonter à une fonûion primitive qui ait
précédé toutes les autres,& qui les ait déterminées.
La priorité de cette fonûion a échappé aux lumières
de prelque tous les oblervateurs ; ils n’ont examiné
qu’une fonûion a près l’autre, faifant fans ceffe
un cercle vicieux, 6c oblique à tout moment, dans
cette prétendue chaîne de fonûions, de transformer
les caufes en effets, & les effets en caufes. Le defaut
de cette connoiffance eft la principale fource de
leurs erreurs, 6c la vraie caufe pour laquelle il n’y
a eu pendant très-long-tems aucun ouvrage fur \'oe-
conomie animale dont le titre fut rempli, avant le fameux
traité intitulé , fpecimtn novi medicina confpec-_
tus, qui parut pour la première fois en 1 7 4 9 ,6c qui
fut , bien-tôt après, réimprimé avec des augmentations
très-confidérables en 1751.
En remontant aux premiers fiecles de la Médecine
, tems où cette Icience encore dans fon berceau,
étoit réduite à un aveugle empirifme , mêlé d’une
bifarre fuperftition , produit trop ordinaire de l’ignorance
; on ne voit aucune connoiffance anatomique
, pas une obfervation conftatée, rédigée, réfléchie
, aucune idée théorique fur l’homme; ce ne
fut qu’environ la quarantième olympiade, c’eft-à-
dire, vers le commencement du trente-cinquieme
fiecle ; que les Philofophes s’étant appliqués à la Médecine
, ils y introduifirent le raifonnement, 6c établirent
cette partie qu’on appelle phyfiologie , qui
traite particulièrement du corps humain dans l’état
de lamé , qui cherche à en expliquer les fonûions,
d’après les faits anatomiques 6c par les principes de
la Phyfique ; mais ces deux fciences alors peu cultivées
, mal connues, ne purent produire que des
connoiffances 6c des idées très-imparfaites & peu
exaûes : auffi ne voit-on dans tous les écrits de ces
anciens philofophes Médecins , que quelques idées
vagues , ilolées, qui avoient pris naiffance de quelques
faits particuliers mal évalués, mais qui n’a-
voient d’ailleurs aucune liaifon enfemble 6c avec
les découvertes anatomiques : Pythagore e f t , fuivant
Celfe , le plus ancien philofophe qui fe foit
adonné à la théorie de la Médecine, dont il a en
même tems négligé la pratique ; il appliqua au corps
humain les lois fameufes 6c obfcures de l’harmonie,
fuivant lefquelles il croyoit tout l’univers dirigé ; il
pretendoit que la fanté de même que la vertu, Dieu
même, 6c en général tout bien, confiftoit dans l’harmonie,
mot qu’il a fouvent employé & qu’il n’a jamais
expliqué ; peut être n’entendoit il autre chofe
par-là qu’un rapport exaû ou une jufte proportion
que toutes les parties & toutes les fonûions doivent
avoir enfemble ; idée très-belle, très jufte, dont la
vérité eft aujourd’hui généralement reconnue ; il eft
cependant plus vraffemblable que ce mot avoit une
origine plusmyftérieufe 6c fort analogue à fa doc-;
trine fur la vertu des différens nombres. La maladie
étoit, fuivant lu i. une fuite naturelle d’un do-
( ICO
rangement dans cette harmonie. Dr. refte , il éta-
bliffoit de même que les anciens hiftoriens facrés qui
avoient tiré cette doûrine des Chaldéens, une ame
étendue depuis le coeur jufqu’au cerveau, & il pen-
foit que la partie qui eft dans le coeur étoit la lour-
ce des paflions , & que celle qui réfidoit dans le cerveau
produifoit l’intelligence & la raifon ; on ne
fait point quel ufage avoient les autres parties, fi-
tuées entre le coeur & le cerveau.
Alcméon fon difeiple, dont le nom doit être célébré
dans les faftes de la Médecine, pour avoir le
premier anatomifé des animaux ( ce ne fut que long-
tems après lu i , qu’Erafiftra-te & Hérophile oferent
porter le couteau fur les cadavres humains ). Alc-
mæon, dis-je, croyoit que la fanté dépendoit d’une
égalité dans la chaleur, la féchereffe, le froid, l’humidité
, la douceur, l’amertume & autres qualités
femblables ; les maladies naiffoient, lorfque l’une
de ces chofes dominoit fur les autres & en rompoit
ainfi l’union & l’équilibre : ces idées ont été les premiers
fondemens de toutes les théories anciennes,
des différentes claffes d'intempéries , & des diftinc-
tions fameufes reçues encore aujourd’hui chez les
modernes, des quatre tempéramens. Heraclite, ce
philofophe fameux, par les larmes qu’il a eu la bon-
nehommie de répandre fur les vices des hommes ,
établit la célébré comparaifon du corps humain avec
le monde, que les alchimiftes ont enfuite renouvel-
lée , défignant l’homme fous le nom de microcofme,
( petit monde) par oppofition à macro-cofme (grand
monde ): il prétendoit que les deux machines le ref-
fembloient par la ftruûure, & que l’ordre 6c le méchanifme
des fonûions étoient abfolument les mêmes
: tout fe fa i t , dit-il, dans notre corps comme dans
le monde ; l'urine fe forme dans la vefjie , comme la
pluie dans la fécondé région de l'air , & comme la pluie
vient des vapeurs qui montent de la terre & qui en s’é-
paifjîffant, produifent les nuées , de même Vurine ejl formée
par les exhalaifons qui s'élèvent des alimens & qui
s'injînuent dans la vefjie. On peut juger par-là de la
phyfiologie d’Héraclite, de l’étendue & de la juftef-
ïe de fes connoiffances anatomiques.
Le grand Hippocrate furnommé à fi jufte titre , le
divin vieillard, joignit à une exaûe obfervation des
faits, un raifonnement plus folide : il vit très-bien
que les principales fources où l’on pouvoit puifer
les vraies connoiffances de la nature de l'homme ,
étoient l’exercice de la Médecine , par lequel on
avoit les occafions de s’inftruire des différens états
<lu corps, en fanté 6c en maladie, des changemens
qui diftinguoient un état de l’autre , 6c fur-tout des
imprefîions que faifoient fur l’homme, le boire &
le manger, le mouvement & le repos, &c. foit lorfque
cet ufage étoit modéré , réduit au jufte milieu,
loit lorfqu’il étoit porté à un excès abfolu ou relatif
aux difpofitions aûuelles du corps, lib. de veter. Med.
Ces fources font affurément très-fécondes , & les
plus propres à fournir des principês appliquables à
l ’économie animale ; mais Hippocrate perfuadé que
l’anatomie étoit plus néceffaire au peintre qu’au médecin
, négligea trop cette partie , qui peut cependant
répandre un grand jour fur la théorie de l’homme.
Le livre des chairs ou des principes, mp) o-apy-av,
w mpiâpxuv qui contient fa doûrine fur la formation
du corps & le jeu des parties, eft toute énigmatique;
il n’a point été encore fuffifamment éclairci par les
commentateurs ; les mots de chaud, de froid, 6'humide
, de fec, & c . dont il fe fert à tout moment n’ont
point été bien expliqués & évalués ; on voit feulement
, ou l’on croit voir qu’il a fur la compofition
des membranes ou du tiffu cellulaire des idées très-
juftes , il les fait for-mer d’une grande quantité de
matière gluante qui répond au corps muqueux des
modernes. Toutes les fonûions du corps humain
( ECO 365
etoient.produites, fuivant ce médecin célébré, par
l’exercice conftant de quatre faculrés qu’il appel-
loit attraclrice , retentrice , afjîmilatrice & expultrice ;
la faculté attraclrice attiroit au corps tout ce qui pouvoir
concourir au bien être de l’homme ; la faculté
retentrice le retenait; l’ufage de la faculté ajfimilatricc
etoir de changer tout corps étranger hétérogène
fufeeptible de changement, & de Vaffimiler c’eft-à-
dire, de le convertir en la nature propre de l ’homme
: enfin, les matières qui pouvoient être nuifi-
bles par un trop long féjour, par leur quantité ou
leur qualité étoient chaffées, renvoyées dans des re-
fervoirs particuliers, ou hors du corps par la faculté
expultrice. Ces facultés appliquées à chaque vifeè-
r e , à chaque organe , & entretenues dans l’état naturel
& dans une jufte proportion établiffoient la
fanté; la maladie étoit déterminée, lorfqu’il arrivoit
quelque dérangement dans une ou plufieürs de ces
facultés : Hippocrate admettoit auffi pour premier
mobile de ces facultés, un principe veillant à la con-
fervation de la machine, qui dans la fanté, en regloit
& dirigeoit l ’exercice, & le confervoit dans rérat
néceffaire d’uniformité; lorfque quelque caufe trou-
bloit cet équilibre exaû , ce même principe guérif.
foit des maladies,tw wa-av /»Tpoç,faifoit des efforts plus
ôu moins aûifs pour combattre, vaincre & détruire
l’ennemi qui travailloit à l’anéantiffement de fa machine.
Ce principe eft défigné dans les écrits d’Hippocrate
fous les noms d’ame de nature, de chaud inné
d'archée y de chaleur primordiale, effective, & c . Sen-
nert a prétendu que le chaud inné n’étoit autre chofe
que le principal organe dont l’ame fe fert pour exercer
fes fonûions dans le corps. Fernel remarque ,
au contraire, fondé fur la décifion expreffe de Galien
, voyei Infl am m at ion , que tous ces noms
ne font que des fynonymes d'ame & employés indifféremment
par Hippocrate dans la même fignifi-
cation. C ’éroit une grande maxime d’Hippocrate
que tout concourt, tout confent, tout confpire enfentblc
dans le corps : maxime remarquable, très - vraie 6c
très-utile pour l’explication de l’économie animale.
Il attribuoit à toutes les parties une affinité qui les
fait compatir réciproquement aux maux qu elles
fouffrent, & partager le bien qui leur arrive. Nous
remarquerons en terminant ce qui le regarde, qu’il
plaçoit le fiege du fentiment autour de la poitrine ,
qu’il donne à la membrane qui fépare la poitrine du
bas ventre le même nom que celui par lequel les
Grecs defignoient l'efprit ,* tppw ; les plus anciens
Médecins avoient ainfi nommé cette partie, parce
qu’ils penfoient qu’elle étoit le fiége de l’entendement
ou de la prudence. Platon avoit imaginé une
ame, fituée dans les environs du diaphragme , qui
recherche & appette le boire & le manger & tout
ce qui eft néceffaire à la v ie , & qui eft en outre le
principe des defirs ôc de la cupidité. Galien, admirateur
enthoufiafte d’Hippocrate , n’a rien innové
dans fa doûrine fur l’économie animale, il n’a fait que
la commenter, l’étendre, la foutenir & la répandre
avec beaucoup de zele ; toutes fes opinions ont été
pendant plufieurs fiecles la théorie régnante, la feule
adoptée & fuivie dans les écoles lous le nom de
Galenifme. Les Médecins chimiftes qui parurent dans
le treizième fiecle, y apportèrent quelques change-,
mens , & Paracelfe qui vécut fur la fin du quinzième
, l’abandonna entièrement : il avoit l’ambition
de changer tout-à-fait la face de la Médecine , 6c
d’en créer une nouvelle ; une imagination bouillante,
v ive, mais préoccupée, ne lui laiffa trouver dans
le corps humain qu’un affemblage de différens principes
chimiques ; le corps de l'homme , s’écria-t-il,
paramif lib. de origin. morbor. n’eft autre chofe que
foufre , mercure & fel ; l’équilibre & la jufte proportion
de ces trois fubjlances lui parut devoir faire la