vement d’ondulation qu’on exciteroit dans l’air par
l’ explolionde plufieurs canons tires les uns après les
autres, on pourroit ébranler, divifer,diffiperle nuage
qui commence à fermenter.
Peut-être qu’on écarteroit les nuages voifins &
qu’on difperferoit toutes ces parties de différens mixtes
répandues dans l’air ; en forte qu’on empêcheroit
l’effet de cette vertu attra&ive qui aflemble tout au
même endroit : car ce n’eft qu’à la faveur du calme
extraordinaire qui régné dans l’air , que peut fe former
& continuer cette efpece de chaîne que font ces
différens corpufcules en fe levant vers \ orage les
uns à la fuite des autres. Or le bruit du canon en
troublant ce calme, ne doit-il pas rompre cette chaîne
& faire cefl'er la fermentation en lui dérobant
des fermens qui fans doute fervent à l entretenir ?
Peut-être enfin qu’on romproit cet équilibre qui
jregne dans tontes les parties de l’air environnant,
comprimé parl’expanfionde la matière qui fermente,
lequel favorife l’a&ion des fermens que 1 * ora g e renferme
dans fon fein en le tenant immobile > & en empêchant
un mouvement de tranflation qui ne pourvoit
que traverfer leur aftion. _ #
Sur quoi j’obferve que le canon pourroit produire
ce dernier effet de deux façons :
Premièrement, en augmentant la force de cette
partie de l’air environnant, vers laquelle fon adion
feroit dirigée ; fecondement, en troublant la fermentation
dans cette partie de l’orage qu’il ebranle-
roit le plus par fes fecouffes : car en luppofant la
fermentation arrêtée , ou confidérablement diminuée
dans une partie de l’orage , le corps de l’orage
doit fe jetter de ce côté , comme je l’ai obfervé ailleurs,
8c l’air environnant fe déployant enmême-tems
du même cô té , dôit emporter l’orage 8c le diffiper,
ou le faire fondre avant que la fermentation ait fait
un progrès fuffifarjt pour procurer cette coagulation
qui fait la grêle. Il y a lieu de croire que c’eft ce qui
arrive Iorfqu’un orage vient à fondre bientôt apres
qu’il a commencé à fe former : auflî dans ce cas n’y
a-t-il point de grêlé. _ i :
Je ne porte pas plus loin mes conje&ures , & je finis
cet article en conjurant les phyficiens de vouloir
bien examiner s’il n’y auroit pas des bonnes raifons
pour engager les malheureux habitans des pays fu-
jets à la grêle , à faire l’expérience du canon pour
tâcher de fe délivrer de ce fléau.
Peut-être des raifons dé douter devroient-elles
fuffire pour preffer l’exécution de ce projet. En effet,
pour le conduire avec prudence, on doit balancer
le danger qu’il y a de faire une dépenfe inutile par le
degré d’utilité que cette même dépenfe peut procurer
, fi l’expérience réuffit. Or , l’utilité feroit ( a )
grande fans doute ; donc il femble que l’incertitude
du fuccès ne devroit pas empêcher qu’on la fît.
Aurefte, pour éviter l’embarras qu’il y auroit à
faire tranfporter du canon , 8c la difficulté qu’on
pourroit trouver à obtenir la permiffion de déplacer
celui de nos villes de guerre , ne pourroit on pas
faire ufage des boîtes-à-feu propres à-produire le même
effet dans l’air ? Et fi cela fe peut , comme je
n’en doute pas, quelle forme faudroit-il leur donner
pour que l’inflammation de la poudre qu’on y enfer-
meroit, excitât dans l’air la plus forte commotion
qu’il feroit poffible } C ’eft ce que je voudrois qu’on
•examinât.
U ) Il n’y a pas d’année où la grêle ne ravage la moitié ,
quelquefois les trois quarts des diocefes de R ieux, Com-
minges , Coulerans ; Auch & tombez , fans compter que
les endroits épargnés rendent beaucoup moins, parce que
le propriétaire découragé néglige la culture de fon champ ,
& fouvent le laide en friche n’ayant pas de quoi femer ; il y
a même certains quartiers dans ces différens diocèfes qui
font grélés régulièrement toutes les années, fouvent deux ,
trois, jufqu’à quatre fpis dans la même année; ce fait eft
'certain, & l’auteur ne le fait que trop.
Ne pburfoit-on pas encore faire des boîtes-â-vèhï 5
dans lefquelles on comprimeroit i’air à un tel point,
qu’en le laiffant échapper tout-à-la-fois, il fe déban-
deroit avec force fur l’air extérieur , dans lequel il
exciteroit un ébranlement à peu-près pareil à celui
qu’excite la poudre quand elle prend feu dans le canon
? Autre queftion à examiner.
O r a g e , i l m. ( Poèjie. ) groffe pluie, ordinairement
de peu de durée, mais accompagnée d’un vent
impétueux, 8c quelquefois de grêle , d’éclairs, & de
tonnerre. Le ledeur fera peut-être bien-aife de fe
délaffer à lire ici la defeription que fait M. Thomp-
l'on d’un orage d’automne dans les îles britanniques ;
c’eft un tableau plein de poéfie 8c de fentimens d’humanité.
« Le fud brûlant s’arme d’un fouffle puiffant qui
» détruit les travaux de l’année. A peine voit - on
» d’abord la pointe des arbres trembler, un mur-
» mure tranquille fe gliffe au long des moiffons qui
» s’inclinent doucement ; mais la tempête croît, s’é-
» leve ; l’atmofphere s’ébranle 8c fe remplit d’unè
» humidité pénétrante, invifible , 8c immenfe, qui
» fe précipite avec impétuofité fur la terre. Les
» forêts agitées jettent au loin des nuées de feuilles
» bruyantes. Les montagnes voifines battues de l’o-
» rage, pouffent la tempête brifée, & la renvoient
» entorrens dans le vallon.La plaine fertile flotte en
» ondes, découverte 8c expoîée à la plus grande
» fureur du vent. La mer de la moiffon ne peut évi-
» ter le coup qui la menace, quoiqu’elle plie à Vo-
» rage, elle eft arrachée 8c enlevée dans l’a ir , ou
» réduite en chaume inutile par l’ébranlement qui la
• » détruit.
» Quelquefois l’horifon noircit, fond 8c defeend.
» en fleuve précipité, tandis que la tempête femble
» fe reproduire. L’obfcurité s’augmente , le déluge
» s’accroît, les champs noyés de toutes parts, per-
» dent leurs fruits couchés fous l’inondation. Tout-
» à-coup des ruiffeaux fans nombre fe précipitent
» tumultueufement,rougis,jaunis ou blanchis, par
>> la terre des collines qu’ils entraînent ; la riviere
» s’enfle 8c quitte fes bords. Les brebis , la moif-
» fon , les cabanes roulent enfemble emportées par
» la cruelle vague. Tout ce que les vents ont épar-
» gné, cède à ce dernier effort, qui ruine en un infi
» tant les plus hautes efpérances , 8c diffipe les tré-
» fors mérités , fruits de l’année laborieufe.
» Le laboureur fans fecours fuit fur les hauteurs,'
>> confidereie malheureux naufrage de tout fon bien,
» fes troupeaux noyés, 8c tous fes travaux difperfés.
» Les befoins de l’hiver s’offrent en ce cruel moment
» à la penfée tremblante : il frémit, il croit enten-
» dre les cris de fes chers enfans affamés.
» Vous maîtres accourez, confolez-le, féchez fes
» larmes, & ne foyez alors occupés que de foutenir
» la main rude 8c laborieufe , qui vous procurera
» l’aifance dans laquelle vous vivèz : donnez du
» moins des vêtemens groffiers à ceux dont le tra-
» vail a fourni la chaleur 8c la parure de vos habits :
»veillez encore au foin de cette pauvre table,
» qui a couvert la vôtre de luxe 8c d’abondance :
» foyez compatifl'ans enfin, 8c gardez-vous d’exiger
» ce que les vents orageux 8c les affreufes pluies
» viennent de moiffonner fans retour. (D . ƒ .)
OR AGEUX, adj. (Gram.') qui menace d’orage,
qui y eft fujet. On dit un tems orageux, dans le premier
feus; & une mer orageufe, dans le fécond.
ORAIRE, f. m. orarium, terme de Liturgie ; c’eft
le nom qu’on a autrefois donné à cette partie des
vêtemens facrés des prêtres 8c des diacres, que nous
appelions aujourd’hui étole : on mettoit Voraire fur
la tunique ou dalmatique ; mais les Bollandiftes remarquent
que ce motn’z pas toujours la même lignification
; qu’il fe prend quelquefois pour rochet ou
petit habillement de toile que portent les évoques,
& 'quelquefois pour un linge qui fert à effuyer la
bouche. Le quatrième concile de Tolede, canon 40,
ordonne que les diacres ne porteront qu’un orarium
ou étole, & qu’ il fera blanc 8c fans or. Cependant
tout cela a changé ; car l’orarium, qui n’étoit autrefois
que de linge , n’eft plus, depuis long-tems, que
d’une belle étoffe. Ce mot vient-il du latin ora, le
bord de l’habit, ou de os, oris9 la bouche, ou de
quelqu’autre origine ? c’eft ce qu’on ignore, 8c ce
qu’il importe fort peu de favoir. (D .J .)
ORAISON, f. f. DISCOURS , f. m. (Synonym.)
ces deux mots en grammaire fignifient également
l’énonciation de la penfée par la parole ; c’eft en quoi
ils font fynopymes.
Dans le difeours on envifage furtout l’analogie &
la reffemblance de l’énonciation avec la penfée énoncée.
- x i
Dans l’oraifon, l’on fait plus attention à la matière
phyfique de l ’énonciation , 8c aux fignes vo caux
qui y font employés. Ainfi, lorfque l’on dit en
grée. aô^Toç tVn o Ôecff , en latin aumus eft Deus ,
en françois, Dieu efi éternel, en italien , eterno e Id-
dioy en allemand, Gott ift ewig ; c’eft toujours le
m êm e difeours , parce que c’eft toujours la même
penfée énoncée par la parole, 8c rendue avec la
même fidélité ; mais Voraifon eft différente dans chaque
énonciation , parce que la même penfée n’eft
pas rendue partout par les mêmes fignes vocaux.
Legi tuas litteras, tuas legi litteras, litteras tuas legi,
c’eft encore en latin le même difeours, parce que
c’eft l ’énon ~ia.ion fidele de la même penfée ; mais
quoique les mêmes fignes vocaux foient employés
dans les trois phrafës, l’oraifon n’eft pourtant pas
tout-à-fait la même, parce que l’enfemble phyfique
de rénonciation varie de l’une à l’autre.
Le difeours eft donc plus intelleâuel ; fes parties
font les mêmes que celles, de la penfée , le fujet,
l ’attribut, 8c les divers complémens néceffaircs aux
vues de l’éno,nciation. Voyeç Su jet , A t t r ib u t ,
R égim e , &c. il eft du reffort'de la Logique.
L’oraifon eft plus matérielle; fes parties font les différentes
efpeces de mots,l’interje&ion, le nom,le pronom,
l’adjeélif, le verbe, la prépofition, l’adverbe
8c la conjon&ion, que l’on nomme auffi les partiel
d} or aifoh. F oyei Mo t . Eile fuit les lois de la
Grammaire. t
Le Jlyle caraûérife le difeours, & le rend précis ou
diffus, élevé ou rampant, facile ou embarraffé, v if
7 ou-froid , &c. La diction cara&érife Voraifon , & fa it
qu’elle eft corre&e ou incorrecte , claire ou obfcure.
Voye^ ÉLOCUTION; au commencement. . I
L ’étymologie' peut fervir à confirmer la diftinc-
tion que l’on vient d’établir entre difeours 8c orai-
fon. Le mot difeours , en latin difeurfus, vient du
verbe difeurere, courir de place en place, ou d?idée
en idée ; parce que l’analyfe de la penfée, qui
eft l’objet du difeours, montre, l’une après l’autre,
les idées partielles , & paffe en quelque maniéré de
l ’ime à l’autre. Le mot oraifon eft tiré immédiatement
du latin oratio , formé d’oratum , lupin d ora-
re ; 8>C orare a une première origine dans le génitif
oris , du nom os,.b o u ch eq u i eft le nom de l’inftru-
ment organique du matériel de la parole : orare, faire
ufage de la bouche pour énoncer fa penfée; oratio,
la matière phyfique de l’énonciation.
J’ajouterai ici ce qu’a écrit M. l ’abbé Girard fur
la différence des trois mots haranguedifeours > orai-
■fon : quoiqu’il prenne ces mots relativement à le^1
loque.nce , on verra néanmoins qu’ il met entre lés
deux derniers une diftindion de même nature que
celle que j’y ai mife moi-même.
» La harangue, dit i l , ( Synon.fr.) en veut pro-
» prement au coeur; elle a pour but de perfuader 8i
» d’émouvoir ; fa beauté confifte à être vive , for*
» t e , & touchante. [Le difeours s ’adrefle directe-
»ment à l ’efprit; il fe propofe d’expliquer & d’inf-
» truire ; fa beauté eft d’être clair, jufte 8c élégant*
» L ’oraifon travaille à prévenir l’imagination ; fon
» plan roule ordinairement fur la louange ou fur la
» critique ; fa beauté corififte à être noble , délicate
» 8c brillante.
» Le capitaine fait à fes foldatsune harangueront
» les animer au combat. L’académicien prononce
» un difeours 9 pour développer ou pour foutenir un
» fyftème. L’orateur prononce une oraifon funebre,
» pour donner à l’affemblée une grande idée de fon
» héros.
» La longueur de la harangue rallentit quelquefois
» le feu del’a&ion. Les fleurs du difeours en dimi-
» nuent fouvent les grâces. La recherche du mer-
» veilleux dans Voraifon fait perdre l’avantage du
» vrai. »
Ainfi, il en eft du difeours 8c de Voraifon dans le
langage des Rhéteurs, comme dans celui des Grammairiens
: de part 8c d’autre le difeours eft pour l’efprit,
parce qu’il çn repréfente les penfées;rora//o« eft
pour l’imagination , parce qu’elle repréfente d’une
maniéré matérielle 8c fenfible. (JJ. E R. M.)
Oraison dom inic ale , (Critique facrée.) c’eft-
à-dire , priere de Notre Seigneur, ou le modèle d’o-
raifon que Notre Seigneur daigna donner à fes dilci-
ples qui l’en follicitoient f Luc. II. z . Matt. 6. g*
Notre pere quiètes dans le ciel ; appellatio pietatis &
poteflatis , dit fort bien Tertulien : Qwe ton nom foie
fanclifié : Que ton régné vienne : Que ta volonté foie
faite y &c. Autant d’expreflions graduées , qui fignifient
que Dieufoit reconnu pour le feul vrai Dieu ;
& qu’il foit honoré en cette qualité par toute la terre
d’un culte pur 8c conforme à fes perfections.
Donnez-nous'aujourd’hui notre pain quotidien ; ce qui
nouseft néceffairepour chaque jour, ou ce qui convient
à chaque jour. Pardonnez-nous nos ojftnfes,
comme nous les pardonnons Jefus-Chrift recommande
par ce comme , ‘le pardon des injures: C ’eft ainfi
qu’il eft dit dans l’eccléfiaftiq. 28. 2. » Pardonnez à
» votre ennemi l’injure qu’il vous a faite, 8c vos pé-
» chés vous feront remis, quand vous en demande-
» rez le pardon. » Ne nous induifez point tn tentation„
Ne nous expofez point à des épreuves trop rigou-
reufes, oit nous pourrions fuccomber , mais délivrez
nous du mal y à<ao t» urovépa, mais foutenez-nous contre
les intentions que nous pourrions avoir de nuire
aux autres hommes ; ntorupia. eft une paffion maligne
, qui tend à faire du tort aux autres. Kunia. eft le
vice oppofé à là vertu, qui doit régler nos aâions
par rapport à nous-mêmes. On a quelques bonnes
paraphrafes de cette excellente priere ; mais la plupart
dès théologiens l’ont noyée d’explications diffu-
les 8c trop recherchées. Quant à la doxologie ; car
c’eft à toi qiCappartiennent le régné , la puiffance & la
gloire aux jieeles des fiecles ; elle a été prife vraiffem-
blablement des conftitutions apoftoliques , lib. ///.
,8. oîi elle fe trouve, & de quelques anciennes li-
: turgies /d ’où elle a paffé dans le texte. Il eft vrai
du moins qu’elle manque dans quelques exemplaires
grecs , comme dans la vulgate. (D .J .)
O r a iso n , (Rhétor. & Eloq.) le mot oraifon eft
d’une fignification fort étendue, fi l’on en confidero
feulement l’étymologie ; il défigne toute penfée exprimée
par le difeours , ore ratio exprefsa. C eft dans
ce fens qu’ il eft employé par les Grammairiens. Ici
il défigne un difeours préparé avec art, pour opérer
la perluafion.
Il fa u t obferver qu’il y a une grande différence entre
le talent de Voraifon 8c l’art quiaide à le former.
Le talent s’appelle éloquence, l’art, rhétorique : l’un