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foire à Paris. Il s’enfonçoit en apparence Un grand
clou dans le cerveau par les narines; voici comment :
ilprenoit un clou de l’épaifleur d’une groffe plume ,
long environ de cinq pouces, & arrondi par la
pointe. Il le mettoit avec fa main gauche dans une
de fes narines, 8c tenant un marteau avec fa main
droite, il difoit qu'il alloit enfoncer le clou dans fa
tête, ou comme il s’expliquoit, dans fa cervelle,
Effe&ivement il l’enfonçoit prefqu’entier par plu-
lieürs petits coups de marteau ; il en faifoit autant
avec un autre clou dans l’autre narine ; enfuite il
pendoit un fceau plein d’eau par une corde fur les têtes
de ces clous, & le portoitainfi fans aucun autre
fecours.
Ces deux opérations parurent d’abord furprenan-
tes non-feulemer.tau vulgaire, mais même auxPhy-
ficiens anatomiftes les plus éclairés. Leur première
idée fut de foupçonner quelque artifice, quelque in-
duftrie cachée , quelque tour de main ; mais M.
‘Winflow, après avoir réfléchi fur la flruchire, la
lituation, & la connexion des parties, en trouva l’explication
fuivante.
Le creux interne de chaque narine va tout droit
depuis l’ouverture antcrieurejufqu’à l’ouverture pof-
térieure, qui eft au-deffus de la cloifon du palais*
Dans tout ce trajet, les parties olfeufes ne font revêtues
que de la membrane pituitaire ; les cornets inférieurs
n’y occupent pas beaucoup d’efpace, & laif-
fent facilement paffer enîr’eux & la cloifon des narines
, le tuyau d’une plume à écrire, que l’on peut
fans aucune difficulté glifler diredement jufqu'à la
partie antérieure de l’os occipital. Ainfi un clou de la
même groffeur pour le moins, mais arrondi dans
toute fa longueur 8c fa pointe, ou fort émouffé,
peut y glifler fans peine 8c fans coups de marteau ,
dont le joueur fe fervoit pour déguifer fon tour d’a-
dreffe. ^ ! ..
Cette première opération fait comprendre la fécondé.
Les clous étant introduits jufqu’à l’os occipital
, & leurs têtes étant près du nez , il eft aifé de
juger que fi on met quelque fardeau fur les têtes de
ces clous , ils appuieront en-bas fur le bord ofleux
de l’ouverture antérieure des narines, pendant que
leurs extrémités ou pointes s’élèvent contre l ’alon-
gement de l’os occipital, qui fait comme la voûte
du gofier. Les clous repréfentent ici la première ef-
pece de levier, dont le bras court eft du côté du
fardeau, & le bras long du côté de la refiftance. Si
l ’on objede que cela ne fe peut faire fans caufer
une contufion très-confîdérable aux parties molles
qui couvrent ces deux endroits, on peut répondre
que l’habitude perpétuelle eft propre à rendre avec
le tems ces parties comme calleufes & prefque in-
fenfibl’es.
Mais la pefanteur du fardeau eft une autre difficulté
plus grande ; car ce font les os maxillaires qui
foutiennent le poids, & leur connexion avec les
autres pièces du crâne paroît fi légère , qu’elle donne
lieu de craindre qu’un tel effort ne les arrache.
Cependant il faut confidérer, i° . que fouvent cés
os fe foudent entièrement avec l’âge, & que pôur-
lors il n’y a rien à craindre ; 20. ces deux Os unis
enfemble font engrenés par deux bouts avec l ’os
frontal, ce qui augmente leur force ; 30. ils le font
encore avec l’os îphénoïde, par des entailles qui
en empêchent la féparation de haut en bas; 40. ils
font de plus appuyés en arriéré par les apophyfes
ptérigoïdiennes, comme par des arcs - boutans, ce
qui leur eft d’autant plus avantageux , qu’ils y font
enclavés par le moyen des pie'ces particulières des
os du palais ; 50. le périofte ligamenteux qui tapifle
toutes ces jointures, contribue beaucoup à leur fermeté
; 6°. enfin ajoutons que les mufcles de la mâchoire
inférieure y ont bonne part, principalement
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ceux qu’on appelle crotaphites. On fait qu’ils font
très-puiffans, fortement attachés, non - feulement
à une affez grande étendue de la partie latérale dé
la tête, mais encore aux apophyfes coronoïdes de
la mâchoire inférieure : ainfi elles font allez capables
de foulever cette mâchoire contre la fupérieu-?
re, & par - là de foutenir celle - ci pendant qu’elle
porte le feau plein d’eau. (D . J. )
Narines des poissons, ( Ichthiolog.) les narines
font placées dans les poiflons d’une maniéré fi
variée, 8c elles ont tant de différence dans leur nombre
, leur figure, leur fituation, & leur proportion,
qu’elles forment une fuite très-effentielle de caractères,
pour fervir à diftinguer les genres & les efpe-
ces les unes des autres.
Par rapport au nombre, i°. quelques poiflons
n’ont point-du-tout de narines y comme le pétremy-
zon, genre de poiffon, qui renferme fous lui les
diveriès efpeces de lamproies ; z°. plufieurs poiflons
n’ont qu’ une narine de chaque côté, placée comme
celle des oifeaux 8c des quadrupèdes, 30. plufieurs
ont deux narines de chaque cô té, comme les carpes,
les perches, &c.
Quant à la1 figure des narines elles font, i°. rondes
dans quelques poiflons ; 20. ovales dans quelques
autres ; 30. oblongues dans plufieurs.
Les narines des poiflons different aufîi beaucoup
par rapport à leur fituation ; ï °. dans quelques-uns
elles font placées très-près du mufeau, comme dans
les clupecs & le congre ; 20. dans plufieurs genres de •
poiflons elles font placées près des y eux , comme
dans le brochet, la perche, 8c leurs femblablcs;
30. elles fe trouvent placées dans quelques-uns à
moitié diftance entre les yeux & la fin du mufeau ,
comme dans les anguilles qui vivent dans le fable,*
Enfin les nafines des poiflons different aufîi beaucoup
en proportion; car dans les poiflons qui en
ont deux paires, elles font, i°. dans quelques-unes
placées fi près les unes des autres , qu’elles paroif-
fent prefque fe toucher, comme dans la carpe ;
20. dans d’autres, comme dans le congre, la perche
, 8c plufieurs autres poiflons, elles fe trouvent
au contraire fort éloignées. En un mot, quoique
les narines foient une partie des poiflons, à laquelle
on fait en général peu d’attention, il n’en eft pas
moins vrai qu’on doit les regarder comme d’une
grande utilité pour la diftindion des efpeces.
B ■ . :
NAR1SQUES, (Geog. anc.) Narifciy anciens peuples
de la Germanie félon Tacite. Ils font nommés
Varifli par Ptolomée, liv. I I . chap. xj. 8c Narifloe par
Dion, liv. L X X l. Il y a quelque apparence que ces
peuples tiroient leur nom de la riviere nommée
Navus y la Naw, qui traverfoit leur pays, & que les
Romains changèrent Vu en r.
Le lieu qu’ils habitoient s’étendoit au midi du
Danube, des deux côtés de la Naw, & félon la pofi-
tion que Ptolomée leur donné, ils- étoient bornés au
nord par les montagnes Hercyniennes, à l’orient
par la forêt Hercynienne , au midi par le Danube ,
8c au couchant par lesHermaudures : de cetre façon
leur pays renfermoit le haut palàtinat ou le palati-
nat de Bavière, avec le landgraviat de Leuchtën-
berg. Nous, apprenons de Dion , que ces peuples
fubliftoient encore du tertis-desXntonins, car il les
met au nombre des nations qui confpirerent contre
les Romains. (D . J .)
NARNI, ( Géogr. ) on- l’appelloit Nequinum félon
Tite-Live, liv. X . chap. ix. à caufe de la difficulté
des chemins qui y condüifenr ;; petite ville-très'-ancienne
d’Italie au duché’ de Spolete, dans l’état ec-
cléfiaftique, avec un évêché fuffragant du pape.
L ’an de Rome 454, le conful M. Fulvius Perunîüs
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triompha des NSqumhns SC des Samriîtës confédérés:
Elle réfifta plus heureufement aux forces d Annibal
dans le teins qu’il ravageqit l’Italie ; mais dans le
zv j fiecle, l’armée de Charles V . & des Vénitiens,
s’en rendit maître, & y commit des rayages inexprimables
; elle eft heureufement reflufcitée de fes
cendres : on y voit encore quelques relies d’un pont
magnifique, qu’on dit avoir été conftruit par Au-
gufte, après la défaite des Sicambres, & de leurs
dépouilles : il étoit b â# te grands quartiers de marbre
joints enfemble par des bandes de fe r , Sc fcel-
lécs en plom.Iisifc • '■ -
Narni eft en partie fituée fur là croupe, Si en
partie fur la pente d’une montagne efcarpéè , à <J.
lieues S. O- dé Spolete, & à 15 N. E. de Rome : la
Néra paffe ait bas fle Narni jîalang. eft 30. 2.5.' lai.
4 Cette petite ville a produit quelques gens de lettres
mais elle doit principalement fe vanter d’avoir
donné la naiflance à l ’emperent Nerva. V ie i lh a -J
vénérable quand il monta fur le trône poui rempla-
cer un monftre odieux, il fe fit adorer par fa fa-
geffe, par fa douceur, & par fes vertus. 11 n’eut pas
de plus grande joie que de penfer & de dire en lui-
même :
Par-tout en ce moment on me bénit, on m aime y
On ne voit point le peuple à mon nom s'allarrner,
Le* Ciel dans tous leurs pleurs ne ni entend point
nommer,
Leur fombre inimitié ne fuit point mon vifage ,
Je vois par-tout Les coeurs voler à mon paflage.
Enfin il mit le comble à fa gloire en adoptant
Trajan, l’homme le plits propre à honorer la nature
humaine : ainfi le premier Antonin adopta
Marc-Aùrele. (D . J. )
NARO , (Géogr.) Naray ville de Sicile, dans la
vallée de Mazzara , près de la foilrce de la riviere
de Naroy à io milles au levant de Gergenti. Long.
21 . 3,6. lut. gy. 20.
Naro , ( Géog. ) riviere de la Sicile, dans la vallée
de Mazzara; Elle prend fa four ce auprès de la
ville qui porte fori nom, court du côté du midi, 8c
fe jette dans la mer d’Afrique, auprès de Vallone
di Mole.
NARRAGA y ( Géog. anc. ) fleuve aux environs
de la Babylonie, félon Pline, /. J^I. c. x xvj. C ’eft le
canal ou la branche la plus occidentale de l’Euphrate,
& ce canal a été creufé de main d’homme.
Ptolomée, /. V. c. xx. l’appelle Maarfares,8i Ammien
Marcellin, l. X X I I I . le nomme Manias. (D . J .)
NARRATION, f. f. ( Belles-Lettres. ) dans l’éloquence
& dans l’hiftoiré eft un récit Ou relation
d’un fait ou d’un événement comme il eft arrivé ,
ou comme on le fuppofe arrivé.
Il y en a de deux fortes, l ’une fimple & hiftori-
que, dans laquelle l’auditeur ou le lefteur eft fup-
pofé entendre ou lire un fait qiii -Tui eft tranlmis de
la fécondé main : l’autre artificielle 8c fabuleufe ;
où l’imagination de l’auditeur échauffée prend part
au recit -d’une chofe, comme fi elle fe paffoit en fa
préfence.
La narrationfélon les Rhéteurs, eft- la fécondé
partie du difeours, c’eft-à-dire, celle qui doit fui-
vre immédiatement l’exorde îfoye^ Oraison ou
D iscours.
Dansl’biftdire , la narration fait le corps de l’ouvrage
; 8c fi Fon en retranche lés réflexions incident
e s , les épifodes , (îès digrëflions , l’hiftoire fe réduit
à une fimple narration. Voye{ HiSTOiRE.
•' Cieerôn demande-quatre qualités dans la narration
,■ f avoir clarté, probabilité, brièveté & agrément.
Ori rend la narration claire, en y obferyant l’or-
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dré dés tènis, enforte qu’il ne refaite nulle Confu-
fion dans l’enchaînement des faits, ert n’employant
que_ des termes propres & ufitës, 8c en racontant
l’aôion fans interruption.
Elle devient probable par le degré de confiancé
que mérite le narrateur, par la {implicite 8c la fin-
cerité de fon récit, par le foin qu’on a de n’y rieri.
faire entrer de contraire au fens commun ou aux
Opinions reçues, par le détail précis des circonf-
tances 8c par leur union, enforte qu’elles n’impliquent
point contradi&ion, ôc ne fe détruifent point
mutuellement.
La brièveté coefifte à ne {joint reprendre les cho-
fes de plus haut qu’il n’eft néceffaire, afin d’éviter
le défaut de cet auteur ridicule dont parle Horace,
qui gemino bellum trojarium orditur ab ovo, 8c à ne
la point charger de circonftances triviales ou de
détails inutiles.
Enfin on donne à lâ narration de l’agrément en
employant .des exprefîions nombreufes d’un fon
agréable & doux, en évitant dans leur arrangement
les hiatus & les diffonnances, en choififfant
pour objet de fon récit des chofes grandes, nouvelles,
inattendues, en embelliflânt fa diclion de
tropes 8c dé figures, en tenant l’auditeur en fuf-
pens fur certaines circonftances intéreffantes, 8c en
excitant des mouvemens de trifteffe ou de joie, de
terreur ou de pitié. Voye^ NOMBRE, CADENCE,
Figures, Passions, & c.
C ’eft principalement la narration oratoire qui
compofe ces ornemens ; car la narration hiftonque
n’exige qu’une fimplicité mâle & majeftueufe, qui
coûte plus à un écrivain que tous les agrémens du
ftyle qu’on peut répandre fur les fujets qui font du
reffort de l ’éloquence.
Il ne fera pas inutile d’ajouter ici quelques ob-
fervations fur les qualités propres à la narration
oratoire.
i° . Quoiqu’on recommande dans la narration la
fimplicité, on n’en exclut pas toujours le pathétique.
Cicéron, par exemple, remue vivement les
paflions, en décrivant les circonftances du fup-
plicede G avius, citoyen romain, qui fut condamné
à être battu de verges, par l’injuftice & par la
cruauté de Verrès. Rien n’eft plus touchant que le
récit qu’il fait de la mort des deux Philodamus pere
& fils, tous deux immolés à la fureur du même
Verrès, le père déplorant le fort de fon fils, & le
fils gémiffant fur le malheur de fon pere. II y a
donc des caufes qui demandent une narration touchante
& paflionnée, comme il en eft qui n’exigent
qu’une exacte 8c tranquille expofition du fait.
C’eft à l’orateur fenfé à diftinguer ces convenances
8c à varier fon f ty le , félon la différence des
matières.
2°. Pour les caufes de peu d’importance, comme
font la plupart des caufes privées, il faut relever
la médiocrité du fujet par une diôion fimple en apparence,
mais pure, élégante, variée. Sans cette
parure elles paroiffent triftes , feches, qnnuyeufes ;
on doit même y jettér quelques penfées ingénieu-
fes, quelques traits vifs, qui piquent la curiofite,
& qui foutiennent l’attention.
3°. A l’égard des caufes où il s’agit d’un crime
ou d ’un fait grave, d’un intérêt public, elles admettent
des mouvemens plus forts ; on y peut ménager
des furprifes qui tiennent refprit en fiifpens,
y faire entrer des mouvemens de joie , d’admiration
, d’étonnement, d’indignation, de crainte 8c
d’efpérance, -pourvu que l’on fe foüvienne que ce
n’eft pas là le lieu de terminer ces grands fentimens,
& qu’il fuffit de les ébaucher; earPexorde & la narration
ne doivent avoir d’autres fondions que de