chimique, auffi bien que fes propriétés médicinales
communes, au mot O d o r a n t , principe.
Cette eau eft très-communément appellée dans
les ouvrages de Médecine latins, aqua naphx.
On peut retirer une eau effentielle très-analogue
à celle-ci, des feuilles à'oranger & des écorces du
fruit.
Tout ce que nous avons dit jufqu à prêtent convient
également, non-teulement aux feuilles , aux
fleurs 6c aux fruits de l ’un & de l’autre oranger, mais
encore, avec de très-légeres différences, aux parties
analogues du citronier, du cédrat, du bergamotier,
&c, ,
C ’eft encore indifféremment les fleurs de 1 un ou
de l’autre oranger qu’on prend pa«l|f n préparer des
conferves folides 6c liquides ou inities , 6 c des teintures
ou ratafïats. Les confitures préparées avec l’e-
corce blanche.de F uji 6c de l’autre fruit convenablement
épuifée de leur extrait amer par des macérations
ou des décollions fuffifanres y ont à-peu-
près les mêmes qualités diététiques 6c medicamen-
1 1 1 1 1 , , ,, j
La chair, moelle ou pulpe de 1 orange douce ,
contient un fuc abondant , doux 6c aigrelet , qui
Tend ce fruit très-rafraîchiffant 6c calmant la foif.
On mange cette chair dépouillée de ion écorce , ou
feule, ou avec du fucre ; cet aliment opéré mani-
feftement fur l’eftomac dans la plupart des fujets ,
cette fenfation qui elt défignee dans la plupart des
livres de diete par l’expreilion de réjouir l'efomac ,
c’eft-à-dire qu’il eft affez généralement auffi lalutaire
qu’agréable. Cependant comme le parenchyme ou
l’affemblage de cellules membraneuies où ce fuc elt
enfermé, eft coriace 6c indigefte ; il vaut mieux lu-
cer l’orange dans laquelle on a fait ce qu’on appelle
un puits , c’ eft à-dire qu’on a ouverte par un des
bouts , 6c dont on a écrafé la chair encore enfermée
dans le refte de l’écorce, en y plongeant à plufieurs
reprifes une fourchette ou un couteau à lame d’argent
, y diffolvant enfuite, fi l’on v eu t, une bonne
quantité de fucre en poudre ; & il vaut mieux, dis-
je , avaler le fuc d’orange ainfi préparé, que de manger
l’orange entière. On peut rendre encore cette
préparation plus gracieufe , fi l’on mêle parmi le fucre
qu’on y emploie une petite quantité d eleofaccha-
rum préparé fur-le-champ, en frottant un petit morceau
de fucre contre l’écorce de la même orange ;
c ’eft le moyen d’unir le parfum de l’écorce à la-faveur
du fuc. On peut préparer auffi avec le même
fuc une liqueur parfaitement analogue à la limonade
, & qui a à-peu-près les mêmes vertus , quoiqu’à
un degré inférieur , parce que l’acide de l’orange
douce eft beaucoup plus tempéré que celui du citron.
La première liqueur elt connue fous le nom
d'orangeade. Voyeç CITRONNIER & LIMONADE.
Le lue de l’orange douce fe conferve moins bien
que celui du citron ; auffi ne le garde-t-on que fort
rarement dans les boutiques ; il ne feroit pas même
fort agréable, & il auroit affez peu de vertu fi on
le confervoir fous la forme de firop.
L’orange amere n’eft employée parmi nos alimens
qu’à titre d’affaifonnement : on arrofe de fon lue la
plupart des volailles & des gibiers qu’on mange rôtis
; & il eft fur que cet affaifonnement en facilite
la digeftion. On fait entrer auffi leur rapure & même
leur écorce entière feche, dans quelques ragoûts
affez communs ; l’amertume qu’ils y portent peut
être regardée auffi comme un affaifonnement utile..
Il eft bon fur-tout pour corriger la fadeur, l'inertie
des poiffons gras mangés en ragoûts , comme de
l’anguille, &c. On fait auffi dans quelques provinces,
en Languedoc, par exemple, avec l’orange amere
non pelée & coupée par tranches, l’a i l, la rapure
de pain, & le jus de viande qu’on fait bouillir enfemble
, une fauffe qu’on fert avec les volailles rôties
; cette fauffe ne peut qu’être 6c eft en effet dé-
teftable , car les fucs acides végétaux font entièrement
dénaturés par l’ébullition , 6c acquièrent ifhe
faveur très-defagréable, que l’ail 6c l’extrait amer de
l’écorce blanche 6c des pépins ne corrigent certainement
point.
Les pépins d’orange, & fur-tout ceux de l’orange
aigre, font vermifuges comme toutes les fubftances
végétales ameres.
L ’écorce d’orange amere eft comptée parmi les
fébrifuges les plus éprouvés : on la donne, loit en décoction
, foit defféchée 6c réduite en poudre ; elle
eft regardée auffi comme un bon emmenagogue, 6c
comme un fpécifique dans la rétention 6c dans l’ardeur
d’urine ; la dole en fubftance en eft depuis demi-
gros jufqu’à deux gros.
Les écorces d’orange , foit douce , foit amere ,
confites, peuvent être regardées , par leur légère
amertume 6c par un refte de partum qu’elles retiennent
, comme ftomachiques, fortifiantes , propres
à aider la digeftion lorlqu’on les mange à la fin
des repas dans, l’état de f'anté, & à reveiiler doucement
le jeu de l’ellomac dans les convalefcences. La
conferve ou le gâteau de fleurs d’orange , dont il eft
bon de rejetter les fleurs après qu’on les a mâchées
6c que le fucre eft fondu dans la bouche ; 6c la marmelade
ou conferve liquide , poffedent les mêmes
qualités, & même à un degré îupérieur. Leratafiat
de fleurs d’orange qui eft préparé avec une teinture
des fleurs , joint à l ’efficacité de leur amertume 6c
de leur parfum, celle de l’efprit ardent. Voye^ L iqueurs
SPIRITUEUSES , Diete,
L’eau de fleurs d’orange qui eft amere & chargée
d’une matière aromatique tres-concentrée, eft non-
feulement employée pour aromatifer des alimens ,
des boiffons 6c des remedes , mais même feule ou
bien faifant la bafe d’un remede compofé ; on la
mêle très - utilement au premier égard, c’eft-à-dire
comme affaifonnement au lait & à plufieurs de fes
préparations, telles que la Crème douce, le fromage
frais à la crème, le caillé, les crèmes avec les oeufs ,
&c. L’eau de fleurs d’orange pure ou feule eft à la
dofe d’une ou de deux cuillerées, une remede puif-
famment ftomachique , cordial, vermifuge ; carmi-
natif, emmenagogue, hiftérique ; elle remédie fur-
tout très-efficacement, prife le matin à jeun , aux
foibleffes & aux douleurs d’eftomac ; elle entre très-
communément dans les juleps 6c dans les potions
cordiales 6c hiftériques , à la dofe de deux jufqu’à
quatre 6c même fix onces. On prépare avec l’eau
de fleurs d’orange & avec les écorces des fruits, des
firops fimples qui'ont à-peu-près les mêmes vertus
que ces matières.
Les fleurs & les écorces de$ fruits, auffi-bien que
les divers principes & préparations fimples qu’on en
retire, & dont nous venons de parler, tels que l’eau
diftillée, l’huile effentielle, la teinture, &c. entrent
dans un très-grand nombre de compofitions pharmaceutiques
officinales.
On trouve dans la plupart des pharmacopées la
defeription d’une pommade de fleurs d’orange qui
fe prépare en aromatifant du fain-doux avec les fleurs
d’orange qu’on fait infufer dans ce fain-doux liquéfié
par la chaleur du bain-marie , en réitérant plufieurs
fpis ces infufions fur des nouvelles fleurs , &c. Voyeç
Pommade & O nguent. Cette pommade , outre
les qualités médicinales du fain-doux , paroît poffé-
der encore la qualité réfolutive, tonique, fortifiante,
propre aux huiles effentielles. Le fain-doux liquide
6c chaud fe charge d’une certaine quantité de l’huile
effentielle des fleurs d’orange, 6c lur-toutlorfqu’on
les écrafe dans le fain-doux. ( b )
ORANGERIE, f. f. ( Archittcl, civile. ) c ’eft un •
bâtiment
batiment dans les grands jardins qui fert en hiver
à préferver du froid les orangers, & en général toutes
les plantes exotiques. Sa forme la plus ordinaire
eft celle d’un grand fallon ou plutôt d’une galerie ,
dont le Côté de l’entrée eft expofé au midi , 6c qui
n’a point d’ouvertures du côté du nord ; 6c afin que
le froid ne puiffe pas pénétrer de ce côté, il y a de
petits appartemens ; ces appartemens peuvent même
fervir à échauffer l'orangerie fans y faire du feu,
& cela en y faifant paffer des tuyaux de poîle , ou
en pratiquant un poîle dans l’ouverture du mur mitoyen
aux appartemens'& à l'orangerie. Une des plus
magnifiques orangeries qui ait été bâtie , eft celle de
Verfailles, avec aîles en retour, & décorée d’un ordre
tofcaii.
On appelle auffi orangerie le partere où l’on expôfe
les orangers pendant la belle faifon.
Orangerie fe dit encore des orangers mêmes enfermés
dans les caiffes. ( D . J. )
O R A R IUM , {. m'.filiifl. eccléf.') partie du v ê tement
des prêtres , qu’on appelloit auffifola,ètolQ.
Les évêques, les prêtres 6c les diacres le portoient,
mais non les foudiacres, les leéleurs 6c les chantres.
Oter l'orarium ou dépofer, c’étoit la même chofe.
C ’étoit auffi un linge que les diacres portoient fur lé
bras gauche ; il n’étoit pas quarré , mais oblong ;
il étoit à I’ufage de tous les citoyens. On n’alloit
point aux fpeftacles fans ce mouchoir, qu’on jettoit
en l’air quand on étoit content. L’empereur Auré-
lien en fit diftribuer au peuple. Paule de Samofate
exigeoit le même applaudiffement de fes auditeurs
lorfqu’il pféchoit. Le mot orarium vient, félon quelques
uns , de os, oris, parce qu’on s’en, fe r a i t pour
s’effuyer la bouche ; félon d’autres d'ora, ôree, frange
, bordure , parce qu’il étoit bordé 6c frangé.
O R A TÀ VA , ( Géogr. ) ville de l’île de Ténériffe,
Une des Canaries , à l ’oueft de l’île. C ’eft le port le
plus célébré qu’il y-ait dans ce canton pour le commerce.
Les Anglois y ont un cônful. Selon l’obfer-
vation du P. Feuillée en 1744, la différence du méridien
entre Oratava 6c Toulon, eft de 2.2 degrés
23 minutes , 6c par conféquent entre Paris
26". ( D . J. )
ORATEUR, ( Eloquence & Rhétorique. ) Ce mot
dans fon étymologie s’étend fort loin , lignifiant en
général tout homme qui harangue. Ici il défigne un
homme éloquent qui fait un difeours public préparé
avec art pour opérer la perfuafion.
Quelque fujet que traite un tel orateur, il a nécef-
fairement trois fondions à remplir ; la première eft
de trouver les chofes qu’il doit dire ; la fécondé eft
de les mettre dans un ordre convenable ; la troi-
fieme, de les exprimer avec éloquence : e’eft ce
qu’on appelle invention , difpoftion , exptcjfioh. La
ieconde opération tient prefque à la première, parce
que le génie lorfqu’il enfante , étant mené par la
nature, va d’une chofe à celle qui doit la fuivre.
L ’expreffion eft l’effet de l’art & du goût. Voye^
Inv ent io n , D is p o s it io n , Expression.
On diftingue trois devoirs dé Y orateur, ou, fi l ’on
Veut, trois objets qu’il ne doit jamais perdre de vue,
inftruire, plaire 6c émouvoir. Le premier eft indil-
penfable , car à moins que les auditeurs ne fôier.t
inftruits d’ailleurs, il faut néceflairement que Yorateur
le s inftruife : cette inftru&ion^ft quelquefois
capable de plaire par elle-même ; il pourtant des
agrémens qu’on y peut répandre , ainfi que dans les
autres parties du difeours ; c’eft à quoi l’on oblige
i °’'aCeur par le fécond devoir qu’on lui preferit, qui
eft.de plaire. Il y en a un troineme, qui eft d emou-
VOir » c eft en y fatisfaiiant que Y orateur s’élève au
plus haut degré de gloire auquel il puiffe parvenir ;
c elt ce qui le fait triompher : ç ’eft ce qui brife les
çyeurs 6c les .entraîne.
Tome XI*
Lejecret ejl d'abord de plaire & de toucher 3
Invente£ des refforts quipuiffent m'attacher.
Ces refforts font d’employer les paflions, infiniment
dangereux quand il n’eft pas manié par la raifon ;
mais plus efficace que la raifon même quand il l’ac-
compagne 6c qu il la fert. C’eft: par les paflions qué
1 éloquence triomphe, qu’elle régné fur les coeurs ;
quiconque fait exciter les paflions à propos, niaî^
tnfe à fon gré les efprits, il les fait paffer de la trif-
teffe à la jo ie , de la pitié à la colere. Auffi véhément
que l ’orage, auffi pénétrant que la foudre ■'
auffi rapide que les torrens, il emporte, il renverfé
tout par les flots de fa vive éloquence : c’eft par-là
que Démofthène a régné dans l’Aréopage & Cicéron
dans les roftres.
Perfonne n’ignore que les orateurs chez les Grecs
6c le s Romains étoieht des hommes d’état, des mi*
niftres non moins confidérables que les généraux
qui mamoient les affaires publiques, & qui entroient
’ dans prefque toutes les révolutions. Leur hiftoirè
n’eft point celle de particuliers, ni les matières qu’ils
traitoient un fpe&acle d’un art inutile. Les haran*
gués de Démofthène & de Cicéron offrent des tableaux
vivans du gouvernement, des intérêts des
moeurs 6c du génie des deux peuples. Il me paroît
donc important de tracer avec quelque étendue le
caraftere des orateurs d’Athènes & de Rome : ce fera
l’hiftoire de l’éloquence même. Ainfi , voye{ Or a teurs
grecs , Orateurs r om a in s .
Boftuet, Flechier, Bourdalouë , ont été dans lé
dernier fiecle de grands orateurs chrétiens. Les orai-
fons funèbres des deux premiers les ont conduits à
l ’immortalité ; & Bourdalouë devint bien-tôt le modèle
de la plupart des prédicateurs. Mais rien parmi
nous n’engage aujourd’hui perfonne à cultiver le talent
d'orateur au barreau, ce tribunal que Vircrile
•appelle fi bien ferrea juga , infanumque forum. C ’eft
ce qui a fait dire à un de nos auteurs modernes t
Egaré dans le noir dédale
Où le phantôme de Thémis
Couché fur la poupre & les iis >
Penche la balance inégale ,
E t lire d'une urne vénale
Des arrêts dictés par Cypris-,.
Iroisje, orateur mercénaire
Du faux & de la vérité,
Charge d'une haine étrangère
Vendre aux querelles du vulgairt
Ma voix & ma tranquillité ? (D .J .y
O rateurs grecs , ( Hifl. de l'Éloquence. ) pour
mettre de la méthode dans ce difeours , nous partagerons
les orateurs grecs en trois âges, conformé*
ment aux trois âges de l’éloquence d’Athènes.
P r e m i e r A G E .P é r i c l ï s fut proprement le premier
o ra teu r de la Grece, avant lui nul difeours, nul ornement
oratoire.Quelques fophiftes fortis des colonie^
grecques, avec un ftylë fèntentieux, des termes
amphatiques, un ton empoulé,&un amas faftueux
d’hyperboles , éblouirent quelque tems les Grecs.
Les Athéniens frappés du ftyle fleuri & métaphorique
de Gorgias de Léontium, le refpeélerent comme
un enfant des dieux; fes hypallages, fes hyperba*
tes, fes cara&eres lui méritèrent une ftatue d’ot
maffive dans le temple de Delphes. Hyppias d’EIée*
fameux par fa prodigieufe mémoire, étoit comme
l'o r a t eu r commun de toutes les républiques grec*
ques. Périclès, guidé par un génie fupérieur, &
formé par de plus habiles maîtres, vint tout à coup
éclipfer la réputation que ces vains harangueurs
a voient ufurpée , & détromper fes compatriotes i
fes vertus, fes exploits, fon fa voir profond, 6t fe£
rares qualités donnèrent de l’éclat à cette magnifî*
B B b b