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'viendroicnt étranges& fauvages,d’oîi naîtroîent une
grande confufion 6c une infinité d’erreurs» Mais fur
quel fondement veut-on que l’accroiffement des os
de l'oreille changeât la fenfation de l’ouïe ? Les organes
de la vue , du goût, de l’odorat ne croiflent-
ils pas fans déranger fes fenfatiôns ? Et quoique l’ouïe
ne foit pas fufceptible d’un pareil accroiffement,
croit-on que cet organe foit le même dans tous les
hommes ? Cela n’eft pas probable. Chacun entend à
fa façon , comme chacun v o it , fent 6c goûte aufîi
proportionnellement à la ftruôure particulière de
les organes.
Dans les canaux demi - circulaires on rencontre
deux chofes dignes de remarque. i° . Ils font tous
trois de grandeur différente. Aufli l’un s’appelle le
plus grand j le fécond le moyen , 6c le troifieme le
plus petit. Winflow nomme le premier, verticalfu-
périeur ; le fécond, vertical pojlérieur, & le troifieme,
canalfuperieur horifontal. 20. Quoiqu’ils different fou-
vent félon les fujets, ils gardent néanmoins les mêmes
proportions entr’eux , & font toujours fembla-
bles dans un même fujet. Valfalva rend raifon de
tout cela , 6c détermine leurs ufages d’une maniéré
ingénieufe : il croit que comme une partie de
la portion molle du nerf auditif eft fituée dans ces
canaux, ils ont été faits de grandeur différente pour
s’accommoder mieux à toutes les diverfités des tons ;
& quoiqu’il y ait de la différence par rapport à la
longueur & à la groffeur de ces canaux, en les comparant
dans différens fujets, ils font cependant toujours
dans une exaâe conformité en.r'eux dans la
même perfonne , à moins qu’ii n’y ait quelque defaut
ou difcordance dans les organes de l’ouïe. Au
refte , Fabricius avoit établi une infinité de canaux
demi-circulaires ; mais les autres anciens Anatomif-
tes n’en ont reconnu que trois, & il n’y en a jamais
davantage.
Un mot du veftibule : c’eft une cavité irrégulièrement
ronde , décrite par Véfale & Fallope , formée
intérieurement dans l’os pierreux, & voifine du tympan.
On trouve dans le veftibule , i° . la pulpe de
la portion molle du nerf acouftique ; 2°. une liqueur
aqueufe, comme dans le tympan, 6c 30. de l’air qui
du tympan vient dans cet endroit.
Rien n’eft plus admirable que la conftruftion du
limaçon, ou de la coquille fpirale. C ’eft un canal
offeux, conique , qui fait environ deux tours 6c demi
, fuivant une ligne fpirale au-tour d’un cône offeux
, qui par fa pointe le termine à celle du cône.
On trouve dans toute fon étendue l’expanfion des
petits nerfs acouftiques qui font de la derniere déli-
cateffe. L’artifice de* fa conftruûion fait voir que
dans la lame fpirale , qui commence par une bafe
déterminée, 6c finit en un feul point, on peut afli-
gner une infinité de cordes tremblantes également
tendues: ainfi parmi ces cordes, dont le nombre
peut à peine fe compter, il y en aura toujours qui
feront à l’uniffon avec chaque fon, 6c qui par con-
féquent pourront le repréfenter, 6c le porter fans altération
au fenforium commune.
Des nerfs auditifs. Les portions des nerfs auditifs,
ou de la feptieme paire de nerfs , fe diftinguent eu
égard aux divers degrés de leur confiftance, en portion
dure, 6c en portion molle. Les deux portions
fe portent dans le trou auditif interne ; la molle pénétré
dans le labyrinthe par plufieurs petits trous qui
y répondent, & va fe perdre dans les différentes parties
qui le compofent. La portion dure s’infinue dans
l’aqueduc de Fallope , traverfe la glande parotide,
lui donne plufieurs filets, 6c fe partage en deux grof-
fes branches, dont l’une eft fupérieure & l’autre inférieure.
11 eft difficile d’en fuivre le cours.
Les derniers filamens des petits nerfs auditifs,
après avoir fait leurs fondions, 6c s’être diftribués
ORE
par les labyrinthes de V oreille, reviennent - ils ait
cerveau 6c au fenforium commune , conformément
à l’idée d’un chirurgien de Rome , dont on a gravé
dans les lettres du fieur des Noues une figure repré*
fentant le décours de ces nerfs ?
C e chirurgien de Rome, dont l’ouvrage n’a point
été publié, eft Simoncelli. Mais fon confrère Mifti-
chelli a prétendu , d’après lui, que la portion molle
du nerf auditif entre dans le fillon du limaçon, fe
précipite de la pointe dans fa cavité , la pénétré ,
forme dans le veftibule une expanfion pulpeufe, dégénéré
enfuite en filament grêle, entoure les canaux
demi-circulaires ; enfin de l’orifice propre du plus
grand de ces canaux , revient par un trou particulier
dans la cavité du crâne, & ramifié , va fe distribuer
à la dure-mere , à la lurface fupérieure du
cerveau , 6c au-tour de la glande pinéale*
C ’eft dommage que tout cela ne foit qu’un roman*'
Simoncelli &Miftichelli ont pris pour nerf, un vaif-
feau fanguin du limaçon, 6c des canaux demi-circulaires.
Le trou du petit nerf qui retourne dans la cavité
du crâne , eft un trou par lequel le n erf mou fe
rend au veftibule. Le refte de la defeription du chirurgien
des Noues , eft tiré de la diftribution de la
portion dure à la dure-mere, diftribution même que
Simoncelli n’avoit vue qu’une feule fois , de l ’aveu
de Pacchioni 6c de Valfalva.
Que dirons-nous de la communication de la portion
dure du nerfauditif avec les branches de la cin-*
quieme paire qui fe diftribuent aux parties qui fer*
vent à former 6c à modifier la v o ix , d’où naît Pac<
cord qu’il y a entre l’ouïe & la parole ? De la communication
de la fécondé paire vertébrale avec les
nerfs de l’oreille externe, au moyen de quoi on tourne
la tête au moindre bruit ? Enfin de la communication
de ces nerfs avec ceux du coeur & des poumons
, qui fait aufîi qu’on fent les mêmes altérations
dans le pouls & dans la refpiration , félon la
différence des bruits ? Mais on n’eft pas encore d’accord
des effets de ces communications ; c’eft feulement
un fyftème ingénieux pour expliquer les phé-
nomenes de la fympathie qui fe rencontre entre tou-
1 tes les diverfes parties de notre corps.
Des jeux de la nature fur l ’organe de Poule. Cet organe
fi compofé , eft en même tems un de ceux qui
fournit le moins de jeux de la nature; tandis que tous
les autres font imparfaits dans le premier â g e , les
offelets de l'oreille fe trouvent dans les enfans aufli
grands & aufli durs que dans les adultes ; 6c dans
l’enfant de neuf mois, ils ont prefque acquis leur
grandeur , leur forme 6c leur dureté. Le célébré
Ruyfch croit avoir vu une fois dans le fquelette d’un
enfant nouveau-né que ces offelets étoient confufé-
ment attachés enfemble contre l’ordre naturel, 6c
c’eft une obfervation rare.
Il arrive plus fouvent de rencontrer des enfans
qui viennent au monde avec le canal auditif bouché
par une petite membrane ; il faut y porter remede,'
s’il eft poflible , autrement ces enfans auroient le
malheur d’être fourds & muets ; parce que n’entendant
pas parler, ils ne pourroient apprendre aucune
langue. Quand donc cette membrane eft affez en-
dehors pour être apperçue, il convient de la percer
avec un biftouri, ou l’ouvrir avec la lancette par
une incifion cruciale ; l’ouverture étant faite, on introduira
dans la divifion une efpece de tente pour
empêcher qu’elle ne fe réunifie. La cure s’exécute
ainfi facilement ; mais elle eft douloureufe 6c très-
difficile , lorfque cette membrane eft fituée bien
avant dans P oreille, parce qu’il eft prefque impofîï-
ble de percer ou d’enlever la membrane qui caufe la
furdité fans offenfer celle du tympan. Je ne fai point
d’exemple d’opération heureulè dans ce dernier cas.
A u t e u r s , Les anciens anatomiftes n’ont point connu
? ORË
les parties intérieures de P oreille humaine j & j ’en
trouve là raifon, i ° . dans la difficulté de découvrir
les diverfes parties de cet organe , qui font la plû-
part cachées dans des os très-durs ; 20. parce que
cette adminiftration anatomique eft fort embarraf-
fé e , 6c demande d’être variée pour appercevoir tantôt
une partie, tantôt l’autre : 30. parce que ces parties
font très-délicates 6c très-petites. Mais comme
les anatomiftes modernes ont eu plus de fuccès, récapitulons
par ordre de date leurs travaux & leurs
découvertes.
Vifale donna ies vraies figures de deux des offe-
lets internes de P oreille.
Eufiachi a depuis fait connoître le premier la trompe
dont il eft l’inventeur, l’étrier, le mufcle nommé
rn'ufcle d’EuJlachi, la corde du tympan , la portion
molle, &c. Voyeç fon ouvrage de auditûs organis ,
Romæ 1562 -, in 8%
Ingraffias ( Jean-Philippe) mort en iç 80, âgé de
ÿ o ans , affure qu’il a de fon côté découvert à Naples
en 1546, Varier, troifieme offelet de Voreille,
6c qu’il l’a nommé tantôtfeapha , 6c tantôt Vos deltoïde.
Fallope (Gab riel) a rendu dé nouveaux fervices
à l ’anatomie de cette partie. Il a décrit dans fes ob-
fervations, l’étrier, l’aquedûC, les deux fenêtres ,
les canaux demi-circulaires & le limaçon; Il eft mort
à Padoue en 1563 , âgé de 39 ans.
Albertus (Salomon) a le premierdécrit la coquille
de l’oreille dans fon livre intitulé, hifioria plerarunï-
que humani corporis partiüm , "Wïtteb. ï 583 ,in-8°.
Fabricius d’Aquapendens a ajouté peu de chofes à
fes prédéceffeurs. Il en a oublié plufieurs qui appar-
tenoient à la gloire de Fallope, 6c a fait graver
d’affez mauvaifes figures.
CaJferiuS a pris beaucoup de fès devanciers ; il
paroît cependant avoir repréfenté le premier les
mufcles obliques 6c externes du marteau, & d’avoir
tâché de s’inftruire par l’anatomie comparée. Son
hiftoire anatomique deauris auditus organô a été imprimée
pour la première fois à Ferrare en 1600,
fo l. reg. L’auteur eft mort en 1605 , âgé de 60 ans ,
& pendant que fon maître Aquapendens vivoit encore.
Folius (Coeciiius) paffe pour avoir découvert I’a-
pophyfe du marteau ; 6c l’on doit convenir qu’il n’a
pas mal décrit les parties du labyrinthe de Voreille.
Son livre intitulé àurium internarum delineatio, a paru
Venet. 1643 , iri-40.
M. Perault (Claude) a non-feulement traité phy-
fiquement la matière du fon , mais il a décrit encore
avec exaâitude la fabrique de l’organe de l’ouïe. On
ne lui a point rendu toute la juftice qii’il méritoit ;
cependant il n’a rien avancé dans la defeription de
cet organe , qu’après l’avoir vu diftinâement. Ses
figures font belles, 6c faites fur fes propres deffeins.
Je ne loue pas fes explications , parce qu’elles font
fondées fur des fauflës. hy pothefes* Il a précédé M éry
& Duverney dont nous allons parler.
La defeription de Voreille dé l’homme par Méry
Vit le jour à Paris en 16 81 , in-12., avecfig. niais elle
ne renferme rien de nouveau.
Il n’en eft pas de même du traité de Duverney
(Jofeph-Guichard ). Cet habile bomme a le pre*
mier fait connoître parfaitement le mufcle de l ’étrier,
les glandes cérumineufes , lé. limaçon , la portion
molle, les canaux demi-circulaires, 6c plufieurs autres
chofes qu’il a mifes dans tout leur jour. Son ouvrage
a été imprimé à Paris en 1683 , in-i2i C’eft la
bonne édition ; 6c les figures qui font d’une grande
beauté, ont fait defirer la publication de tout ce
qu’il avoit compofé fur les autres fens.
. Shtllammer ( Chriftophorus) a luayec fruit lès auteurs
qui l’ont précédé , & a joint dans fon ouvrage'
ORË
là Phyfique à l’Anatomie ; mais il a fait dans ce dernier
genre quelques fautes groflïeres, ehtr’autres fur
la corde du tambour & les canaux demi-circulaires-.
Son livre intitulé de auditu liber umts, a été publié à
Leyde en 1684, in-8°.
Falfalva , heàlmola en 1666, a fait aufli des mers
veilles fur cette partie. Il a trouvé les petits mufcles
de Voreille, a rétabli la ftrufture & les mufcles delà
trompe , & y en a ajouté un trôifieme nommé le pa-
lato-falpingèe ; il a pris plus exaâement la dimenfioh
des canaux demi-circulaires, & a confidérablement
augmenté la phyfiologie dé Voreille. Il a relevé quelques
fautes de Duverney , & en a fait aufli lui-
même ; tant la ftruâure de cet organe eft délicate 6c
cachée ! La première & la belle édition du traité dé
Valfalva parut Bonon. 1 7 0 4 , in-40. avecfig.
Vieuffens ( Raymond ) a mis au jour fon traité dé
la ftruélure du coeur 6c de Voreille à Touloufe etl
17*4 » t‘T-4°. avec fig. Ce livre eft devenu rare ;
cependant l’auteur, dans fon traité de Voreille, n ’eft
guere que le copifte de Duverney ; fes defcriptions
mêmes font embrouillées, & de plus fes figures font
obfcures & mal gravées.
M. Winjlow ne doit pas craindre un tel reproche}
car on trouve dans fa defeription de Voreille l’ordre ,
la netteté , la précifion 6c i’exattitude qui brillent
par-tout dans fon anatomie.
Cajfebhom ( Joan. Frid ) eft le dernier écrivain qui
ait fait un traité exprès fur Voreille de l’homme. II eft
imprimé en latin , Francofi i j$ 4 , in-40. avec fig-,
c ’eft un bon recueil, mais qui renferme peu de chofes
au-delà des découvertes de Duverney & de Valfalvai
A tous ces auteurs, on joindra les obfervations dé
Morgagni, de Manfredi , de Santorini & autres *
répandues dans les mémoires de l’académ. des Sciences,
& dans lesTranfaftions philofophiques. Enfin
les curieux fa vent que Ruyfch * Albinus, Nicholls
Ont fait de leur côté de belles préparations &injec*
tions de diverfes parties de Vorèillé.
Quelques anatomiftes, comme M. Hunaüld* ont
ëffayé dé faciliter la connoiffance de l ’organe dé
l’ouïe en taillant des coupes d’os de grandeur dou^
b le, triple ou quatruple de toutes lés parties de Vo-
rèille. M. Martiani, médecin ficilien, eut l’honneur
de préfenter en 1743 à l’académie des Sciences de
femblables coupes artiftement fculptées en bois de
t illeu l, au nombre de fep t , qu’on peut voir au cabinet
du roi , & dont M. Daubanton a donné l’explication
& les figures dans le troifiemé tome de l’explication
de cé cabinet.
En un mot, les modernes n’ont rien oublié pour
nous procurer des connoiffances dé l’organe dé
l’ouïe ; mais s’ils font parvenus à exciter notre admiration
fur fon artifice , ils n’ont pas été affez heureux
poiir le dévoiler un peu cofriplettement, 6c
félon toute apparence On n’y parviendra jamais. ( Le
Chevalier DE J AU COURTE)
O reille , lés maladies chirurgicales de Voreillè
ne font pas èti grand nombre, elles méritent cependant
une attention particulière : fi elles étoient plus
nombreufes, il s’élèveroit sûrement une efpece dé
chirurgiens pour les traiter exclufivement * comme
les maladies dés yeux. Le conduit de Voreille peut
être bouché par vice de conformation par une membrane.
Si cètte cloifon eft profondément fituée dans
le conduit auditif, il faut de la prudence pour y
porter l’inftrüment tranchant. Si elle eft füperficiel-
le , on la fend fans grand inconvénient* Il faut faire
l’incifion cruciale , & mettre dans le conduit uné
tente de charpie pour écarter les lambeaux de la
membrane , julqu’à ce que la confolidaiion des plaies
foit faite.
Il arrive quelquefois à là fuite des abfcès de l’o-
reille f des excroiffançes charnues qu’il faut détruire«