tfon propre poids & par la force de fon réffort vers
'l’efpace abandonné par la matière qui s’élève , &
ramener ainfi vers Y-orage les mêmes nuages qu’on
avoit vu s’en écarter un peu auparavant. C’eft ainfi
■ que l’air écarté par l’aétion du foleil revient à l’endroit
même d’où il a été chaffé aufli-tôt que le foleil
a pafle outre : encore dans le cas propofé, y a-t-il,
comme l’on v o i t , une caufe particulière qui doit
hâter le retour de l’a ir , puifque le nuage qui s’élève
laifle après lui un efpace propre à la recevoir , au
lieu que le foleil n’en laifle pointi. ' V
Pour rendre encore plus fenfible ce que je viens
de dire , & ne laitier aucun doute fur la caufe qui
produit ce jeu fingnlier dans les nuages qui fe trouvent
à portée d’un orage qui fe forme , je fuppofe
qu’on'mette dans un vale différentes liqueurs moins
pelantes lés unes que les autres , par exemple, du
mercure , de l’eau & de l’huile, & pour rapprocher
cette fuppofition du cas propofé autant qu’il eft pof-
fible , j’imagine ce vafe extrêmement étendu & ces
différentes liqueurs aufli élaftiques que l’air. Si on
jette dans ce valè un folide d’un certain volume &
d ’une pefanteur fpccifique égale à celle de l’eau, il
eft évident qu’il doit s’arrêter dans l’eau entre l’huiîe
ôc le mercure , & qu’il doit s’y tenir en équilibre
tandis qu’il ne furviendra aucun changement dans
fa mafle , ni dans fon volume : mais fi l’on fuppofe
qu’il fe fafle dans ce folide une fermentation qui le
dilate,il arrivera en premier lieu que fon expanfion
jointe au mouvement de chaleur qui l’accompagne
écartera l’eau environnante, & la pouffera de tous
côtés vers les parois du v a fe , enforte que fi cette
eau fe trouve chargée, de quelques corpufcules , on
les verra s’éloigner peu-à-peu en s’approchant des
bords: il arrivera en fécond lieu que ce folide, enfe
dilatant, s’élèvera hors de l’eau & paffera dans l’huile,
qu’il, doit également pouffer vers les parois du vafe
, de même que les corps étrangers dont l’huile fe
trouvera chargée. Enfin il arrivera qu’à mefure que
ce folide paflera l’eau dans l ’huile ; l ’eau qui d’abord
avoit été pouflee vers les bords, doit retomber par
fon propre poids vers l’efpace que le folide laifle
dans l’eau en montant dans l’huile, & ramener ainfi
au-deffous du folide les mêmes corpufcules qu’on
avoit vu un peu auparavant s ’écarter vers les bords;
enforte que dans le même tems on verra ceux-ci
s ’approcher du folide, & ceux quinagent dans l’huile
s’en éloigner jufqu’à ce qu’enfin le folide paffant de
l ’huile dans l’air , ils feront ramenés à leur tour vers
l ’efpaçe que le folide laiffera dans l’huile en montant
dans l’air; Ceci eft palpable, & il éft aifé d’en faire
l ’application aux différens nuages qui fe trouvent
dans les différens couches d’air qu’ un orage qui fe
forme doit traverfer en s’élevant.
Mais ce n’eft pas affez d’avoir démontré que les
nuages voifins doivent être attirés par ce mouvement
de bas-en-haut de la matière qui fermente , il
faut encore prouver que les vapeurs & les exhalai-
fons qui ne forment point de nuage, &qui font fi
répandues dans l’air quelles ne tombent point fous
les fens, doivent aufli fe porter vers cet endroit &
fuivre la matière qui s’élève. Or rien de plus aifé à
faire que cette preuve.
Car premièrement, tout mouvement de chaleur
excité dans l’a ir , procure l’élévation des corpufcu-
ies qu’il foutient. O r la chaleur de la fermentation
fe répand fans doute dans cette couche d’air, qui eft
immédiatement au-deffous de la matière qui fermente.
Donc les vapeurs & les exhalaifons qui s’y
trouvent doivent monter plus haut, & fe joindre à
celles qui fermentent.
En fécond lieu , cette première couche d’air ne
peut fe débarraffer de tous les corps étrangers dont
çjie-étoit chargée, & que la fermentation lui enleye,
qu’en même tems elle n’attire une partie de ceux
qui fe trouvent répandus dans là couche inférieure,
lefquels à mefure qu’ils y arriveront feront élevés
plus haut comme les premiers, & iront tout comme
eux grofîir le corps de Yorage, & par-là même contribuer
au progrès, tant de la fermentation que de
cette efpece de vertu attra âive, qui en eft une
fuite.
De forte que , félon ces principes , il peut arriver
ce que l’on voit fouvent, que quand bien même
il n’y aura point ou prefque point de nuages qui aillent
fe joindre à celui qui commence à Fermenter,
il ne laifle pas que de s’étendre & de groflir confi-
dérablement au moyen de cette efpece d’empire
qu’il exerce fur les vapeurs & les exhalaifons répandues
autour de lui,en les attirant de toutes parts,
& en les allant chercher jufque vers la furface de la
terre & dans la terre même ; car on comprend que
de proche en proche l’attraâion peut aller jufque-
l à , fur-tout quand il régné lin grand calme dans
l’a ir , que la terre eft humide & que le foleil dardant
fes rayons fur cet endroit de la terre qui fe
trouve direftement fous Yorage, en détache des parties
déjà ébranlées par l’humidité , & facilite leur
élévation en les atténuant : aufli obferve-t-on constamment
que les orages deviennent plus confidéra-
bles & même plus dangereux toutes les fois que le
foleil paroît pendant qu’ils fe forment, comme aufli
qu’ils font fouvent précédés d’une rofée abondante
qui tombe pendant la nuit , ou d’un brouillard ou
petite pluie qui tombe le matin.
Au refte , j’ai dit ci-deflùs que les nuages pouffés
vers le lieu abandonné par ceux que la fermentation
éleve , doivent s’élever aufli & fe joindre à
eux. J’ajouterai maintenant que cela doit arriver ,
quelle que foit leur denfité ou leur pefanteur fpécifique.
Car j parmi tous ces corpufcules & toutes ces
parties de différens mixtes dont je viens d’expliquer
l’élévation , il y en a fans doute que l’on peut regarder
comme des véritables fermens ; or ces fer-
mens ne pouvant s’élever jufqu’aux nuages fupé-
rieurs qui les attirent lans rencontrer ceux qui s’af-
femblent au-deffous, les pénétreront, les feront fermenter
, les dilateront & les feront monter jufqu’à
ce qu’ils fe joignent aux premiers.
Voilà une explication bien fimpie de la maniéré
dont les orages fe forment : celle que l’on va donner
du vent impétueux qui fe fait fentir ordinairement
loçfqu’ils commencent à fondre, ne le fera pas
moins.
Vm t. Pendant que la fermentation éleve & foutient
la matière qui fermente, il eft évident que
ceux qui fe trouvent fous Yorage ne doivent fentir
aucun v en t , à moins que quelque caufe particulière
& indépendante de Yorage ne leur en procure,
puifqu’alors tout le mouvement qui régné dans l’air
fe dirige vers le lieu abandonné par la matière qui
s’élève. Mais voyons ce qui doit arriver lorfque la
fermentation parvenue au période commence enfin
à diminuer.
D ’abord fi nous fuppofons qu’elle diminue également
& dans la même proportion dans toutes les
parties de Yorage, il arrivera en premier lieu que le
corps de Yorage diminuera de volume , & que cette
diminution fera parfaitement égale dans toutes fes
parties : il arrivera en fécond lieu que la réfiftance
que le corps de Yorage oppofoit à l’air environnant,
diminuera également de tous côtés , de façon que le
reffort de cet air environnant doit fe déployer également
fur toutes fes parties. Il y aura donc deux
caufes qui concourent pour pouffer Yorage perpendiculairement
vers la terre, & pour le tenir tou jours
parallèle à lui-même pendant fa chute ; l’air intermédiaire
doit donc être preffé de - haut en-bas avec
une
tille force exaûement proportionnée à la vîtefle
avec laquelle Yorage defcend, c’eft-à-dire à la diminution
plus ou moins prompte de la fermentation
qui le foutient. Mais quel fera l’effet de cette pref-
fion ? & que doit devenir cette grande colonne d’air
ainfi pouffée contre la furface de la terre qu’elle
ne peut pénétrer ? La réponfe eft aifée. Elle doit
s’échapper de tous côtés en fe répandant du centre
à la circonférence de Yorage. ; enforte qu’on doit fe
repréfenter cette ligne qui tombe du centre de gravité
de Yorage perpendiculairement fur la furface de
la terre, comme environnée dans toute fa longueur
de petits, filets de vent coulant horifontalement juf-
qûe par-delà les extrémités de Yorage, & fe repliant
enfuite vers l’efpace que Yorage laifle après lui. Il
n’y aura donc point de vent au pié de cette ligne
(non plus que dans toute fa longueur) ; & celui qui
foufflera tout proche ne fera prefque rien , &c ne
pourra devenir fenfible qu’à une certaine diftance ,
comme vers les extrémités , & tout autour de cet
endroit de la terre fur lequel Yorage defcend;.
Mais il eft moralement impoflible que la fermentation
diminue en même tems & dans la même proportion
dans toutes les parties de:l’o rbe, ainfi qu’on
vient de le fuppofer ; il faudroit pour cela que les
fermens euffent été diftribués par-tout également,
qu’ils euffent par-tout la même force & la même
a â iv ité , & que la matière qui fermente fût par-tout
également difpofée & fufceptible du même degré
de fermentation dans le même tems. Ainfi ce cas-là
doit prefque être regardé comme un cas chimérique.
^ Suppofons donc' ce qui doit prefque toujours arriver
, que la fermentation s’affoibliffe fenfiblement
dans une partie de Yorage, tandis qu’elle fe foutient
ou qu’elle diminue beaucoup moins dans les autres :
alprs il eft évident non-feulement que le corps de
Yorage doit faire un mouvement vers cet endroit
devenu plus foible, mais encore que toute l’aftion
de l’air environnant, qui jufque-là a été tellement
dirigée vers le centre de Yorage, qu’elle l’a tenu immobile
en, le prefl’ant également de tous côtés, doit
maintenant fuivre ce centre qui s’échappe, & fe déployer
de ce côté avec d’autant plus de force, que
la réfiftance de la partie de Yorage qui s’aftbiblit, diminue
avec plus de promptitude.
Et ce qui doit donner lieu à cet air de fe jettér
du même côté avec encore plus de force, & d’accélérer
d’autant plus le mouvement progreflif de Yorage
, .c’eft que la fermentation ne peut s’affoiblir
dans une de fes parties faps que cet affoibliffement
fe communique en quelque façon à tout le corps de
Yorage ; je m’explique. La partie qui s’affoiblit ne
peut defeendre fans entraîner tout Yorage , qui doit
defeendre aufli en s’inclinant fur elle. Donc la fermentation
doit aufli s’affoiblir dans le corps d e l’o-
rage ; la conféquence eft évidente , car il ne peut
defeendre fans prendre la place d’un volume d’air
plus pefant ; il doit donc devenir lui-même plus pelant.
Donc fon volume doit diminuer ; ce qui ne
peut fe faire fans que la fermentation diminue aufli
dans la même proportion : de forte que ces deux
chofes , favoir la diminution de la fermentation &
la defeente de la matière qui fermente, feront la
caufe & l’effet l’une de l’autre en différens endroits
de Yorage.
Cependant comme Yorage n’eft forcé de defeendre
qu’en s’inclinant fur la partie foible , la diminution
de la fermentation oceafionnée par cette defeente,
ne doit pas être égale dans toutes fes parties,
mais plus ou moins confidérable dans chacune ,.fe-
. n 3lî e^e fe trouve plus ou moins proche de la partie
foible qui entraîne tout. On voit même que le
progrès que cét affoibliffement fera dans cette par-
Torne X I .
tie, doit fe communiquer aux autres de la même
maniéré & avec la même.gradation. Voye^ ci-après
pag. J'uiv. phénom. 3.
Il y aura donc cette différence du premier cas à
celui-ci, que dans le premier le corps de Yorage doir
defeendre dire&ement vers le centre de la terre ,
au lieu que^ dans le fécond il doit plonger oblique*
ment eqtraîné par la partie foible qui eft la première
à defeendre , & force d’obéir au mouvement
que lui imprime l’aftion de l’air, qui lé fuit & le
poufle devant lu i, ainfi qu’on vient d’expliquer.
Ce n’eft donc plus directement vers la terre que
fa chute doit pouffer l’air intermédiaire , comme
dans le cas precedent, mais obliquement & fuivant
la direChon de fa ligne de route. Or la furface de lu
terre ne fauroit empêcher l’effet de cette preffion ,
qui dans ce cas doit être fuivie d’un vent plus ou
moins impétueux , félon que le mouvement pro-
greflif de Yorage e& plus ou moins hâte parl’affoi-
bliffement de la fermentation, & par la facilité que
cet affoibliffement trouve à fe communiquer d’une
extrémité de Yorage à l’autre.
Ouragans. C’eft la direction oblique de ce vent
ainfi excite par latranflation précipitée du corps
de l’o rb e, qui eft caufe de ces tourbillons que l’on
voit quelquefois arracher des arbres, renverfer des
maifons , &c. car cette direction étant compofée de
l’horifontale & de la perpendiculaire , la furface de
la terre eft entièrement oppofée à l’une ; & les montagnes
, les edificés , les forêts, &c. s ’oppofent à
l’autre, Sc même en différens fens & de différentes
façons , félon leur différente pofition & la differente
inclinaifon de leurs furfaces , par rapport au mon-
vement dire&du vent que Yorage poufle devant lui.
Ainfi., par exemple , différens ruiffeaux de vent réfléchis
en arriéré & du haut en bas par différentes
montagnes, différens édifices , &c. différemment fi-
tués oc différemment inclinés , peuvent concourir
en un même point comme en un foyer. Là ils feront
croifés par d’autres ruiffeaux réfléchis en avant ôc
de bas en haut par la furface de la terre, & les uns
& les autres feront encore traverfés par des troifie-
mes qui n’ayant point rencontré d’obftacle, ontfui-
vijulques-là leur première détermination.
Qn voit affez que le concours , l’oppofition, la
differente inclinaifon de tous ces ruiffeaux , les uns
à l’egard des autres, peut produire dans i’air qui
les compofe, un mouvement fpiral ou circulaire
extrêmement violent, & que fi quelque obftacle*
par exemple, un arbre fe trouve dans l’enceinte de
ce tourbillon, il en deviendra bientôt le centre, 6c
qu’il fera arraché avec d’autant plus de facilité que
les branches & fon feuillage donneront plus de prife
au vent qui roule tout autour avec une rapidité inconcevable.
Grêle. Ce phénomène, tout étrange qu’il eft, I'eft
cependant moins que celui qu’à jufte titre on peut
appeller le fléau de nos. contrées ; on voit bien que
c’eft de. la grêle qu’il eft .ici queftion. En effet, il
n’eft pas mal-aifé de comprendre que plufieurs cou-
rans d’air , qui fe choquant les uns aux autres, s’empêchent
mutuellement de continuer leur mouvement
en ligne droite , & par-là même s’obligent à
tourner circulairement autour d’un centre commun;
peuvent envelopper un arbre & le déraciner. Mais
comment concevoir que des vapeurs & des exhalai-
fo'ns fufpendues.fur nos têtes , & échauffées à un
tel point, que le lieu d’où,elles fortent nous paroît
bien fouvent tout en feu, puiflent fe convertir fit*
birement en pièces de glace plus compactes & plus
folides que celle que nous voyons fe former durant
l’hiver,le plus rude ? On dira fans doute que ce qui
glace & durcit ainfi les parties liquides qui 1e détachent
d’un orage, ôc le convertit en grêle, c’eft la
Z' z 2