O B S
■ cin tant mieux ne fera attention qu’aux fymptômes
qui peuvent flatter l’efpérance ; les lignes fâcheux
prendront chez lui une lignification avantageufe,
& la maladie fera toujours douce & favorable. Il y
en a qui regardant plulieurs lignes comme peu mte-
reffans, négligeront de les confulter; celui-ci ne
tâtera pas le pouls ; celui-là ne regardera pas la lan-
oue : l’un trop délicat dédaignera d’ailer jetter les
yeux fur les excrémens, l’antre n’ajoutera pas foi à
l’ouromantie ou n’aura pas la commodité d examiner
les urines , & quelques-uns trop preffés ne jetteront
qu’un coup d’oeil en paffant fans entrer dans le
moindre détail ; il y en a d’autres qui confondront
le s Agnes les plus fignificatifs avec ceux qui ne di-
fent n en , pafferont rapidement fur les premiers, &
s’étendront minutieufement fur ce dont on n a que
faire; comme ce médecin allemand, qui regardant
le mouvement comme un obftacle à la crile, qui,
fuivant lu i, demande un repos abfolu de tous les
membres & une extrême tranquillité, avoit foin
d’obferver fcrupuleufement toutes les fois que fon
malade remuoit les piés ou les mains ; 6c ainfi pour
bien v o ir , c’eft-à-dire tout ce qu’il faut comme il
fau t, & pas plus qu’il ne faut, il faut des lumières,
de la fagacité, di/génie, il faut être inftruir ,affidu
au lit dés malades, pénétrant, defintéreflé, dépouillé
de toute idée théorique , de préjugé, & de
paflion.
z°. Pour bien raconter ce qu’on a vu ; a ces qualités
, qui font encore pour la plupart neceffaires
i c i , il faut joindre beauconp de candeur & de bonne
fo i; le ftyle doit être Ample-, le détail circonftancie
fans être minutieux ; les faits expofés dans l’ordre
qu’ ils ont fu iv i, de la maniéré dont ils fe font fuc-
cédés, fans raifonnement , fans théorie. Les mauvais
fuccès doivent être décrits avec la même fin-
cérité que les heureux, même dans le cas ^ou ils
pourroient être attribués à l’inopportunité d’un re-
mede ; ces cas font les plus inftru&ifs. Que la candeur
de Sydenham eft admirable, lorl'qu’il d it ,
qu’enthoufiaftfié de l’efficacité du fy op de nerprun
dans .l’hydropifle , il voulut fe fervir de ce remede
dans tous les cas qui fe préfentoient ; qu’il l’ordon-
na à une dame hydropique dont la maladie empiroit
toujours ; que laffée d’un remede dont elle éprou-
voit de fi mauvais effets , elle le congédia, appella
un autre médecin , qui fuivant une route oppofée ,
vint à-bout de la guérir en peu de tems. Ainfi que
l’intérêt ou la paffion ne guident jamais te plume du
médecin obfervateur, qu’il les faffe plutôt céder à
la vérité ; & fur-tout s’il n’a pas le courage de la
publier, qu’il la laiffe plutôt enl'evelie dans un profond
filence , comme ces médecins qui rougiiient
d’avouer qu’il leur eft mort quelque malade entre
les mains ; mais qu’ils fe gardent bien de la défigurer,
de transformer en fuccès glorieux les luîtes
les plus funeftes, à l’exemple de ces charlatans ,
qui n’ayant jamais la vérité pour eu x , font obligés
de recourir au menfonge pour accréditer un remede
fouvent dangereux, & pour acquérir une réputation
qui fera pernicieufe. A cet obftacle qui s’oppoie
à la fidélité des observateurs, on peut en ajopter un
autre encore très-fréquent, c eft que la plupart ne
font des obfervations que pour-confirmer quelque
idée ,quelqu’opinion^ quelque decouverte, 6c alors
ou ils voyent mal & l racontent de bonne foi;® ou
ce qui eft le plus ordinaire , ils détournent 1 obler-
vation en leur faveur, ils l’interpretent à leur fan-
ta ifie, & arrangent de façon qu’il paroît que le lyi-
tème a plutôt iervi à créer l’oblervation, que lob
fervation n’a été faite pour favorifer le lyftème.
C ’eft pour cela qu’il nous parvient peu d oblerva-
tiohs exactes , & que pendant plus de vingt fiecles
à. peine pourroit-on compter huit ou dix médecins
4>bj'tryauursi
O,B S
Hipocrate a été le premier & le meilleur de'
tous les médecins obfervateurs ; nous n’héfitons pas
à le propofer pour modèle à quiconque veut fuivre
une femblable route , c’eft-à-dire, s’adonner à la
partie de la médecine la plus fûre, la plus utile 6c
la plus fatisfaifante. Ses ouvrages annoncent à chaque
ligne fon génie obfervateur ; peu de raifonnement
& beaucoup de faits , voilà ce qu’ils renferment.
Ses livres d’épidémie font un morceau très-
précieux & unique en ce genre : il commence par
donner une hiftoire fidele des failons , des variations
qu’il y a eu , des changemens dans 1 air » les
météores , &c. Il paffe au détail des maladies differentes
ou analogues qui ont régné : il vient enfin
à la defeription de chaque maladie, telle qùe chaque
malade en particulier l’a éprouvé ; c’eft-là fur-tout
qu’il eft inimitable. Quand on lit ces hiftoires , on
fe croit tranfporté au lit des malades ; on croit voir
les fymptômes qu’il détaille ; il raconte Amplement,
fans y mêler rien d’étranger ; & ces narrations Amples
, fideles , qui , dénuées de tout ornement, pa-
roiffent devoir être féches , ennuyeufes, ont un
attrait infini, captivent le leCteur , 1 occupent &
l’inftruifent fans le laffer , fans lui infpirer le moindre
dé°out. Il n’a point honte de terminer fouvent
fes obfervations par ces mots fi injuftement critiqués,
etTrtdetn , il ç/l mort ; on voit là une candeur , une
bonne foi qu’on ne fçauroit affez louer. Que je l’ad*
mire auffi lorfqu’il avoue fes erreurs , lorfqu’il dit,
qu’ayant confondu la future du crâne avec une
fente, il fit trépaner mal-à-propos un homme ! A quel
point de certitude auroit été porté la médecine , fi
tous les médecins l’avoient imité ? Que les médecins
mérireroient bien ce qu’on dit affez mal-à-propos
d’eu x, qu’ils font les hommes qui approchent le plus
de la divinité , en confervant la vie 6c rétabliflant
la fanté ! Que la médecine me paroît belle quand
je la vois dans fes écrits ; mais que je reviens de
cette bonne opinion quand je jette les yeux fur la
maniéré dont on la pratique aujourd’h u i, fur les
baffeffes auxquels on a recours, fur le charlatan!fine
qui devient dominant, fur les morts qui, . . . . Mais
tirons le rideau fur un fpeétacle auffi révoltant.
Hippocrate a principalement obfervé la maladie
laiffée à elle-même, & il nous a laiffe tirer cette
heureufe conféquence, donc la maladie fe guérit fouvent
parles feuls efforts delà nature. Nous ne diffi-
mulerons cependant pas que ce genre d obfervations
, quelqu’avantage qu il ait apporte enluite,
a été quelquefois pernicieux aux malades fur qui
il les faifoit. On peut auffi reprocher à Hippocrate
qu’il a un peu trop négligé l’anatomie & lès obfervations
cadavériques. Galien , fon illuftre commentateur
, a été auffi très-bon obfervateur ; mais
il a trop donné dans la théorie , & fes obfervations
s’en reffentent. Parmi les médecins qui ont marché
fur fes traces, on peut compter les Aretée , les
Baillou , les Duret , les Baglivi, les Sydenham.
Riviere, Ferael , Sennert mériteroient auffi à quelques
égards d’être mis dans cette claffe. Sydenham
a été appellé avec raifon l’Hippocrate anglois ; il
a comme ce divin légiflateur, vu exactement 6c
décrit avec beaucoup de fimplicité & de naïveté ; il
a eu la candeur d’avouer que dans les épidémies ,
les premiers malades qui étoient confies a fes foins,
couroient un grand danger , qu’ils étoient immoles
ou à la force de la maladie, ou à l’irrégularité de
fa pratique. Il diffère d’Hippocrate, en ce qu’il
nous a fur-tout fait connoïrre ce que peut l’art d’accord
à la nature dans le traitement des maladies ;
mais on peut lui paffer d’avoir prétendu dans la
pluréfie avoir en fon pouvoir la matière morbifique
par la faignée, & de regarder le trou fait au bras
par la lancette , comme très propre à fuppléer la
DBS
trachée artere & à en faire la fon&ïon, Sydënh.
opér. fecl. VI. cap. iv. On pourroit mettre au même
rang quelques médecins eftimables qui fie font appliqués
à des obfervations particulières, à confta-
ter la valeur de certains lignes, à en déterminer
la lignification, à les claffer , 6 c. De ce nombre
font Profper Alpin; Bellini pour les urines ; Solano,
Nihell 6c Bordeu pour le pouls, &c.
On voit par-là combien le nombre des médecins
obfervateurs eft petit; cependant la flatterie, l’abus,
l ’ignorance avoient avili ce titre honorable en le
prodiguant indifféremment à l’ignorant empirique ,
au praticien routinier, au fyftèmatique préoccupé ,
au compilateur d?obfervations , au deferipteur de
maladie, &c. mais on n’eft pas obfervateur pour
avoir inféré deux ou trois obfervations dans quelques
journaux, colledions ou mémoires d’academie ;
pour avoir raffemblé, abrégé 6c défiguré des obfervations
, 6c en avoir compofé des fuites de volumes
fans choix 6c des gros in folio. On n’eft pas non
plus obfervateur , parce qu’on a vu bien des malades
; il faut voir des maladies. On l’eft encore moins
quand on n’a vu ni l’un ni l’autre, quoiqu’on donne
des delcriptions fort méthodiques ; c’eft ce qui eft
arrivé au fameux Boerhaave, qui a compote fes
aphorifmes dans un tems oit quelques mauvais fuccès
lui avoient ôté la confiance du public, & l’avoient
relegué.dans fon cabinet: il lui eft arrivé auffi
de décrire les maladies , plutôt comme il imaginoit
qu’elles dévoient être, que comme elles étoient en
effet. De-là cette divifion multipliée à l’infini, ces
réglés toujours générales, & jamais des paiticulari-
tés: de-là auffi cette grande méthode à claffer les
maladies, à y rapporter toutes les caufies avec une
extrême facilité, cet ordre fi bien fioutenu dans
cet ouvrage, qui décele toujours le travail du cabinet
, 6c qui eft fi différent de l’irrégularité qu’on
obferve au lit du malade, qui eft fi bien peinte dans
les ouvrages d’Hippocrate & de Sydenham, 6c dont
la defeription affiche 6c caraCterife infailliblement le
médecin obfervateur. (/«)
OBSERVATIONS CÉLESTES, (Jfiron.pratiq.)
font les obfervations des phénomènes des corps
céleftes faites avec lesinftrumens d’Afironomic, afin
de déterminer les fituations, les diftances, les mou-
vemens, &c. de ces corps.
Les obfervations fe font avec différens inftrumens,
dont les principaux font le télefeope, le quart de cerc
l e , l’inftrument des paffages, le feCteur, la machine
paralla&ique, &c. Voye[ ces mots, voyer auffi
A s t r o n o m i q u e & A s t r o n o m i e .
Les obfervations faites de jour ont cet avantage
que les fils du micromètre qui font placés au foyer
de l’objeôif du télefeope, s’apperçoivent fans aucun
fecours ; au lieu que dans celles qu’on fait la nuit,
il faut les éclairer.
Pour y parvenir on fe fert d’une lumière dont
on fait tomber obliquement les rayons fui l’object
if , afin que la fumée n’interprete pas ceux de l’af-
tre qu’on obferve , & lorlqu’on en a la commodité,
on fait une ouverture à la lunette auprès du
foyer de l’objc&if, 6c c’eft alors vis-à-vis de cette
ouverture qu’on place la lumière afin d’éclairer les
fils.
M. de la Hire, par un moyen fort fimplev, a
beaucoup perfectionné la première de ces deux
méthodes: il veut qu’on couvre le bout du tube
vers l’objeftif d’une pièce de gafe ou de crepe fin
de fioye bianche, avec cette leule précaution , il
fuffit de placer le flambeau à une bonne diltance
du tube pour rendre vifible les fils du micromètre.
Les obfervations du foleil demandent abfolument
qu’on place entre l’oeil 6c l’oculaire du télelcope,
T om e X l %
O B S ftfi
Un verre tiôirci par la fumée d’une chandelle OU
d une lampe, afin d’inrercepter par ce moyen la
plus grande partie des rayons du foleil qui trou*
bleroient la vue 6c endommageroient l’oeil.
Les obfervations aftrOnomiques fie font ordinairement
avec des lunettes à deux verres qui renver-
fent les- objets; parce qu’il importe peu pour l’af*
tronomie que les aftres foient renverfés, & qu’on
gagne beaucoup à n’avoir que deux verres.
On peut obfierver les corps céleftes dans toute
l’étendue du ciel vifible ; mais on diftingue ordinairement
les obfervations en deux fortes , celles
qui font faites à leur paflâge par le méridien , ou
à leur paffage dans les autres verticaux. Voyc^ M é r
i d i e n & V e r t i c a l .
Les obfervations des anciens étoient beaucoup
moins existes que les nôtres , faute d’inftrümenS
fuffifans 6c convenables. L’invention du télefeope ,
l’application de la lunette ou quart de cercle , ôc
celle du micromètre à la lunette ; enfin la perfection
de l’horlogerie pour la mefure du tems, ont
rendu h-s obfervations aftronomiqucs modernes d’une
precifion qui lemble ne laiffer plus rien à defirer.
Poyei M i c r o m è t r e , H o r l o g e , P e n d u l e ,
O b s e r v a t i o n , f. f . en termes de mer, fign'fie
Faction de prendre la hauteur méridienne du foleil,
d’une étoile , & principalement du foleil , afin de
déterminer la latitude. Foye^ H a u t e u r , M é r i d
i e n n e & L a t i t u d e .
Trouver la latitude par l’obfervation de la hauteur
méridienne , s’appelle chez les marins faire
l'obfervation.
O b s e r v a t i o n , (Gram. Phyfîq. Méd.) c’eft l’attention
de l’ame tournée vers les objets qu’offre la
nature. L ’expérience eft cette même attention dirigée
aux phénomènes produits par l’art. Ainfi,
l’on doit comprendre fous le nom générique â’obfer-
vation l’examen de tous les effets naturels, non-feulement
de ceux qui fc préfentent d’abord, 6c fans intermède
à la vue ; mais encore de ceux qu’on né
pourroit découvrir fans la main de l’ouvrier , pourvu
que cette main ne les ait point changés, altérés,
défigures. Le travail neceffaire pour parvenir jufqu’à
une mine , n’empêche pas que l’examen qu’on fait
de l’arrangement des métaux qu’on y trouve , de
leur fituation, de leur quantité , de leur couleur ,
&c. ne foit une Ample obfervation ; c’eft auffi par Vob-
fervation qu’on connoît la géographie inférieure ,
qu’on fait le nombre, la fituation, la nature des couches
de la terre, quoiqu’on foit obhgé de recourir à
des inftrumens pour la creuler 6c pour le mettre en.
état de voir ; on ne doit point regarder comme expérience
les ouvertures des cadavres , les différions
des plantes , des animaux , 6c certaines décompofi-
tions , oudivifions méchaniquesdes fubftances minérales
qu’on eft obligé de faire pour pouvoir nbfcrver
les parties qui entrent dans leur compolmon. Les
lunettes des Aftronomes , la loupe du Natinalifie ,
le microfcope du Phyficien n’empêchent p -s que les
connoiflances qu’on acquiert par ce moyen ne loient
exactement le produit de l'obfervation. toutes ces
préparations, ces inftrumensn'e fervent qu’à rendre
plus lenfibles les différens objets A*obfervation , emporter
les obftacles qui empêchoient de les apper-
cevoir , ou à percer le voile qui les cachoit ; mais il
n’en réfulte aucun changement, pas la moindre altération
dans la nature de l’objet obfervé ; il ne laiffe
pas de paroître tel qu’il eft ; 6c c’eft principalement
en cela que l’obfervation diffère de Vexpérience qui
décompole & combine, & donne par-là naiffance
à des phénomènes biens différens de ceux que la nature
préfente; ainfi, par exemple, fi lorfqu’on a ouvert
une mine , le chimifte prend un morceau de
R r ij