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par Henri Etienne, fous le nom de Poefis philofopluca.
j] fout lire çiufli au fujet à!Orphée la Diflèrtation
d’André - Chriftieu Efchenbach, intitulée Epignejts
de poejî;, ac phiLofophiâ orphied, 6c imprimée à Nu-
rembeïiig en 170 1 , i/2-4°* .
Le célébré Cudwérjh dans Ion ouvrage anglois
du fyllème intelle&uel , a de Ion côté traité afl'ez
au long 6c fort bien tout ce qui regarde Orphée ;
voyez enfin le Recueil de Vacad. des Infcript. tom. X .
& X V I . in-40. . , • ,
Je n’ignore pas que quelques littérateurs ont révoqué
en doute, fi Orphée a jamais exifté. pour moi
je n’imagine pas comment Pindare, Euripide, Arifto-
phane, Platon, tous écrivains d une autorité relpec-
table, auxquels je puis ajouter Ifocrate, Paufanias,
& plufieu.rs autres s’accordent à citer un poète, un
auteur de religion, un fondateur de feéte ; & que ce
poète,cet auteur de religion, ce fondateur de fe&e,
foit un perfonnage imaginaire. Hérodpte.aprèsHo-
merè & Héfiode, nous parle d'Orphée comme d’un
perfonnage très-- réel. Diodore nous apprend qu’il
voyagea en Egypte, qu’il en apporta dans la Grece
tout ce quil’y rendit fi fameux dans la fuite, la théologie
, la poëfie, la mufique ; 6c que fur le plan des
myfteres égyptiens d’Ifis 6c d’Oliris, il inllitua à
Athènes les orgies de Bacchus& de Gérés, connues
fous le nom de dyonyfiaques 6c Üélèufiennes. Pytha-
«ore fait mention des ouvrages d'Orphée. Epigenes
que Pline cite avec éloge, Epigenes entre autres les
avoit lus ; tous les anciens enfin attellent d’une voix
unanime qu’Orphée a exilte. j | .
Ariftote feroit peut-être le feul qui en eut fait un
perfonnage imaginaire., s’il falloit prendre au fens
littéral ce paflàge de Cicéron : Orpheum poetam docet
Ariftoteles nunquam fyi/e. Mais outre que l’autorité
Ariftote ne peut rien ici contre une foule de témoins
dont la plupart lui font antérieurs ; le même Ariftote,
dans un de fes ouvrages qui s’ell perdu, re-
eonnoifioit qu’il avoit exillé un Orphée. Ainfi, Iorf-
qu’il l’a nié quelque part ( car Cicéron ne cite point
l ’ouvrage), il faut l’entendre, non dans un fens ab-
folu, mais,en ce fens qu’il n’y eut jamais d’Orphée,
tel que les Poètes l’ont repréfenté, traînant après
lui les arbres & les rochers, & pénétrant jufqu’aux
enfers, à la faveur de fes chants harmonieux. Le
chevalier DE J AV COURT.
ORPHELIN , f. m. ( Gramm. & Antiq. greq.) enfant
mineur qui a perdu fon pere 6c fa mere. On
prenoit un foin particulier des orphelins dans plu-
lieurs villes de G rece, mais fur-tout à Athènes, tant
que cet état fut bien gouverné. Les enfans dont les
peres avoient été tués à la guerre étoient élevés aux
dépens du public, jufqu’ à ce qu’ils fuffent parvenus
à l’ adolefeence , alors on les produifoit fur le théâtre
pendant les fêtes deBacchus; & après leur avoir
donné une armure complette, on les renvoyoft dans
leurs maifons. Efchine nous a confervé la belle for^
mule dont le héraut fe fervoit pour les congédier ;
paroiffant avec eux fur la fçene, il difoit à haute
voix : « Que ces jeunes orphelins , k qui une mort
» prématurée avoit ravi au milieu des hafards leurs
» peres illuftrés par des exploits guerriers , ont re-
» trouvé dans le peuple un pere qui a pris foin d’eux
» jufqu’à la fin de leur enfance ; que maintenant il
» les renvoie armés de pié en cap, pour vaquer fous
» d’heureux aufpices à leurs affaires , 6c les convie
» de mériter chacun à l’envi les premières places
» de la république ». On n’a point imité dans nos
gouvernemens modernes de fi nobles inllitutions politiques.
(Z). J, )
ORPHEOTÉLISTE , f . m. ( Antiq. greq. ) les
Grecs nommoient orphêoteliftes , 0f.q>icmXiç7a1 , ceux
qui étoient initiés aux myfteres d’Orphée. On leur
promettoit le bonheur après la m ort, & cependant
on ne requéroit d’eux prefqu’autre chofe que le
ferment'du fecret. Potter , Archoeol. groec; tome I.
page.qctf. (D . J . ) . ,
ORPHIES , terme de Pêche , efpece de poiffon ;
voici la maniéré d’en faire la pêche à la ligne 6c à pié.
On plante deux ou trois hautes perches de 15 à
18 piés, le plus à la baffe eau qu’il eft poftible , éloignées
les unes des autres à volonté, félon la longueur
de la tiffure.qu’on veut former. Il faut que ces
perches foient unies 6c fans aucun -noeud v.
On prend une ligne un peu forte, de la nature des
appelets, que l’on nomme petites cordes. On y met
de diftance en diftançe des piles ou empiles éloignées
les unes des antres environ de demi - brafie -,
avec un ain à orphies, femblable à ceux dont fe
fervent les pêcheurs bas Normands , qui font la pêche
des mêmes poiffons paffagers, à la ligne flottante
avec appât de vers marins. On peut aufli era:
ployer des piles roulantes ; on les frappe fur un petit
morceau de bois , tel qu’on le voit ici
percé par le milieu,large d’un pouce au plus, arrondi
par unbout,;& de l’autre venant en pointe émouf-
ïée où la pillé eft amarrée. La groffe ligne paffe au-
travç.rs du trou , ce qui rend les pilles volages, libres
6c plus à la portée des orphies qui font toujours
à fleur d’eau ; d’efpace en efpace on frappe
fur la greffe ligne , quelques fortes flottes de liege
pour la foutenir'élevée : à chaque bout de cette
ligne, il y a un organeau fait de bois tors, bien
uni, où à fa place un morceau de bois troué, 6c pareillement
bien uni 6c beaucoup plus ouvert que de
la groffeur de la perche fur laquelle cet organeau
fera pafle , de maniéré qu’elle y foit libre. Quand
la mareé commence à monter, on frappera les deux
bouts de la ligne fur les organeaux des perches ; la
ligne fe lèvera avec le flot, & les piles qui feront
garnies chacune d’un petit corferon de liçge, flotteront
à fleur d ’eau j comme les lignes flottantes. Les
orphies qui n’approchent de la côte que de pleine
mer, fe prendront de même que celles qui le pêchent
avec bateau. Les pêcheurs viennent à la bafle
eau relever leurs lignes , & détacher le poiffon qui
a mordu aux hameçons.
Les ophilieres de pié peuvent fe tendre de. la même
maniéré, avec cet avantage qu’elles ne fe déchireront
pas. La manoeuvre de cette pêche eft repré-
fentée dans nos Planches de Pêche.
ORPHILIERES ou HARANGUIERES , terme de
Pêche, filets ainfi nommés , parce qu’ils, fervent
également à la pêche des orphies & des harengs.
La maille de l’orpkiliere eft: compofée d’un fil très-
fin 6c non retors. Elle n’a que douze lignes au plus
en quarré. Le rêt eft flotté , plombe & pêche à la
dérive , comme les manets à maquereaux , dont on
prend aufli quelques-uns à l’orphiliere , mais petits ,
& de ceux que les Normands appellent fanfonnets ^
6c les Picards roblots.
On pêche encore lés orphies, que les Bretons
nomment éguillettes, au feu 6c pendant la nuit , avec
Je dard ou la fouanne.
Pour cette pêche, qui dure depuis le mois de Mars
jufqu’au mois de Juin , plus ou moins, fuivant Péta»
bliflement & l’expofition des côtes que le poiffon
vient ranger, les pêcheurs fe mettent la nuit quatre
«dans un bateau ; il y en a un placé à l’avant, avec
un brandon de paille, dont l’éclat attire les orphies.;
les trois autres avec leurs dards ou fouannes faites
en rateaux, avec une douille de fer & un manche,
les frappent. -La fouanne qui fert à cette pêche , a
au-moins 20 tiges ou branches corbelées de 6 pouces
de haut& fort preffées. La tête du rateau n’a au
plus que 13 à 14 pouces de long , & le manche eft
de la longueur de 8 à 12 piés. Quand les pêcheurs
voient-
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Voient les orphies ou éguillettes attroupées, ils lancent
leurs dards , & en prennent quelquefois plu-
fieurs d’un fej.il coup ; comme le bateau devire doucement
, la manoeuvre de la pêche n’effaronche
point les poiffons. Dans les pêches heureufes, on
en prend jufqu’à 11 à 1500 dans une nuit. Pour cet
effet, il faut que l’obfcurité foit grande & le tems
très-calme , deux conditions requifes pour toutes
les pêches au feu. Cette manoeuvre eft la même que
la pêche au farillon, expliquée à ce mot, & repré-
fentée dans nos Planches.
ORPHIQUE, v ie , ( Littér. ) optpiKoc (èios, forte
de vie pure , religieufe , & dent une des pratiques
confiftoit à ne point manger la chair des animaux.
Orphée , dit Efchyle dans Ariftophane , nous a
montré les cérémonies , & nous a enfeigné à nous
abflenir de tout meurtre. Horace exprime la même
idée encore plus élégamment :
Sylveftres homines facer interprefque deorum
Coedibus & viclu feedo deterruit Orpheus.
» Le divin Orphée , l’interprete des dieux, dé-
» tourna les hommes du meurtre , & leur fit quitter
» le genre de vie brutal qu’ils menoient ». Il com-
pofa des hymnes en l’honneur des dieux , & apprit
aux mortels les cérémonies de la religion. Les poètes
furent les premiers prêtres, les premiers philo-
fophes , & les premiers légiflateurs.
Platon, après avoir raifonné dans le VI. livre de
fes lois, de la brutalité de plufieurs peuples , & de
rufage que quelques-uns avoient encore d’immoler
des hommes, ajoute que les anciens Grecs tout au
contraire n’auroient pas ofé tuer un boeuf ; & qu’a-
lors on ne facrifioit point d’animaux aux dieux. Les
gâteaux, dit-il, les fruits trempés dans le miel, &
telles autres offrandes pures étoient ce qu’on leur
préfentoit. On s’abflenoit de la chair, & c’eût été
un aâe impie que d’en manger , ou de fouiller de
fang les autels. Alors fe forma parmi nous, continue
t-il , une forte de vie , nommée vie orphique ,
où l’ufage des chofes inanimées étoit libre & permis
, au lieu que l’ufage de celles qui avoient eu v ie,
étoit défendu.
Cette pratique d’auftérité mérite le nom orphique
, & parce qu’Orphée en étoit l’inftituteur , &
parce que le même Orphée, le plus ancien des fa-
g e s , pouvoit avoir donné fon nom à tous ceux qui
faifoient prôfeflion de vertu & de lettres. C ’eft ce
que l’on voit clairement dans un paflage d’Euripide ;
car Théfée , à-peu-près contemporain d’Orphée,
reprochant à fon fils Hippolite le peu de rapport qu’il
y a entre l’aûion infame dont il le croit coupable ,
& l’auflere fageffe dont ce jeune homme faifoit pro-
fefîion : « Voilà donc cet homme , lui dit-il, qui eft
» en commerce avec les dieux , comme un perfon-
» nage d’éminente vertu : voilà cet exemple de tem-
» pérance, ôc d’une conduite irréprochable. N’ef-
» pere pas m’impofer plus long-tems par ce vain
»» éc la t, ni que j’attribue aux dieux un commerce
» qui feroit une preuve de leur folie. Trompe nous,
» fi tu peux , maintenant par tón affeôation de ne
» rien manger qui ait eu vie ; 6c fournis à ton Or-
» phée , joue l’infpiré , 6c te remplis de la fumée
» du vain favoir , puifque te voilà pris dans le
» crime ».
On trouve dans ce paffage les trois points qui
conflituoient la vie àrphique , iavoir la religion, l’abf-
tinence de ce qui avoit eu v ie , & la fcience.
Les livres d’Orphée, qui juflifioient fa fcience ,
font cités par tous les anciens auteurs. Euripide ,
dans un choeur de fon Alcefte , après avoir dit que
la néceflïté eft infurmontabie, ajoute que les livres
d’Orphée n’indiquent aucun remede contre ce mal.
£ eft de l’étude ces livres & de leuç inselligence,
Tome X I y
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autant que de l’attachement pour la chafle & pour
la déeffe qui y préfide , dont Théfée veut parler
lorfqu’il reproche à Hippolite fon prétendu commerce
avec les dieux.
En un mot , Orphée fut une efpece de réformateur,
q u i, à l ’aide de la poéfie & de la mufique ,
ayant adouci des hommes féroces, donna naiflance
à une feéle diftinguée par fon attachement à l ’étude
de la religion, 6c par une auftérité de v ie , dont la
pratique éloignant les hommes des plaifirs fenfuels ,
fi funeftes à la vertu , les portoit à une haute perfection.
Témoin l’Hippolite d’Euripide , qui, libre
de toute paflion , aima mieux perdre la v ie , que de
manquer au fecret qu’il avoit promis.
Il fait lui-même au commencement de la piece
une peinture charmante de la vie orphique fous l’allégorie
d’une prairie , confervée contre tout ce qui
peut en altérer la fraîcheur , dans laquelle il vient
de cueillir la couronne qu’il offre à Diane. « Re-
» ce ve z, lui dit-il, de ma main, déeffe refpeClable,'
» la couronne de fleurs que j’ai cueillie dans une:
» prairie, où la fraîcheur de l’herbe n’a jamais été
» livrée à l’avidité des troupeaux , ni au tranchant
» d’une faux facrilege ; la feule abeille en fuce les
» fleurs, que la Pudeur elle-même prend foin d’ar-
» rofer d’une eau toujours pure. Ceux en qui la
» tempérance eft un don du c ie l, ont feuls le droit
» d’en cueillir : l’accès en eft défendu aux méchansJ
» Ornez-en vos beaux cheveux, 6c foyez propice à
» la main pleine d’innocence qui vous l’offre. Seul
» entre les mortels, j’ai l’avantage de vivre avec
» vous , de vous entendre 6c de vous répondre.}
» Quoique privé de votre v u e , accordez - moi,
» grande déeffe , de terminer ma carrière comme je
» l’ai commencée » !
Ilia termina en effet par une aâion de vertu, 6c
fit voir en fa perfonne ce que la juftice peut fur,
une ame, qui ayant reçu de la naiflance de grandes
difpofitions au bien, les a nourries par la pratique
d’un vie pure , qu’on appelloit alors 6c qu’on a ap-
pellé depuis la vie orphique. ( D . J. )
Orphiques , adjeél. ( Littérat. ) furnom des or-,
gies de Bàcchus ; il leur fut donné , les uns difent
en mémoire de ce qu’Orphée avoit perdu la v ie
dans la’ célébration des orgies , d’autres parce qu’il
avoit introduit dans la Grece la pratique de ces fêtes
fingulieres dont l’Egypte étoit le berceau. 1 8 1
ORPHITIEN ,fenatus confulte, (’Jurifprud.) voye^
au mot Senatus consulte.
ORPIMENT ou ORPIN, (Hift. nat. Minéralog. J
en latin auripigmentum,‘fandaracha, rijîgallum, real-
gar , arfenicum fiavum , arjenicinn rubrum , &c. fubf-
tance minérale d’un jaune plus ou moins v i f , en
feuillets luifans comme ceux du talc , compofé
d’arfenic, & d’une quantité tantôt plus tantôt moins
grande de foufre, qui lui donne la couleur, foit
d’un jaune de citron, foit d’un jaune orangé , foit
d’un rouge v i f comme le cinnabre que l’on y remarque.
L’orpiment naturel eft un minéral très-rare ^
cependant on le trouve foit en mafles, foit en petites
venules, foit attaché à la furface des fentes des
mines en Hongrie, en Turquie, à Kremnitz , àNeu-
fol 6c Coronfay.
Quelques auteurs ont confondu l’orpiment, dont
on vient de donner la defeription avec l’arfenic
jaune, ou l’orpiment faélice , qui eft un produit de
l’a r t , comme nous le ferons voir dans cet article ,
mais il diffère de ce dernier par la beauté de fa couleur
& même par fon tiffu ; celui de l’orpiment naturel
eft communément par lames ou feuillets, tandis
que l’orpiment faélice n’a jamais ce tiffu. Aufli les
Be filtres donnent:ils la préférence à Vorpiment natu