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Il PRÉFACE.
dans les priioccuiiations scienlifiqucs les plus spéciales de toute ma
vie, a pris sous ma plume, pat' une pente naturelle, un développement
qui a dépassé de beaucoup les limites que j e m'étais assignées
dans le principe, faute de m'être sulTisatiiment rendu compte alors
de rétendue de ma tacite, de toute l'importance des matériaux que
j'avais rassemblés, et de la manière de tirer de ceux-ci tout le parti
désirable. Ce n'est qu'à l'oeitvre que j'ai pu me convaincre qu'en
dehors des données purement géologiques relatives ;i la nature et à
l'extension des roches, à leurs conditions stratigraphiqties,'etc., mes
collections renfermaient des éléments paléontologiques assez riches
pour devenir l'objet d'un travail spécial et indépendant, travail d'autant
plus important qu'à l'époque {18/|7) oit je commençai mes
explorations, l'Asie Mineure était peut-être encore moins Connue
sous le rapport paléontologique que sous l'aspect de la géologie jiroprement
dite. En effet, à cette époque, l'ensemble de tous les corps
organisés fossiles positivement constatés dans cette contrée ne dépassait
guère le chiffre d'une soixantaine d'esp'eces, tandis quemes collections,
si scrupuleusement et savamment étudiées par MM. d'Archiac,
de Verneuil, Fischer, Brongniart et Unger, devaient permettre à
ces éminents paléontologistes de reconnaître, comme résultat de
mes pacifiques conquêtes, quatro cent cinquante-trois espèces dans
le domaine du règne animal seulement, le total des corps organisés
fossiles indiqués dans la Paléontologie de l'Asie Mineure
n'étant pas inférieur à cinq cent soixante-quinze espèces, dont cinquanle
trois nouvelles.
Il en est résulté que tna description géologique de l'Asie Mineure
se divise naturellement en deux parties bien distinctes, savoir : la
Géologie proprement dite qui est mon oeuvre à moi seul, et la
Paléontologie, récemment publiée, pour laquelle j'ai eu le bonheur
inappréciable d'obtenir le concours de mes célèbres amis et
confrères.
Eu égard à la méthode que j'ai cru devoir adopter pottr l'exposition
des faits géologiques, ces derniers ont donné matière à deux
volumes d'une épaisseur inattendue. C'e.st qu'il no s'agissait pas
d'un pays d'une facile exploration scientifique, où il sullit de signaler
les résultats obtenus, pour que chactui soit à même d'en vérifier
PRÉFACE. "1
l'exactitude, mais bien d'une contrée oii le contrôle des observations
présente tant de dillicullés, que l'on est en quelque sorte réduit à
croire l'observateur sur parole. De là vient qu'il importait d'accompagner
mes découvertes et mes assertions du plus de garanties
possible, et que, malgré ma crainte de fatiguer le lecteur par de
fréquentes répétitions, par des détails et des bors-d'oeuvre topographiques
plus ou moins arides, je n'ai pas dû hésiter à accumuler
les preuves à l'appui de ce que j'étais bien souvent le premier à
faire connaître. En conséquence, dans la descri]ition des terrains et
des roches, j'ai cru devoir développer mes observations dans l'orilrc
même où je les avais faites, et, par suite, reproduire en substance
mes itinéraires géologiqties. Du reste, il en est de ces précautions,
utiles seulement lorsqti'il s'agit d'un premier essai, d'tme tentative
entièrement neuve, comme de celles que prend l'architecte qui
lais,so subsister, pendant un temps, l'échafaudage à l'aide duquel il
a construit son édifice, pour faire mieux apprécier aux gens du
métier sa manière de procéder.
Malgré le soin que j'ai pris de dégager le plus possible la géologie
de tout alliage, les géologues purs me reprocheront peut-être
d'avoir donné, même en forme de notes, des considérations relatives
à la physionomie végétale et aux monuments historiques des pays
que je parcourais. Mais, d'une part, j'aurai à leur répondre qu'il leur
est loisible de ne tenir aucun compte de ces notes, et, d'autre part,
que les choses en apparence les plus disparates, dont il est si facile
à l'homme de cabinet d'éliminer celles qu'il croit,étrangères à son
sujet, s'imposent pour ainsi dire au voyageur qui visite une contrée
oil se trouve concentré tout ce qui peut captiver ou intéresser les
facultés les plus opposées de l'àme; en sorte que, placé dans un
milieu aussi exceptionnel, le savant, même le plus exclusif, cède
aux entraînements causés par celte variété d'impressions toujours
attrayantes et quelquefois palpitantes de nouveauté.
Je n'avais encore rien publie sur les roches éruptives qui occupent
une grande pariio de mon premier vohune. .\u contraire,
j'avais déjà inséré dans le Bulletin de la Société géologique de France,
ainsi que dans les Comptes rendus de l'Académie des sciences, plusieurs
notes relatives aux terrains sédimenlaires qui font le sujet