En effet, si l’outillage de la Monnaie du Moulin, établie
en r55i, avait été perfectionné par l ’illustre artiste liégeois
Jean Varin, au XVIIe siècle, puis sous Nicolas de
Launay, à la Monnaie des Médailles, et dans la suite
encore, aucun changement appréciable n’avait été apporté
par les graveurs, jusqu a la fin du Second Empire, dans
la technique des médailles frappées.
Le relief était plus fort, le module plus grand, grâce
a la puissance des balanciers, mais les oeuvres procédaient
toujours des mêmes données qu’autrefois.
La raison pour laquelle la technique de la médaille
frappée n avait guère été modifiée depuis le XVIe siècle,
tient à l’origine même de sa première Renaissance sous
Henri II.
Les graveurs de médailles qui se groupèrent autour
de la Monnaie du Moulin, dont l’établissement avait eu
pour but une réforme de la fabrication monétaire, appliquèrent
aux oeuvres qui devaient être fabriquées avec le
nouvel outillage, les mêmes principes qu’aux monnaies :
l’effigie ou le sujet, se détachant sur un fond poli; un
grènetis ou un listel entourant le champ; des lettres à
aretes vives composant les légendes; ainsi ces. pièces ne
différaient des espèces courantes que par leur sujet non
monétaire, par un module plus grand, par un relief plus
accentué.
Lorsque, à la fin du XVIIe siècle, l’emploi de la fonte
fut négligé et délaisse, les médailleurs se spécialisèrent
dans la gravure de l’acier, poinçons et coins, exécutant
indifféremment des monnaies, des médailles et des jetons
et, par suite, appliquant à ces trois genres de pièces,
fabriquées avec les mêmes instruments, des données
identiques, que leurs successeurs se transmirent de génération
en génération.
La médaille de Naudet rompait avec cette tradition.
L’effigie ne se détache plus sur un champ poli comme
un miroir ; elle se fond en quelque sorte avec lui ; le grènetis
disparaît; les lettres, au lieu d’avoir cet aspect de
caractères d’imprimerie, à arêtes vives, sont,au contraire,
arrondies, grasses, atténuées; en un mot, au lieu d’un
aspect r a i d e , de con tours rigidement marqués, de légendes
dont la netteté et la régularité voulues sont souvent choquantes,
une douceur et un flou dans le modelé, une
atténuation de tous les reliefs qui se perdent dans le
champ, donnent une impression de charme, sans enlever
au sujet son importance ou son caractère.
Ainsi 011 appliquait à la médaille frappée toutes les
données techniques qui avaient valu à la médaille
fondue une si éclatante supériorité. En reprenant la
tradition des admirables maîtres italiens du XVe siècle,
en l’adaptant aux procédés de fabrication qu’ils n’avaient
pas connus, on redonnait à la médaille une nouvelle
vie, que devait attester une incomparable Renaissance.
Le maître Ghapu, qui mourut en 1891, avait fait pressentir
cette rénovation; certains desesgrands médaillons,
qui auraient pu être réduits et frappés, n ’ont pas été
sans influence sur une transformation à laquelle on peut
dire qu’il a collaboré.
Le médailleur Degeorge, mort en 1898, sans avoir pu
donner toute la mesure de son talent, chercha aussi à se
soustraire aux traditions surannées.
« Avec Ghapu et Degeorge, écrit M. Roty, la médaille
» n’est plus l’objet de curiosité banal, que l’on ne
» regardait que la loupe à la main. C’est désormais un
» bas-relief de métal. Les maîtres d’autrefois l’avaient
» compris : ainsi aucun souci d etonner par le metier,